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Durabilité : la marche arrière européenne
Sous couvert de simplification, la directive « omnibus » vide de sa substance les textes adoptés pour améliorer la durabilité et la responsabilité.
1 juin 2025
Paragraphe actualités

Au printemps 2024, le Parlement européen, alors en fin de mandature, adopte un texte historique. La directive sur le devoir de vigilance des entreprises oblige certaines grandes entreprises à identifier, prévenir, atténuer et rendre compte des impacts négatifs sur les droits humains et l’environnement dans leurs chaînes de valeur.

Le texte, affaibli après deux ans d’intenses débats entre les instances européennes, n’en reste pas moins une avancée majeure. Les grandes entreprises doivent, notamment, repérer si ses fournisseurs exploitent des enfants, polluent ou violent les droits des travailleur·e·s et aussi se fixer des objectifs de réduction des émissions de CO2 réalistes. Il faut toutefois noter que la directive n’impose pas d’obligation de résultat : une entreprise ne sera pas punie parce qu’un fournisseur a violé les droits humains, mais si elle n’a rien fait pour l’éviter.

Ce texte arrive après la mise en place de la taxonomie (qui définit les activités économiques durables sur le plan environnemental) et la directive CSRD, adoptée deux ans plus tôt, qui impose à près de 50 000 entreprises en Europe (lorsqu’elle sera entièrement entrée en vigueur), de publier un rapport sur les questions de durabilité, notamment environnementales, sociales et de gouvernance.

Un seul mot d'ordre : la simplification

Seulement voilà, à peine mises en place ou adoptées, ces réglementations sont jugées par certains (comprendre par les lobbys) trop lourdes pour les entreprises. Elles entraîneraient des coûts considérables et un enfer administratif.

Entre alors en scène la directive omnibus. Elle vise spécifiquement à rationaliser ou simplifier les réglementations en lien avec la durabilité. Début février, la commission invite donc les entreprises et associations professionnelles à deux journées de consultation. Le secteur de l’énergie et de la finance y est particulièrement représenté. À l’inverse, les entreprises qui ont défendu ces directives n’ont pas reçu de carton d’invitation, tout comme les acteur·rice·s de la finance durable ou de l’économie durable, ni aucune organisation dédiée à la responsabilité sociale des entreprises.

Le résultat : Reclaim Finance a analysé les demandes de quatre groupes industriels majeurs reçues par les commissaires et a noté un très haut degré de similitude entre les mesures incluses dans l’Omnibus et ces demandes.

Passées au Parlement européen début avril, les textes ont donc été « simplifiés ». Seules les entreprises de plus de 1 000 salariés et un chiffre d’affaires supérieur à 450 millions d’euros devront désormais se soumettre à la taxonomie. En ce qui concerne les deux autres directives, les amendements visaient à réduire drastiquement le nombres d’entreprises concernées ou carrément vider de sa substance la réglementation. La diligence raisonnable de la chaîne de valeur pourrait être limitée aux fournisseurs directs ou annulée pour les entreprises de moins de 500 employé·e·s. Il n’y aurait parallèlement plus aucune obligation de mettre un plan de transition crédible. Les député·e·s ont voté une mesure d’urgence visant à reporter de deux ans l’application des directives. Le contenu, lui, doit encore faire l’objet d’importantes négociations.

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