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Le crédit aux plus démunis profite aux mieux nantis !

Soumis par Anonyme le

Banco Compartamos

Banco Compartamos est une institution de microfinance mexicaine créée en 1990 grâce à des subventions variées. Le 20 avril dernier, elle a lancé une offre publique de vente de 30 % de son capital. Cette offre a été souscrite 13 fois, ce qui peut être considéré comme un succès important sur tout marché financier.1 La demande n’ayant pas pu être satisfaite, le prix des actions, a grimpé jusqu’à atteindre 22 % de hausse dès le premier jour d’échange. Les actions ont finalement été achetées par les gestionnaires de fonds internationaux habituels et d’autres investisseurs commerciaux. Le succès de cette offre est lié à divers facteurs : la croissance et la rentabilité exceptionnelles de Compartamos, une pénurie d’investissements mexicains sur les marchés émergeants, une valeur rare, une gestion solide de l’organisation et l’intérêt suscité par la microfinance. En ce qui concerne la rentabilité, Banco Compartamos génère des profits importants (rendement de 56 % sur les fonds propres) grâce aux taux d’intérêt élevés qu'elle pratique, qui dépassent 100 %, c'est-à-dire des taux intérêts qui sont considérablement supérieurs à ce dont la banque a besoin pour couvrir ses coûts.2

Selon Standard & Poor’s, l’une des trois principales société de notation financière, les plus de 15 milliards de dollars de microcrédits actuellement recensés sont dérisoires par rapport au potentiel, qui est, lui, de l’ordre de 150 milliards de dollars3. En septembre, Standard & Poor’s prévoit d'ailleurs de définir de nouvelles normes mondiales et devrait noter environ vingt organismes de microcrédits, mesure demandée par les fonds de pension et autres, pressés de toucher les rendements alléchants que peut offrir ce segment.

Un autre aspect de cet engouement est la titrisation des crédits, c'est-à-dire l'émission de titres représentant une société spécialement créée pour acheter le portefeuille de crédit d'un organisme prêteur. De cette manière, l’investisseur acquiert en quelque sorte une fraction du portefeuille de crédits, avec le rendement mais aussi les risques liés à celui-ci. En mai dernier, la banque d'investissement Morgan Stanley a ainsi titrisé des petits crédits accordés par une douzaine d’organismes à but lucratif – valeur totale : 108 millions de dollars – en un titre négociable rapportant jusqu’à 7,7 %. Et, annonce Standard & Poor’s, deux autres poids lourds de l’industrie devraient eux aussi se jeter à l’eau cette année, en offrant 500 millions de dollars au total en titres.

Les rendements sur fonds propres élevés qu'espèrent les investisseurs suscitent l’intérêt des grands noms du capital risque. En mars, la société Sequoia Capital, qui finance des entreprises comme Google et YouTube, s’est jetée sur une participation de 11,5 millions de dollars dans SKS Microfinance, basée à Hyderabad, en Inde. Depuis sa fondation en 1998, SKS a accordé des prêts à 731 000 Indiens, à des taux allant de 24 à 30 %.4

Crise des subprimes

La « crise des subprimes » que nous avons connue cet été a, quant à elle, été provoquée par un krach des prêts hypothécaires à risque aux Etats-Unis : les subprimes. Aux Etats-Unis, les banques et assurances classent leurs clients en non-primes, primes et subprimes selon les risques estimés de défaillance de l’emprunteur ; les subprimes étant les plus potentiellement défaillants. Les subprime mortgage sont donc des prêts hypothécaires censés permettre à de petits salariés, voire à des chômeurs, de devenir propriétaires. Ces crédits sont accordés par des institutions financières de moins en moins regardantes sur le profil de l’emprunteur. Ils ont un taux d’intérêt très élevé, de 4 à 5 points supérieur au taux normal (prime de risque), et variable en fonction de l’évolution des taux de la Réserve fédérale américaine. Leur remboursement se fait souvent suivant la règle du 2 28 : deux ans de remboursements très faibles, puis 28 ans à pleine charge. Les montages financiers permettent parfois de prêter jusqu’à 110 % de l’acquisition.

Ces prêts ont connu un grand succès lié au fait que le taux directeur de la Réserve fédérale américaine était très faible. Mais ce taux s'est mis à augmenter : il est passé de 1 % en 2004 à plus de 5 % en 2007. Une hausse des taux longs s'en est suivie, qui a entraîné une augmentation des montants de remboursement, et certains ménages ont commencé à ne plus pouvoir faire face à leurs dettes. Près de 1,2 million de prêts immobiliers ont fait défaut en 2006 aux Etats-Unis, soit une augmentation de 42 % par rapport à 2005, avec bien sûr pour conséquence immédiate et dramatique la mise en vente des logements.5

Par ailleurs, à partir de 2006, le marché immobilier américain est entré dans une crise, faisant baisser les prix des logements. Dans ce contexte, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur n'arrive plus à recouvrer la totalité de sa créance en revendant le bien immobilier. A la faillite personnelle des emprunteurs s'est donc ajoutée une série de graves difficultés financières pour les prêteurs et certains de leurs banquiers.

La combinaison des deux facteurs a conduit à une crise financière internationale. En effet, des titres représentatifs de ces subprimes se sont négociés sur le marché des prêts hypothécaires et la crise connue par les prêteurs s'est répercutée sur les marchés financiers dès que les créances douteuses ont été révélées par les organismes prêteurs.

Conclusions

Ces deux exemples, par ailleurs très différents, montrent deux choses : d'une part, l'activité de crédit peut générer des revenus très élevés grâce à des taux d'intérêt d'usuriers car les pauvres n'ont souvent pas d’autre solution et, d'autre part, les marchés de capitaux s’intéressent très sérieusement à ce marché des crédits aux pauvres, au moins pour spéculer sur la période durant laquelle ceux-ci sont encore en capacité de rembourser.

Car c'est là que se situe le problème. Aux Etats-Unis, au Mexique ou partout ailleurs dans le monde, les individus et ménages à revenus modestes n'accèdent pas au crédit classique, soit parce qu'il n'existe pas d'institution financière pour les servir, soit parce qu'ils ont un profil jugé trop risqué ou simplement insuffisamment évaluable. Pour eux, l'alternative se pose souvent en ces termes: ne pas bénéficier d'un crédit, alors qu'il s'avère parfois indispensable pour lancer ou soutenir une activité professionnelle ou tout simplement pour faire face à un aléa de la vie, soit accepter, quand cette faculté existe, des conditions à ce point exorbitantes qu'elles portent bien souvent en elles-mêmes les germes de la défaillance de l'emprunteur.

En d'autres termes, la fragilité – objective – dans laquelle se trouve l'emprunteur est exploitée de manière éhontée par des prêteurs sans scrupules qui, par les marges qu'ils entendent se réserver, renforcent encore cette fragilité, quand ils n'anéantissent tout simplement pas des existences. Selon les études de l'Institut français de Pondichéry, le microcrédit a entraîné en Inde des vagues de suicides chez les paysans.6

Sont ainsi posées à la fois les limites d'une finance fondée sur la maximisation du profit et la nécessité corrélative pour les institutions qui veulent fournir un crédit adapté aux populations précarisées de mobiliser l'épargne solidaire plutôt que de courir vers le marché des capitaux. Cette épargne solidaire, qui place le souci de cohésion sociale avant celui du rendement, est en effet la seule qui permette de répondre à des besoins réels de financement de personnes ou de groupes pour sortir de la précarité, de favoriser l’émergence d’activités nouvelles rencontrant des difficultés de financement auprès des banques classiques (environnement, éducation, action sociale, etc., particulièrement sur le plan local) et de faire la preuve que l’économie peut être utilisée de façon plus humaine et plus au service des hommes. Est enfin posée à l'épargnant la question de ses choix d'investisseur, y compris de ses choix par défaut – ou par cécité serait-il plus exact d'écrire – lorsqu'il se complaît dans l'ignorance dans laquelle le berce sa banque quant à l'utilisation des fonds qui lui sont confiés.

2 Richard Rosenberg, Réflexions de CGAP sur la première offre publique de vente de Compartamos : Une étude de cas sur les taux d’intérêts et les profits de la microfinance, CGAP/The World Bank, Washington, D.C.

3 Standard & Poor’s, Report Of The Microfinance Rating Methodology Working Group, 19 juin 2007.

4 Keith Epstein, avec Geri Smith à Mexico et Nandini Lakshman à Hyderabad, « Les grands de la finance jouent le microcrédit », Business Week, 13 juillet 2007

5 Michel Lasserre, Crise des crédits immobiliers "subprime" et turbulences financières mondialisées, http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=5368

6 Jean-Michel Servet, « Le microcrédit n'est pas un levier fort du développement », Libération, 21 mars 2007; Banquier aux pieds nus, Editions Odile Jacob, 2006.

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Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
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Les plus démunis, s'ils veulent accéder à du crédit doivent passer sous les fourches caudines de conditions de prêt - notamment de taux d'intérêt - abusives. Les mieux nantis, qui disposent du capital, en retirent des profits éhontés, quand ils ne spéculent pas froidement sur la probable période durant laquelle l'emprunteur restera en capacité de rembourser, pour revendre le crédit avant qu'il ne fasse dé- faillance. Cette description peut apparaître comme une mauvaise caricature. L'actualité récente, en particulier l'offre publique de vente de Banco Compartamos et la crise des subprime mortgage aux Etats-Unis, semble toutefois lui donner les traits d'une triste et inquiétante réalité.

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Année d'édition
2007
Jour d'édition
24
Date d'édition
24/08/2007
Mois d'édition
Août

Hypothèque inversée : du crédit à la consommation garanti par une hypothèque ?

Soumis par Anonyme le

Contexte politique et social

Peu après une annonce du ministre de l'Économie, dans laquelle ce dernier a présenté l'hypothèque inversée comme pouvant répondre à un besoin réel en raison du vieillissement de la population, des représentants de l'industrie du crédit ont notamment réagi en organisant le 8 mai 2007, via le Forum financier belge, un colloque sur « le crédit logement inversé ». En juin, l'Union professionnelle du crédit éditait un feuillet d'information sur ce thème1, envisageant les adaptations nécessaires du cadre légal pour son introduction en Belgique.

A priori, en effet, compte tenu de certains traits de la société belge, ce type de produit pourrait rencontrer les besoins d'un public précis : les personnes âgées, propriétairesà tout le moins de leur logement, qui souhaitent continuer d'y vivre et dont le pouvoir d'achat est insuffisant pour couvrir leurs besoins courants.

Principales caractéristiques

Sous des vocables variés « crédit-logement inversé », « prêt viager hypothécaire », « hypothèque inversée »2, se cache un produit financier dont les caractéristiques principales procurent au client :

  • la disposition d'une somme d'argent, en un versement ou sous la forme éventuelle d'une rente ;
  • le maintien de son droit de propriété sur l'immeuble, en ce compris le droit de jouissance, pour autant qu'il y ait eu constitution d'une hypothèque ;
  • la possibilité de lier généralement le remboursement du crédit à la survenance d'un événement particulier, le décès ou la vente de l'immeuble.

La mise à disposition d'une somme d'argent pourra prendre des formes variées :

  • montant versé en une fois ;
  • montant versé sous la forme de versements réguliers pendant une période déterminée, dont la fréquence sera le plus souvent mensuelle.

Une variante de cette formule est également possible lorsque la durée n'est pas prédéterminée, mais correspond à la période d'occupation effective de l'immeuble hypothéqué (en anglais « tenure »);

  • montant versé à la demande (à l'instar d'une ouverture de crédit), à concurrence du montant maximum prédéterminé.

En matière de remboursement, ce crédit peut prévoir que le montant emprunté et le coût du crédit deviennent exigibles soit :

  • au moment du décès ou de la vente de l'immeuble hypothéqué (le contrat est alors à durée indéterminée) ;
  • au terme d'un certain délai déterminé contractuellement (20 - 25 ans, contrat à durée déterminée).

Conditions envisagées par l'Union professionnelle du crédit (UPC)3

  • Puisque le remboursement du montant prêté et le paiement du coût du crédit seront a priori couverts par la réalisation de l'immeuble, l'analyse de solvabilité du client n'a pas d'importance (principe de capitalisation des intérêts). Dès lors, plus jeune sera le senior, moins grand sera le capital.
  • Une inscription hypothécaire en premier rang est prise sur le bien immobilier pour la valeur entière du bien immobilier (résidence habituelle / autre habitation).
  • L'emprunteur agit exclusivement/principalement dans un but pouvant être considéré comme étranger à ses activités commerciales, professionnelles ou artisanales.
  • Mentions particulières dans l'offre de crédit – Ajout d'un tableau illustratif de libération des fonds (évolution de l'augmentation de la dette sur une période forfaitaire de 20 ans).
  • L'emprunteur, qui a accepté l'offre de crédit avant la passation de l'acte, a le droit de renoncer au contrat de crédit jusqu'à la passation de l'acte.
  • Un expert indépendant évalue la valeur du bien immobilier.
  • Conseil indépendant par le notaire préalablement à la passation de l'acte (Loi Ventôse). Les héritiers peuvent y être associés.
  • Compensation dans les cas où l'emprunteur reste en défaut de prélever le capital.
  • Indemnité de remploi spécifique dans la mesure où il y a plus d'interventions, de contrôles et d'estimations dont l'emprunteur pourrait déroger.
  • L'emprunteur a l'obligation d'entretenir soigneusement le bien immobilier grevé d'une hypothèque et de le traiter en bon père de famille, afin que la valeur du bien immobilier évolue normalement (contrôle périodique par l'expert). La prime d'assurance d'incendie et l'impôt sur l'immobilier doivent être payés à temps.
  • À la fin du crédit, un choix s'impose. Soit la famille veut garder le bien et elle paye la dette finale du crédit (qui sera toujours plafonnée à la valeur de la maison). Soit la dette finale n'est pas payée et la maison est vendue. Si la vente rapporte plus que la dette finale, le surplus reviendra à la famille.

Les éléments positifs

Par rapport à une vente viagère :

Pour les personnes qui envisagent une vente viagère, la formule présente une série d'avantages non négligeables :

  • maintien du droit de propriété : en cas de décès prématuré, seuls le montant réellement prélevé et les intérêts échus sont redevables. Les héritiers peuvent les prendre en charge sans devoir obligatoirement mettre en vente l'immeuble hypothéqué ;
  • la formule viagère ne prévoit qu'une seule modalité de versement du montant : un montant déterminé versé périodiquement;
  • la rente viagère est généralement moins élevée lorsque le vendeur souhaite continuer à occuper le logement.

C'est très probablement dans ces circonstances particulières (alternative à la vente viagère) que le produit semble le plus pertinent.

En complément du pouvoir d'achat des seniors :

Compte tenu des évolutions démographiques, du prolongement de l'espérance de vie, des coûts croissants de certains soins de santé et d'un système de pension fragile dans ces circonstances, le public potentiel existera réellement. Ce crédit pourrait sensiblement améliorer le quotidien de certains seniors à moins que des solutions politiques soient trouvées pour maintenir un pouvoir d'achat raisonnable et un accès peu coûteux aux soins de santé.

En outre, face à une réduction du niveau général des solidarités intergénérationnelles, qui s'explique à la fois par un changement dans les relations et les mentalités, mais aussi parfois à cause de la réduction du pouvoir d'achat des plus jeunes. Ce type de crédit permet de compenser l'absence de transferts de fonds intrafamiliaux des plus jeunes vers les plus âgés par une réduction du volume du patrimoine transmis des plus âgés vers leurs héritiers.

Une conjoncture économique favorable4

  • Les taux élevés de propriétaires occupants5 : dans un nombre croissant de pays, et, en particulier, dans le nôtre, la part de la population propriétaire de sa résidence dans la population totale est particulièrement élevée.
  • Le marché immobilier en forte croissance6 : la valeur des biens immobiliers s’est accrue de manière importante et cette plus-value tend à se maintenir7.
  • Les taux d’intérêt faibles : la conjoncture est basse depuis de nombreuses années et les taux auxquels sont consentis les prêts destinés à financer le logement sont inférieurs à ceux appliqués aux autres formes de crédit à la consommation.

Les questions pendantes...

Aspects légaux

Si le crédit envisagé prend la forme d'une ouverture de crédit à durée indéterminée, l'hypothèque peut être affectée à la garantie des dettes futures (les montants prélevés) : sur cet aspect, il ne semble pas que la loi belge s'oppose à sa mise en oeuvre.

Mais la question de savoir si ce crédit relèvera de la loi relative au crédit à la consommation ou plutôt à celle du crédit hypothécaire reste ouverte. Comment qualifier un crédit dont la finalité première est la consommation quotidienne ? Les cas où ce type de crédit sera utilisé pour rénover ou transformer l'immeuble hypothéqué soulèvent évidemment moins la question.

Aspects socio-économiques

On peut aussi s'interroger sur les bienfaits d'un crédit consommation qui s'octroie « sur garantie », compte tenu de l'impact que cela peut avoir sur la transmission patrimoniale. Cela peut être source de tensions familiales et il serait utile d'envisager les modalités de publicité à l'attention des héritiers.

Les éléments positifs du contexte économique précédemment cités ne sont pas éternels : l'accès à la propriété (coût / financement / pouvoir d'achat) sera-t-il dans le futur aussi bon qu'il l'a été par le passé ? Si, jusqu'ici, la classe moyenne a pu accéder largement à la propriété, sera-ce encore le cas pour les générations futures ? Il serait nécessaire de vérifier qu'un tel produit ne favorise pas à long terme l'appauvrissement net des familles aux revenus modestes.

Dans certaines circonstances, en effet, il existe également un risque de surendettement de l'emprunteur ou de ses héritiers. On constate en effet dans les pays où ce type de crédit est commercialisé (États-Unis, Royaume-Uni ...) que les emprunteurs sont de plus en plus jeunes. Dès lors, la période sur laquelle le coût du crédit se calcule est plus grande et majore d'autant ce dernier. Si, dans le même temps, la valeur du bien hypothéqué n'a pas évolué aussi favorablement (marché immobilier, niveau d'entretien du bien, performance énergétique), il est possible que la valeur vénale du bien soit inférieure aux remboursements à opérer, et puisse être source de difficultés financières pour les héritiers... Inutile de rappeler que ces circonstances ont présidé à certains des drames sociaux générés par la crise des sub-primes.

La stabilité des taux d'intérêt faibles ou encore la croissance du marché immobilier sont quant à eux beaucoup plus volatiles encore...

Conclusion - recommandations

L'apparition d'un tel produit sur le marché n'est donc pas anodine et mérite à tout le moins un encadrement adapté.

Afin d'éviter les risques de surendettement évoqués, une mesure déjà en vigueur aux États-Unis permet notamment de limiter la créance résultant du crédit, soit à la valeur vénale, soit au produit de la vente du bien hypothéqué. Dans ces cas, les dettes nées du crédit s'éteignent en toute hypothèse à la vente de l'immeuble.

Il est également possible d'aller plus loin en envisageant de limiter le montant emprunté à maximum 50 % de la valeur vénale. Dans cette configuration, on ménage à la fois la possibilité d'améliorer son pouvoir d'achat sans compromettre toute transmission patrimoniale : une voie intermédiaire, donc.

Le plus inquiétant dans la proposition de l'UPC est la volonté manifestée, pour mettre en oeuvre le produit imaginé, de lever l'interdiction de capitalisation des intérêts. Le cadre légal actuel s'y oppose8, et les conditions dans lesquelles elle peut s'opérer sont définies par l'article 1154 du Code civil (elles relèvent de l'ordre public économique). Il est fondamental que les intérêts ne puissent être calculés que sur le capital prélevé, sans souffrir aucune forme d'exception telle que la capitalisation des intérêts débiteurs. Ceci impacterait gravement la protection du consommateur telle qu'elle existe à ce jour et rendrait complexes la compréhension et la comparaison du coût du crédit.

Enfin, nous retiendrons comme bonne pratique le passage prévu des candidats clients9 devant un service-conseil professionnel et indépendant (type ASBL) afin que leur soient présentés les avantages et inconvénients de la formule ainsi que des simulations adaptées à leur situation personnelle.

1 « Le crédit-logement inversé », Union professionnelle du crédit, 2007

http://www.upc-bvk.be/documents/public/Cr%C3%A9ditlogement%20invers%C3%A9%20(feuillet%20d'information)%20v3.pdf

2 Cette dernière dénomination est calquée sur le terme anglais « reverse mortgage »

3 Op. cit.

4 « Le prêt viager hypothécaire:analyses et réflexions », Échos du Crédit et de l'Endettement, nº 14,

5 Taux de ménages propriétaires : 74,4 %; sans prêt à rembourser : 37,5 %; avec prêt à rembourser : 36,9 %. Source : DG Statistique et information économique – Enquête sur le budget des ménages 97/98.

6 Entre 2000 et 2006, le prix de vente moyen des maisons d’habitation ordinaire a augmenté de plus de 86 %, alors que celui des appartements a augmenté de plus de 75 %. Source : DG Statistique et information économique

7 Si elle venait à se résorber, voire si la valeur des biens immobiliers tendait à diminuer, la vente viagère pourrait davantage tenter les consommateurs âgés.

8 Art. 10 de la loi du 4 août 1992 et l'art. 14, §2, 5ème alinéa, de la loi du 12 juin 1991.

9 « Le prêt viager hypothécaire ou hypothèque inversée : une solution au financement des retraites et de la dépendance? » ,mémoire de T. Dubocage – promotion 2005 CHEA, p. 7

lien : http://www.silverlife-institute.com/uploaded_files/docs/rapportreversefr_1137753264.pdf

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Effet d'annonce ou projet réel, depuis quelques mois, l'industrie du crédit réfléchit aux conditions de mise en oeuvre de ce nouveau type de crédit en Belgique. De quoi s'agit-il ? À qui ce type de crédit s'adresse-t-il? Quels dangers recèle-t-il ? Éléments de réponses

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Année d'édition
2007
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09/2007
Mois d'édition
Septembre

Centrale des crédits aux particuliers : premier pas vers un crédit responsable ?

Soumis par Anonyme le

Éléments de contexte

L'analyse de la solvabilité des demandeurs de crédit fait partie intégrante de l'analyse risque mise en place par les prêteurs, dans la phase pré-contractuelle... ou devrait en tout cas toujours en faire partie. Dans les précédentes analyses réalisées par le Réseau Financement Alternatif relatives au Credit scoring, nous avons vu que l'analyse de fiabilité des demandeurs doit somme toute être complétée d'une analyse de solvabilité.

C'est notamment dans cette optique que le législateur a décidé, pour renforcer la qualité de l'information dont dispose les prêteurs, de mettre en place la Centrale des Crédits aux Particuliers.

Quelle place, quelle efficacité peut-on attendre de la tenue de ce fichier dans une pratique responsable du crédit ? Avant d'entrer dans le vif du sujet, présentons brièvement le cadre légal relatif à l'analyse de la solvabilité dont les prêteurs doivent s'acquiter.

Eléments législatifs 1

La loi précise les obligations préalables à la conclusion du contrat et à charge du prêteur, de l'intermédiaire de crédit et de l'emprunteur :

  • le prêteur et l'intermédiaire de crédit doivent, avant de solliciter ou d'octroyer un crédit, vérifier la situation financière et les engagements financiers du candidat emprunteur et s'assurer de sa solvabilité, de ce qu'il aura la possibilité d'assumer les obligations résultant du contrat de crédit envisagé et, en particulier, de ses facultés de remboursement (articles 10, alinéa 1er, et 15 de la loi du 12.06.1991) ;
  • à cet effet, le prêteur doit consulter la Centrale des Crédits aux Particuliers (article 9 de la loi du 10.08.2001) et le prêteur et l'intermédiaire de crédit doivent recueillir tous les renseignements exacts et complets qu'ils jugent nécessaires (article 10, alinéa 1er de la loi du 12.06.1991) ;
  • le candidat emprunteur doit répondre de manière exacte et complète aux demandes de renseignement qui lui sont adressées par le prêteur et l'intermédiaire de crédit ;
  • le prêteur et l'intermédiaire de crédit doivent rechercher, parmi les produits qu'ils offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant de crédit les mieux adaptés compte tenu de la situation du candidat emprunteur au moment de la conclusion du contrat de crédit et du but du crédit (article 11, 2°, de la loi du 12.06.1991) ;
  • le prêteur doit vérifier les données d'identification du candidat emprunteur sur base de sa carte d'identité (article 17 de la loi du 12.06.1991).

Avant de poursuivre, il est utile de souligner que des décisions jurisprudentielles insistent sur le fait que la consultation de la Centrale ne peut représenter l'unique élément d'analyse de la solvabilité du client.

Impacts du fichier de la CCP sur l'analyse risque crédit

Plus de transparence

L'existence du fichier et sa consultation systématique par le prêteur rend inutile toute tentative de fraude de la part du demandeur quand à déclaration des crédits à la consommation en cours, et d'éventuels défauts de paiement y relatifs.

Cela simplifie la relation avec les clients, qui légalement avaient de toute façon l'obligation de répondre complètement et sans erreurs aux questions du prêteurs.

En revanche, des omissions d'informations sur ces matières par le client peuvent susciter de nouvelles questions : raisons de l'omission ? Distraction ? Crédit dormant ou jamais activé? Les réponses peuvent utilement informer le prêteur sur la rigueur de gestion du client, sur sa compréhension des enjeux que représentent la signature d'un contrat de crédit...

Réduction de l'incertitude

L'accès à une information complète et fiable à propos de l'endettement crédit permet aux prêteurs de lever le doute qui subsistait jusqu'ici. Les données étant fiables, le credit scoring a dû intégrer cette nouvelle donne, car avant 2003, si l'information collectée était réputée exacte, elle ne l'était pas avec certitude. En outre, si le demandeur a l'obligation de repondre correctement aux questions du prêteur, encore faut-il que ce dernier pose systématiquement la question. La consultation étant obligatoire avant l'octroi du crédit, on peut dès lors considérer que le niveau global de l'information utilisée pour l'analyse risque des prêteurs a été augmenté.

Indicateur partiel de solvabilité

Connaître le niveau d'endettement en crédit à la consommation n'est pas en soi suffisant pour mesurer la solvabilité du client, mais elle apporte toutefois une des informations indispensables à son évaluation.

Quel usage réserver à cette information?

L'approche mise en oeuvre en Belgique laisse une marge de manoeuvre importante aux prêteurs sur la manière dont ces derniers doivent utiliser cette information. Ils gardent en effet toute liberté d'octroyer ou non le crédit, puisqu'ils en assument la responsabilité finale.

Selon la loi, le prêteur ne peut délivrer d'offre de crédit que si, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, notamment sur base de la consultation organisée par l'article 9 de la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers, et sur base des renseignements visés à l'article 10, il doit raisonnablement estimer que le consommateur sera à même de respecter les obligations découlant du contrat.

Cela signifie concrétement que c'est le prêteur qui garde toute l'attitude pour évaluer la capacité de remboursement du client potentiel. Cela signifie qu'il est en principe autorisé à octroyer du crédit :

  • même en cas de fichage négatif (existence de défaut de paiement);
  • quelque soit le niveau d'endettement observé (nombre de crédit et montant);
    pour autant qu'il considère que les chances de remboursements du client sont suffisantes.

Dans les faits, toutefois, force est de constater que lorsqu'un client est fiché négativement (défaut de paiement), son accès au crédit est quasi nul. Cette lourde conséquence souligne, s'il en est besoin, l'importance d'une tenue très stricte du fichier, afin que les données collectées soient exactes et à jour.

Quelle responsablilité? Quelle sanction ?

Responsabilité : obligation de moyen – obligation de résultat ?

En Belgique, le prêteur ou l'intermédiaire sont considérés comme des professionnels, le législateur ne leur dicte pas leur conduite.

En matière d'analyse de la capacité de remboursement, de la mesure du risque, c'est donc à eux de mettre en oeuvre les moyens adéquats et ce sont également eux qui sont à même de les déterminer. La loi de 1991 est donc source d'une simple obligation de moyen : obligation d'investigation (dans les limites raisonnables) qui doit permettre de repérer et éviter les omissions, les incohérences et être assortie des vérifications jugées nécessaires.

Puisqu'il s'agit d'une obligation de moyen, la question de savoir si le prêteur a mis en oeuvre une investigation adéquate n'est pas automatiquement soulevée par le juge, en cas d'action en justice. En effet, dans ce cas, si le consommateur considère que le prêteur ou l'intermédiaire n'ont pas réalisé l'analyse adéquate, c'est à lui ou à son représentant de soulever la question et d'amener des éléments probants de négligence, d'incohérence ou d'omission dans le montage du dossier de demande de crédit. Dans ce cas seulement, la responsabilité du prêteur pourrait être engagée.

En revanche, il en va différemment pour la consultation de la CCP par le prêteur, dans la phase pré-contractuelle. Cette dernière représente une obligation de résultat, ce qui modifie la manière dont la question sera traitée en cas d'action en justice. Dans ce cas, en effet, la question sera soulevée automatiquement par le juge et c'est au prêteur a qui revient la charge de la preuve que la consultation a bien été réalisée.

Sanction

La sanction la plus souvent appliquée en cas de faute est la levée du coût du crédit. Le client ne sera plus redevable alors que du montant du capital emprunté.

La législation particulière relative aux crédits à la consommation et à la protection du consommateur en la matière apporte un petit plus par rapport au droit commun d'application en matière de contrat : en effet, lorsque la faute a été constatée, il n'est alors plus obligatoire de prouver ni le dommage, ni le lien de causalité entre la faute et le dommage, pour que la sanction soit appliquée. Ceci rend nettement plus efficace toute la procédure au profit du consommateur.

Conclusion

En tant que telle, la consultation obligatoire de la CCP par le prêteur ou l'intermédiaire de crédit dans la phase précontractuelle constitue donc un premier pas vers une objectivation de la responsabilité du prêteur, même si, par ailleurs, des progrès sensibles sont encore envisageables pour améliorer la qualité et la pertinence des données collectées2.

La loi du 10.08.2001 prévoit en son article 10 que la Banque Nationale de Belgique (BNB) pourra interroger pour le compte des prêteurs le fichier des avis de saisie, de délégation, de cession et de règlement collectif de dettes, qui n'est toutefois pas opérationnel à ce jour. Cette même loi prévoit en son article 11 que la BNB pourra consulter pour le compte des prêteurs d'autres fichiers centralisant des dettes impayées à charges du consommateur.

Des marges de progrès sont donc possibles pour améliorer la fiabilité des informations fournies au prêteur dans le cadre de leur analyse risque, et l'approche belge confiant à une institution publique la gestion des fichiers garantit le respect de la législation en matière de protection de la vie privée. Il n'est toutefois pas prévu à ce jour de rendre ces potentielles consultations obligatoires pour les prêteurs.

Les données citées précédement relèvent toute d'une mesure de l'endettement : nombre de crédits en cours, et potentiellement pour l'avenir, nombre de procédure de recouvrement de dette en cours. Ces données (utiles mais toutefois non exhaustives) informent le prêteur sur la qualité de gestion du consommateur, sur sa maîtrise budgétaire et donne des indications sur le poid de ses dettes sur son budget.

Des progrès sont également à envisager au niveau de l'analyse de la solvabilité, telle qu'elle peut s'appréhender sous l'angle budgétaire : quelles sont les ressources régulières, quel est le niveau des dépenses incompressibles du ménage et dès lors qu'elle est la capacité contributive du consommateur pour faire face à ses engagements en matière de crédit.

Le législateur jusqu'ici n'a pas envisagé d'inviter plus précisément les prêteurs à collecter certaines informations minimales : preuves de revenus, preuves des charges de loyer et autres dépenses incompressibles et récurrentes... Peut-être faudra-t-il un jour envisager de construire un socle minimal et fiable d'informations relatives à la solvabilité du consommateur, que ce dernier devra collecter pour compléter sa demande de crédit.

Nous pensons en effet que les responsabilités croisées des parties prenantes:

  • le consommateur, qui devrait apporter des éléments prouvant sa solvabilité;
  • le prêteur, qui s'engage à les vérifier et à ajuster le montant du crédit à la capacité contributive;

sont les meilleures garantes d'un crédit responsable. En outre, par une telle approche, le consommateur est amené à mesurer lui-même sa capacité contributive, ce qui est en soit une source potentielle d'apprentissage en matière de gestion budgétaire...

 

Réflexions à poursuivre...

1 Extrait du « Rapport belge. Les services financiers adéquats », Observatoire du Crédit et de l'Endettement asbl, 2007, p.8

2 Voir analyse intitulée « Défaut de paiement : une obligation incomplète » - Réseau Financement Alternatif asbl, O. Jérusalmy, octobre 2007

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La Banque nationale de Belgique (BNB) gère la Centrale des crédits aux particuliers (CCP), plus simplement appelée « fichier positif et négatif des crédits ». Alimentées par l'ensemble des professionnels du crédit, les données collectées dans la Centrale servent à augmenter la qualité de l'information à laquelle ils accèdent lors du traitement d'une demande de crédit...

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11/2007
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Novembre

Centrale des crédits aux particuliers (CCP) : identification de données clés toujours manquantes

Soumis par Anonyme le

Un rôle qui doit évoluer...

La CCP n'avait pas pour but, lors de sa création, de devenir une base de données qui pourrait alimenter la recherche relative à la prévention du surendettement. Certes, cette centrale a bien pour finalité de réduire le risque de surendettement, mais son mode opératoire original était la tenue d'un fichier « à jour » de tous les contrats de crédits régis par la loi relative au crédit à la consommation et les crédits hypothécaires destinés aux particuliers.

La Banque nationale de Belgique, dont la mission première est la gestion de ce fichier, s'est toutefois très vite intéressée aux matières contenues dans ce fichier et a également perçu le potentiel préventif de l'analyse de nombre d'entre elles. Les rapports annuels statistiques produits sur la base de certaines de ces données en sont les signes les plus visibles, auxquels s'ajoute un travail plus approfondi réalisé en 20061.

Des marges importantes de progrès sont encore possibles pour améliorer la prévention du surendettement et pousser l'ensemble des parties prenantes à avoir des comportements responsables.

Pour une plus grande prévention du surendettement...

Mesurer l'endettement réel

À l'heure actuelle, les montants enregistrés dans la CCP correspondent aux montants maxima prévus contractuellement. Si, en ce qui concerne les prêts et ventes à tempérament, les prêts hypothécaires et les crédits-bails, cela correspond le plus souvent au montant réellement libéré à la signature, cela n'est pas d'application aux ouvertures de crédit. Cette information, relative aux montants maxima, est, en tant que telle, tout à fait intéressante pour le prêteur, comme pour le chercheur qui s'intéresse à l'activité de crédit ou à la prévention du surendettement, mais, en revanche, elle se révèle insuffisante pour mesurer le niveau réel de l'endettement des personnes. En effet, pour les ouvertures de crédits, le montant maximum (droit de tirage) octroyé par contrat ne correspond pas au montant réellement prélevé.

De ce fait, telle que l'information est stockée à ce jour, elle surévalue le plus souvent le montant réellement dû par l'emprunteur. Ceci est vrai également pour les autres types de crédit, puisqu'il n'est pas tenu compte des remboursements réalisés une fois le crédit octroyé. Ce biais est dommageable à plusieurs égards : 

  • il limite la connaissance des montants réellement dus, de l'endettement crédit effectif ;
  • il biaise l'information collectée par les prêteurs alors que l’un des attraits fondamentaux de la CCP est de fournir une information exact (par rapport à celle qui était jusque-là reçue par les clients, et qui était donc sujette à caution, en matière de crédit en cours;

L’information se révèle également insuffisante pour illustrer l'usage effectif des ouvertures de crédit (dont un grand nombre est contracté à durée indéterminée) : ces dernières représentent, en nombre, plus de 45,7 % des contrats au 31 décembre 2007 (soit 4.433.937 contrats).

Vu le succès de ce type de crédit, il devient totalement déraisonnable de poursuivre une analyse des ouvertures de crédit s'il n'est pas possible :

  • d'identifier celles qui sont dormantes (on pourrait considérer comme dormantes celles qui sont inutilisées depuis leur octroi et celles qui sont à zéro depuis au moins 12 mois) ;
  • d'identifier les encours réels utilisés par les consommateurs.

Pour ce faire, il est indispensable que la Centrale des crédits puisse collecter au moins une fois par an, en plus des informations disponibles à l'heure actuelle, les encours réels des crédits enregistrés, et qu'un suivi longitudinal anonymisé des situations d'endettement puisse être mis en oeuvre.

Tracer les regroupements de crédits et les refinancements

Le regroupement de crédit – et toute offre de crédit qui tend à consolider des dettes (permettre un étalement plus long des remboursements, réduire la mensualité, et parfois aussi, augmenter le montant emprunté) – représente une activité en croissance et mérite une attention particulière, pour les raisons suivantes :

  • il se présente généralement « déjà » comme une réponse à des difficultés budgétaires, et constitue à ce titre un premier signal ;
  • il se présente comme une solution facile, qui amène peu de réflexion sur la gestion budgétaire du ménage, sur ce qui l’a amené à devoir faire ce regroupement. Il n'y a donc aucun effet pédagogique sur la qualité de gestion du ménage ;
  • il est souvent assorti d'une offre d'argent supplémentaire : dès lors, le total du crédit regroupé représente plus que la somme des soldes restant dus des crédits existants ;
  • enfin, malgré l'allégement qu'il procure (ou est censé procurer) au niveau du budget mensuel – puisqu'il permet de réduire le montant des remboursements – il est généralement plus coûteux en termes absolus, ce qui est une source potentielle d'aggravation de la situation financière dans le futur.

Pour toutes ces raisons, une traçabilité des « regroupements de crédits et refinancements » devrait être rendue possible au sein de la CCP. Elle permettrait, par une observation longitudinale adaptée, de vérifier si, dans les faits, les bienfaits immédiats apportés aux consommateurs ne se révèlent pas nocifs à moyen terme. Cette observation particulière pousserait par ailleurs l'ensemble des acteurs (consommateurs et prêteurs) à un usage raisonné de ce type de crédit. Les modalités d'identification de ces situations devront faire l'objet d'un soin particulier.

Pour ce faire, une rubrique «but du crédit » devrait être systématiquement complétée dans le contrat de crédit, avec le « regroupement/refinancement» comme un choix particulier parmi d'autres. Cette information, complétée par le professionnel, sera ensuite transmise à la CCP avec les autres informations déjà collectées.

Tracer les intermédiaires de crédit

Les intermédiaires de crédit jouent un rôle clé dans la commercialisation de certains types de crédit. Or, cette étape intègre notamment l'information et le conseil que les consommateurs doivent recevoir dans la phase précontractuelle. Il devient dès lors tout à fait indispensable de pouvoir identifier, au sein de la CCP, non seulement le prêteur, mais également l'intermédiaire de crédit qui est éventuellement intervenu.

Cette traçabilité des intermédiaires de crédit permettrait de vérifier si oui ou non leur présence réduit ou augmente le risque de défaut de paiement, ou de détecter, parmi ceux-ci, ceux qui l'augmentent.

Cette observation ciblée des pratiques des intermédiaires devrait avoir, une fois de plus, un effet incitatif à une pratique raisonnée de l'offre de crédit, et devrait avoir des retombées positives quant à la professionnalisation du personnel de ce secteur.

La traçabilité des intermédiaires de crédit devrait permettre d'accroître la responsabilité et le professionnalisme d'un secteur professionnel, qui occupe aujourd'hui une place prépondérante dans l'offre de crédit et dans les risques d'endettement qui en découlent.

La participation des intermédiaires de crédit pourra permettre par ailleurs d'élargir la base de financement du Fonds de traitement du surendettement.

Conclusion

L'exploitation des données collectées par la CCP n'en est qu'à ses balbutiements. Comme nous l'avons illustré, les perspectives de développement sont importantes et pourraient contribuer à influencer les pratiques sur le marché de manière positive, en accroissant l'attrait de comportements responsables tant de la part des professionnels que des consommateurs. Ce type d'influence est d'autant plus efficace qu'elle touche l'ensemble des acteurs de la même manière et sans qu'il soit possible de s'y soustraire. Ces deux qualités permettent à ce type de mesure de réduire d'autant les risques de distorsion de concurrence ou d'autres effets indésirables. 

1 2006-01-18, Working Paper 78, Helga De Doncker, Crédits aux particuliers – Analyse des données de la Centrale des Crédits aux Particuliers. 

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Les données diffusées à ce jour par la Centrale des crédits, certes utiles pour une première compréhension du marché du crédit et des défaillances qui y sont inscrites, continuent à n'utiliser qu'une part infime des informations dont cet organisme dispose à des fins de prévention du surendettement...

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2008
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05/2008
Mois d'édition
Mai

Défaut de paiement : une obligation incomplète

Soumis par Anonyme le

Les crédits et défauts enregistrés à la Centrale des Crédits aux Particuliers1

La Centrale enregistre, conformément aux dispositions légales et réglementaires, les informations concernant tous les crédits à la consommation et les crédits hypothécaires, conclus par des personnes physiques à des fins privées ainsi que les éventuels défauts de paiementrésultant de ces crédits.

En 1993, suite à la loi du 12 juin 1991 sur le crédit à la consommation, le champ d'application de l'enregistrement "négatif" a été élargi à toutes les formes de crédits prévues dans cette loi, c'est-à-dire la vente à tempérament, le prêt à tempérament, le crédit-bail et l'ouverture de crédit. L'enregistrement des défauts de paiement relatifs à des crédits hypothécaires a également débuté cette même année suite à la nouvelle loi sur le crédit hypothécaire.

Ne sont toutefois pas enregistrés, les crédits à la consommation :

  • dont le montant initial est inférieur à 200 euros;
  • constatés par un acte authentique et dont le montant initial est supérieur à 20.000 euros;
  • dont le montant initial doit être remboursé par le débiteur dans un délai ne dépassant pas trois mois, pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une ouverture de crédit;
  • dont le montant octroyé est inférieur à 1.250 euros et est remboursable dans un délai de trois mois, en cas d'ouverture de crédit.

Les critères provoquant l'enregistrement des défauts de paiement découlant des contrats de crédit sont les suivants :

  • a) pour les ventes à tempérament, les prêts à tempérament et les crédits-bails:
    • lorsque trois termes n'ont pas été payés ou l'ont été incomplètement, ou
    • lorsqu'un terme échu n'a pas été payé ou l'a été incomplètement durant trois mois, ou
    • lorsque les montants de termes restant encore à échoir sont devenus immédiatement exigibles;
  • b) pour les ouvertures de crédit :
    • lorsqu'une situation débitrice non autorisée n'est pas apurée dans les trois mois à partir de la date à laquelle le prêteur l'a exigé par écrit;
  • c) pour les crédits hypothécaires :
    • lorsqu'une somme due n'a pas été payée ou l'a été incomplètement trois mois après la date de son échéance, ou
    • lorsqu'une somme due n'a pas été payée ou l'a été incomplètement un mois après une mise en demeure par lettre recommandée.

Les données fournies par les prêteurs relatives au crédit sont les suivantes :

  • a) concernant le débiteur ainsi que le codébiteur éventuel : le numéro d'identification du Registre national des personnes physiques, le nom, le premier prénom, la date de naissance, le sexe et l'adresse;
  • b) concernant le contrat de crédit : le type de crédit, le numéro du contrat, et
    • pour les ventes à tempérament, les prêts à tempérament et les crédits-bails : le montant total à rembourser, le montant du premier terme, le nombre de termes, la périodicité initiale des termes, la date du premier terme et la date du dernier terme ;
    • pour les ouvertures de crédit: le montant du crédit, la date de conclusion du contrat et, le cas échéant, la date de fin du contrat ;
    • pour les crédits hypothécaires : le montant emprunté en capital, le montant de la première échéance, le nombre d'échéances, la périodicité initiale des échéances, la date de la première échéance et la date de la dernière échéance;
  • c) concernant le défaut de paiement : la date et le montant de l'arriéré ou, en cas d'exigibilité, le montant et la date du solde débiteur restant dû.

L'objectif d'un tel enregistrement

L'enregistrement des données en matière de défaut de paiement des crédits à la consommation et des crédits hypothécaires au sein de la Centrale des Crédits aux Particuliers a pour objectif d'accroitre de manière significative la prévention du surendettement des particuliers.

En effet, ce fichier doit être obligatoirement consulté par les prêteurs ou leurs représentants dans la phase précontractuelle. Cela signifie que ces professionnels disposent d'une cartographie des crédits en cours d'un candidat emprunteur, qu'ils soient ou non en défaut de paiement. Chaque consultation génère un code qui doit être mentionné sur le contrat de crédit avec la date de cette dernière. Le contrat doit être émis au plus tard dans les 20 jours qui suivent la consultation, sous peine de devoir réaliser une nouvelle consultation.

Cette information est utile au prêteur dans la mesure où l'octroi d'un crédit repose sur une analyse de risque qui comporte généralement un volet « fiabilité » et un volet « solvabilité ». La place que l'information contenue dans la Centrale prendra in fine dans la décision est quant à elle variable en fonction des politiques commerciales et des politiques risques des prêteurs. A la croisée des chemins, le résultat du fichage permettra une connaissance du nombre d'engagements en cours2 et permettra dans certains cas de vérifier les propos des clients ou d'entamer une discussion.

A un autre niveau, il faut également considérer la consultation obligatoire de la Centrale des Crédits comme le premier pas tangible en direction d'une objectivation des obligations du prêteur dans la phase précontractuelle, en ce qui touche l'évaluation de la solvabilité du client.

Un fichier perfectible

Ce fichier correspond, à n'en pas douter, à une très belle avancée en matière de prévention du surendettement. Toutefois, nous souhaitons souligner dans cette analyse deux éléments particuliers qui nous semblent handicaper cette belle mécanique.

A) Un fichage incomplet qui souligne le paradoxe des crédits non régis

  • Les crédits non régis : il s'agit des crédits à la consommation destinés aux particuliers dont les montants (inférieurs à 200 € ou 1.250 € selon le type) ou les durées (inférieures à 3 mois) les font sortir du cadre légal organisant la protection du consommateur (loi de 1991) et donc de leur fichage corrélatif, qu'il soit positif ou négatif.
  • Ne sont pas non plus régis par cette loi les dépassements non autorisés en compte courant ni les contrats de leasing conclus par des personnes physiques, alors qu'ils représentent également des engagements financiers dont la présence impacte directement la solvabilité des clients. La connaissance de défaut de remboursement pour ces services est tout aussi pertinente dans l'analyse du risque que les défauts soumis à l'enregistrement.

Il est toutefois paradoxal que les défauts relatifs à ces services financiers non régis par la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers soient tout de même centralisés à la Banque Nationale de Belgique, dans un fichier appelé « enregistrement des défauts non régis », pour les mêmes raisons « préventives » que celles qui animent les autres enregistrements. Toutefois, seuls les participants à ce fichier particulier, c'est-à-dire les prêteurs qui ont signé une convention avec la Banque Nationale de Belgique et qui alimentent ce fichier, ont accès aux données.

Nous sommes d'avis que l'ensemble des services financiers (régis et non régis) fassent l'objet d'un même traitement au sein de la CCP : qu'ils fassent tous l'objet d'un enregistrement « positif » et qu'ils soient consultables par les mêmes acteurs (les professionnels ainsi que les particuliers pour leur propre situation) car cette information participe à une meilleure estimation de la fiabilité et de la solvabilité des candidats emprunteurs. En outre, si la collecte de ce type de données est généralisée à l'ensemble des acteurs, il n'y a plus de raison d'en réserver l'accès aux seuls pourvoyeurs.

B) La difficile interprétation des défauts de paiement

Parmi les analyses possibles des données collectées dans la Centrale des Crédits, il est légitime d'identifier, parmi les différents types de crédits, ceux qui provoquent proportionnellement plus de défaut de paiement, et le cas échéant, si des différences s'observent entre les différentes catégories de prêteurs recensées.

Cette analyse est toutefois rendue difficile, voire impossible, pour les raisons suivantes :

a) la règle d'enregistrement des défauts varie en fonction des types de crédits (cf. infra), et elle ne nous paraît pas adaptée aux ouvertures de crédit (OC). D'une part, il y a un effet de stock : puisque les OC sont des crédits à durée indéterminée, même si elles sont remboursées et inutilisées, elles restent enregistrées jusqu'à la résiliation du contrat par le consommateur – cet effet de stock est aggravé par le fait que de nombreuses OC sont accordées sans jamais être utilisées, parfois simplement d'ailleurs car le client n'a pas pris conscience que la carte de paiement qu'il s'est vu proposer est en réalité une OC. D'autre part, les OC sont des crédits dont les modalités sont très variables : d'un contrat à un autre, les règles régissant les droits de tirage comme les modalités de remboursement sont très variables. Ces dernières peuvent prévoir soit un remboursement en capital à terme et le paiement régulier d'intérêts, soit des remboursements échelonnés composés de capital et d'intérêts. Dans ce dernier cas, le montant minimum proposé de remboursement équivaut généralement au montant des intérêts dus augmentés d'une part de capital, qui peut parfois être faible.

Pour ces raisons, les comparaisons des taux de défaut de paiement par type de crédit sont fallacieuses et souvent utilisées, d'ailleurs, par les professionnels du secteur pour minimiser les problèmes générés par les OC, puisqu'ils sont amplement dilués dans ces effets de stock.

Parmi les pistes envisageables, il pourrait s'avérer utile de :

  • mettre fin au caractère « indéterminé » des durées des ouvertures de crédit, cela permettrait de « nettoyer » le fichier régulièrement;
  • prévoir un niveau de remboursement mensuel minimal en deçà duquel le défaut de paiement devrait être enregistré de manière systématique ;
  • prévoir annuellement une mise à jour des encours - et pouvoir ainsi identifier les OC dormantes à ce moment-là des autres. Cette mesure serait également utile pour les autres types de crédit, puisque cela permettrait d'appréhender de manière plus réaliste non seulement « les types de crédits souscrits », mais également l'encours de ces crédits.

A quand un « scoring » des prêteurs ?

A ce jour, les informations collectées par la Centrale des Crédits aux Particuliers servent aux professionnels dans la phase précontractuelle de l'octroi d'un crédit, et plus précisément dans leur analyse risque.

Un autre usage utile des données collectées pourrait être d'identifier les professionnels et les crédits qui provoquent le moins de défaut de paiement. D'un scoring exclusivement orienté « client », on passerait ainsi à une plus grande symétrie d'information en proposant également un scoring des « prêteurs ».

Olivier Jérusalmy, octobre 2007

Références

  • Working paper document n°78 « Crédits aux particuliers - Analyse des données de la Centrale des Crédits aux Particuliers », (janvier 2006), Helga De Doncker, Banque Nationale de Belgique

1 Banque Nationale de Belgique, Statistiques, Centrale des crédits aux particuliers, 2006

2 A noter que les données mises à disposition ne traitent pas des encours des crédits recensés, puisque ce sont les montants octroyés à la signature du contrat qui sont repris dans la Centrale, et qu'il n'y a pas d'actualisation prévue des montants.

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La loi de 2003 relative à la Centrale des Crédits aux Particuliers (CCP) organise l'enregistrement de tous les crédits à la consommation et crédits hypothécaires ainsi que les arriérés de paiement : les modalités d'enregistrement ne permettent pas une analyse des dangers respectifs des différents types de crédit.

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2007
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10/2007
Mois d'édition
Octobre

Pour apporter une réponse au surendettement, l'Europe peut-elle importer le modèle américain du Community Reinvestment Act?

Soumis par Anonyme le

Les exclus du système socio-économique sont nombreux au sein de l’Union européenne : chômeurs, femmes, immigrés, gens du voyage, jeunes universitaires sans emploi, etc. Pour répondre à des besoins de première nécessité tels que l’achat de mobilier, les réparations des installations sanitaires, des soins dentaires, l’achat de lunettes, ou encore l’obtention du permis de conduire, ces personnes doivent faire appel au crédit.

Or, pour octroyer ou non des crédits, les banques se basent sur un credit scoring, tenant compte de la situation financière du demandeur. Les personnes les plus démunies se voient, dès lors, le plus souvent refuser l’accès au crédit dans les banques traditionnelles. Lesquelles prétendent, ce faisant, agir de façon responsable en évitant à leurs clients la spirale du surendettement. Voire. Elles agissent plus certainement dans l’intérêt de leurs résultats, en se concentrant sur les produits les plus rentables. Quant aux emprunteurs potentiels, ils sont généralement contraints de frapper à la porte des prêteurs sur gage, augmentant alors, de facto, le risque de surendettement.

Pour lutter contre ce problème, à l’instar de ce qui se fait aux Etats-Unis depuis près de 30 ans, les banques européennes pourraient être appelées à s’engager dans un marché qu’elles ne connaissent pas encore : celui des personnes à revenu faible ou modéré.

Community Reinvestment Act : de quoi s’agit-il ?

Aux Etats-Unis, les communautés noires ou latino-américaines, souvent économiquement défavorisées, se trouvaient généralement exclues du marché des crédits. Pour mettre fin à cette discrimination, ou à tout le moins pour la diminuer, fut adopté le Community Reinvestment Act (CRA), en 1977, sous la présidence de Carter. Ce premier dispositif allait se voir renforcé en 1994-1995 par l’administration Clinton.

Le CRA mentionne que ‘les institutions financières ont une obligation continue et non discriminatoire d’aider à répondre aux besoins de crédit des communautés, y compris dans les régions à revenu faible ou modéré, et ce, sans que cela soit incompatible avec des pratiques de prêt saines’.

Par conséquent, les banques et autres institutions financières de prêt doivent octroyer des crédits et services financiers aux individus à revenu faible ou modéré ainsi qu’aux organisations et associations s’occupant de ces personnes et ce, dans toutes les zones géographiques où les banques proposent des comptes bancaires. Par ailleurs, elles ont l’obligation de justifier les rejets de prêts, pour lesquels seuls les critères économiques peuvent entrer en ligne de compte.1

Le respect du Community Reinvestment Act par les banques est contrôlé par l’administration fédérale. En effet, en cas de non respect du CRA, les banques s’exposent à des sanctions telles qu’une amende, la perte de l’accès au refinancement à court terme de la FED2 ou à l’arrêt temporaire des opérations du fusion ou d’acquisition.

Un mécanisme de type ‘CRA’ est-il envisageable en Europe ?

A ce jour, l’Union européenne ne dispose pas encore de contrainte légale comparable à l’égard des banques.

Cela s’explique sans doute par des traditions différentes en Europe et aux Etats-Unis. D’abord, les « communautés » en tant que telles sont, la plupart du temps, davantage fondues dans la population. Ensuite, le vieux continent a développé une tradition de banques mutuelles et coopératives lesquelles, historiquement, s’adressent à une clientèle précarisée. Enfin, l’intervention réglementaire des pouvoirs publics sur le secteur financier est généralement plus importante en Europe qu’aux États-Unis. Sous quelles conditions un CRA pourrait-il, dès lors, se développer au sein de l’Union européenne ?

Engagement envers les « communautés » ou principe de solidarité

En visant à réduire les actions discriminatoires envers certains groupes de la population (noirs, latino-américains, …), le CRA américain renvoie à la notion de communautarisme. L’analyse en termes de « communautés » n’est sans doute pas aussi pertinente en Europe. Si ce n’est au Royaume-Uni, voire un peu au Danemark, la notion même de ‘développement communautaire’ est très peu répandue en Europe. Cela ne signifie pas pour autant, loin s’en faut, que l’Europe ne compte pas son lot de personnes marginalisées d’un point de vue socio-économique. Mais on y parlera de populations exclues des services bancaires et financiers.

Aux Etats-Unis, les banques sont contraintes de consacrer une partie de leurs engagements aux « communautés », correspondant à une part de l’épargne qu’elles ont collectée auprès de ces communautés. Les banques sont examinées sur la base des résultats, et non des déclarations d’intention, en matière de lutte contre la discrimination. Ainsi, « si dans des zones d’évaluation du CRA, l’analyse statistique du portefeuille de crédits identifie des exemples de discrimination, y compris par l’absence de prêts, les banques sont appelées à se justifier. Elles doivent fournir une justification économique à leur décision de ne pas prêter. Comme ceci peut s’avérer aussi onéreux que difficile, les banques préfèrent faire de sérieux efforts pour ne pas voir leurs politiques remises en question. »3

Toutefois, dans leur souci de maximisation de la rentabilité, elles créent des Fondations qui font du ‘social banking’, de sorte que le coût du ‘social banking’ est externalisé. Le CRA crée donc, de facto, une dualisation de la société. Or, l’objectif poursuivi consiste en une mutualisation et non en une dualisation de la société et des risques bancaires.

Le Community Reinvesment Act américain pourrait, dès lors, se voir adapté au modèle socio-économique européen par l’instauration d’un principe de solidarité dans les banques et entre les banques. En effet, les produits les plus rentables doivent permettre de couvrir les coûts des produits moins rentables afin de répondre aux besoins de l’ensemble de la population.

Un système d’évaluation pourrait être mis sur pied de sorte que les instances publiques accordent un niveau de rating aux institutions financières, sur la base d’indicateurs pertinents, relatifs principalement à l’accès au crédit mais aussi aux investissements et aux services bancaires (crédit à la consommation, crédit aux indépendants, artisans et PME, crédit à l’économie sociale et solidaire). L’évaluation se ferait tant au niveau de l’action du secteur dans sa globalité que de celle de chaque opérateur en particulier.

Par ailleurs, la création d’un « fonds de compensation des banques permettrait de répartir la charge économique excédentaire que représente l’offre de crédit approprié, sur l’ensemble des opérations de crédit. Ce mécanisme de compensation rendrait neutre, sur le plan économique, la prise en charge de ce service économique d’intérêt général par certains opérateurs et éviterait ainsi une distorsion de concurrence »4.

Obligation de transparence en matière de crédit 

Aux Etats-Unis, « l’intuition première du législateur était que la menace de publicité négative à laquelle serait exposée une banque mal notée par le CRA serait suffisante pour réduire les pratiques discriminatoires de crédit. Elle s’est avérée fondée dans la mesure où peu de banques américaines ont été soumises à une amende.»5

L’expérience américaine a ainsi démontré l’importance de la transparence : tant qu’un mauvais résultat en termes de CRA entraînait une sanction sans publicité, les banques ne s’en inquiétaient pas. Dès lors que les résultats sont devenus publics, c’est-à-dire qu’ils ont touché l’image de la banque, ils sont en même temps devenus dignes d’intérêt…

Par ailleurs, le succès du CRA est dû, en partie au moins, à l’obligation de transparence de la part des institutions financières. On ne peut pas s’attendre à des avancées spectaculaires en Europe si on travaille uniquement sur une base volontaire de la part des banques.

Or, en Belgique, il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’obligation de rendre publique l’information sur les clients. Il existe une centrale positive des crédits à laquelle les prêteurs ont accès mais qui n’est pas publique : tous les crédits y sont enregistrés ; le dispensateur de crédit doit la consulter avant d’accorder un crédit. Il engage ici sa responsabilité.

Il nous semble, dès lors, essentiel de promouvoir la transparence dans les institutions financières en les obligeant à fournir périodiquement les informations sur la manière dont elles ont répondu ou non aux besoins de crédit de la population. Ces informations seraient contrôlées par un organisme indépendant et selon des procédures bien établies.

’Social banking’, banking rentable ?

Il importe de prouver aux banques qu’elles peuvent faire de la ‘finance sociale’ sans enregistrer de perte.

Aux Etats-Unis, plusieurs études ont démontré que le risque de crédit supporté par les banques n’a pas augmenté du fait de l’instauration du Community Reinvestment Act. En effet, les institutions financières ont appris à connaître un marché somme toute nouveau pour elles et la concurrence a joué son rôle dans l’économie libérale de Etats-Unis. Par conséquent, l’évaluation des risques clients s’est affinée de telle façon que le taux de créances non remboursées n’est pas plus élevé auprès des clients CRA qu’auprès des autres clients. Et les prêts hypothécaires aux personnes à revenu faible ou modéré ont augmenté de 39 % entre 1993 et 1998, selon le département du Trésor américain.

Or, chez nous, les banques ont mis au point une méthode d’évaluation des consommateurs, sur la base de leurs dépenses. Ce scoring est de plus en plus précis. Les banques disposent donc déjà d’un premier outil important pour faire crédit aussi aux groupes défavorisés.

Par ailleurs, les banques coopératives s’avèrent aussi rentables que les banques traditionnelles. Pour preuve, quelques acquisitions retentissantes des secondes par les premières, en France et en Italie notamment.

Dans son rapport « Développer des outils communs aux pouvoirs publics et aux institutions financières en vue de favoriser les droits fondamentaux dans l’Union européenne », le Réseau Financement Alternatif insistait déjà, en décembre 2005, sur la nécessité de « favoriser l’implication des institutions financières dans la promotion des droits fondamentaux »6. Ainsi, nous notions alors qu’il importe de sensibiliser les institutions financières à un secteur et à un public qu’elles ne connaissent pas encore. Parallèlement, il convient de leur expliquer l’intérêt qu’elles ont à y prendre part : amélioration de leur image, valorisation du crédit en tant que facteur économique intéressant, nouveaux clients potentiels, etc.

Allier solidarité, lutte contre le surendettement et rentabilité

In fine, l’instauration d’une évaluation sur la base, notamment, de l’accès au crédit, l’obligation de transparence ainsi que la création d’un fonds de compensation pourraient insuffler un vent de solidarité, si léger soit-il, au sein du secteur bancaire sans pour autant en gêner la rentabilité.

Par ailleurs, le CRA européen pourrait devenir un outil puissant de lutte contre le surendettement en permettant aux personnes à revenu faible ou modéré d’emprunter auprès de banques et non plus auprès de financiers aux taux usuriers.

Car, le but ultime d’un Community Reinvestment Act à l’européenne est bien de sortir les personnes précarisées de leur situation d’exclusion pour les intégrer dans l’économie de marché. Lorsque cet objectif est atteint, toutes les parties prenantes en sortent gagnantes : en priorité les personnes anciennement précarisées; mais aussi le secteur bancaire qui ‘récupère’ de nouveaux clients et les pouvoirs publics, enfin, qui évitent d’engager des coûts sociaux.

Françoise Radermacher - Juin 2006

1 Pour davantage d’informations sur le sujet, le lecteur se référera à un article précédent ‘Pour lutter contre la discrimination économique des personnes à revenu faible, l’exemple viendrait-il des Etats-Unis ?, juin 2006, www.financite.be

2 Banque Fédérale américaine

3 Pour davantage d’informations sur le sujet, le lecteur se référera à un article précédent ‘Pour lutter contre la discrimination économique des personnes à revenu faible, l’exemple viendrait-il des Etats-Unis ?, juin 2006, www.financite.be

4 BAYOT Bernard, directeur du Réseau Financement Alternatif.

5 HUDSON Kent, Le Community Reinvestment Act (CRA), 2004, page 4

6 RADERMACHER Françoise,  Développer des outils communs aux pouvoirs publics et aux institutions financières en vue de favoriser les droits fondamentaux dans l’Union européenne , rapport final d’un projet européen, page 51, décembre 2005.

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A l'instar de ce qui ce fait outre-Atlantique, l'Europe doit-elle imposer une obligation de performance sociale au secteur bancaire ? Eléments de réponse.

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2006
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06/2006
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Juin

Crédits rapides et grands magasins : un problème, quel problème ?

Soumis par Anonyme le

Introduction

On vit une époque formidable, on ne le dit pas assez. Ces quelques lignes provocatrices, pourquoi nous choquent-elles ? Craquer pour une dépense coup de cœur ? On en rêve tous, non ? Ou, en tout cas, ne rêvons-nous tous pas de pouvoir nous les offrir, ces coups de cœur ? Alors, qui sera le premier à jeter la pierre ? Le consommateur asphyxié par son crédit, mais assis dans un superbe canapé ? Le vendeur de canapés, qui grâce à ce salon vendu, peut s'asseoir dans un canapé encore plus beau ? Le pouvoir politique, qui doit certes financer des services de médiation de dettes lorsque la situation est vraiment grave, mais qui, d’une manière générale, permet le maintien d'une consommation élevée afin de soutenir l'économie ? Ou le médiateur de dettes qui souhaite arriver à une solution viable de remboursement, en méditant, assis sur sa chaise, aux plaisirs différents qu’il pourrait tirer d’un bon canapé acheté cash plutôt qu'à crédit ?

Et puis, n'est-ce pas notre très cher Oscar Wilde, peu avare de bons mots, qui, dans Le Portrait de Dorian Gray, nous assène cette vérité un tant soit peu subversive : « Les folies sont les seules choses qu'on ne regrette jamais » ?

Dès lors, vivons sans regret... et endettés?

Sans une analyse du problème, pas de solution possible

Ce n'est sans doute pas un hasard si les lieux de grande distribution multiplient les possibilités et facilités de paiement entre leurs murs. Car si les stimuli d'achat sont diffusés en permanence sous des formes multiples et par des canaux variés – spots publicitaires à la radio ou à la télévision, publicité sur Internet, dans la presse, dans les rues et lieux publics au moyen d’affiches, de panneaux rotatifs, d’enseignes, d’enseignes lumineuses et digitales, de sculptures et d’objets urbains, d’écrans électroniques, messages publicitaires au dos de tickets de caisse, au cinéma avant le film, mais aussi pendant le film, grâce au placement d'objets, publicité, encore, dans les messages d'attente téléphonique, dans l'enveloppe des chèques repas, pour ne citer que quelques exemples – rien ne vaut le contact réel avec la marchandise. La vue, le toucher, l'essai possible sont autant d'expériences qui peuvent nous convaincre des satisfactions que nous pourrons tirer de nos nouvelles acquisitions. Et comme nous sommes amenés à pousser régulièrement les portes de ces magasins, puisqu'on s'y approvisionne par ailleurs d'une multitude de biens de consommation courante, la résistance à s'offrir une petite folie s'émoussera de manière régulière.

Dans ces conditions, il devient évident que le lieu d'octroi du crédit n'est pas neutre. Dans bien des cas, le crédit est précisément mis à disposition pour permettre des achats sur place, ou, si ce n'est pas le cas, il est proposé au même titre que les autres biens et services : on passe en grande surface pour acheter un crédit.

En quoi est-ce un problème ?

Que l'on soit pour ou contre ce modèle économique, que l'on apprécie ou non ces temples de la consommation, la question que nous souhaitons soulever ici est la suivante : ces offres de crédit sont-elles particulièrement problématiques quand elles sont proposées en grandes surfaces ?

Dans une précédente analyse1, il est effectivement montré que les ouvertures de crédit – soit le crédit phare proposé dans ces lieux – continuent de connaître une croissance du nombre de défauts de paiement (cf. chiffres de la Centrale des crédits aux particuliers). On y rappelle également les divers risques spécifiques qui y sont liés.

La Centrale des crédits aux particuliers (CCP) nous informe aussi que le taux de défauts des ouvertures de crédit est plus élevé lorsque ces dernières sont octroyées par les « autres institutions »2 que par les « établissements de crédit »3. Sur la base des données 2007, le pourcentage de contrats défaillants est de 6,8 % pour les autres institutions (155.044 défauts / 2.284.314 contrats) contre 5,2 % pour les établissements de crédit (59.979 défauts / 1.149.623 contrats). Malheureusement, la CCP ne dispose d'aucune information relative au canal d'octroi du crédit (sur le point de vente, par courrier, par internet, à l'agence, à domicile, etc.) et ne peut, dès lors, pas identifier les éventuels canaux qui seraient plus risqués que d'autres.

Qu'est-ce qui différencie une ouverture de crédit offerte en « grande surface » d'une ouverture de crédit proposée en banque ?

  • a) On l'a dit, les motivations de souscription peuvent être, plus qu'en banque, liées à une impulsion lorsque le crédit est souscrit en grande surface... le consommateur est donc, sur ce plan, en partie responsable de ce problème... et il peut lui arriver de regretter son acte. Toutefois, face à ce problème, il existe d'ores et déjà un droit de rétractation pour le consommateur, qui devrait d'ailleurs être renforcé dans le cadre de la Directive européenne 2008/48/CE, puisqu'il y est prévu, dans le considérant 34, que la rétractation soit possible pendant 14 jours, sans pénalité ni justification.
  • b) Les devoirs d'information et de conseil y sont la plupart du temps réduits à néant. Si la législation sur ce point s'intéresse à la qualité de l'information et des conseils qui peuvent être donnés au consommateur dans la phase pré-contractuelle, elle ne s'applique que peu ou pas aux crédits proposés en grandes surfaces. En effet, cette obligation, d'une part, ne porte pas directement sur les intermédiaires de crédit, et, d'autre part, l'offre de crédit y est en général d'un seul type. Dans ces conditions, le conseil n'a plus vraiment lieu d'être, puisque le prêteur ne peut proposer de conseil qu'entre les produits qu'il met à la disposition de la clientèle.
  • c) L'analyse de la solvabilité : lorsque l'offre de crédit bancaire est faite par le banquier du consommateur, elle n'est pas faite à un inconnu, mais au contraire à un client dont sont connus la surface financière, les mouvements en comptes, les habitudes de gestion. La rapidité d'octroi peut donc ne pas impacter la qualité de l'analyse.

En revanche, en grande surface, les clients qui sollicitent un crédit sont de parfaits inconnus, et l'on sait que les modalités d'octroi y sont aisées et que l'enquête de solvabilité est réduite à sa plus simple expression. La plupart du temps, en effet, seul le fichier de la CCP est consulté. Mais c'est là une obligation légale aisément contrôlable, puisque la référence de la consultation doit être indiquée sur le contrat de crédit, qui est dès lors très efficace et bien appliquée. Elle est par ailleurs facile à réaliser, puisque la CCP est accessible en ligne et que l'opération ne requiert pas plus de quelques minutes.

Exploration de solutions envisageables

Passons en revue les solutions qui pourraient être envisagées et tâchons d'identifier les plus pertinentes :

Achat « coup de coeur », où, contrairement au bon mot d'Oscar, le malendettement qui découle d’un achat impulsif fait regretter amèrement cette petite (ou grande) « folie ». Si l'on souhaite protéger le consommateur contre ses propres impulsions, ou en tout cas, contre celles qu'il peut être amené à regretter dans le futur, l'approche actuelle de délai de rétractation est une première piste intéressante. Toutefois, ce délai semble relativement peu souvent utilisé, car il ne peut s'appliquer que lorsque le bien financé peut être rendu à l'état neuf, ce qui n'est plus le cas la plupart du temps. En outre, il paraît peu approprié d'interdire tout bonnement l'accès aux crédits « rapides » en grande surface puisque, dans une majorité de cas, ces derniers sont bel et bien honorés.
Du reste, la mise en oeuvre concrète d'une telle mesure n'irait pas sans soulever de très nombreuses questions. À partir de quelle distance considère-t-on que l'offre n'est plus réalisée sur le lieu d'achat ? Que penser, par exemple, d’une offre faite sur le parking du lieu d’achat ? Quel nombre minimum de mètres devrait être parcouru ? Que faire des institutions de crédit présentes dans le périmètre ainsi défini ? Comment les professionnels contreront-ils cette mesure ? Que risquent-ils de mettre en place ? Ne sera-ce pas pire ? Sans compter que cela ne résoudra pas de manière satisfaisante les deux autres problèmes soulevés ci-dessous...
Les devoirs d'information ...

Pour que cette obligation puisse être correctement remplie, il faut idéalement :

  • du personnel qui connaisse le/les produit(s) financier(s) proposé(s) – afin d'être à même de présenter des droits et obligations qui en découlent, notamment les modalités de remboursement, les coûts et les mesures qui seront mises en oeuvre en cas de défaut de paiement. À ce stade, il est utile de penser au moyen de prouver qu'une telle information a bien été donnée. Pour ce faire, un dépliant « simplifié », présentant l'essentiel de ces informations en termes clairs pourrait être élaboré... mais ce n'est là qu'une piste de réflexion ;
  • du personnel qui puisse déterminer les besoins de financement du client et le type de crédit qui lui correspond et ne finaliser une offre que lorsque cette correspondance est avérée. Cet élément nous semble bien difficile à imposer dans un cadre légal puisque, d'une part, dans la majorité des cas, seul un type de crédit est proposé, et que, d'autre part, cela demanderait à ces professionnels de travailler « contre leur intérêt », ce qui paraît peu réaliste. En effet, la décision de crédit se prend dans une logique de maximisation des profits, et si le risque de défaut de paiement est en dessous du seuil d'acceptation, on comprendrait mal qu'un prêteur se rétracte. Enfin, la mise en place d’une procédure de contrôle vérifiant qu’une telle analyse a été faite semble à ce jour difficile à imaginer.

... et de conseil

C'est en général sous ce vocable que l'on trouve l'analyse de la solvabilité.

À ce jour, les obligations se concentrent autour de trois éléments d'information :

  1. la vérification de l'identité du consommateur (indispensable pour l'étape 2) ;

  2. la consultation du fichier CCP ;

  3. le but du crédit (le plus souvent énoncé de manière floue).

Pour le reste, c'est aux professionnels qu’il revient de recueillir les informations qu'ils considèrent comme nécessaires pour apprécier la situation financière du consommateur.

Il nous semble nécessaire d'aller plus loin sur ce point. Pour l'ensemble des parties prenantes (prêteurs et intermédiaires, consommateurs et pouvoirs publics), une analyse appropriée de la solvabilité reste le meilleur rempart contre la mise en place de crédit inadéquat.

Nous considérons que les obligations légales sur ce point ne vont pas assez loin. La plate-forme « Journée sans crédit » à laquelle participe le Réseau Financement Alternatif a présenté, en 2008, dans sa proposition 4.14, une piste sérieuse de solution.

L'idée consiste en la réalisation d'un questionnaire standard permettant d'évaluer la situation financière du consommateur. Le prêteur ou son intermédiaire devraient, pour ce faire, questionner le consommateur sur ses ressources (revenus, allocations...), mais aussi sur sa situation familiale (composition du ménage), ses charges courantes et ses dettes. Ceci devrait permettre de vérifier que le consommateur dispose des ressources suffisantes pour faire face, à la fois, à ses dépenses incompressibles et au remboursement du crédit envisagé. Pour ce faire, le consommateur devrait être invité à fournir les justificatifs des principaux postes et s'engager, comme c'est déjà le cas, sur la véracité des diverses informations qu'il communique.

Étude de solvabilité objectivée, la panacée ?

Dans notre quête de solution au problème de surendettement, dans notre volonté d'éviter que des pratiques préventives réduisent par ailleurs l'accès du crédit à des ménages en situation financière précaire, il nous semble inévitable de faire reposer en grande partie la décision d'octroi sur la solvabilité réelle du consommateur, et, à ce stade, une objectivation de cette dernière paraît une étape indispensable à mettre en place.

Pourquoi privilégier cette approche ?

 

  • Elle fait reposer la décision d'octroi sur des éléments objectifs.
  • Elle permet d'établir clairement les responsabilités des uns et des autres : le consommateur se doit d'apporter les pièces justificatives et de répondre sincèrement aux questions qui lui seront posées. Le dossier constitué en apportera la preuve. On peut même réfléchir à la manière dont on pourrait traiter différemment le sort des consommateurs de bonne ou de mauvaise foi, au même titre que des prêteurs de bonne ou de mauvaise foi, lorsque des défauts de paiement aboutissent à des litiges ou à des procédures de médiation de dettes.
  • Le consommateur responsableet solvable pourra toujours obtenir rapidement un crédit, puisqu'il se munira des pièces ad hoc pour remplir son dossier. Pour les autres, il est probable que cela prenne plus de temps (oubli de document...). Ceci présente l'avantage pour ces derniers de ne plus pouvoir facilement tomber dans l'achat impulsif qui doit être financé par un crédit et d'avoir à mettre le nez dans le budget et dans la vérification dans les grandes lignes de la capacité de remboursement.
  • Pour le prêteur ou son intermédiaire, il s'agit de vérifier les pièces justificatives, de les joindre au dossier et de compléter la grille budgétaire afin de vérifier le disponible pour le remboursement du crédit. Si, on en convient, cela prend plus de temps que ce qui se pratique à ce jour, nous sommes convaincus des capacités des professionnels à rationaliser ce process pour en réduire autant que possible le coût.
  • Cette approche s'applique à l'ensemble de la profession et ne créera donc pas de distorsion de concurrence.
  • Elle n'entre pas en contradiction avec le projet de la Directive 2008/48/CE.
  • Elle renforce et objective la notion de « crédit responsable » et permet de réaliser un bond en avant en matière de responsabilité sociale des entreprises financières. L'usage approprié d'un questionnaire standard pouvant devenir une norme minimale du crédit responsable.

En guise de conclusion

Quel prêteur qui se considère comme responsable peut considérer cette option comme inappropriée ou inadéquate ? Après ce que les crédits subprime ont déclenché comme tempête, peut-on encore envisager de faire du crédit sur base de credit-scoring simpliste, sans une approche individuelle précise de la capacité de remboursement ?

Chers prêteurs, la balle est dans votre camp... et celui qui parmi vous sera performant dans une approche responsable développera un avantage compétitif, n'est-il pas ?

Olivier Jérusalmy

 

1 Lise Disneur, Réseau Financement Alternatif, « Les Sirènes du crédit facile », octobre 2008

2 Institutions, autres que les établissements de crédit, qui sont agréées par le SPF Économie pour l'octroi de crédits à la consommation.

3 Institutions soumises à la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit et qui sont agréées par la Commission bancaire, financière et des assurances.

4 http://www.journeesanscredit.be/var/www/eqpop/www.journeesanscredit.be/I...

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La proximité de biens de consommation attrayants, les techniques de marketing agressives, la volonté de déclencher autant que possible l'achat « coup de coeur » sont d'autant plus efficaces que le consommateur, même quand il ne dispose pas d'argent disponible, peut tout de même se l'offrir grâce à une ouverture de crédit disponible illico presto...

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Echos du Crédit et de l'Endettement - n°20

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Au fait : des personnes surendettetées témoignent p 4-8 Dossier : Se porter caution ou codébiteur : quelles conséquences? p. 9-17 Europe : Directive 2008/48/CE sur le crédit à la consommation : protection du consommateur ou avantages adaptés pour certains prêteurs? p. 18-21 L'administration provisoire des biens p. 22-24

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Echos du Crédit et de l'Endettement - n°1

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Dossier : les huissiers jouent-ils le jeu? p.9-12 Ecoles de consommateurs reconnues p.3 Centrale des crédits aux particuliers p; 4-6 Ecole de consommateurs p. 7-8 Réglement collectif p.23-25  

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Echos du Crédit et de l'Endettement - n°19

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RCD : tous les dossiers désormais transférés : p.4 Des campagnes de prévention à géométrie variable : Quand le privé s'intéresse à la prévention p.5-8 Bruxelles : recréer du lien par la parole : p.9 Les huissiers de justice et le recouvrement amiable: p.10-11 Dossier : cérdit à distance : un exercice de style ? p.12-19 Europe : une définition made in EU du surendettement : p.20-22 Energie : le fonds mazout reprend du service. tarifs sociaux, réduction forfaitaire et prêt vert social p.23-24 l'administration provisoir des biens p. 23-24

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