Aller au contenu principal

Who pays ? An analysis of the cost of consumer credit in Belgium, regulation and implications

Soumis par Anonyme le

En juin 2021, le TAEG maximum des ouvertures de crédit et des découverts a été abaissé d'un point de pourcentage. Le but de cet article est de documenter l'importance des taux d'intérêt annuels élevés sur le marché belge du crédit et d'évaluer comment les modifications des taux maximum peuvent affecter les emprunteurs et les prêteurs.

Type de support
Editeur
NBB Economic Review
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2021
Date d'édition
12/2021
Mois d'édition
Décembre

Contrats d'ouverture de crédit : bientôt soumis à la condition du renouvellement explicite et annuel par le bénéficiaire ?

Soumis par Anonyme le
Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Les sénatrices socialistes Olga Zrihen et Joëlle Kapompol déposent une proposition de loi en ce sens au Sénat, en vue de prémunir les consommateurs de la spirale de l'endettement qui peut résulter de ce type de crédit.

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
AR-CONT2005-2
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2005
Date d'édition
11/2005
Mois d'édition
Novembre

Des mesures nécessaires pour mieux encadrer le crédit à la consommation

Soumis par Anonyme le

Introduction

En cette période de crise financière et de crise du pouvoir d’achat, la nécessité d’encadrer et de réguler les activités de crédit aux particuliers apparaît de manière plus perceptible que jamais1. Soucieux de prendre les mesures législatives qui s’imposent, nos mandataires politiques ont déposé plusieurs propositions en ce sens ces derniers mois.

Organisée le 29 novembre dernier à l'initiative de quatorze associations francophones et néerlandophones, la Journée sans crédit a été l'occasion, pour les acteurs de terrain luttant contre le surendettement, de sensibiliser les consommateurs aux dangers du crédit facile et de rappeler leurs recommandations aux pouvoirs publics pour améliorer la protection des consommateurs les plus fragilisés.

Après avoir effectué une analyse comparative des différents types de mesures proposées par nos politiques, nous examinerons leur adéquation aux revendications formulées par les acteurs de terrain et nous nous interrogerons sur leurs conséquences.

Propositions de loi visant à encadrer le crédit à la consommation et à protéger le consommateur contre le « crédit facile ».

Plusieurs groupes politiques proposent aujourd’hui des mesures en vue d’encadrer le crédit à la consommation et de protéger le consommateur contre le crédit facile.

Ainsi, début juillet 2008, Christiane Vienne, Joëlle Kapompolé et Olga Zrihen ont déposé une proposition de loi au Sénat visant à lutter contre le « crédit facile », complétée par 17 des 52 propositions adoptées par le Bureau du PS le 6 novembre dernier « en vue de mieux protéger les épargnants, les investisseurs, les emprunteurs et les assurés ». Ces propositions ont pour objet de mieux encadrer le secteur du crédit à la consommation en raison du risque de surendettement qu’il fait peser sur les emprunteurs.

De son côté, le groupe Ecolo-Groen! a déposé une proposition de loi à la Chambre le 4 novembre dernier2 modifiant la législation relative aux crédits à la consommation en vue de mieux protéger les consommateurs et d’éviter que ceux-ci ne contractent des dettes excessives à des taux usuraires et voient leur pouvoir d’achat s’éroder de manière structurelle.

De l’analyse des mesures proposées par les deux partis se dégagent plusieurs constatations.

Tout d’abord, les différentes propositions de loi déposées par les deux partis s’accordent sur la nécessité d’introduire les mesures suivantes :

  • Plafonnement des intérêts usuraires : la proposition de loi d’Ecolo et de Groen! fixe légalement à 9 % les taux annuels effectifs globaux (TAEG) maxima pour tous les crédits à la consommation3, tandis que le PS
    entend modifier les TAEG maxima pour les ouvertures de crédit en établissant un taux maximum unique de 10 %, et ce, quel que soit le montant.
  • Augmentation du délai de réflexion du consommateur : le PS propose de généraliser le délai de réflexion de sept jours à tous les contrats de crédit à la consommation, alors qu’Écolo et Groen ! proposent que ce délai de réflexion soit porté à quatorze jours pour tous les types de contrat de crédit, quel qu’en soit le montant.
  • Introduction d’un délai de « zérotage » pour tous les contrats d’ouverture de crédit et réduction de ce délai à un an pour les crédits jusque 5.000 euros et à maximum cinq ans pour les crédits de plus de 5.000 euros, et ce, quelles que soient leur durée et la nature (capital ou intérêt) de leur remboursement périodique.
  • Amélioration de la lisibilité des taux en matière d’ouvertures de crédit : Pour Écolo et Groen!, des informations standardisées doivent être indiquées dans toute publicité mentionnant un taux d’intérêt ou des chiffres liés au coût du crédit4 et le prêteur doit être obligé d’indiquer le coût des ouvertures de crédit en euros à côté du pourcentage actuel. Pour le PS, il convient de traduire le TAEG en pourcentage mensuel dans le contrat d'ouverture de crédit en plus de la précision du TAEG en pourcentage annuel. Le coût du crédit doit également être exprimé en valeur nominale plutôt qu'en pourcentage.
  • Amélioration de la réglementation du découvert bancaire : la proposition d’Ecolo-Groen! prévoit que l’établissement de crédit ne peut accorder un crédit ou autoriser un solde débiteur en compte courant que si le client l’a explicitement demandé. Elle inclut la modification de la sanction en cas de dépassement en vue de l’application des dispositions de la loi sur le crédit à la consommation5.
    Cette mesure ne figure pas dans la proposition des Sénateurs PS, mais est bien reprise dans la liste des 52 mesures adoptées par le Bureau du PS en novembre dernier.

Par ailleurs, la proposition du groupe Ecolo-Groen! prévoit également l’adoption des deux mesures suivantes :

  • un réexamen de la situation financière de l’emprunteur à l’occasion de toute offre intermédiaire de crédit de la part du prêteur dans le cas des ouvertures de crédit ;
  • l’obligation pour le prêteur ou l’intermédiaire de crédit de prévoir un service gratuit par le biais d’un guichet où l’emprunteur doit pouvoir poser toutes ses questions et avoir l’assurance d’obtenir une réponse. 

La proposition de loi des sénateurs PS de juillet dernier comporte en outre plusieurs autres revendications émises par la plateforme en 2007 :

  • Limitation des frais de souscription d’un contrat d’assurance lié à un contrat de crédit : les frais relatifs à la souscription, libre ou non, d'un contrat d'assurance lié à un contrat de crédit doivent être systématiquement inclus dans le coût total du crédit.
  • Clarification de la notion de publicité abusive dans la loi sur le crédit à la consommation : les publicités qui mettent en évidence la facilité, la rapidité d'octroi, le regroupement et la centralisation des crédits visent toujours un public fragilisé et doivent être considérées, par essence, comme dangereuses et abusives.
  • Séparation physique entre le lieu d’achat d’un bien et celui de la conclusion du contrat d’ouverture crédit de cet achat.
  • Amélioration de la formation du personnel des prêteurs et intermédiaires de crédit : des conditions minimales de formation sont imposées en vue de permettre à ces derniers d'assumer correctement l'obligation légale d'information et le devoir de conseil lors de la conclusion du contrat de crédit.
  • Mise à disposition du public de la liste des intermédiaires de crédit :actuellement, seule la liste des prêteurs agréés6 est publiée au Moniteur belge.
  • Renforcement des sanctions en matière de publicité sur le crédit à la consommation7.

Cette dernière mesure fait également l’objet d’une proposition de loi déposée à la Chambre des représentants par François-Xavier de Donnéa, du MR, en novembre 2007 8.

Adéquation des mesures législatives proposées aux revendications des acteurs de terrain

Ce 29 novembre dernier, les acteurs de terrain de la plateforme Journée sans crédit ont publié leurs Constats et recommandations 2008 pour une meilleure protection des consommateurs en matière de crédit à la consommation9. Le document, très fourni, propose un baromètre des recommandations formulées en 2007 qui examine chaque recommandation émise en relevant l’existence ou non d’actions prises par les responsables politiques pour y répondre et en posant une appréciation de chaque action prise.

L’examen du baromètre permet de constater que, hormis la mesure visant à réduire les TAEG maxima pour les ouvertures de crédit sur laquelle nous reviendrons plus bas, l’ensemble des mesures reprises dans les propositions de loi communes au groupe Ecolo-Groen! et au PS répondent à des revendications formulées par la plateforme en 200710 et font l’objet d’une appréciation positive de la part de la plateforme.

Au-delà des mesures reprises dans les propositions de loi ci-dessus, la plateforme préconisait également, dans ses recommandations 2007, que soient prises des mesures complémentaires :

  • En matière de publicité pour le crédit : il conviendrait que plus de moyens financiers soient alloués aux autorités pour contrôler les publicités, que la transparence et la diffusion des résultats des contrôles et enquêtes du SPF Économie soient assurées et qu’on procède à un renforcement des pouvoirs de contrôle et de sanction à l’égard des prêteurs et intermédiaires qui n’assument pas leur devoir de conseil et leur obligation d’information.
  • En termes de moyens pour la lutte contre le surendettement : il conviendrait de renforcer les contrôles des dispositions en matière de publicité et de conditions d’octroi des crédits, de publier une liste des prêteurs ayant enfreint la loi, de diffuser, vers le grand public, des informations sur le règlement collectif de dettes et d’encourager le crédit social pour mieux lutter contre l’exclusion bancaire et le surendettement.

En conclusion de son baromètre, la plate-forme souligne l'important écho qu'ont eu ses recommandations, mais considère néanmoins que « le bilan actuel est assez maigre dans la mesure où, au niveau national, seules des propositions législatives ont été déposées au Parlement (Chambre ou Sénat)».

Pour 2008, la plateforme a également formulé de nouvelles recommandations sur plusieurs points essentiels, à savoir l’amélioration de l’utilisation de la Centrale des crédits aux particuliers telle qu’elle existe aujourd’hui, l’amélioration de l’information et de la protection du consommateur par la mise au point et l’utilisation d’un formulaire standardisé avant tout octroi de prêt.

Elle se positionne aussi sur l’élargissement – inopportun à son sens — des données enregistrées dans la Centrale des crédits aux particuliers. Elle plaide également pour l’interdiction d’offres de crédit non liées à des achats. Et sous un volet plus curatif, elle formule quelques suggestions visant à rendre plus efficace la procédure de demande de facilités de paiement auprès du juge de Paix.

Bien que ne faisant pas encore l’objet de propositions législatives en bonne et due forme, plusieurs de ces recommandations11, trouvent toutefois déjà écho dans la liste de propositions adoptées par le Bureau du PS le 6 novembre dernier « en vue de mieux protéger les épargnants, les investisseurs, les emprunteurs et les assurés ». Le document plaide, en outre, pour une coordination des actions entreprises par les pouvoirs publics et le monde associatif en matière de sensibilisation des consommateurs aux dangers du crédit facile.

Si on ne peut qu’appuyer cette volonté de coordination des actions de sensibilisation, il nous semble par ailleurs également crucial que les mesures législatives proposées traduisent bien des revendications des acteurs de terrain. L’exposé ci-dessus démontre que c’est largement le cas, ce dont nous nous réjouissons.

Diminution des TAEG maxima : une proposition qui pose question

Une mesure proposée par les mandataires publics, tant du groupe PS que du groupe Ecolo-Groen! échappe néanmoins à ce constat : la proposition de diminuer les TAEG maxima à 9 ou 10 % pour les ouvertures de crédit, voire tous les contrats de crédit à la consommation, ne traduit pas une recommandation des acteurs de terrain, qui ne se sont pas encore exprimés à cet égard.

Il s’agirait pourtant d’une mini révolution dans le monde du crédit à la consommation tel que nous le connaissons actuellement.

Les deux propositions soulignent très justement les différents risques que présente pour le consommateur la multiplication des contrats d’ouverture de crédit à des taux « usuraires » variant de 16 et 19 %. Malheureusement, celles-ci négligent néanmoins d’examiner de manière approfondie un élément crucial permettant de juger de l’opportunité d’une telle mesure, à savoir l’impact que pourrait avoir une diminution des TAEG maxima sur l’offre, et partant sur l’accès au crédit à la consommation en général.

Tout au plus, la proposition d’Ecolo-Groen! affirme-t-elle que cette mesure dissuadera surtout les établissements de crédit d’octroyer des crédits faciles. Ils seront plutôt tentés d’effectuer une analyse approfondie des clients auxquels ils octroient un crédit en raison des marges bénéficiaires moins élevées. De cette manière, les crédits octroyés tiendront compte de la capacité financière du consommateur. Il n’y aura pas moins de crédits, mais ce seront des crédits sur mesure.

Or, en réalité, de multiples éléments laissent à penser qu’une telle diminution des TAEG entraînera très certainement une diminution du nombre de crédits accordés.

Présentons ici brièvement certains enseignements non négligeables que nous pourrions tirer à cet égard du débat et des recherches en cours en Europe à ce sujet12.

Si l’existence de plafonds maxima pour les TAEG en matière de crédit à la consommation est une évidence en Belgique, il n’en va pas de même dans tous les pays européens. Ainsi, si l'Autriche, la France, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, la Pologne et la Slovaquie ont également instauré de tels plafonds13, plusieurs pays, tels que la Pologne, l’Italie, l’Irlande et le Royaume-Uni sont préoccupés par, voire carrément opposés au recours à cette pratique.

Différentes études démontrent en effet un risque majeur lié à la mise en place d’un taux maximum : fixés trop bas, les plafonds risquent d'avoir pour effet d'exclure les personnes pour lesquelles les coûts de la fourniture de crédit sont élevés et ne peuvent être couverts par les intérêts. Il s’agit généralement de personnes qui souhaitent et qui ont besoin d'emprunter de petites sommes d'argent pendant de courtes périodes, c'est-à-dire précisément dans le cas où les méthodes de recouvrement sont plus coûteuses ou encore lorsque la probabilité d'un défaut de paiement est supérieure à la moyenne.

Le refus de crédit pour ces personnes en fait, par conséquent, la proie des prêteurs informels et illégaux – certaines études tendant à démontrer que le plafonnement des taux d'intérêt a pour effet de faire grimper le nombre de prêts illégaux.

On le voit, il est dès lors indispensable d’analyser de manière approfondie les conséquences d’une diminution des TAEG maxima pour les ouvertures de crédit au regard des spécificités du marché du crédit belge afin d’identifier quels pourraient être les effets positifs, mais également négatifs d’une telle mesure.

Ce n’est qu’une fois ces derniers aspects identifiés, qu’il sera possible de juger de l’opportunité de l’introduction d’une telle mesure, couplée éventuellement à d’autres mécanismes permettant de contrecarrer ses effets négatifs éventuels.

Conclusion

La question de l’encadrement du crédit à la consommation semble être enfin prise à bras le corps par nos mandataires politiques. Ceux-ci donnent aujourd’hui largement écho aux revendications des acteurs de terrain en la matière.

Reste à souhaiter que l’essai soit transformé avec succès dans les mois qui viennent grâce à une collaboration encore accrue des différentes parties prenantes, tant en ce qui concerne la sensibilisation que la réglementation du secteur.

À cet égard, on peut s’attendre à ce que les représentants du monde du crédit, demeurés fort discrets jusqu’à présent, sortent du bois très prochainement et se prononcent sur les différentes mesures proposées. Afin de favoriser un réel débat sur la question et de permettre une prise de mesures cohérentes dans leur ensemble, il nous semble indispensable de réexaminer l’opportunité de diminuer le TAEG maximum des ouvertures de crédit en analysant de manière approfondie l’impact d’une telle mesure sur l’offre et l’accès au marché du crédit. Il s'agirait aussi d’évaluer dans quelle mesure une telle disposition peut rencontrer les objectifs poursuivis.

 

Lise Disneur, décembre 2008

 

 

1 Voir à ce sujet notre analyse « Les sirènes du crédit facile », octobre 2008

2 Proposition de loi modifiant la législation relative aux crédits à la consommation déposée à la Chambre par

Mme Meyrem Almaci et consorts DOC 52 1538/001, p. 2438

3 Ce maximum est lié à l’indice de référence A (certificat de trésorerie à 12 mois) utilisé pour la fixation des

taux d’intérêt du crédit hypothécaire (article 9, § 1er, de la loi du 4 août 1992 relative au crédit hypothécaire).

Pour les montants inférieurs à 1.250 euros, le taux annuel effectif global maximum est fixé à l’indice de référence A (annuel) + 5 %. Pour les crédits d’un montant supérieur à 1.250 euros, le taux annuel effectif global maximum est fixé à l’indice de référence A (annuel) + 4 %.

4 Doivent y figurer le taux débiteur, le montant total du crédit, le TAEG, la durée du contrat, et le montant

total à payer par le consommateur et le montant des échéances.

5 La loi prévoit la suspension des prélèvements et le remboursement du dépassement dans les 45 jours. À

défaut de remboursement dans les 45 jours, la banque aura la possibilité soit de clôturer le compte, soit de faire signer un contrat d’ouverture de crédit.

6 C'est-à-dire les banques, les compagnies d'assurances, les sociétés de financement.

7 Actuellement, les sanctions comprennent une peine d'emprisonnement allant de 8 jours à 1 an et une amende

de 26 à 100 000 euros, ou une de ces peines seulement. Il est proposé de faire passer la durée d'emprisonnement de 3

mois à 2 ans et l'amende de 500 euros à 200 000 euros.

8 Nº DOC 52 0328/001

9 Le document complet est téléchargeable sur http://www.journeesanscredit.be/Recommandations-2008,9

10 Voir le document dossier intitulé "Les ouvertures de crédit : constats et recommandations pour une meilleure

protection des consommateurs" publié en 2007 disponible sur http://www.journeesanscredit.be/En-2007-Les-32-

recommandations

11 Telles que l’utilisation optimale de la Centrale et l’interdiction d’offres de crédit non liées à des achats.

12 Pour une étude approfondie de la question, lire à ce sujet le chapitre 9.2.1.2. du rapport de l’étude « Offre de

services financiers et prévention de l’exclusion financière » réalisée en 2007-2008 par le Réseau Financement

Alternatif pour le compte de la Commission Européenne, dont les paragraphes suivants sont largement issus.

13 Le niveau de ces taux d'intérêt plafonnés varie entre les pays et au sein même de pays pour différents types

de crédit. Par exemple, en France, les taux s'échelonnent entre 8,72 % et 20,35 % de TAEG – en fonction, de la somme empruntée et du type de crédit utilisé. L'Italie possède 15 taux différents. Aux Pays-Bas, il n'y a qu'un seul plafond fixé à 17 % au-dessus du taux de base de la Banque centrale ; en Pologne, c'est quatre fois le taux de base.

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Examen critique des propositions de loi déposées récemment en la matière au regard des revendications formulées par les acteurs de terrain.

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-DISN2008-4
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2008
Date d'édition
12/2008
Mois d'édition
Décembre

Les sirènes du crédit facile

Soumis par Anonyme le

Le crédit à la consommation : outil fantastique à double tranchant

Ce matin, dans le métro, je suis interpellée par ce gros crapaud qui me sourit depuis son panneau publicitaire et m’invite en ces termes : « Augmentez votre pouvoir d’achat, allégez votre charge mensuelle ! » Ensuite, alors que je fais mes courses, je découvre avec surprise qu’avec la carte Untel émise par mon supermarché de prédilection, je peux « payer mon caddy en 3 fois sans frais ». Un crédit en ces temps financièrement difficiles, ce serait donc ça la solution ?

S'il est évident que le crédit à la consommation, qui offre à chacun la possibilité d’étaler ses dépenses au gré de ses préférences et des événements inopinés de la vie, peut s’avérer essentiel dans le monde contemporain et constitue un rouage essentiel de notre économie, il convient néanmoins de ne pas négliger que celui-ci peut également, lorsqu’il n’est pas accordé de manière adaptée, faire plonger l’emprunteur dans une spirale de surendettement.

La crise du crédit qu'a initiée l’économie américaine démontre à suffisance que l’octroi irresponsable de crédits a des effets désastreux non seulement pour l’individu en tant que consommateur, mais également pour l’économie en général.

Or, force est de constater que la crise du crédit actuelle coïncide avec une hausse des prix des produits de consommation de base – comme les produits alimentaires et l’énergie – qui pèse sur le pouvoir d’achat des consommateurs.

Le recours au crédit en ces temps difficiles est-il une bonne ou une mauvaise chose ? Tout dépend bien entendu de la situation particulière du consommateur, des termes du produit souscrit, et de l’utilisation à laquelle le crédit est destiné.

Les développements actuels du marché du crédit et les lacunes qui subsistent en matière de protection du consommateur à l’égard de certains produits laissent néanmoins craindre un risque accru de voir le consommateur confronté à des crédits inadaptés à ses besoins, voire dangereux.

Le nombre de crédits à la consommation en Belgique augmente

Le consommateur a de plus en plus facilement accès au crédit en Belgique.

Ainsi, selon les dernières données relatives aux enregistrements de la Centrale des crédits aux particuliers collectés par la Banque Nationale de Belgique, fin juin 20081, 4.761 millions de Belges étaient enregistrés auprès de la Centrale des crédits, dont 3.643 millions pour au moins un crédit à la consommation.

Quelque 56 % de la population majeure ont au moins un crédit à rembourser, ce qui représente une augmentation de près de 10 % en quatre ans. Le nombre de contrats — environ 7.743 millions – est encore plus élevé. En outre, l’augmentation du nombre de contrats – de 15 % – est plus forte que celle du nombre de personnes ayant un crédit à rembourser. En 2007, pour chaque nouveau consommateur contractant un crédit venaient s’ajouter trois contrats de crédit. Fin juin 2008, près de 10 % des particuliers ayant emprunté avaient cinq contrats ou plus à rembourser.

Force est donc de constater que, d’une part, de plus en plus de consommateurs contractent un crédit à la consommation et que, d’autre part, les consommateurs contractent davantage de crédits.

L’ouverture de crédit : la formule la plus utilisée

Par ailleurs, on constate que ce sont les ouvertures de crédit qui occupent en nombre la plus grande partie de ce marché (crédits à la consommation et crédits hypothécaires).

L'ouverture de crédit, également appelée « credit revolving », « crédit renouvelable », « crédit permanent » ou « réserve d’argent », est une forme de crédit à la consommation qui se présente sous forme d’une ligne de crédit, c'est-à-dire un droit de tirage grâce auquel le consommateur peut librement emprunter, sans toutefois pouvoir dépasser le plafond déterminé par le prêteur. Le moment et le montant du remboursement restent à l’appréciation du consommateur une fois la ligne de crédit entamée – un remboursement mensuel minimum étant généralement imposé par le prêteur. La réserve financière proposée lors d’une ouverture de crédit est reconstituée au fur et à mesure des remboursements, ce qui permet au titulaire de réutiliser immédiatement les sommes remboursées, sans qu’un nouveau contrat de crédit soit conclu.

En quatre ans, le nombre de contrats d’ouverture de crédit a augmenté d’environ vingt pour cent, pour atteindre 3.589.993 unités, et cette croissance ne semble pas près de fléchir. Fin juin 2008, ces contrats représentaient un montant total de 10.685 milliards d’euros, soit presque un tiers du marché du crédit.

L’ouverture de crédit — une formule qui n’est pas sans risques 

Le pourcentage de contrats d’ouverture de crédit défaillants est bien plus élevé que celui des autres types de crédit à la consommation.

L’analyse des nouveaux contrats permet de constater qu’il y a un problème insidieux au niveau des ouvertures de crédit. On observe en effet que 34,2 % des nouveaux contrats sont des ouvertures de crédit, mais que les ouvertures de crédit représentent 41,3 % des nouveaux arriérés de paiement. La ligne de crédit moyenne est de plus en plus élevée et a augmenté en 2007 de plus de 7 %, pour s’établir à 6.141 euros par contrat. Le montant moyen de l’arriéré a diminué légèrement l’an dernier et s’élève à 1.589 euros, mais simultanément, 5.758 contrats avec arriéré de paiement sont venus s’ajouter.

Ce recours accru aux ouvertures de crédits, observé depuis quelques années, soulève différentes critiques, liées directement à la nature du produit :

  • son coût est généralement élevé, le taux annuel effectif global (TAEG)2 étant presque toujours fixé au maximum légal3, les TAEG maxima s'élevant actuellement à 17 % pour les ouvertures de crédit de plus de 1.250 euros et à 19 % pour ceux de moins de 1.250 euros ;
  • contrairement aux prêts amortissables classiques, le taux à la souscription n’est pas garanti et rien ne garantit donc que le taux annoncé sera celui appliqué le jour de l’utilisation effective de l’argent, surtout si celle-ci a lieu quelques mois plus tard ;
  • l’absence de plan fixe de remboursement et la possibilité offerte de puiser à tout moment dans la réserve d'argent sans qu'un nouveau contrat soit conclu nécessite que le consommateur dispose d’une importante capacité à maîtriser fermement son budget4 ;
  • son obtention est souvent trop aisée et rapide et la réserve octroyée, qui dépasse souvent le besoin, constitue une tentation qui incite parfois le consommateur à éviter de réfléchir à la structure et à l'équilibre de son budget ou à l'utilité d'une dépense.

Par ailleurs, on constate que les contrats proprement dits sont de plus en plus souvent émis par des établissements qui ne sont pas des organismes de crédit. On observe également de manière générale que la proportion de contrats défaillants est plus importante chez ces derniers. Ainsi, les cartes de crédit des magasins sont une considérable source d'endettement des ménages. Ceux-ci ont accumulé 1,37 milliard d'euros de dette par leur biais, selon des chiffres du SPF Économie, soit une hausse de 13 % par rapport à 2006 et de 50 % par rapport à 2000.

Or, en 2006, les cartes de crédit qui n'émanent pas des banques représentaient déjà 65,9 % des quelque 4 millions de crédits ouverts via des cartes en Belgique5. Il s'agissait, pour une grande part, de cartes proposées par des supermarchés, des chaînes de distribution et des sociétés de vente par correspondance.

Cette pratique croissante soulève une seconde salve de critiques :

  • Le vendeur travaillant dans un magasin, ou une grande surface n’étant pas un professionnel du crédit, il est très souvent incapable d’informer ou de conseiller correctement le consommateur quant au choix du crédit le plus adapté.
  • L’objectif du vendeur étant de maximiser la consommation des produits du magasin pour lequel il travaille, n’existe-t-il pas un conflit d’intérêts alors que le prêteur est normalement obligé d’adapter le type de crédit proposé aux besoins du consommateur ?
  • On constate actuellement que les vendeurs-intermédiaires de crédit proposent de plus en plus des crédits qui ne sont absolument pas liés à un achat dans leur enseigne, voire aux fins d’un rachat de crédit — jouant là un rôle de banquier qui n’est pas le leur !

L’omniprésence de ces formules de crédit disponibles dans les magasins, les grandes surfaces, via les achats par correspondance, etc., et la facilité avec laquelle elles sont octroyées rend la tentation d’autant plus forte et constitue un argument de vente de poids pour les enseignes, qui en usent et en abusent largement !

Crise du pouvoir d’achat et risque de crédit inadapté

Si, pour les ménages à revenus modestes qui ne disposent pas de liquidités suffisantes, le crédit à la consommation, et plus particulièrement l’ouverture de crédit, permet d’anticiper un revenu qui n’a pas encore été perçu et de donner ainsi un accès immédiat à des biens ou des services, il est néanmoins communément admis que le choix de l’ouverture de crédit n’est adapté que pour un besoin temporaire de liquidités.

L’ouverture de crédit n’est un crédit adapté aux besoins du consommateur que si le montant du crédit consenti est adapté aux revenus du consommateur, qui doit être en mesure de le rembourser dans un délai très court. Par ailleurs, s’il s’agit de financer des achats ou des services, l’ouverture de crédit ne sera adaptée que si elle a la même durée de vie que ces biens et ces services.

Dans le contexte de crise financière et économique que l'on connaît actuellement, il est légitime de craindre une multiplication d'ouvertures de crédit inadaptées pouvant entraîner des conséquences désastreuses.

En effet, la crise financière pousse les établissements bancaires dits « classiques » à faire preuve de plus de vigilance dans l’octroi de crédit, risquant de jeter bon nombre de personnes dans les bras de prêteurs moins scrupuleux.

Parallèlement à cela, la crise du pouvoir d’achat due à l’augmentation du coût de la vie se fait sentir pour de nombreux ménages qui éprouvent davantage de difficultés à joindre les deux bouts.

Ceux-ci étant, dans le même temps, de plus en plus confrontés à des offres de crédits « faciles » – mais très chers – par le biais de publicités de plus en plus agressives, la tentation est forte d'avoir recours à l'ouverture de crédit non plus pour l’acquisition ponctuelle d’un bien ou d’un service précis, mais bien de manière structurelle et récurrente pour satisfaire des besoins quotidiens (alimentation, électricité, soins de santé) ou pour rembourser un prêt à tempérament, regrouper des dettes, acheter une voiture, financer un abonnement dans une salle de fitness, etc. Dans ces cas, l'ouverture de crédit permet de camoufler pour un temps un déséquilibre structurel dans le budget du ménage, en permettant de faire face à des dépenses plus élevées que les revenus.

Dès lors qu’une ouverture de crédit est octroyée pour une durée indéterminée, le risque d’installer le consommateur dans un endettement permanent est alors non négligeable.

Conclusion 

En cette période de crise du pouvoir d’achat que nous connaissons actuellement en Belgique, la nécessité de sensibiliser les consommateurs aux risques du crédit inadapté et de réguler l’usage de telles pratiques, clamée depuis plusieurs années par les acteurs de terrain dans le domaine du surendettement, est indéniablement accrue.

Gageons que la « mise sous les projecteurs » de cette problématique, qui s’inscrit sans conteste dans le contexte plus large de la crise financière, incitera nos mandataires publics à proposer des mesures pour faire taire les sirènes du crédit facile, dont il conviendra de suivre de près les développements dans les mois qui viennent.

 

Lise Disneur - Octobre 2008

 

1 Rapport Statistiques de la Centrale des crédits aux particuliers - 2007 actualisé au 30 juin 2008, Banque Nationale de Belgique.

2 Qui comprend le taux d'intérêt débiteur et les frais annexes au contrat (frais de dossier, assurance solde restant dû).

3 L’arrêté royal du 19 octobre 2006 (Moniteur belge 31.10.2006.) entré en vigueur le 1er février 2007, a instauré une nouvelle grille des taux annuels effectifs globaux maxima et a mis en place un système d'adaptation automatique des taux maxima. L’adaptation est fonction de l’évolution de certains indices de référence du marché financier. Cette évolution est examinée tous les 6 mois, à la fin du mois de mars et de septembre, et donne lieu à une adaptation de taux lorsque l’indice varie d’au moins 0,75 %. Le ou les taux adaptés sont publiés sans délai au Moniteur belge et entrent en vigueur le 1er jour du 2ème mois qui suit la publication. Une première adaptation de + 1 % de l’ensemble des TAEG maxima est entrée en vigueur le 1er juin 2007. Une seconde adaptation de + 1 % est intervenue le 1er décembre 2007 pour les TAEG maxima des ouvertures de crédit. Celle-ci est toujours d'application. Les TAEG maxima s'élèvent actuellement à 17 % pour les ouvertures de crédit de plus de 1.250 euros et 19 % pour ceux de moins de 1.250 euros.

4 Ainsi, celui qui s’en tient à rembourser des montants peu élevés remboursera essentiellement des intérêts, laissant la dette de capital quasiment intacte.

5 Working Paper document nº 78 - janvier 2006 – BNB- Crédits aux particuliers - analyse des données de la Centrale des crédits aux particuliers, pages 14 à 20.

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

En cette période de crise du pouvoir d'achat, il est fort tentant de recourir au crédit pour joindre les deux bouts... avec, à la clé, le risque de souscrire un crédit inadapté ?

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-DISN2008-2
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2008
Date d'édition
10/2008
Mois d'édition
Octobre

Crédits rapides et grands magasins : un problème, quel problème ?

Soumis par Anonyme le

Introduction

On vit une époque formidable, on ne le dit pas assez. Ces quelques lignes provocatrices, pourquoi nous choquent-elles ? Craquer pour une dépense coup de cœur ? On en rêve tous, non ? Ou, en tout cas, ne rêvons-nous tous pas de pouvoir nous les offrir, ces coups de cœur ? Alors, qui sera le premier à jeter la pierre ? Le consommateur asphyxié par son crédit, mais assis dans un superbe canapé ? Le vendeur de canapés, qui grâce à ce salon vendu, peut s'asseoir dans un canapé encore plus beau ? Le pouvoir politique, qui doit certes financer des services de médiation de dettes lorsque la situation est vraiment grave, mais qui, d’une manière générale, permet le maintien d'une consommation élevée afin de soutenir l'économie ? Ou le médiateur de dettes qui souhaite arriver à une solution viable de remboursement, en méditant, assis sur sa chaise, aux plaisirs différents qu’il pourrait tirer d’un bon canapé acheté cash plutôt qu'à crédit ?

Et puis, n'est-ce pas notre très cher Oscar Wilde, peu avare de bons mots, qui, dans Le Portrait de Dorian Gray, nous assène cette vérité un tant soit peu subversive : « Les folies sont les seules choses qu'on ne regrette jamais » ?

Dès lors, vivons sans regret... et endettés?

Sans une analyse du problème, pas de solution possible

Ce n'est sans doute pas un hasard si les lieux de grande distribution multiplient les possibilités et facilités de paiement entre leurs murs. Car si les stimuli d'achat sont diffusés en permanence sous des formes multiples et par des canaux variés – spots publicitaires à la radio ou à la télévision, publicité sur Internet, dans la presse, dans les rues et lieux publics au moyen d’affiches, de panneaux rotatifs, d’enseignes, d’enseignes lumineuses et digitales, de sculptures et d’objets urbains, d’écrans électroniques, messages publicitaires au dos de tickets de caisse, au cinéma avant le film, mais aussi pendant le film, grâce au placement d'objets, publicité, encore, dans les messages d'attente téléphonique, dans l'enveloppe des chèques repas, pour ne citer que quelques exemples – rien ne vaut le contact réel avec la marchandise. La vue, le toucher, l'essai possible sont autant d'expériences qui peuvent nous convaincre des satisfactions que nous pourrons tirer de nos nouvelles acquisitions. Et comme nous sommes amenés à pousser régulièrement les portes de ces magasins, puisqu'on s'y approvisionne par ailleurs d'une multitude de biens de consommation courante, la résistance à s'offrir une petite folie s'émoussera de manière régulière.

Dans ces conditions, il devient évident que le lieu d'octroi du crédit n'est pas neutre. Dans bien des cas, le crédit est précisément mis à disposition pour permettre des achats sur place, ou, si ce n'est pas le cas, il est proposé au même titre que les autres biens et services : on passe en grande surface pour acheter un crédit.

En quoi est-ce un problème ?

Que l'on soit pour ou contre ce modèle économique, que l'on apprécie ou non ces temples de la consommation, la question que nous souhaitons soulever ici est la suivante : ces offres de crédit sont-elles particulièrement problématiques quand elles sont proposées en grandes surfaces ?

Dans une précédente analyse1, il est effectivement montré que les ouvertures de crédit – soit le crédit phare proposé dans ces lieux – continuent de connaître une croissance du nombre de défauts de paiement (cf. chiffres de la Centrale des crédits aux particuliers). On y rappelle également les divers risques spécifiques qui y sont liés.

La Centrale des crédits aux particuliers (CCP) nous informe aussi que le taux de défauts des ouvertures de crédit est plus élevé lorsque ces dernières sont octroyées par les « autres institutions »2 que par les « établissements de crédit »3. Sur la base des données 2007, le pourcentage de contrats défaillants est de 6,8 % pour les autres institutions (155.044 défauts / 2.284.314 contrats) contre 5,2 % pour les établissements de crédit (59.979 défauts / 1.149.623 contrats). Malheureusement, la CCP ne dispose d'aucune information relative au canal d'octroi du crédit (sur le point de vente, par courrier, par internet, à l'agence, à domicile, etc.) et ne peut, dès lors, pas identifier les éventuels canaux qui seraient plus risqués que d'autres.

Qu'est-ce qui différencie une ouverture de crédit offerte en « grande surface » d'une ouverture de crédit proposée en banque ?

  • a) On l'a dit, les motivations de souscription peuvent être, plus qu'en banque, liées à une impulsion lorsque le crédit est souscrit en grande surface... le consommateur est donc, sur ce plan, en partie responsable de ce problème... et il peut lui arriver de regretter son acte. Toutefois, face à ce problème, il existe d'ores et déjà un droit de rétractation pour le consommateur, qui devrait d'ailleurs être renforcé dans le cadre de la Directive européenne 2008/48/CE, puisqu'il y est prévu, dans le considérant 34, que la rétractation soit possible pendant 14 jours, sans pénalité ni justification.
  • b) Les devoirs d'information et de conseil y sont la plupart du temps réduits à néant. Si la législation sur ce point s'intéresse à la qualité de l'information et des conseils qui peuvent être donnés au consommateur dans la phase pré-contractuelle, elle ne s'applique que peu ou pas aux crédits proposés en grandes surfaces. En effet, cette obligation, d'une part, ne porte pas directement sur les intermédiaires de crédit, et, d'autre part, l'offre de crédit y est en général d'un seul type. Dans ces conditions, le conseil n'a plus vraiment lieu d'être, puisque le prêteur ne peut proposer de conseil qu'entre les produits qu'il met à la disposition de la clientèle.
  • c) L'analyse de la solvabilité : lorsque l'offre de crédit bancaire est faite par le banquier du consommateur, elle n'est pas faite à un inconnu, mais au contraire à un client dont sont connus la surface financière, les mouvements en comptes, les habitudes de gestion. La rapidité d'octroi peut donc ne pas impacter la qualité de l'analyse.

En revanche, en grande surface, les clients qui sollicitent un crédit sont de parfaits inconnus, et l'on sait que les modalités d'octroi y sont aisées et que l'enquête de solvabilité est réduite à sa plus simple expression. La plupart du temps, en effet, seul le fichier de la CCP est consulté. Mais c'est là une obligation légale aisément contrôlable, puisque la référence de la consultation doit être indiquée sur le contrat de crédit, qui est dès lors très efficace et bien appliquée. Elle est par ailleurs facile à réaliser, puisque la CCP est accessible en ligne et que l'opération ne requiert pas plus de quelques minutes.

Exploration de solutions envisageables

Passons en revue les solutions qui pourraient être envisagées et tâchons d'identifier les plus pertinentes :

Achat « coup de coeur », où, contrairement au bon mot d'Oscar, le malendettement qui découle d’un achat impulsif fait regretter amèrement cette petite (ou grande) « folie ». Si l'on souhaite protéger le consommateur contre ses propres impulsions, ou en tout cas, contre celles qu'il peut être amené à regretter dans le futur, l'approche actuelle de délai de rétractation est une première piste intéressante. Toutefois, ce délai semble relativement peu souvent utilisé, car il ne peut s'appliquer que lorsque le bien financé peut être rendu à l'état neuf, ce qui n'est plus le cas la plupart du temps. En outre, il paraît peu approprié d'interdire tout bonnement l'accès aux crédits « rapides » en grande surface puisque, dans une majorité de cas, ces derniers sont bel et bien honorés.
Du reste, la mise en oeuvre concrète d'une telle mesure n'irait pas sans soulever de très nombreuses questions. À partir de quelle distance considère-t-on que l'offre n'est plus réalisée sur le lieu d'achat ? Que penser, par exemple, d’une offre faite sur le parking du lieu d’achat ? Quel nombre minimum de mètres devrait être parcouru ? Que faire des institutions de crédit présentes dans le périmètre ainsi défini ? Comment les professionnels contreront-ils cette mesure ? Que risquent-ils de mettre en place ? Ne sera-ce pas pire ? Sans compter que cela ne résoudra pas de manière satisfaisante les deux autres problèmes soulevés ci-dessous...
Les devoirs d'information ...

Pour que cette obligation puisse être correctement remplie, il faut idéalement :

  • du personnel qui connaisse le/les produit(s) financier(s) proposé(s) – afin d'être à même de présenter des droits et obligations qui en découlent, notamment les modalités de remboursement, les coûts et les mesures qui seront mises en oeuvre en cas de défaut de paiement. À ce stade, il est utile de penser au moyen de prouver qu'une telle information a bien été donnée. Pour ce faire, un dépliant « simplifié », présentant l'essentiel de ces informations en termes clairs pourrait être élaboré... mais ce n'est là qu'une piste de réflexion ;
  • du personnel qui puisse déterminer les besoins de financement du client et le type de crédit qui lui correspond et ne finaliser une offre que lorsque cette correspondance est avérée. Cet élément nous semble bien difficile à imposer dans un cadre légal puisque, d'une part, dans la majorité des cas, seul un type de crédit est proposé, et que, d'autre part, cela demanderait à ces professionnels de travailler « contre leur intérêt », ce qui paraît peu réaliste. En effet, la décision de crédit se prend dans une logique de maximisation des profits, et si le risque de défaut de paiement est en dessous du seuil d'acceptation, on comprendrait mal qu'un prêteur se rétracte. Enfin, la mise en place d’une procédure de contrôle vérifiant qu’une telle analyse a été faite semble à ce jour difficile à imaginer.

... et de conseil

C'est en général sous ce vocable que l'on trouve l'analyse de la solvabilité.

À ce jour, les obligations se concentrent autour de trois éléments d'information :

  1. la vérification de l'identité du consommateur (indispensable pour l'étape 2) ;

  2. la consultation du fichier CCP ;

  3. le but du crédit (le plus souvent énoncé de manière floue).

Pour le reste, c'est aux professionnels qu’il revient de recueillir les informations qu'ils considèrent comme nécessaires pour apprécier la situation financière du consommateur.

Il nous semble nécessaire d'aller plus loin sur ce point. Pour l'ensemble des parties prenantes (prêteurs et intermédiaires, consommateurs et pouvoirs publics), une analyse appropriée de la solvabilité reste le meilleur rempart contre la mise en place de crédit inadéquat.

Nous considérons que les obligations légales sur ce point ne vont pas assez loin. La plate-forme « Journée sans crédit » à laquelle participe le Réseau Financement Alternatif a présenté, en 2008, dans sa proposition 4.14, une piste sérieuse de solution.

L'idée consiste en la réalisation d'un questionnaire standard permettant d'évaluer la situation financière du consommateur. Le prêteur ou son intermédiaire devraient, pour ce faire, questionner le consommateur sur ses ressources (revenus, allocations...), mais aussi sur sa situation familiale (composition du ménage), ses charges courantes et ses dettes. Ceci devrait permettre de vérifier que le consommateur dispose des ressources suffisantes pour faire face, à la fois, à ses dépenses incompressibles et au remboursement du crédit envisagé. Pour ce faire, le consommateur devrait être invité à fournir les justificatifs des principaux postes et s'engager, comme c'est déjà le cas, sur la véracité des diverses informations qu'il communique.

Étude de solvabilité objectivée, la panacée ?

Dans notre quête de solution au problème de surendettement, dans notre volonté d'éviter que des pratiques préventives réduisent par ailleurs l'accès du crédit à des ménages en situation financière précaire, il nous semble inévitable de faire reposer en grande partie la décision d'octroi sur la solvabilité réelle du consommateur, et, à ce stade, une objectivation de cette dernière paraît une étape indispensable à mettre en place.

Pourquoi privilégier cette approche ?

 

  • Elle fait reposer la décision d'octroi sur des éléments objectifs.
  • Elle permet d'établir clairement les responsabilités des uns et des autres : le consommateur se doit d'apporter les pièces justificatives et de répondre sincèrement aux questions qui lui seront posées. Le dossier constitué en apportera la preuve. On peut même réfléchir à la manière dont on pourrait traiter différemment le sort des consommateurs de bonne ou de mauvaise foi, au même titre que des prêteurs de bonne ou de mauvaise foi, lorsque des défauts de paiement aboutissent à des litiges ou à des procédures de médiation de dettes.
  • Le consommateur responsableet solvable pourra toujours obtenir rapidement un crédit, puisqu'il se munira des pièces ad hoc pour remplir son dossier. Pour les autres, il est probable que cela prenne plus de temps (oubli de document...). Ceci présente l'avantage pour ces derniers de ne plus pouvoir facilement tomber dans l'achat impulsif qui doit être financé par un crédit et d'avoir à mettre le nez dans le budget et dans la vérification dans les grandes lignes de la capacité de remboursement.
  • Pour le prêteur ou son intermédiaire, il s'agit de vérifier les pièces justificatives, de les joindre au dossier et de compléter la grille budgétaire afin de vérifier le disponible pour le remboursement du crédit. Si, on en convient, cela prend plus de temps que ce qui se pratique à ce jour, nous sommes convaincus des capacités des professionnels à rationaliser ce process pour en réduire autant que possible le coût.
  • Cette approche s'applique à l'ensemble de la profession et ne créera donc pas de distorsion de concurrence.
  • Elle n'entre pas en contradiction avec le projet de la Directive 2008/48/CE.
  • Elle renforce et objective la notion de « crédit responsable » et permet de réaliser un bond en avant en matière de responsabilité sociale des entreprises financières. L'usage approprié d'un questionnaire standard pouvant devenir une norme minimale du crédit responsable.

En guise de conclusion

Quel prêteur qui se considère comme responsable peut considérer cette option comme inappropriée ou inadéquate ? Après ce que les crédits subprime ont déclenché comme tempête, peut-on encore envisager de faire du crédit sur base de credit-scoring simpliste, sans une approche individuelle précise de la capacité de remboursement ?

Chers prêteurs, la balle est dans votre camp... et celui qui parmi vous sera performant dans une approche responsable développera un avantage compétitif, n'est-il pas ?

Olivier Jérusalmy

 

1 Lise Disneur, Réseau Financement Alternatif, « Les Sirènes du crédit facile », octobre 2008

2 Institutions, autres que les établissements de crédit, qui sont agréées par le SPF Économie pour l'octroi de crédits à la consommation.

3 Institutions soumises à la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit et qui sont agréées par la Commission bancaire, financière et des assurances.

4 http://www.journeesanscredit.be/var/www/eqpop/www.journeesanscredit.be/I...

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

La proximité de biens de consommation attrayants, les techniques de marketing agressives, la volonté de déclencher autant que possible l'achat « coup de coeur » sont d'autant plus efficaces que le consommateur, même quand il ne dispose pas d'argent disponible, peut tout de même se l'offrir grâce à une ouverture de crédit disponible illico presto...

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2008-1
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2008
Date d'édition
12/2008
Mois d'édition
Décembre