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Soumis par Anonyme le

Marie-Claude Hessler, qui habite Paris, se rend chaque année à Los Angeles pour assister à l’assemblée générale des actionnaires de Mattel, maison mère de la célèbre poupée Barbie. Depuis 12 ans, elle interpelle sans relâche
la direction du groupe sur les conditions de travail des ouvriers (qui sont surtout des ouvrières) dans les usines où sont fabriqués les jouets.

Comment vous est venue l’idée d’acheter des actions de Mattel ?

J’ai pris cette décision à la suite d’un échange épistolaire avec Mattel. La lettre, proposée par le Réseau solidarité français, questionnait la
multinationale sur ses conditions sociales de production. La réponse standard, sur le ton « N e vous faites pas de souci ! », ne me plaisait pas du tout. J’ai alors acheté le nombre d’actions requises (250, pour une valeur de 2 000 dollars) pour pouvoir participer aux assemblées générales et y met en oeuvre tous mes droits : prise de parole de 3 minutes et trois questions d’une minute chacune... En comptant la réponse du PDG, cela fait, lors de chaque assemblée de 75 minutes, au moins 10 minutes consacrées à la problématique des conditions de travail dans
les usines de fabrication, situées principalement en Chine.

Quelle évolution constatez-vous dans le fonctionnement de cette entreprise ?

« Lors de la première AG à laquelle j’ai participé en mai 1997, Mattel venait de rédiger son premier code de conduite et annonçait la mise en oeuvre d’audits indépendants qui ont démarré quelques mois plus tard. Cette initiative était assez pionnière à l’époque, d’autant plus que les audits indépendants étaient publiés en ligne. Cela m’a permis de les relancer chaque année sur le sujet. La PDG qui avait pris cette initiative a été licenciée en 2000 à la suite d’une malencontreuse opération d’acquisition. Elle a été remplacée par Robert Eckert, toujours en fonction, que j’ai trouvé assez arrogant lors de la dernière assemblée générale, en mai 2009. Comme je lui parlais
des heures supplémentaires auxquelles sont astreintes les ouvrières chinoises, il m’a répondu qu’elles s’ennuyaient quand elles avaient congé ! Ce qui, soit dit en passant, arrive au mieux... un jour toutes les deux semaines ! J’ai compris la raison de ce ton en juin, lors de la publication d’un communiqué de Mattel annonçant la fin de ce programme d’audits indépendants et publiés en ligne. Raison invoquée : Mattel souscrit à présent au code de la fédération internationale des producteurs de jouets, l’ICTI (www.toy-icti.org). Ce code, d’ailleurs très critiqué, est beaucoup moins transparent. »

Quelle conclusion tirez-vous de cette évolution ?

« Si je fais le bilan de ces 12 années d’action, les conditions et sécurité et d’hygiène ont certes été améliorées dans les usines où sont fabriquées les Barbies. Mais pour le reste, les multinationales européennes et américaines ne veulent pas changer leur logique de flux tendu : elles passent leurs commandes en dernière minute, ce qui oblige les ouvrières à travailler nuit et jour à certaines périodes, pour se retrouver ensuite sans travail. Les derniers rapports d’audit publiés étaient très négatifs sur cette question de la pression sur les horaires, ne constatant aucune amélioration d’année en année. Au contraire : d’une moyenne de 60 h par semaine en 1997, on est passé à un régime habituel de 72 h aujourd’hui. Dans certaines usines, l’ouvrière pointe en arrivant, mais c’est son contremaître qui signe l’heure de sortie... Ceci pour éviter le paiement des heures supplémentaires ! »

Type de support
Type de document
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Cent fois sur le métier remettre son ouvrage... Trois questions à Marie-Claude Hessler, actionnaire de Mattel depuis 12 ans

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Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
RV-BAYO2008-1/42
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Année d'édition
2009
Date d'édition
09/2009
Mois d'édition
Septembre