SCAN DES BANQUES
Tous les deux ans, FairFin et Financité passent au peigne fin les politiques d'investissement des banques opérant en Belgique. L’analyse se concentre sur les grandes banques qui ont le plus de client·e·s et sur un certain nombre de petits acteurs durables. Les banques sont étudiées sur dix thèmes, allant du changement climatique et des droits humains, en passant par l'évasion fiscale et la corruption. Pour établir le Scan des banques, nous suivons une méthodologie établie au niveau international. Pour ce faire, nous examinons presque exclusivement la politique d'investissement d'une banque, c'est-à-dire les conditions que les banques s'imposent à elles-mêmes. Nous vérifions leur politique sur 10 thèmes, chacun d'entre eux contribuant à la note globale de la banque. Il est donc possible qu'une banque n'ayant pas formalisé une politique d'investissement ait un mauvais score alors qu'une banque qui a établi des règles précises en la matière obtient un score supérieur alors qu'elle ne les respecte pas nécessairement. Dans le détail de chaque note, nous essayons donc de préciser si l'institution a été épinglée dans un rapport sur les investissements nuisibles ou ce qu'elle pourrait faire pour améliorer son score.
ARMES
Même en temps de guerre aux frontières de l'Europe, la production d'armes par les multinationales constitue un problème majeur. Trop d'armes se retrouvent entre les mains de régimes brutaux ou de civils, avec ou sans mauvaises intentions. Les profits énormes que ces entreprises réalisent peuvent constituer des investissements sûrs et stables pour les banques, mais pour notre société, cette industrie reste une source d'insécurité et d'instabilité. Une bonne banque retire ses investissements des entreprises impliquées dans la production et le commerce d'armes.
Les lignes directrices de la Banque Triodos en matière d'armes restent excellentes. La banque exclut totalement les investissements ou le financement de sociétés actives dans la production et le commerce de systèmes d'armes conventionnels et controversés. Les entreprises produisant des biens à double usage (militaire et civil) sont soigneusement évaluées et exclues si les produits sont destinés à des utilisations finales non civiles. Les systèmes d'armes autonomes sont également totalement exclus.
La banque vdk obtient un très bon score pour le thème des armes. En effet, la banque applique une politique de tolérance zéro à l'égard de la production et du commerce de diverses armes. Le seul aspect sur lequel la banque peut encore améliorer son score est le renforcement de sa politique concernant les produits à double usage (à la fois militaire et civil) ou les armes automatisées.
Argenta obtient un très bon score en matière de politique d'armement. La banque n'investit pas dans les armes controversées interdites par la loi, telles que les armes à sous-munitions, les mines antipersonnel ou les armes biologiques et chimiques. Les armes nucléaires sont également exclues. Argenta refuse également les entreprises qui tirent plus de 5 % de leurs revenus de la production d'autres armes "non controversées". La seule mesure qui lui permettrait encore d'améliorer son score serait d'exclure les produits à double usage (militaire et civil) ou les armes automatisées.
KBC obtient des résultats satisfaisants en matière de politique d'armement. La banque exclut totalement les armes controversées, telles que les armes à sous-munitions, les mines antipersonnel, les armes biologiques et chimiques et les armes nucléaires. Les
entreprises actives dans ces domaines sont inscrites sur une liste noire. KBC a également pris des précautions supplémentaires concernant la fourniture d'armes à ce qu'elle appelle des "régimes controversés". Ainsi, la banque ne veut pas contribuer financièrement à la fourniture d'armes à des régions instables ou à des régions où les droits humains ne sont pas respectés.
Mais la politique de la KBC en matière d'armement présente encore de nombreuses lacunes. Les produits à double usage (militaire et civil) ne sont pas abordés. Elle n'exclut pas non plus complètement les systèmes d'armes létales autonomes (Lethal autonomous weapon, LAWS) et ne classe pas les pays qui allouent un budget disproportionné à la défense dans la catégorie des "régimes controversés".
La banque exclut un nombre limité d'entreprises qui produisent, conçoivent ou vendent des armes. Seules les entreprises produisant des armes controversées telles que les armes à sous-munitions, les armes chimiques et biologiques et les mines antipersonnel sont exclues. Cette exclusion est exigée par la loi. Le financement de biens de transport militaire ou de produits à double usage (militaire et civil) n'est pas contrôlé par BNP Paribas. La banque ne limite pas non plus la fourniture d'armes aux pays qui violent gravement les droits humains.
En pratique
En septembre 2023, la coalition internationale Don't Buy Into Occupation a publié son dernier rapport. Il montre que BNP Paribas a accordé plus de 20 milliards d'euros de prêts et détient plus de 3,5 milliards d'euros d'actions et d'obligations dans des entreprises actives dans les colonies israéliennes. Ces colonies sont reconnues par le droit international comme des crimes de guerre. Les entreprises qui y opèrent courent un risque important de contribuer aux violations des droits humains. BNP Paribas reste la seule banque européenne à prêter à la société Elbit Systems, une entreprise d'armement ayant des liens directs avec l'armée israélienne.
La politique d'ING en matière d'armement est tout juste suffisante. La banque n'a pas de politique contre l'investissement ou le financement d'entreprises qui fournissent des armes, des systèmes d'armes, du matériel de transport militaire et d'autres biens militaires à des pays qui consacrent une part disproportionnée de leur budget à l'achat d'armes. ING pourrait améliorer sa politique en excluant les financements ou les investissements destinés à fournir lesdits biens militaires à des États fragiles ou en déliquescence.
ING obtient également un score faible en raison de l'application limitée de sa politique en matière de vente d'armes. La banque continue d'accorder des prêts généraux aux fabricants d'armes et l'ensemble de sa politique en matière d'armement ne s'applique pas à sa gestion d'actifs. ING n'a pas non plus de politique concernant les systèmes d'armes létales autonomes (LAWS). En outre, elle n'exclut pas totalement la production, l'entretien et le commerce d'armes nucléaires (composants clés de ces armes).
En pratique
L'étude de terrain de l'institut de recherche Profundo intitulée "Controversial Arms Trade" (2019) a révélé qu'ING a investi 510 millions d'euros dans 10 entreprises qui fournissent du matériel militaire, tel que des armes, des munitions et des avions de combat, à des pays qui violent les droits humains, sont en conflit, gravement corrompus ou très fragiles, soit en accordant des prêts à une entreprise et ou en détenant des actions et des obligations d’autres entreprises.
La politique de Belfius en matière d'armement est tout à fait insuffisante. La banque respecte la législation belge en n'investissant pas dans les armes controversées, telles que les armes à sous-munitions, les mines antipersonnel et les armes biologiques et chimiques. Elle exclut également totalement les armes nucléaires. Belfius limite ses transactions avec les gouvernements en matière d'armement à une certaine zone géographique (États membres de l'OTAN, États membres de l'UE, Suisse et Ukraine). Cette zone a été élargie depuis la dernière analyse. La banque n'a pas mis en place de règles pour empêcher les livraisons dans les "zones sensibles".
La politique de Deutsche Bank en matière d'armement reste faible et s'est même aggravée par rapport à l'analyse précédente. La banque n'exclut plus clairement le financement des producteurs d'armes à sousmunitions, de mines antipersonnel et d'armes nucléaire, bactériologique et chimique. Sa politique de 2018 sur les armes controversées ne peut plus être consultée sur le site web de la banque, tandis que la position dans son rapport non financier reste vague. Dans de nombreux domaines critiques, les lignes directrices de Deutsche Bank sont encore inadéquates ou inexistantes. Par exemple, la banque n'a pas établi de politique claire sur les armes autonomes. En outre, la Deutsche Bank affirme qu'elle respecte les embargos sur les armes, mais n'exige pas explicitement de ses clients qu'ils le fassent.
Crelan dit exclure les entreprises impliquées dans la production d'armes, les jeux d'argent, les activités illégales, etc. Cependant, elle ne précise pas le type d'armes couvertes par l'exclusion.