
Aujourd’hui, le gouvernement De Wever menace de vendre les actions de BNP Paribas, détenues par l’Etat belge. Le ministre de la Défense, Theo Francken, souhaite utiliser le produit de cette vente pour financer de nouvelles armes. Ce faisant, l’Etat belge manquerait une occasion unique vis-à-vis du climat et de la société.
En effet, en tant que deuxième actionnaire de la banque (5,6 % des actions), le gouvernement belge dispose d’une influence dans l’une des plus grandes banques d’Europe et du monde. Au lieu de vendre cette opportunité unique, le gouvernement doit prendre ses responsabilités et demander à BNP Paribas de prendre les mesures concrètes et urgentes en faveur d’une transition écologique juste et pour éviter les licenciements massifs.
Tout d’abord, l’Etat belge doit faire pression sur BNP Paribas pour qu’elle ferme définitivement la porte des énergies fossiles. Entre 2021 et 2023, elle a été le premier financeur de l’Union européenne de l’expansion des énergies fossiles, et le troisième financeur mondial des plus grandes multinationales du pétrole et du gaz. Au cours de cette période, la banque a engagé plus de 8,5 milliards d’euros dans des entreprises fossiles, qui continuent aujourd’hui à investir dans de nouvelles infrastructures de combustibles fossiles, des investissements lourds qui nous maintiennent ainsi dans une dépendance dangereuse au pétrole et au gaz pour les décennies à venir. Depuis 2016, la banque a accordé 186 milliards de dollars au financement des énergies fossiles.
En France, BNP Paribas a été poursuivie en justice pour ces activités nocives par une coalition d’ONG, pour non-respect de son devoir de vigilance climatique. Bien que la première banque française ait annoncé de nouvelles mesures visant à limiter ses soutiens à cette industrie polluante, elle n’a malheureusement pas coupé toutes les vannes de capitaux pouvant encore alimenter les entreprises portant de nouveaux projets pétro-gaziers. Le gouvernement belge, lui, a gardé et garde un silence assourdissant à ce sujet.
En outre, le gouvernement belge devrait utiliser son influence pour protéger les emplois belges. Malgré de bons résultats, la banque belge BNP Paribas Fortis va confier une partie de ses services internes au géant de l’informatique et de la consultance Accenture. 500 emplois sont ainsi menacés. Cette décision, sous couvert de faire appel à une société externe plus performante pour les tâches concernées, est avant tout une question de réduction des coûts. Le gouvernement belge laisse faire.
Enfin, il y a la question du rendement de cette participation. Cette année, le gouvernement recevra quelque 300 millions d’euros de dividendes de BNP Paribas. Il ne s’agit donc pas seulement d’un poids politique, mais aussi d’un investissement rentable avec des revenus stables. Notre gouvernement pourrait s’en servir pour financer la transition écologique, et une transition écologique juste, respectueuse des salariés et travailleurs. Pour l’instant, ce dividende se fait en partie au détriment du climat, mais en encourageant BNP Paribas à adopter une nouvelle stratégie d’investissement, cela pourrait changer à terme.
Depuis la crise financière de 2008, le gouvernement belge est propriétaire de Belfius et actionnaire principal de BNP Paribas. Bien que l’Etat ait dû s’engouffrer dans la brèche pour sauver le secteur bancaire belge, une opportunité unique en a découlé. Depuis lors, nous avons techniquement une grande influence sur le monde bancaire européen, mais sommes restés un actionnaire passif. Avec BNP Paribas, la Belgique peut faire beaucoup plus. Voulons-nous perdre ce potentiel juste pour augmenter une fois nos dépenses de défense ?
Signataires
Brecht Rogissart (FairFin); Bernard Bayot et Annika Cayrol (Financité); Ludo De Brabander (Vrede vzw); Orry Van de Wauwer (Pax Christi); Luc Maertens (Reset.Vlaanderen); Hugo Van Dienderen (Grootouders voor het Klimaat); Filip De Bodt (Climaxi); Ike Teuling (Hart Boven Hard); Korneel Vermeulen (Climate Express); Ansje Van Beselaere (Intal); Dorine Cordy et Valérie Vanwalleghem (SETCa Fédéral | BBTK Federaal); Marie-Charlotte Debouche (Natagora); Cécile de Ryckel (Grands-parents pour le Climat); Eva Smets (Oxfam)
Carte blanche publiée dans Le Soir