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Publication de l’acte délégué de la taxonomie européenne : la Commission veut se prémunir d'un rejet par le Parlement

Soumis par Anonyme le

La Commission européenne a dévoilé l’acte délégué de la taxonomie européenne sur les activités vertes apportant une contribution significative à l’objectif d’atténuation du changement climatique. Sorte de décret d’application de la loi adoptée par l’Union européenne, l’acte délégué est un document à la fois administratif, car il fixe les règles du jeu de la part verte des grandes entreprises et des produits financiers durables, visés par des obligations de reporting. Mais aussi un document hautement politique, très discuté tant par les lobbys industriels que par les responsables politiques européens. L’acte publié ce 21 avril se révèle un compromis qui vise le consensus, afin de minimiser le risque de rejet par les parlementaires européens.

C’est d’abord sur le secteur de l’énergie que la Commission a tranché. Les services de la DG Fisma de la Commission, en charge de la stabilité financière des services financiers et de l’union des marchés de capitaux, ont ainsi choisi de mettre de côté les cas explosifs du gaz naturel et du nucléaire. Ceux-ci seront traités à part. "La Commission a l’intention de présenter une proposition législative séparée au quatrième trimestre 2021, couvrant spécifiquement la manière dont certaines activités économiques, principalement dans le secteur de l’énergie, contribuent à la décarbonisation", écrit la Commission dans le texte de présentation de l’acte délégué.

Un premier projet d’acte délégué, révélé dans la presse mais jamais commenté par la Commission, avait pourtant inclus le gaz selon certaines conditions, ce qui avait ravivé les ardeurs françaises pour inscrire également l’énergie nucléaire dans les activités vertes. Le débat houleux avait poussé des membres de la Plateforme européenne sur la finance durable à menacer de démissionner, si la taxonomie ne respectait pas les faits scientifiques.

Interviewé par le journal Euractiv, Pascal Canfin, le député européen membre du groupe Renew, légitime le choix de la Commission. "Il faut selon moi traiter le gaz et le nucléaire ensemble, parce que politiquement c’est lié à la même question. Et la question c’est : sous quelles conditions ces deux technologies peuvent-elles être utiles à la transition ?", déclare-t-il. 

Les forêts, autre point de discorde

Autre sujet de discorde sur la taxonomie, celui de la gestion durable des forêts. Le projet initial prévoyait des critères stricts permettant de s’assurer que les exploitants apportent la preuve que leurs forêts assurent leur rôle de puits de carbone sur 20 ans. Face à la levée de bouclier des pays nordiques, où l’industrie forestière est particulièrement développée, la Commission a revu ses critères à la baisse. Les exploitants de forêts auront 30 ans pour produire une analyse du bénéfice climatique de leur gestion, ce qui mène à 2050. Une échéance trop lointaine selon les ONG, d’autant plus si les bénéfices carbone sont modestes.

Par ailleurs, ces obligations de bilan seront exigées pour les forêts dès qu'elles dépassent 13 hectares, une victoire pour plusieurs ONG, dont le WWF et ClientEarth. Celles-ci avaient signé une lettre commune à la Commission européenne pour marquer leur désaccord sur ce point et demandent que la question de l’agroforesterie soit purement et simplement enlevée de la taxonomie et remise à plus tard, comme c’est le cas pour l’agriculture, qui a disparu de l’acte délégué final. Les ONG critiquent aussi des critères trop souples pour certaines pratiques de combustion de biomasse forestière.

Ce pas de côté sur l’énergie et le recul sur les forêts donnent l’impression que la Commission a opéré des choix stratégiques pour s’assurer que son texte ne soit pas rejeté par le Parlement. "À l’Est, elle fait déjà face à une opposition énorme de pays comme la Pologne ou la Tchéquie sur la partie énergie. Si en plus, elle perd le soutien des pays nordiques, elle perd sa majorité sur la taxonomie au Conseil européen", analyse Pascal Canfin dans Euractiv.

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Novethic
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La Commission européenne a publié l’acte délégué pour l’application de la taxonomie sur les activités vertes. Plusieurs mois de travail ont été nécessaires pour élaborer le texte, pendant lesquels la pression n’a cessé de s’intensifier de la part des industriels et des États. Au final, le document n’intègre ni le gaz naturel ni le nucléaire dans la taxonomie, remettant la décision à plus tard, et adopte des critères peu contraignants pour la gestion des forêts.

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2021
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21
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21/04/2021
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Avril

L’industrie financière, un intermédiaire engagé dans la transition sociale et environnementale

Soumis par Anonyme le

Ces dernières années ont été marquées par l’essor des investissements socialement responsables (ISR). En Belgique, les ISR ont atteint environ 60 milliards en 2019 (en hausse de 40 % par rapport à 2018), soit 11 % des encours (Rapport ISR 2020, Febelfin). Comment la finance peut-elle contribuer aux enjeux environnementaux et sociaux de notre société et accélérer le processus de transition ?

En étant au cœur des échanges de capitaux entre les investisseurs (ménages, investisseurs institutionnels) et les entreprises privées et publiques, la finance assure l’allocation efficiente des capitaux. Au travers de l’engagement de ses apporteurs de capitaux, elle peut initier des changements dans la pratique des entreprises. La crise sanitaire nous a montré la fragilité d’un système ne tenant pas compte des considérations de durabilité et de l’impact sur l’ensemble des parties prenantes. L’industrie financière se positionne désormais comme un intermédiaire engagé, soucieux de son impact sur la société au-delà des rendements financiers.

Le besoin d’informations extra-financières

Une condition à l’allocation efficiente et informée des ressources est l’accès à des informations fiables sur la durabilité des entreprises. À la demande du marché, des agences privées ont développé des notations durables facilitant le suivi de la performance extra-financière, fréquemment appelée notations ESG (l’environnement, le social, la gouvernance). Ces notations ont gagné en popularité en raison de leur simplicité et de leur facilité d’utilisation.

Néanmoins, des études académiques ont montré un manque de convergence entre ces agences. Il n’est pas rare d’observer des écarts de notation pour une même entreprise entre les agences. Des différences de définition et de périmètre concernant les risques environnementaux ou sociaux matériels expliquent en partie ces écarts. Par ailleurs, le critère de gouvernance inclut, pour certaines agences, les compétences de l’équipe managériale de l’entreprise alors que pour d’autres systèmes de notation, la capacité du management influence directement les critères environnementaux et sociaux au travers des politiques mises en place.

S’appuyant sur la recherche académique, une étude de l’Union européenne (Study on Sustainability-Related Ratings, Data and Research) publiée en novembre 2020 recense des biais potentiels dans les ratings qui donneraient un avantage pour les grandes entreprises, pour les entreprises situées dans certains pays et/ou certaines industries. Face à ces critiques, les acteurs réagissent : les investisseurs appellent à plus de transparence des agences, les agences réclament de meilleures informations des entreprises et les entreprises demandent plus de collaboration avec les agences.

La sélection des investissements durables

Afin de répondre aux demandes des investisseurs, l’industrie financière a étoffé sa gamme de produits "durables". Il est toutefois compliqué pour un investisseur individuel de différencier ces produits. Au-delà des notations, de nombreuses certifications et labels de qualité coexistent tant au niveau des produits (par exemple, Ethibel, Towards Sustainability ou Financité&FairFin en Belgique) que des fournisseurs de produits tels que les gestionnaires de fortune, banques et assureurs (par exemple, être signataire des UN Principles for Responsible Investment). L’engagement de ces acteurs financiers est devenu une condition sine qua non à une finance durable capable d’établir un dialogue avec les entreprises quant à leur responsabilité sociétale et à l’impact de leurs activités.

Construire la finance de demain

À Hec Liège (École de Gestion de l’Université de Liège), nous étudions les conditions nécessaires au développement d’une finance responsable, capable d’accélérer la transition vers une société durable. Notre agenda de recherche s’intéresse tout particulièrement à l’intégration des informations extra-financières dans les politiques d’investissement des acteurs financiers. Le succès de cette intégration passe par la mise à disposition d’informations de qualité, mais également par la nécessité d’intégrer les impacts environnementaux (E), sociaux (S) à long terme dans le processus de décision (G) de toutes les parties (les entreprises, les gestionnaires d’actifs et les investisseurs).

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La libre
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Comment la finance peut-elle contribuer aux enjeux environnementaux et sociaux de notre société et accélérer le processus de transition ? Une chronique signée Marie Lambert et Jérôme Ruth, respectivement directrice de la recherche et professeur de Finance Chercheur-Doctorant en Finance HEC Liège – École de gestion de l’Université de Liège.

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20/04/2021
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Avril

CAC 40 ESG : le nouvel indice boursier qui rassemble 40 entreprises socialement responsables

Soumis par Anonyme le

Un nouvel indice, le CAC 40 ESG, vient agrandir la famille des indices à la Bourse de Paris, en réponse à une demande forte en matière de finance durable, a annoncé lundi son opérateur Euronext.

Ce nouvel indice, lancé ce 22 mars, regroupe 40 sociétés qui ont démontré les meilleures pratiques d'un point de vue environnemental, social et de gouvernance (ESG), indique Euronext, l'un des principaux opérateurs de marché en Europe.

« Le lancement de l'indice CAC 40 ESG constitue une étape importante dans l'accélération de la transition vers une économie durable », a déclaré Stéphane Boujnah, patron d'Euronext, cité dans un communiqué.

Le « premier indice ESG d'Euronext au niveau national » a été développé à l'issue d'une « large consultation au sein de la communauté financière, des autorités publiques et de régulation », indique l'opérateur boursier.

Des entreprises exclues

Neuf sociétés du CAC 40 n'intègrent pas l'indice CAC 40 ESG : Airbus, Alstom, ArcelorMittal, Dassault-Systèmes, EssilorLuxottica, Hermès, Saint-Gobain, Thales et Total.

En revanche, neuf sociétés cotées sur l'indice élargi SBF 120 intègrent le CAC 40 ESG, à savoir Accor, Arkema, EDF, Gecina, Klépierre, Sodexo, Solvay, Suez et Valeo.

Il n'existe pas encore de produits financiers adossés à cet indice mais de grands noms de la gestion d'actifs (Amundi, BNP Paribas et Lyxor) ont déjà confirmé leur intérêt pour cet indice boursier et la création d'ETF, des fonds qui répliqueraient cet indice, selon Euronext.

Armes, tabac, charbon…

La construction du CAC 40 ESG repose sur une méthodologie alignée sur le label ISR (investissement socialement responsable) qui fait référence dans la communauté financière depuis 2016 en France et sur des critères ESG évalués par un partenaire externe, Vigeo Eiris.

Elle s'appuie aussi sur un mécanisme d'exclusion des activités jugées incompatibles avec les critères ESG, à l'instar des activités autour du charbon, des armes controversées et du tabac. L'indice intègre également les principes des Nations unies en matière de normes internationales du travail et de lutte contre la corruption.

Comme pour le CAC 40, la composition de l'indice CAC 40 ESG sera revue tous les trimestres par le comité scientifique des indices d'Euronext, qui prend en compte deux critères majeurs, la taille du capital flottant (capital négociable en Bourse) et le nombre d'échanges enregistrés sur les titres.

Méthodologie revue chaque année

Il est également possible d'exclure une valeur du CAC 40 ESG sans attendre la revue trimestrielle « dans le cas d'une controverse critique sur les principes ESG », selon Euronext.

A minima une fois pas an, il est prévu de revoir la méthodologie sur la base des recommandations d'Euronext et d'éléments apportés par Vigeo Eiris et prendre en compte les évolutions des réglementations européennes en matière de finance durable.

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Les Echos start
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Euronext a lancé le 22 mars la déclinaison responsable du CAC 40. Objectif : répondre à la demande croissante des particuliers d'investir dans la finance durable. Plusieurs entreprises cotées comme Saint-Gobain ou Total sont exclues.

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23/03/2021
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Mars

Non, le PDG de Danone n’a pas été limogé pour son trop grand attachement à la politique RSE du groupe

Soumis par Anonyme le

Le récent départ du patron de Danone, d’abord poussé à abandonner ses fonctions exécutives, puis démis de son tout nouveau mandat de président du Conseil d’administration, a fait grand bruit et fait couler beaucoup d’encre.

Différents points de vue se sont exprimés. Il y a ceux plutôt favorables au rôle des fonds activistes, considérant que ces derniers ont pointé du doigt un dysfonctionnement au sein de l’entreprise et étaient légitimes à se plaindre des résultats financiers de celle-ci. D’autres estiment que la concentration des pouvoirs dans les mains du seul PDG n’est jamais une solution et conduit nécessairement à certaines dérives un peu autoritaires.Enfin, peut-être les plus vocaux, il y a les fervents partisans d’un capitalisme responsable qui considèrent qu’Emmanuel Faber a été limogé pour de mauvaises raisons, celui-ci se montrant plus attaché à la performance environnementale et sociale que financière ou actionnariale du groupe.

En réalité, c’est nier qu’au cours de la dernière décennie, les fonds activistes se sont largement éloignés des seules exigences couvrant la meilleure allocation ou redistribution du capital, l’amélioration de l’efficacité opérationnelle ou les fusions/acquisitions, et se sont plutôt positionnés comme des défenseurs de l’amélioration de la gouvernance. Ce fut déjà le cas en 2019 lorsque Elliot Management critiquait la gouvernance de Pernod Ricard, sa culture managériale et les mésententes au sein de la famille, poussant de facto le groupe à revoir la composition de son conseil d’administration et à présenter un plan d’économies.

La vague de l’investissement socialement responsable

Plus encore, les plus grands hedge funds activistes surfent désormais sur la vague de l’investissement socialement responsable. L’année dernière, Elliott suggérait dans une lettre publique à Evergy, fournisseur américain d’énergie, de réduire son empreinte carbone. Même refrain également il y a quelques mois pour Third Point qui, dans sa lettre à la direction de Prudential, soulignait l'empreinte carbone excessive du groupe, créée selon lui par la présence d’un siège social à Londres pour les filiales américaines et asiatiques de l'assureur britannique.

Les fonds activistes commencent ainsi à ajouter à leur liste standard de demandes des améliorations dans les pratiques environnementales et sociales des entreprises. Les changements de stratégie, de périmètre ou même de gouvernance ne sont plus les seuls critères de leurs campagnes musclées. Pourquoi un tel comportement de la part de fonds surtout connus pour vouloir maximiser le cours de Bourse des entreprises et rehausser le dividende versé aux actionnaires ? Tout simplement parce que c’est leur intérêt.

En effet, les plus grands gestionnaires d’actifs mondiaux mettent désormais les questions telles que le changement climatique et la diversité au cœur de leurs préoccupations stratégiques. Vanguard, le numéro deux mondial de la gestion d'actifs qui a dépassé en 2020 les 7 000 milliards de dollars d'encours, axe désormais sa stratégie sur les fonds ESG (Environnementaux, Sociaux et de bonne Gouvernance, NDLR) et entend rattraper, à la faveur de la présidence Biden, le retard américain en matière de finance durable. Même chose pour BNP Paribas qui exclut depuis le 1er janvier 2020 de sa politique d’investissement les entreprises liées à la production d’électricité particulièrement intensive en CO2. On pourrait ainsi multiplier les exemples.

L’accent sur les critères environnementaux et sociaux

La mise en évidence de l'ESG s’avère aujourd’hui presque indispensable aux activistes pour gagner le soutien des grands gestionnaires d’actifs, alliés essentiels dans le cadre de leurs opérations médiatiques de montée au capital. Dans les années à venir, les campagnes mettant l’accent sur les critères environnementaux et sociaux devraient même se développer, sous l’effet des changements de politique d’investissement de ces grands gestionnaires de fonds présents au capital de la plupart des grands groupes cotés en Europe et aux États-Unis.

 

Preuve encore que le sujet est pris au sérieux, Elliott et Third Point ont chacun d’ores et déjà nommé des profils très senior pour prendre en charge et guider la politique d’investissement ESG du fonds. Chez Danone le mouvement est de même nature : le statut d’entreprise à mission a été adopté à plus de 99 % lors de l’AG 2020, et aucun actionnaire ni aucun administrateur n’a depuis critiqué ce choix.

Certes les deux fonds activistes, Artisan Partners et Bluebell Capital, ont reproché à Emmanuel Faber la performance boursière décevante du groupe, sa rentabilité inférieure à celle de ses principaux concurrents, mais ils lui reprochaient aussi ses investissements en retrait et réclamaient la suspension du plan de réorganisation, dont la suppression de près de 2 000 postes. Si une nouvelle histoire s’écrit pour Danone, avec l’objectif de retrouver une trajectoire de croissance profitable, cela se fera « en conservant la durabilité comme priorité » comme l’a déclaré il y a quelques jours Bluebell Capital. Et ce ne sont pas forcément que des mots.

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La Croix
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Antoine Denry, directeur chez Taddeo, cabinet de conseil stratégique en communication. Pour ce spécialiste de la communication d’entreprises, les fonds activistes surfent désormais sur la vague de l’investissement socialement responsable

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2021
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24
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24/03/2021
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Mars

Tester la capacité de résistance du secteur financier au changement climatique

Soumis par Anonyme le

Le changement climatique est susceptible de perturber fortement nos économies et nos entreprises, et de peser sur nos moyens d’existence, dans les décennies à venir. Les risques associés demeurent pourtant mal compris, les chocs climatiques étant très différents des chocs financiers observés lors des crises passées. Le changement climatique est un processus lent, qui se déroule sur une longue période, avec une forte incertitude quant aux événements climatiques extrêmes qui se produiront à l’avenir. Comme les instruments classiques de gestion des risques ne suffiront probablement pas, les institutions tant publiques que privées auront fort à faire pour parvenir à recenser et évaluer les retombées potentielles des risques climatiques. Dans ce contexte, la BCE a conçu le premier test de résistance « climatique » à l’échelle de l’ensemble de l’économie afin d’aider les autorités publiques et les institutions financières à évaluer les effets des risques climatiques sur les entreprises et les banques au cours des trente prochaines années.

Les risques liés au changement climatique se répartissent généralement en deux grandes catégories. Tout d’abord, le risque physique, qui tient à l’augmentation attendue de la fréquence des catastrophes causées par les aléas de la nature et à leur aggravation. Les entreprises situées dans des zones exposées, comme en bord de rivière ou près d’un littoral, qui sont donc vulnérables aux inondations, pourraient subir d’importants dommages si un événement climatique survenait. Ces dommages pourraient interrompre le processus de production à court terme, voire entraîner la faillite de ces entreprises à plus longue échéance. Le risque physique varie selon les pays et les régions, le sud de l’Europe étant, en moyenne, plus exposé aux canicules et aux incendies, l’Europe centrale et du nord étant davantage en proie aux inondations.

La seconde grande catégorie est le risque de transition, dans lequel l’introduction tardive ou soudaine de politiques climatiques visant à réduire les émissions de CO2 pourrait avoir une incidence négative sur certains secteurs à forte intensité énergétique et en carbone, comme l’industrie minière, les cimenteries ou la sidérurgie. Augmenter les taux de taxation sur les émissions de carbone pourrait, par exemple, accroître les coûts de production et entamer la rentabilité des entreprises.

Les risques tant physiques que de transition sont susceptibles d’altérer la stabilité financière lorsque les banques ou d’autres institutions financières sont exposées à des entreprises en défaut à travers leurs prêts ou leurs portefeuilles d’actifs. Cela étant, si cette distinction entre ces deux types de risques est souvent opérée, ils sont en réalité étroitement liés. Un renforcement des mesures en faveur du climat peut accroître les retombées du risque de transition à court terme, tout en réduisant l’incidence du risque physique dans les décennies à venir. Le test de résistance au risque climatique de la BCE tient compte de cet arbitrage potentiel et le quantifie, en utilisant un horizon de trente ans permettant de prendre en considération les évolutions de long terme.

Ce test étudie la capacité de résistance des entreprises et des banques dans plusieurs scénarios climatiques. Ces scénarios proposent des représentations plausibles des conditions climatiques à venir, tout en tenant compte également des effets sur les entreprises des mesures prises pour limiter l’ampleur du changement climatique, par exemple les taxes sur le carbone. La BCE se fonde sur les scénarios fournis par le Réseau pour le verdissement du système financier (Network for Greening the Financial System, NGFS) pour élaborer les siens, en les corrigeant pour mieux saisir le lien entre le risque de transition et le risque physique.

Dans le scénario d’une transition ordonnée, le déploiement rapide et efficace de politiques climatiques permet de limiter le réchauffement de la planète. Le scénario de la « Terre étuve » évalue les effets du changement climatique dans le cas où aucune nouvelle politique n’est mise en œuvre : il prévoit une aggravation considérable du risque physique à moyen et long terme. Le scénario d’une transition désordonnée s’intéresse aux effets d’une mise en application tardive et soudaine de politiques climatiques.

Ces scénarios, ainsi qu’un ensemble unique de données qui recensent et quantifient l’exposition au risque de transition et au risque physique de millions d’entreprises, servent de trame à l’analyse des conséquences du changement climatique pour les entreprises et les banques.

Les résultats préliminaires montrent que, en l’absence de nouvelles politiques climatiques, les coûts associés aux phénomènes extrêmes augmentent de manière substantielle pour les entreprises. Ces résultats mettent également en évidence les avantages d’une action rapide : les coûts à court terme de l’ajustement aux politiques « vertes » sont beaucoup moins élevés que les coûts potentiels engendrés par des catastrophes naturelles à moyen et long terme. Le changement climatique est donc une source majeure de risque systémique, en particulier pour les banques détenant des portefeuilles concentrés sur certains secteurs économiques et zones géographiques.

Ces résultats soulignent l’urgente nécessité d’entamer la transition vers une économie plus verte, non seulement pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris, mais aussi pour limiter les perturbations à long terme sur nos économies, nos entreprises et nos moyens d’existence

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La banque centrale européenne (BCE)
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2021
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18/03/2021
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Mars

Le Contrat à Impact Social : Quand l'engagement sociétal prime sur la rentabilité

Soumis par Anonyme le

Il ne s’agit plus seulement d’investir dans des actifs limitant leur impact négatif sur l’environnement et la société, mais de soutenir directement des structures engagées pour l’intérêt général. Si peu d’acteurs bancaires se sont à ce jour mobilisés autour du sujet, l’engagement gouvernemental actuel et l’appel à projets qui vient de s’achever devraient probablement provoquer un regain d’intérêt.

Une structure financière innovante venue du Royaume Uni

Le premier Contrat à Impact Social (CIS) est lancé au Royaume Uni en 2010. Il s’agit pour le gouvernement de faire financer par un investisseur privé un projet associatif innovant sous forme obligataire dont le rendement sera directement indexé au succès du projet. Le CIS se structure autour de quatre acteurs : l’association qui lance le projet (dans un cadre bien établi et notamment avec des indicateurs de performance quantifiables), l’investisseur privé qui avance les fonds, l’instance ministérielle ou gouvernementale (cela peut être un fonds créée spécialement à cet usage – « un Fonds de Paiement au Résultat») qui rémunère l’investissement si les objectifs sont atteints, et un organisme indépendant évaluateur, chargé de mesurer les impacts réels et de chiffrer les résultats. En cas d’échec du projet et si les objectifs définis dans le contrat ne sont pas réalisés, l’investisseur peut perdre l’intégralité de son placement. Par ailleurs, la rémunération en cas de succès correspond à une fraction de l’économie budgétaire réalisée par l’État grâce à l’atteinte des objectifs. En 2010, le Royaume Uni structure le premier « Social Impact Bond » (ou CIS) en lançant un projet portant sur la réinsertion des prisonniers incarcérés à Peterborough. Le budget engagé est de 8M€ et l’objectif vise à réduire de 7.5% la récidive d’une population donnée, entre 2010 et 2015. Les critères de réussite sont largement dépassés : le taux de récidive chute de 9% et les investisseurs, intégralement remboursés, obtiennent un rendement de 3%.

Rapide essor mondial et soutien progressif de l’Etat en France

Forts de ce premier succès, les Britanniques ont rapidement fait aboutir de nombreux projets et d’autres pays, notamment les Etats-Unis, n’ont pas tardé à les imiter. A ce jour, d’après la base de données globales de la plateforme française de l’Impact Invest Lab, on compte 169 CIS dans 31 pays, pour un investissement global de 470 millions de dollars. La France, loin derrière le Royaume Uni et les Etats-Unis, peine à en faire un outil de politique publique à part entière. Un premier appel à projet en 2016 permet de faire émerger les premiers contrats, sur des projets engagés autour d’enjeux sociaux tels que la mobilité, l’insertion professionnelle ou la lutte contre le décrochage scolaire. A ce jour, 9 contrats ont été mis en oeuvre, dont trois ont été financés par BNP Paribas. La banque a fait du CIS une expertise reconnue et cumule les mandats de structureur et investisseur dans 10 contrats à travers le monde. En 2019, le Haut-Commissariat à l’Economie Sociale et Solidaire et à l’Innovation Sociale confie à Frederic Lavenir, président de l’Association pour le Droit à l’Initiative Economique, la mission d’élaborer des recommandations afin de susciter le recours au CIS, de le simplifier et de lancer une dynamique de développement. Dans son rapport, ce dernier identifie plusieurs axes d’opportunités, et propose notamment de donner un cadre institutionnel à la structure financière afin de la rendre plus facilement compréhensible avec l’élaboration d’un contrat « type », mais aussi de créer un centre de compétences et surtout, comme au Royaume Uni, faire preuve d’un engagement volontariste de l’Etat en lançant un « Fonds de paiements aux résultats ».

L’intérêt croissant des investisseurs se heurte à l’enjeu de la valorisation

Dès 2014, dans leur rapport « Choosing Social Impact Bonds », le fonds Bridges Ventures (spécialiste des investissements à impacts et à ce jour investisseur dans 14 CIS) explique que les CIS comportent des originalités qui diffèrent des autres investissements à impact et les rendent particulièrement attractifs. Ils permettent notamment de soutenir des projets entrepreneuriaux qui s’attaquent directement à des problématiques sociales ciblées, mais l’alignement des parties engagées permet d’assurer que l’ensemble des parties prenantes travaille dans la même direction. Par ailleurs, bien qu’en France dans la plupart des CIS, au moins la moitié du montant financé soit conditionné à des objectifs raisonnablement atteignables, il n’en reste un instrument particulièrement risqué. Les investisseurs s’interrogent sur leur rendement potentiel mais aussi plus concrètement sur la façon de valoriser l’actif dans leur portefeuille. D’après un retour d’expérience publié par BNP en décembre 2019, le taux de rentabilité interne maximum des CIS ne dépasse pas les 5,5%, ce qui le rend, si on ne regarde qu’elle, peu attractif face au risque auquel on s’expose. L’émergence de ce type de produit est donc l’illustration d’un réel glissement qui s’opère, vers une vision de la rentabilité qui intègre des critères d’impact.

Si la question du risque demeure un frein important, l’intérêt des clients pour cette typologie de produits est bien présent. Suite aux recommandations du rapport Lavenir en 2019, et à la lumière de nombreuses études conduites dans le monde, le travail réalisé pour clarifier la structure du CIS (l’élaboration du « contrat type ») ainsi que le lancement du « Fonds de paiement aux résultats » (opérationnel depuis le premier trimestre 2020) devraient sans nul doute appuyer le développement des CIS. Les trois appels à projet, dont le premier a été initié fin 2020, illustrent bien l’engagement de l’Etat Français. Ils viendront financer des solutions innovantes sur l’économie circulaire ou encore des innovations venant répondre aux enjeux de l’égalité des chances économiques. D’ici fin 2021, nous devrions pouvoir observer si de nouveaux acteurs bancaires français auront été capables de dépasser la logique seule de rentabilité pour s’engager au service des autres.

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EconomieMatin
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Depuis quelques années en France, l’importance des problématiques durables et environnementales a poussé le développement de la logique responsable au coeur de nombreuses stratégies d’investissement. La création du label ISR (Investissement Socialement Responsable) en 2016 ainsi que la multiplication des supports d’investissements labellisés, illustrent bien le souhait des investisseurs de faire des placements responsables et durables. Dans ce contexte et à l’initiative du gouvernement, le Contrat à Impact Responsable, un mécanisme financier innovant, a émergé dans le paysage économique et social français.

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2021
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12
Date d'édition
12/03/2021
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Mars

Verdir son épargne ? Pas si simple !

Soumis par Anonyme le

Malgré l’intérêt des Français pour les placements verts, peu d’épargnants sautent le pas. La faute à une offre peu lisible pour les particuliers. Revue des obstacles et des raisons d’espérer.

La lutte contre le changement climatique est aussi une affaire de gros sous. Au cours des quinze prochaines années, ce ne sont pas moins de 90 000 milliards d’euros qui devront être investis, au niveau mondial, dans des infrastructures vertes. Si de tels chiffres ont de quoi donner le tournis, de nombreux épargnants aimeraient apporter leur obole à cet effort planétaire.

Selon une enquête menée en 2018 par le FIR (Forum pour l’investissement responsable), six Français sur dix désirent que leur épargne ait un impact social ou environnemental et la lutte contre le changement climatique apparaît comme une de leurs priorités. Pourtant, à l’arrivée, l’épargne verte demeure une forme de placement très minoritaire.

Certes, on observe année après année une progression régulière des placements verts accessibles aux particuliers. Lorsqu’ils souscrivent à une formule d’assurance-vie, les épargnants se voient de manière croissante proposer d’allouer une partie de leur cagnotte à un type d’investissement « durable » ou « responsable », c’est-à-dire respectant des critères sociaux et environnementaux. Parfois, ils épargnent « vert » sans même le savoir, comme lorsqu’ils optent pour un plan d’épargne salariale, une formule souvent caractérisée par une gestion durable des placements.

Dans son indicateur de juin 2020, l’agence Novéthic dénombrait 797 fonds durables accessibles aux épargnants, gérant un total de 315 milliards d’euros, soit une quasi-multiplication par deux... en un an. Pourtant, aussi spectaculaire soit-elle, cette dynamique doit être mise en regard avec un chiffre têtu : l’épargne gérée par les fonds durables représente à peine 6 % de l’épargne totale des Français (environ 5 500 milliards d’euros au troisième trimestre 2020).

Des placements encore marginaux

Comment expliquer ce hiatus ? Ecartons tout de suite une première hypothèse : les placements verts ne souffrent pas d’une rentabilité inférieure à celle des fonds classiques. On pourrait croire en effet qu’en prenant en compte des critères extra-économiques, comme la limitation des émissions de dioxyde de carbone ou la qualité de l’eau, les fonds durables se condamneraient à des performances financières moindres. Il n’en est rien. Selon Novéthic, ils obtiennent en effet des rendements comparables, voire supérieurs à ceux du marché. Ainsi les fonds spécialisés dans la gestion d’actions d’entreprises affichaient, en 2019 « une performance moyenne de + 28 %, supérieure à celle du CAC 40 (+ 26 %) ».

Ce résultat est au demeurant plutôt logique. Si les fonds durables ne considèrent que les entreprises ou les titres de dette satisfaisant un certain nombre de critères sociaux et/ou environnementaux, leur stratégie d’investissement est ensuite comparable à celle des autres gestionnaires. Ils composent des portefeuilles d’actions (pour 49 % des encours), d’obligations (18 %, dont une partie d’obligations vertes) et même de titres dits monétaires (27 %), tels que des bons du trésor. Puis ils gèrent ces portefeuilles de façon à obtenir des performances compétitives.

C’est d’ailleurs à ce niveau que réside une seconde explication du relatif désamour des épargnants pour les placements verts : dès lors qu’on entrevoit les coulisses des fonds durables, il n’est pas si évident de les distinguer de la finance classique. « Tant qu’il existe un grand écart entre les attentes des épargnants et les offres de la finance réelle, il n’est pas étonnant que la mayonnaise ne prenne pas », observe un expert de WWF France.

A cela s’ajoute une certaine incapacité des chargés de clientèle à présenter clairement les enjeux et les vertus des produits d’épargne verte, lorsqu’ils sont offerts. En 2018, le WWF a demandé à un pool de bénévoles de réaliser une sorte de blind test auprès de leur conseiller en matière d’épargne. Près des deux tiers de ces derniers se sont révélés incapables de répondre précisément à des questions telles que « quel est l’impact de mon épargne sur le changement climatique ? » ou « y a-t-il une garantie que les investissements seront bien dirigés vers des activités vertes ? »

Sans compter que les placements « durables » proposés par les banques ou les assurances se heurtent à un soupçon récurrent de « greenwashing ». Par-delà des positionnements marketing destinés à surfer sur les préoccupations écologiques croissantes de leurs clients, comment s’assurer que les institutions financières respectent effectivement leurs engagements ?

Il faut dire que le terme « durable » s’avère parfois éminemment trompeur. L’association Attac a ainsi lancé la campagne #pasavecnotreargent pour dénoncer l’utilisation des fonds recueillis avec les LDDS (livret de développement durable et solidaire), l’une des formules d’épargne prisées par les Français, dont rien ne garantit dans les faits qu’ils sont fléchés vers des activités « durables » ou « solidaires » (gérée par la Caisse des dépôts et consignations, l’épargne recueillie par LDDS finance à 80 % des PME, sans discrimination d’activité ou de modes de gestion).

Et si les grandes banques françaises proclament leur engagement pour la planète, Oxfam France a calculé l’impact climatique des entreprises qu’elles financent, concluant que leurs portefeuilles engendraient un monde à + 4 °C en 2100.

Un déficit de lisibilité

S’il partage le constat d’un déficit de lisibilité des placements durables, Grégoire Cousté, délégué général du Forum pour l’investissement responsable (FIR), perçoit des évolutions positives. « Des efforts ont été menés sur le plan du marketing pour rendre accessibles les offres vertes ou durables aux épargnants, constate-t-il. C’est le cas par exemple avec le développement de fonds thématiques. Prenons les fonds "eau", voilà un type de produit facile à construire : il s’agit d’un investissement concret, qui fait sens pour l’épargnant et est en plus associé à un bon rendement. »

La particularité des fonds thématiques est de se focaliser sur une problématique de nature environnementale ou sociale. Certains proposent ainsi d’investir dans des entreprises attentives à des enjeux sociaux comme l’égalité femmes-hommes, d’autres dans le développement des énergies renouvelables ou l’efficacité énergétique.

Le secteur de l’eau émerge effectivement comme une thématique phare, poussée par des acteurs comme le fonds suisse Pictet-Water, la Banque Postale ou encore le fonds BNP Paribas Aqua, qui draine à lui seul près de 3 milliards d’euros vers des entreprises consacrant au moins 20 % de leur chiffre d’affaires au marché de l’eau. Ces fonds s’attachent généralement à développer une offre d’eau « durable », luttant contre le gaspillage et garantissant la production d’une « eau de qualité ».

Les fonds thématiques représentent au total un quart des fonds durables recensés par Novéthic et, parmi eux, ceux dédiés aux enjeux environnementaux se taillent la part du lion (102 sur 207).

En France, une des dispositions de la loi Pacte devrait contribuer à réduire le déficit de lisibilité de l’épargne verte. Dès 2022, les chargés de clientèles seront tenus de proposer à leurs clients de consacrer une partie de leur épargne à des placements durables, lesquels devront être certifiés par l’un des deux labels reconnus en France : ISR et Greenfin.

Les angles morts de la labellisation

Si elle contribue aussi à la lisibilité de l’offre d’épargne durable, la labellisation des placements a un rôle autrement plus important à jouer : celui de garantir que les investissements respecteront bien les critères écologiques et sociaux annoncés. Une ambition qui se heurte à plusieurs limites.

Créé formellement en 2016, le label ISR (investissement socialement responsable), est l’aboutissement de plusieurs décennies d’engagement autour de la « responsabilité sociale des entreprises ». Cette notion conjugue des enjeux tels que le respect des droits salariaux ou l’égalité hommes-femmes, à la problématique du développement durable et de la lutte contre le changement climatique. Selon la définition retenue, « l’ISR est un placement qui vise à concilier performance économique et impact social et environnemental en finançant les entreprises qui contribuent au développement durable dans tous les secteurs d’activité ».

En raison de son histoire, axée sur la promotion de normes de management « éthiques », l’ISR est une culture d’accompagnement et d’intervention auprès des entreprises. Il en découle des critères de sélection des placements parfois contestés. Certains promoteurs de la finance verte aimeraient s’en tenir à un critère « best in universe », consistant à scruter l’ensemble des entreprises, tous secteurs confondus (depuis l’isolation naturelle des bâtiments jusqu’à la prospection pétrolière), et sélectionner, par exemple, celles présentant la meilleure performance en matière d’émission de dioxyde de carbone. Une telle approche conduit mécaniquement à exclure tous les secteurs bruns de l’économie, pour ne financer que les activités vertes.

Engagement actionnarial

Les tenants de l’ISR mettent cependant en avant d’autres critères, à leurs yeux tout aussi pertinents.

Le « best in class » consiste à choisir non pas les plus écologiques de l’échantillon, mais les entreprises qui au sein de chaque secteur sont les plus performantes en matière d’émission carbone. Légèrement distinct, le « best effort » se porte de son côté sur les sociétés qui, quel que soit le secteur, œuvrent le plus pour améliorer leur trajectoire d’émission. C’est à l’aune de ces deux critères que, au grand dam de certains observateurs, des fonds ISR peuvent décider de financer des entreprises pétrolières au bilan carbone par essence peu flatteur.

Un tel choix peut aller de pair avec des stratégies d’engagement actionnarial, consistant à intervenir auprès de la direction des entreprises ou à voter au sein des conseils d’administration pour faire avancer des orientations stratégiques alignées sur les objectifs climatiques.

L’entreprise américaine Exxon en a fait l’expérience, en 2017, lorsque ses actionnaires ont voté en assemblée générale une motion la mettant en demeure de proposer des stratégies compatibles avec les accords de Paris. Plus récemment, Total, après deux ans de pression de la part d’une coalition d’actionnaires (Climate action +100), a réorienté sa stratégie vers un objectif de neutralité carbone.

Des stratégies claires de désinvestissement

Bref, l’ISR considère qu’il ne faut pas seulement désinvestir du brun, mais l’aider à devenir plus vert. Une stratégie remise en cause par certains promoteurs de la finance verte, qui misent plutôt sur un désinvestissement massif et rapide de toutes les activités polluantes.

C’est l’approche adoptée par le label Greenfin (anciennement TEEC). Créé dans la foulée des accords de Paris de 2015, il est spécifiquement dédié à la certification de la finance verte. Il s’appuie sur une méthodologie bien plus sévère pour sélectionner les investissements, fondée sur une nomenclature d’activités éligibles.

Celle-ci retient huit secteurs contribuant à la transition énergétique et à la lutte contre le changement climatique, dont l’énergie, le bâtiment, le contrôle des déchets, le transport propre ou l’adaptation au changement climatique… Sont explicitement exclus certains secteurs, à commencer par toute la filière des énergies fossiles, ainsi que celle du nucléaire, mais aussi les entreprises qui consacreraient plus de 33 % de leur chiffre d’affaires à des activités comme l’incinération sans récupération d’énergie ou l’enfouissement de carbone sans récupération de gaz à effet de serre.

Last but not least, le label Greenfin édicte des normes de gestions financières, notamment une rotation limitée des valeurs au sein du portefeuille… avec toutefois une marge de tolérance.

Vers un label européen ?

En raison de sa jeunesse, mais aussi parce que ses critères sont beaucoup plus drastiques, le label Greenfin certifie un nombre beaucoup plus modeste de fonds durables : à peine 21 fonds accessibles aux épargnants. A comparer avec les 358 fonds ISR, soit la moitié des fonds durables recensés par Novéthic.

En revanche, la méthodologie du label Greenfin est la plus en accord avec les travaux actuellement menés par la Commission européenne pour créer un écolabel dans le domaine de l’épargne verte, en appliquant à la finance ce qui existe pour les biens de consommations courants. Fondé lui aussi sur une taxinomie d’activités éligibles, ce premier label européen pourrait devenir la référence au niveau continental.

Cette évolution n’enchante pas tout le monde. « Avec les critères retenus par le label Greenfin, seules 300 valeurs sont éligibles au niveau mondial, essentiellement des entreprises intermédiaires, en phase de croissance, donc plus risquées pour l’épargnant, pointe Grégoire Cousté. La méthode des écolabels conduit généralement à orienter les consommateurs vers les 10 % d’entreprises les plus qualitatives d’un marché. Appliquée à la finance verte, il est à craindre que cette part soit bien plus modeste. »

Le délégué général du FIR plaide d’ailleurs pour un label unifié qui comporterait plusieurs paliers de « verditude », avec, tout en bas, des fonds monétaires (portefeuilles de dettes publiques ou de bons de trésoreries d’entreprises), puis un dégradé de fonds ISR, pour culminer avec la liste restreinte des activités les plus respectueuses du climat.

D’autant que les labels actuels ne résolvent pas entièrement les problèmes de lisibilité des placements durables pour l’épargnant lambda. Qu’il soit labellisé Greenfin ou ISR, un fonds peut fort bien détenir des actions d’une entreprise automobile ou d’un transporteur (deux activités éminemment carbonées), parce que la « part verte » de son activité est supérieure au seuil recevable. Et défendre la notion d’engagement actionnarial et son efficacité auprès d’entreprises pétrolières n’est pas non plus des plus aisés au moment de présenter un produit d’épargne.

« Si on veut parler à l’épargnant, il faut des indicateurs clairs et simples à comprendre, estime Grégoire Cousté. On n’y est pas encore. Certains outils commencent à émerger pour mesurer la température d’un portefeuille de titres [autrement dit l’augmentation de température à laquelle il conduirait en 2100]. C’est une piste à creuser. »

Beaucoup restent à faire pour permettre à l’épargnant de se repérer dans les arcanes de la finance verte. Sans compter que cette dernière butte elle-même sur ses propres goulots d’étranglements. « On aura beau développer les placements verts, indique-t-on à WWF France, tant que l’économie réelle n’aura pas basculé vers un sentier bas carbone, la part de la finance verte demeurera limitée. »

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Malgré l’intérêt des Français pour les placements verts, peu d’épargnants sautent le pas. La faute à une offre peu lisible pour les particuliers. Revue des obstacles et des raisons d’espérer.

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République Tchèque : une monnaie spéciale Covid pour relancer l'économie ?

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Ecolabel européen : le groupe d’experts peaufine les critères d’attribution

Soumis par Anonyme le

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Pétrole, aéroports, transport maritime… l’acte délégué sur la taxonomie européenne réserve quelques surprises

Soumis par Anonyme le
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