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La speculazione Domande e risposte riguardo l'imposta sulle transazioni finanziarie

Soumis par Anonyme le
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Argent et citoyenneté ou.. Les dessous des sous

Soumis par Anonyme le
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La Fiscalité, un outil contre la pauvreté

Soumis par Anonyme le
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1999
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11
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11/02/1999
Mois d'édition
Février

Les nouveaux aspects institutionnels de la spéculation financiéres : Peut-on agir sur les investisseurs institutionnels face aux risques liés aux bulles financières?

Soumis par Anonyme le
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2000
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26
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26/05/2000
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Mai

l'entreprise & l'homme

Soumis par Anonyme le
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2010
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2010

Qui est à la barre ?

Soumis par Anonyme le

Mais c'est également le cas de la spéculation sur les matières premières alimentaires de 2008 et, à sa suite, des émeutes de la faim que l'on croyaient révolues, appartenant à un autre siècle désormais très lointain, celui des manifestations de février 1917 à Saint-Pétersbourg et Moscou, celui des conflits du tiers-monde et de l’explosion démographique des pays « sous-développés » des années 1970. On assiste encore, depuis le début de cette année, à une spéculation sur les obligations des États les plus vulnérables, d'abord la Grèce, maintenant l'Irlande, alors que les pouvoirs publics, dans de nombreux pays, ont consacré d'importants moyens et creusé leur déficit pour sauver un secteur bancaire en capilotade.

Ces dysfonctionnements posent une question cruciale : qui dirige la manœuvre ? Sont-ce les élus de la nation ou les marchés financiers ? A dire vrai, on a le très net sentiment que ce sont ces derniers et que les pouvoirs publics n'interviennent qu'a posteriori pour éteindre les incendies. Et les acteurs de la finance, à peine tirés d'affaire, ne trouvent rien de mieux que de se retourner contre leurs sauveurs. Le constat accablant de ces crises est que la finance ne répond qu'aux intérêts particuliers de ses acteurs sans considération aucune pour l'intérêt général. Et que la conception de la main invisible d'Adam Smith, qui veut que des actions guidées par notre seul intérêt puissent contribuer à la richesse et au bien-être commun, mène à l'impasse, pour ne pas dire à la catastrophe.

Pour preuve, depuis des années, la finance n'a de cesse de rentrer dans sa bulle et de s'affranchir de la réalité, c'est-à-dire des besoins économiques qu'elle est censée servir. Jusqu'à ce que, bien sur, cette réalité ne la rattrape. Prenons le marché des produits dérivés. Ceux-ci sont des instruments financiers qui ont été créé, à l'origine, pour permettre aux entreprises de se couvrir contre différents types de risques financiers. C'est ainsi que, pour se couvrir contre les risques d'une augmentation du prix des matières premières dont elle a besoin pour sa production, une entreprise va acquérir, à un prix déterminé, des options d'achat de ces matières premières. Elle aura ainsi la garantie d'acheter celles-ci au prix prévu. En face, celui qui vend ces options prend le risque à la place de l'entreprise, en espérant que ce risque se transforme en opportunité. Une autre utilisation courante de produits dérivés concerne le risque de change, par exemple pour prémunir contre les variations de cours des entreprises qui achètent leur fournitures dans une devise et vendent leur production dans une autre.

Le problème est que les transactions sur les produits dérivés sont en forte croissance depuis le début des années 1980 et représentent désormais l'essentiel de l'activité des marchés financiers. En l'espace de dix ans, de 2000 à 2010, le marché des dérivés est en effet passé de 100.000 milliards de dollars à 600.000 milliards de dollars ! Si la fonction de garantie ou de couverture que ces produits offraient est évidemment essentielle, le développement extraordinaire des pratiques spéculatives auquel on a assisté ces dernières années va bien au-delà de la satisfaction de cette fonction. Bien pire, il détourne les flux financiers de cette autre fonction essentielle, le financement de l'économie réelle. On assiste ainsi à un véritable divorce, à une décorrélation entre les flux financiers et les flux de biens et de services.1

Et l'intérêt général ?

L'intérêt général est ainsi pris en otage de deux manières par cette déviance spéculative : les bulles finissent par éclater comme cela a été le cas avec les subprime américains – on en connaît les conséquences catastrophiques -, mais, en outre, l'économie est asséchée et désorientée. Asséchée car les flux financiers ne sont plus principalement destinés au financement de l'économie, au risque de créer un resserrement du crédit, les emprunteurs, entreprises et particuliers, n'arrivant pas à obtenir de crédit ou seulement à des conditions déraisonnables. Désorientée car la finance est privée de sa capacité à être le bras armé d'une politique économique dont la fonction est précisément d'orienter l'activité dans un sens qui satisfasse au mieux l'intérêt général.

Face à ce constat, il appartient aux pouvoirs publics de reprendre la barre. De deux manières. D'abord resserrer les mesures prudentielles, c'est-à-dire celles qui sont fondées sur la prudence, pour éviter que le système financier ne tremble à nouveau sur ses bases et, avec lui, l'économie et le lien social. Des réformes sont en cours, comme le montre l'adoption récente par le Parlement européen de la directive sur les fonds spéculatifs ou encore, au sein de ce même Parlement, les débats relatifs aux produits dérivés négociés de gré à gré. Même si les résultats peuvent paraître trop lents et incomplets, ils ont le mérite de constituer de premiers jalons dans la bonne direction.

Mais, à côté de mesures prudentielles, les autorités publiques doivent d'urgence se montrer davantage prescriptives et discriminantes pour orienter les activités et les flux financiers. Il ne s'agit pas seulement d'encadrer les pratiques spéculatives et de les rendre plus transparentes, il importe d'en réduire l'importance pour diminuer l'effet d'éviction qu'elles opèrent sur le financement de l'économie réelle.2 Et d'orienter l'allocation des ressources vers des objectifs qui prennent en compte les ambitions sociales et environnementales de nos démocraties. Mais comment y parvenir ?

Un parallèle peut être fait avec l'industrie pharmaceutique où, pour schématiser, il existe trois types de médicaments: ceux qu'il est interdit d'offrir en vente, ceux qu'il est autorisé de vendre mais qui ne donnent droit à aucun remboursement pour le patient et ceux enfin qui peuvent être vendu et dont le prix est partiellement remboursé. Pour ce qui concerne le secteur financier, tout le monde s'accorde à dire qu'une plus grande régulation est indispensable pour interdire certaines pratiques particulièrement nuisibles comme vient de nous le montrer la crise financière. Mais au-delà de ces interdictions, sans doute est-il justifié de favoriser l'éclosion de services financiers qui sont structurellement organisées pour répondre à des objectifs d'intérêt général.

Ceux-ci peuvent avoir trait à la protection du consommateur et à un développement local et durable.

Comment se prémunir ?

Les conditions relatives à la protection du consommateur pourraient ainsi être les suivantes:

  • avoir une activité limitée au métier bancaire de base, récolter l'épargne pour octroyer des crédits, sans aucune activité de banqu d'affaires;
  • favoriser la stabilité, par exemple en évitant la cotation des actions de la banque en bourse;
  • garantir l'inclusion financière de tous par une offre de produits simples et adaptés.

Le développement local, tant en terme économique que social, pourrait quant à lui être assuré par deux éléments:

  • une politique de crédit appropriée pour les agents économiques que sont les ménages, les entreprises et les organisations publiques et privées;
  • une politique qui vise à éviter toute forme d'évasion fiscale.

Le développement durable devrait quant à lui être assuré par l'intégration de critères sociaux et environnementaux dans les politiques de crédit et de placement.

Aux seules structures financières structurellement organisées pour répondre à ces objectifs d'intérêt général seraient réservés des mesures publiques incitatives : garantie publique, avantage fiscal, contrainte en capital plus faible, … Libre à celles qui veulent faire prévaloir leurs intérêts particuliers de le faire, pour autant qu'elles ne mettent pas le système en péril, mais sans l'appui d'une politique économique publique aux objectifs de laquelle elles ne satisfont pas.

Contrairement à ce que pensait Adam Smith, la richesse et le bien-être ne sont pas des conséquences automatiques, presque magiques, du marché. Il faut, pour les atteindre, développer une politique économique adéquate. Celle-ci consiste à contrôler mais aussi à discriminer, c'est-à-dire à privilégier les flux financiers tournés vers l'économie réelle et la satisfaction de l'intérêt général.

 

Bernard Bayot,
novembre 2010

1 Vincent Jacob, Réduire les pratiques spéculatives, Le Monde, 13 novembre 2010.

2 Vincent Jacob, op. cit.

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Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
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De nombreux dysfonctionnements ont été mis en exergue au sein de la sphère financière ces derniers mois. On pense bien sûr à la crise financière de 2007-2008 et, dans son sillage, les crises économique et sociale qui ont fait perdre à des millions d'individus leur emploi, leur habitation et les réserves qu'ils avaient constituées pour leurs vieux jour.

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2010
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11/2010
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Novembre

Les migrants solidaires

Soumis par Anonyme le
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Imagine n°85
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Grâce au soutien d'Alliance Kivu Belgique, de la ville de Ciney et de la Region wallonne, une entreprise de formation dans le métier du bâtiment a été créée dans la région dévastée de Shabunda.

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2011
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06/2011
Mois d'édition
Juin

La régulation des agences de notation

Soumis par Anonyme le

Les défaillances des agences de notation ont été spectaculaires ces derniers mois. Des problèmes de qualité et d'indépendance se posent, qui appellent une riposte énergique en matière de régulation. Mais améliorer la qualité du thermomètre ne suffit pas à guérir un malade! Deux actions complémentaires doivent être menées : réduire la spéculation sur les marchés, d'une part, et moins lui donner de prise, d'autre part.

Le problème

Une agence de notation est un organisme privé spécialisé dans l'analyse des comptes d'une société, d'un État ou d'une opération financière1. Elle publie des notes sur la capacité de ces entités à respecter leurs engagements.2
Mais font-elles correctement leur travail ? De nombreuses critiques avaient été émises par le passé, lors de la crise financière asiatique et dans le cas de l’Argentine en 1997, ou encore lors de la bulle internet et de la faillite de Lehman Brothers (noté A jusqu’à sa banqueroute de l’automne 2008), en passant par Enron (2001) ou Parmalat (2003). À chaque fois, les agences ont accordé d’excellentes notations à des organisations au bord du gouffre et sous-estimé jusqu’au dernier moment les risques de défaut de paiement. La qualité de leur travail d'analyse est donc régulièrement mis sur la sellette.
Avec la crise des subprimes3, un autre grief a vu le jour. On se souvient que des crédits hypothécaires risqués ont été accordés aux États-Unis mais que cette pratique, dangereuse en soi, s'est, en outre, accompagnée d'une autre, qui l'a été tout autant, la titrisation. De quoi s'agit-il ? Les banques d'affaires ont émis des titres représentant une société, pas une entreprise produisant des biens et des services, mais une société spécialement créée pour acheter le portefeuille de crédit d'un organisme prêteur et ces banques ont ensuite vendu ces titres à des investisseurs. En d'autres termes, le prêteur s'est dégagé de son risque et celui-ci, par la pratique de la titrisation, a été dispersé loin de tout contrôle régulatoire.

Ici aussi, l'analyse des agences de notation s'est avérée inexacte : 93 % des titrisations de produits hypothécaires commercialisés en 2006 avec la note AAA (la meilleure note) ont maintenant la note « d’obligation pourrie ». Mais il y a plus et c'est le deuxième grief invoqué à l'encontre de ces agences , elles se sont trouvées en conflit d'intérêts patent. Déjà, d'habitude, elles se font rémunérer par les promoteurs des produits qu'elles jugent, ce qui est évidemment critiquable en terme d'indépendance d'analyse. Mais, avec les subprimes, il y a plus : elles ont d'abord travaillé avec les banques pour concevoir les produits toxiques et obtenir le rating recherché, avant d'évaluer ceux-ci et d'accorder ledit rating ! Dans le cas des crédits titrisés, les agences de notation notent et sont en même temps parties prenantes de la titrisation. La constitution du produit et la notation sont complètement imbriquées. Sans la notation, le titre n’a pas d’existence4, peux-t-on lire en France. À la veille de la crise, la notation des produits structurés représentait (selon Michel Prada, ancien président de l’Autorité française des marchés financiers, AMF) la moitié du chiffre d’affaire des agences !5

Quelle régulation ?

Jusqu’à la crise des subprimes les agences de notation n’étaient pas réellement supervisées. En 2003, l’Organisation internationale des autorités de régulation des marchés financiers (OICV ou IOSCO, selon l'acronyme de son nom anglais, International Organization of Securities Commissions) qui regroupe les autorités nationales de marché (la Commission bancaire, financière et des assurances [CBFA] pour la Belgique, la Securities and Exchange Commission[SEC]pour les États-Unis…), a rédigé un code de conduite auquel les agences se soumettaient sur une base volontaire. Cela s'est manifestement révélé insuffisant.

Le 16 septembre 2009 a dès lors été adopté le Règlement (CE) n° 1060/2009 du Parlement européen et du Conseil sur les agences de notation de crédit.6 Ce texte, entré en vigueur le 7 décembre 2010, reprend pour l’essentiel les règles définies dans le code de l’OICV tout en leur donnant un caractère juridiquement contraignant. Il vise à encadrer l’activité des agences de notation de crédits en vue de protéger les investisseurs et les marchés financiers européens contre le risque de mauvaises pratiques. Il fixe les conditions d’émission des notations de crédit ainsi que des règles relatives à l’enregistrement et à la surveillance des agences de notation de crédit.

Comment ce Règlement gère-t-il les questions évoquées ci-dessus de la qualité et de l'indépendance des agences de notation ? Sur cette dernière question, l'objectif est que l’émission des notations de crédit ne soit affectée par aucun conflit d’intérêt ni aucune relation commerciale. Pour ce faire, les agences de notation de crédit sont soumises à des exigences organisationnelles et opérationnelles particulières. Le conseil d’administration ou de surveillance de l’agence assure l’indépendance du processus de notation. Il veille à ce que les conflits d’intérêts soient identifiés, gérés et divulgués adéquatement, et enfin, à ce que l’agence de notation se conforme aux exigences fixées par le règlement.

Pour ce qui est de la qualité, les méthodes de notation des agences et les descriptions des modèles et des principales hypothèses de notation, telles que les hypothèses mathématiques ou corrélatives, font l’objet de publications de caractère général. Par ce biais, les agences garantissent la qualité des notations de crédits qu’elles produisent, de même que la transparence des méthodes utilisées.

Comment s’exerce la surveillance sur ces activités de notation ? Les agences de notation doivent s’enregistrer auprès du Comité européen de régulation des valeurs mobilières (CERVM), qui est un organe indépendant de conseil, de contrôle et de réflexion, chargé d’assister la Commission européenne dans le domaine des valeurs mobilières. Le CERVM assure une application cohérente du Règlement en facilitant et renforçant la coopération des autorités nationales compétentes dans l’exercice de leur mission de surveillance, et en coordonnant les pratiques de surveillance.

La crise grecque

Le débat des agences de notation a repris de plus belle lorsque, au début de l'année 2010, Standard & Poor's, une des trois grandes agences au plan mondial, a baissé la note de la Grèce en catégorie spéculative. On se souvient que cette décision avait lourdement pesé sur les efforts de soutien à la Grèce et sur l'euro. La Commission cherche depuis lors à réduire l'influence des agences de notation sur les marchés financiers afin d'éviter que ce genre de scénario ne se répète et le 30 avril 2010 Michel Barnier, commissaire européen au Marché intérieur et aux Services, a déclaré qu'il réfléchissait à la création d'une agence de notation européenne.

Le 5 novembre 2010, la Commission a lancé une consultation sur les agences de notation.>Nous devons tirer toutes les leçons de la crise, selon Michel Barnier. Nous avons déjà introduit des règles au niveau de l’UE pour améliorer la surveillance et renforcer la transparence sur le marché de la notation du crédit. Il s’agissait d’une étape importante, mais nous devons réfléchir à l’étape suivante: le rôle des notations proprement dites et l’incidence qu’elles peuvent avoir sur les marchés. Aujourd’hui, nous lançons une consultation où nous posons toutes les questions qui doivent être posées. Les contributions que nous recevrons nous aideront à définir les futures actions à prévoir.» Parmi les pistes envisagées, la Banque centrale européenne (BCE) ou les banques centrales nationales pourraient également être autorisées à émettre des notes pour accroître la concurrence et les agences privées pourraient être contraintes à publier gratuitement la totalité de leurs recherches sur la dette publique.

Qu'en penser ?

Les défaillances des agences de notation ne font aucun doute, pas plus que les problèmes évoqués plus haut de qualité et d'indépendance. Une riposte énergique s'impose. La réglementation européenne adoptée en 2009, qui remplace un code de bonne conduite particulièrement inopérant est sûrement un pas dans la bonne direction. Reste à vérifier que cette initiative soit efficace et suffisante. L'avenir nous le dira.

Il est toutefois illusoire de penser que la seule régulation des agences de notation va régler les mouvements spéculatifs hasardeux sur les marchés financiers et l'instabilité consécutive de ceux-ci. Améliorer la qualité du thermomètre ne suffit pas à guérir un malade ! Deux actions complémentaires doivent être menées: réduire cette spéculation, d'une part, et moins lui donner de prise, d'autre part.

Il faut d'abord dissuader la spéculation à court terme, qui se caractérise par des échanges financiers très rapides et très nombreux avec des marges bénéficiaires très faibles. Cette dissuasion peut se faire par l'introduction d'une taxe sur les transactions financières, qui serait trop faible pour entraver les transactions productives mais constituerait, par l'effet de la répétition, un frein aux transactions spéculatives. S'appliquant à chacune des transactions, elle grèverait de façon importante le bénéfice final du spéculateur.7

Mais on peut aussi s'interroger en tant qu'entrepreneur ou décideur politique sur la pertinence de confier aux marchés financiers l’allocation d’une part toujours croissante de nos besoins de capitaux ou de crédit. L'entreprise ne gagnerait-elle pas à s'associer davantage un actionnariat stable et diversifié, à la manière des coopératives8 et les pouvoirs publics à se financer auprès de leur population ? En Belgique, par exemple, la dette publique ne pèse pas loin de 350 milliards d’euros, alors que plus de 200 milliards d’euros reposent sur des livrets d’épargne. D’où cette idée, émise par Eric De Keuleneer (professeur à la Solvay Brussels School of Economics – ULB) et reprise par le ministre des Finances Didier Reynders, d'accorder une exonération de précompte mobilier aux souscripteurs de bons d'État, comme on le fait pour les dépôts sur les livrets d’épargne.9

Dans la mesure où les marchés deviennent générateurs de risques pour les émetteurs, ceux-ci seraient en effet bien inspirés d'appliquer ce principe de précaution qui consiste à ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier.

Bernard Bayot,

février 2011

1 "Agence de notation", in L'économie de A à Z, Alternatives Economiques, hors-série poche n°40, septembre 2009 et DEMONCHY, Anne-Sophie, "Qu’est-ce qu’une agence de notation ?", 1er juillet 2010, disponible sur internet : http://www.politique.net/2010070102-qu-est-ce-qu-une-agence-de-notation.htm

2 Annika Cayrol, Les agences de notation financière, Réseau Financement Alternatif, novembre 2010.

3 Voir Bernard Bayot, Mon toit et mes finances, Réseau Financement Alternatif, novembre 2010.

4 Michel Aglietta, La crise. Pour quoi en est-on arrivé là - Michalon 2009.

5 Patrick Jolivet, Les agences de notation dans la tourmente, Les Echos, 7 janvier 2011.

6 JO L 302 du 17.11.2009.

7 Bernard Bayot, Les produits dérivés, Réseau Financement Alternatif, février 2011.

8 Voir par exemple Bernard Bayot, La Caja Laboral Popular, Réseau Financement Alternatif, avril 2005 .

9 Yves Cavalier, Aider l’Etat à s’en sortir, La Libre Belgique, 29 janvier 2011.

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2011
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02/2011
Mois d'édition
Février

Les fonds spéculatifs

Soumis par Anonyme le

Définition

Les fonds spéculatifs, hedge funds en anglais, sont des fonds d’investissement d’un type particulier. Il n’existe pas de définition légale, précise et formelle du terme. Littéralement, cela signifie en français « fonds de couverture », car se livrant à des placements de protection contre les fluctuations des marchés. En réalité, ils utilisent massivement les techniques permettant de spéculer sur l’évolution des marchés, à la baisse comme à la hausse (utilisation massive de produits dérivés1, de la vente à découvert2 et de l’effet de levier3). Ils sont peu transparents et souvent implantés dans les paradis fiscaux4.

L'investissement minimal est relativement élevé : de quelques dizaines de milliers de dollars parfois, à plusieurs centaines de milliers plus souvent, suivant les fonds. De plus, n'étant par essence pas aussi régulés que les fonds de placement classiques, ils ne peuvent être distribués au grand public et sont réservés à la catégorie des investisseurs institutionnels ou aux grandes fortunes.

Au cours des dix dernières années, les fonds spéculatifs ont enregistré une croissance rapide. On estime qu’aujourd’hui près de 10.000 fonds sont opérationnels dans le monde et qu’ils gèrent 1426 milliards de dollars d’actifs, soit plus de 700 % de plus qu’en 1995 !

Pourquoi sont-ils dangereux ?

Plusieurs facteurs concourent à rendre ces fonds particulièrement dangereux. Le premier facteur est leur stratégie en tant qu'actionnaires, c'est-à-dire de propriétaires, d'entreprises. Toutes les entreprises ont besoin d’une stratégie, matérialisée par un plan. Cette stratégie entrepreneuriale se fonde traditionnellement sur une forte volonté de proactivité, de prise de risques et d'innovation. Bref, l'entreprise se projette dans le futur et consent les investissements nécessaires pour atteindre cette vision qu'elle a d'elle-même dans le futur. À l'inverse, les fonds spéculatifs n'ont pas de stratégie entrepreneuriale mais uniquement une stratégie fondée sur de forts objectifs de rentabilité, souvent à court terme. Cette stratégie des fonds spéculatifs a deux conséquences.

D'abord, leur prise de position quand ils sont actionnaires. Ils tendent à chercher une rentabilité immédiate et rapide au détriment d'investissement à long terme plus coûteux. Leur influence sur la stratégie de certaines entreprises peut donc avoir des conséquences négatives pour toutes les parties prenantes de celle-ci car elle privilégie trop souvent une approche court-termiste de la stratégie de l’entreprise cible. Un exemple concret consiste dans les opérations d’acquisitions par emprunt (ou LBO pour “leveraged buy-outs”) : une société est achetée avec de l’argent emprunté qui doit être remboursé rapidement ; pour ce faire, le fonds met une pression financière de très court terme sur l'entreprise qui est obligée de réduire ses charges (licenciement d'employés, arrêt des investissements productifs de long terme) et de vendre ses actifs. Ainsi, une société autrefois saine et dégageant des bénéfices se trouve-t-elle dépecée.

Ensuite, un hedge fund pourra vendre rapidement une part importante du capital d'une entreprise qu'elle détient si cette dernière ne convient plus à la stratégie du fond. Sous l'effet de la loi de l'offre et de la demande, la valeur de l'action de cette entreprise s'effondrera alors. Ce qui ne sera qu'une petite perte pour le fond se transformera en catastrophe pour l'entreprise.

Le deuxième facteur qui rend ces fonds particulièrement dangereux est le risque systémique c’est-à-dire le risque de déstabilisation généralisée des marchés financiers résultant de la défaillance d’un fonds spéculatif de grande taille ou de la défaillance en chaîne de fonds spéculatifs d’importance plus moyenne. Leur puissance financière est telle que la chute de l'un d'entre eux peut provoquer une forte baisse des marchés financiers et par extension de l'économie. Et de fait, on peut marquer le début de la crise entre mai et juillet 2007 avec la faillite de plusieurs hedge funds spécialistes des dérivés de crédit : UBS Dillon Reed Capital Management, Bear Stearns High-Grade Structured Credit Fund et Bear Stearns High-Grade Structured Credit Enhanced Leveraged Fund. Durant le second semestre 2007 et au début 2008, d’autres fonds – pour la plupart investis dans des ABS (Asset-backed securities) subprimes – ont connu des difficultés les conduisant à suspendre les remboursements aux investisseurs ou à faire faillite. On peut en donner la liste sans doute non exhaustive : Bear Stearns ABS, Caliber, Galena Street, Solent, Basis Capital, Cheyne, Synapse, Thornburg, CSO Partners et Falcons Partners (deux hedge funds de Citigroup), et Peloton.5

Régulation

L’amélioration de leur régulation a été débattue au G 20 de Londres en avril 2009. Une réforme de leur encadrement a fait déjà l’objet d’importantes controverses au niveau européen. Finalement, le 11 novembre 2010, le Parlement européen a approuvé, à une très grande majorité, la Directive sur les gestionnaires de fonds d'investissements alternatifs appelée aussi directive AIFM (Alternative Investment Fund Managers).6 La dernière étape est maintenant l'approbation formelle par le Conseil qui devrait avoir lieu dans les semaines qui viennent. La Directive devrait entrer en vigueur début 2011 avant d'être transposée et appliquée par les États membres en 2013. Que dit-elle ?

Elle met en place des règles nouvelles et robustes qui vont permettre de renforcer :

  • la transparence,
  • la conservation des titres : encadrement de la fonction de dépositaire qui réalise pour ses clients tout ce qui ne fait pas directement référence à la décision d’investissement : la conservation des actifs du fonds, le contrôle de la régularité des décisions du fonds par rapport aux règles d’investissement qu’il a définies, le contrôle de l’application des règles de valorisation des actifs, etc.7
  • la gestion des risques ;
  • et l'effet de levier (c'est-à-dire le niveau de prise de risques au regard des fonds disponibles).

Elle donne des pouvoirs substantiels aux régulateurs :

  • les régulateurs devront agréer les gérants de fonds,
  • ils disposeront des informations nécessaires pour contrôler les prises de risques (niveau de l'effet de levier, gestion de risques)
  • et ces informations pourront être partagées avec le Conseil des Risques Systémiques.8

Ensuite, pour qu'un fonds spéculatif puisse être commercialisé dans l'Union européenne, l'accord prévoit un passeport pour les fonds et les gestionnaires des pays tiers. C'était la proposition initiale de la Commission. Ce sera un passeport qui se mérite, fondé sur des bases solides et apportant toutes les garanties en termes de gestion de risques. C'est aussi une façon de renforcer le marché intérieur.

Critiques

Plusieurs critiques de la directive sont formulées.9

La première est que la directive ne constitue pas un pas en avant dans la création d'un espace financier européen. Au contraire, elle étend le niveau national d'accréditation de ces fonds, en permettant aux organismes domiciliés dans un État membre d'avoir, sans autorisation de chaque autorité nationale, accès à l'ensemble des territoires nationaux composant l'UE. Ceci est rendu possible par l'effet du « passeport européen » permettant la commercialisation des fonds dans toute l'Union européenne, sans devoir obtenir une autorisation dans chaque pays.

Or, comme toute place financière située dans un État membre, la City de Londres, où sont domiciliés 70 % à 80% des hedge funds, sera seulement dépendante de la structure de contrôle britannique. Ainsi, au lieu de former un cadre régulateur européen, la directive favorise une concurrence par le bas entre les États membres. Rien n'empêchera les gestionnaires de choisir leur pays d'enregistrement en fonction du degré de complaisance des autorités nationales à leur égard.

Une deuxième critique porte sur le niveau de contrôle, en particulier en ce qui concerne le levier d'endettement. Certes, les gestionnaires de fonds ont maintenant l'obligation de définir un levier d'endettement maximum. Cette information est transmise au régulateur national du pays européen où le gestionnaire est inscrit. Mais, rien, dans la directive, n'oblige celui-ci à réagir lorsque le levier est trop important. Et l'autorité de régulation européenne des marchés financiers, n'aura pas non plus le pouvoir de contraindre le régulateur national à le faire.

Une autre critique de cette directive est qu'elle ouvre le marché européen aux fonds localisés dans les paradis fiscaux. Contrairement aux Organisme de Placement Collectif en Valeurs Mobilières (OPCVM)10, qui doivent nécessairement être localisés dans l’Union européenne, les fonds spéculatifs pourront continuer à être localisés en dehors de l'Union et, deux ans après l’entrée en application de la directive, bénéficier d’un passeport leur permettant d’être commercialisés dans toute l’Europe. Ces fonds bénéficieront donc du label européen sans garantie réelle pour leurs investisseurs et surtout sans réelle capacité pour le nouveau superviseur européen de contrôler si ces fonds offshore respectent vraiment les règles de la directive.

Certes une disposition de la directive conditionne l’accès des fonds spéculatifs aux marchés européens à la signature d’un accord de coopération fiscale et d’un échange effectif d’informations entre le pays où le fonds est domicilié et celui où il est commercialisé. Ainsi, les fonds spéculatifs, situés dans des pays qui n'assurent pas un échange effectif d'informations, notamment fiscales, ne pourront plus être commercialisés dans l'Union européenne. La question est d'importance quand on sait que 80 % des fonds spéculatifs sont situés dans ces centres offshore.

Cependant, suite aux pressions de Londres, le texte final limite le champ de la directive à la commercialisation dite « active ». Cela signifie concrètement que rien n'empêchera un investisseur européen, une banque, une compagnie d'assurance, un organisme de placement collectif, d'acheter des parts de fonds, situés hors de l'Union européenne, qui n'auraient pas obtenu le passeport européen pour non-respect des critères de la directive. Cette disposition donne ainsi accès au territoire européen aux capitaux placés dans les paradis fiscaux en relation avec la City, tels les territoires anglo-normands et les îles Caïmans ou par exemple, ceux gérés directement par les États-Unis, tel le Delaware.

Conclusions

Les fonds spéculatifs sont dangereux pour les entreprises en raison de leur stratégie court-termiste, ils le sont pour l'économie en général en raison des risques déraisonnables qu'ils prennent et ils le sont, au travers des paradis fiscaux où 80 % d'entre eux sont implantés, pour la souveraineté des États auxquels ils soustraient des recettes fiscales mais aussi pour la justice dans la mesure où ils constituent des instruments de blanchiment à l’argent mafieux et favorisent la corruption.

Cela fait quand même beaucoup de griefs pour que l'on s'occupe un peu d'eux !

Certes le sujet est compliqué et n'est guère amusant. Et il a fait l'objet de débats âpres au sein des institutions européennes avant que la directive ne soit adoptée. Mais un débat entre spécialistes et lobbyistes du secteur financiers... Pourtant il concerne suffisamment d'enjeux qui touchent aux citoyens pour que la société civile fasse entendre sa voix et monte au créneau pour une régulation mieux adaptée au service de l'intérêt général.

Comme dans bien d'autres débats qui concernent le secteur financier, on en vient à la même conclusion : l'urgence de décoder les enjeux, de faire preuve de pédagogie, d'ouvrir des débats sérieux sur des enjeux qui nous concernent tous !

Bernard Bayot,

février 2011

1 Voir Bernard Bayot, Les produits dérivés, Réseau Financement Alternatif, février 2011.

2 La vente à découvert consiste à vendre à terme un titre que l'on ne détient pas le jour où cette vente est négociée mais qu'on se met en mesure de détenir le jour où sa livraison est prévue. Si la valeur du titre baisse après la vente à découvert, le vendeur peut racheter les titres au comptant et dégager une plus-value. Si, à l'inverse, elle monte, le vendeur s'expose à un risque de perte illimitée, tandis qu'un acheteur ne peut pas perdre plus que sa mise de fonds.

3 Cette stratégie d’investissement consiste à mobiliser, à côté de son propre argent, des sommes empruntées aux banques pour se lancer dans des opérations spéculatives. Autrement dit, l’effet de levier permet aux hedge funds de démultiplier les gains potentiels de leurs placements. Cependant, lorsque leurs paris spéculatifs tournent mal, ils peuvent mettre en difficulté les banques qui leur ont prêté de l’argent.

4 Voir Bernard Bayot, Les paradis fiscaux, Réseau Financement Alternatif, février 2011.

5 André Cartapanis etJérôme Teïletche, Les hedge funds et la crise financière internationale, http://www.ffsa.fr/webffsa/risques.nsf/b724c3eb326a8defc12572290050915b/...$FILE/Risques_73-74_0026.htm.

7 Gérard Marie Henry, Les hedge funds, Groupe Eyrolles, 2008, ISBN : 978-2-212-54005-5 .

8 Le Comité européen des risques systémiques (CERS) est officiellement rentré en action en décembre 2010. Cet organisme indépendant, quoique placé dans l'orbite de la Banque Centrale Européenne (BCE), est chargé de veiller à la stabilité financière dans les pays de l'Union européenne.

9 Jean-Claude Paye, Une régulation européenne au service de la City ?, Le Monde, 22 novembre 2010 ; Pascal Canfin, Directive fonds spéculatifs et paradis fiscaux : un progrès ?, 15 décembre 2010, http://alternatives-economiques.fr/blogs/canfin/2010/12/15/directive-fon....

10 Il s'agit d'une entité qui gère un portefeuille dont les fonds investis sont placés en valeurs mobilières, comme une SICAV ou un fonds commun de placement.

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2011
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02/2011
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Février

Les produits dérivés

Soumis par Anonyme le

Les produits dérivés sont un des outils favoris des fonds spéculatifs. Initialement prévus pour couvrir les risques, ils sont de plus en plus utilisés pour en retirer un bénéfice immédiat. Ils ont été accusés d'avoir précipité la crise financière.

Définition

Un produit dérivé est un instrument financier qui revêt trois caractéristiques :

  • sa valeur fluctue en fonction de l'évolution du taux ou du prix d'un produit appelé sous-jacent ;
  • il ne requiert aucun placement net initial ou peu significatif ;
  • son règlement s'effectue à une date future.

Sa fonction, à l'origine, est de se prémunir du risque. Prenons un exemple : une chocolaterie a besoin de cacao pour fabriquer ses produits ; pour se préserver du risque de fluctuation du prix d'achat de cette matière première, elle acquiert, pour un prix déterminé, des options d'achat de cacao pour chacune des dates où elle doit se faire livrer ; ainsi l'augmentation éventuelle du prix de cette matière première n'aura pas d'incidence sur le prix de revient de ses produits et elle pourra vendre ceux-ci à un prix constant. Ce qui vaut pour les risques de cours des matières premières vaut également pour d'autres types de risques comme le risque de change. Ainsi, je peux vouloir me prémunir contre la variation de cours de deux devises, celle avec laquelle j'achète mon cacao (le dollar, par exemple) et celle que j'utilise pour la vente de mon chocolat (l'euro, par exemple). Ou encore, je veux me prémunir d'un risque de crédit : j'accorde un prêt mais je ne veux pas assumer le risque de défaut de l'emprunteur et je vends ce risque sur le marché.

Fondamentalement, c'est donc un principe d'assurance : le fabricant laisse les risques à d'autres qui spéculent sur le fait que ceux-ci n'arrivent pas ou dans une mesure limitée. Parce qu’ils redistribuent le risque, ils peuvent être utilisés pour s’assurer (se couvrir) contre un risque particulier ou, inversement, pour prendre un risque (investir ou spéculer).

Les transactions sur les produits dérivés sont en forte croissance depuis le début des années 1980 et représentent désormais l'essentiel de l'activité des marchés financiers. Les transactions sur produits dérivés, toutes catégories confondues, qui représentaient moins de 1 T$ (soit mille milliards de dollars) au début des années 1980 se montent vingt-cinq ans plus tard à 1,406 T$ (soit 1 million quatre cent six mille milliards de dollars !).1

Gestion des risques

On se rappelle la quasi-faillite de Bear Stearns, une des plus grandes banque d'investissement, d'échange de valeur mobilière et agent de change qui, le 16 mars 2008, a été rachetée par le géant bancaire américain JPMorgan Chase pour seulement 236 millions de dollars, avec l'aide financière de la banque centrale américaine (Federal Reserve System, FED). On se souvient de la faillite de Lehman Brothers, banque d'investissement multinationale proposant des services financiers diversifiés, le 15 septembre 2008.

On a encore en mémoire le sauvetage de l’assureur américain American International Group, Inc. (AIG), un des chef de file mondial de l’assurance et des services financiers, le lendemain, 16 septembre. Actif dans plus de 130 pays, AIG est aux États-Unis, le plus grand arbitre d’assurance pour les secteurs commercial et industriel. Longtemps numéro un mondial par son chiffre d'affaires, AIG est passée en troisième place en 2008 en raison de la crise des subprimes et en dépit de son sauvetage par les pouvoirs publics. C'est que l'assureur a dû recevoir dans l’urgence plus de 180 milliards de dollars du trésor et de la FED pour avoir vendu imprudemment des assurances contre le défaut des emprunts subprimes. L'État américain détient désormais 80% de AIG.

Ces événements ont révélé au grand jour les risques encourus par les contreparties2 qui spéculent sur les produits dérivés et les dysfonctionnements du marché des dérivés de gré à gré3. Ils ont clairement montré la nécessité d'encadrer les produits dérivés, en particulier, la gestion des risques liés aux instruments dérivés traités de gré à gré (over-the-counter, OTC). Aujourd’hui, les dérivés s’échangent en effet le plus souvent sous forme bilatérale entre une banque et son client (la plupart du temps une autre banque), en dehors d'une chambre de compensation ou d'une bourse. Cette situation engendre une forte opacité et se traduit par une hétérogénéité des pratiques prudentielles des différents acteurs financiers.

Le G20 de Pittsburgh de septembre 2009 en a pris conscience et a adopté une approche commune visant à mieux contrôler ces risques. Deux orientations ont été retenues : la compensation centralisée par des contreparties centrales (CCP) de tous les produits jugés suffisamment standardisés et l’enregistrement de ces transactions par des infrastructures dédiées (trade repositories). Ces exigences ont plusieurs objectifs : accroître l’efficience de ces marchés, empêcher les fraudes et abus et surtout prévenir le risque systémique généré par les produits dérivés.

Régulation européenne

Cette approche s'est traduite dans l'Union européenne par la proposition faite le 15 septembre 2010 par la Commission d'un Règlement sur les dérivés de gré à gré, les chambres de compensation multilatérales et les référentiels centraux. Consciente des risques engendrés par le système actuel, l’objectif affiché de la Commission européenne est d'accroître la transparence dans les dérivés négociés sur le marché de gré à gré et les rendre plus sûrs en réduisant le risque de contrepartie et le risque opérationnel. La nouvelle législation ne devrait toutefois pas être mise en place avant fin 2012 et devra au préalable faire l'objet de longues négociations avec le Parlement et les États membres.

Premier objectif : accroître la transparence. Actuellement, il n'est pas obligatoire de déclarer les contrats dérivés de gré à gré, de sorte que ni les responsables politiques, ni les autorités de régulation, ni même les participants au marché, n'ont de vision claire de ce qui se passe sur le marché. La proposition de la Commission prévoit que les transactions sur les produits dérivés de gré à gré réalisées dans l'UE devront être déclarées à des centres de conservation des données, appelés «référentiels centraux». Les autorités de régulation de l'UE auront accès à ces référentiels, ce qui leur permettra d'avoir une meilleure idée de ce que chacun doit et à qui, et de détecter plus rapidement d'éventuels problèmes, comme l'accumulation de risques.

Dans l'intervalle, la nouvelle Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) sera chargée de la surveillance des référentiels centraux et de l'octroi ou du retrait de leur enregistrement. En outre, les référentiels centraux devront publier des positions agrégées par catégorie de dérivés, de manière à ce que les participants au marché aient une vision plus claire du marché des dérivés de gré à gré. En d'autres termes, il s'agit d'avoir une photographie instantanée et fiable des risques pris par les uns et les autres.

Deuxième objectif : réduire les risques de crédit de la contrepartie. Actuellement, les participants au marché des produits dérivés de gré à gré ne tiennent pas suffisamment compte du risque de crédit de la contrepartie, c'est-à-dire le risque de perte lié au fait qu'une partie ne s'acquitte pas des paiements dus le moment venu. La proposition de la Commission prévoit que les dérivés de gré à gré qui sont normalisés (c'est-à-dire qui remplissent des critères d'éligibilité prédéterminés, par exemple un niveau élevé de liquidité) devront être compensés par des contreparties centrales. Ces contreparties centrales sont des entités qui s'interposent entre les deux contreparties à une transaction, en devenant ainsi l'acheteur vis-à-vis de tout vendeur et le vendeur vis-à-vis de tout acheteur. Cela permettra d'éviter que la faillite d'un participant au marché ne provoque celle d'autres participants et ne mette en danger l'ensemble du système financier. Pour les contrats qui ne sont pas éligibles et ne sont donc pas compensés par une contrepartie centrale, différentes techniques de gestion des risques devront s'appliquer (par exemple l'obligation de détenir davantage de capital). Étant donné que les contreparties centrales devront assumer des risques supplémentaires, elles devront se soumettre, pour des raisons de sécurité, à des règles de conduite rigoureuses et à des exigences harmonisées sur les plans organisationnel et prudentiel (règles de gouvernance interne, audits, exigences de capital accrues, etc.). En d'autres termes, il s'agit d'atténuer les conséquences de la faillite d'un acteur : les transactions se font en principe par l'intermédiaire d'une contrepartie centrale qui paie de toute façon et, si elles se font sans contrepartie centrale, les cocontractants doivent se soumettre à des règles plus rigoureuses pour réduire le risque de faillite.

Troisième objectif : réduire le risque opérationnel. Le marché des dérivés de gré à gré autorise une grande souplesse dans la définition des termes économiques et juridiques des contrats. De ce fait, le marché compte un grand nombre de contrats très complexes conçus sur mesure, qui demandent encore beaucoup d'interventions manuelles à différents stades du traitement. Cela augmente le risque opérationnel, c'est-à-dire le risque de pertes liées par exemple à l'erreur humaine. La proposition de la Commission exige des participants au marché qu'ils mesurent, contrôlent et atténuent ce risque, par exemple en confirmant par voie électronique les termes des contrats dérivés de gré à gré.

Qu'en penser ?

Le besoin de couverture des risques par des opérateurs économiques ne fait pas de doute et les en priver serait préjudiciable à ceux-ci mais à aussi à l'économie dans son ensemble. C'est que cette couverture est facteur de stabilité, profitable à tous. Là où le bât blesse, c'est lorsque la contre-partie qui prend le risque -c'est sa fonction- le fait davantage dans un but spéculatif -donc, souvent à court terme, dans le but de le replacer vite et à meilleur compte- que dans le cadre d'une activité d'assurance ou d'investissement – fondé sur une gestion de risques à long terme. Cette activité spéculative, souvent éloignée de l'opération économique sous-jacente, devient alors elle-même facteur d'instabilité comme les crises à répétition l'ont montré.4

Quelles mesures prendre pour contrer ce biais ? L'option retenue par le G20 et la Commission européenne consiste à « encadrer » les transactions. Ce qui n'est d'ailleurs pas du goût de tous. C'est ainsi que des entreprises non financières qui recourent pour leur activité industrielle à l'achat de produits dérivés craignent que la nouvelle régulation n'entraîne de nouvelles contraintes en terme de liquidité et de capital, auxquelles elles ne pourraient faire face.

Mais, par ailleurs, cet « encadrement » est-il suffisant ? C'est que le risque de faillite d'une chambre de compensation n'est pas nul. Ainsi, en France, la volatilité exceptionnelle du prix du sucre, multiplié par 45 entre 1966 et 1974 avant de s'effondrer, a favorisé des manipulations du marché qui ont conduit à la faillite de la chambre de compensation de la bourse de commerce de Paris en raison de la défaillance d’un opérateur qui possédait plus de la moitié des positions.

On se souviendra également qu'en 1995, la Barings, la plus vieille banque d'Angleterre (250 ans d'existence), a été mise en faillite à cause de placements à découvert supérieurs aux fonds propres de la banque. Un bureau de trading basé à Singapour et opérant sur les marchés dérivés d'action avait en effet été en mesure de générer 850 M£ de pertes, engloutissant plus du double des capitaux propres de la banque et la précipitant dans la faillite à la stupeur de son propre top management basé à Londres. Pourtant, le marché à terme de Singapour était régulé par une chambre de compensation...

Les mesures d'encadrement envisagées, pour importantes qu'elles soient, ne paraissent pas suffisantes. Il faut en outre dissuader la spéculation à court terme, qui se caractérise par des échanges financiers très rapides et très nombreux avec des marges bénéficiaires très faibles. Cette dissuasion peut se faire par l'introduction d'une taxe sur les transactions financières, qui serait trop faible pour entraver les transactions productives mais constituerait, par l'effet de la répétition, un frein aux transactions spéculatives. S'appliquant à chacune des transactions, elle grèverait de façon importante le bénéfice final du spéculateur.

 

Bernard Bayot,
février 2011

1Lionel Jospin et François Morin, Faire face à la déraison financière, Le Monde, 5 septembre 2008.

2La contrepartie est une des deux parties qui conclue le contrat (l'acheteur ou le vendeur),

3Les contrats de gré à gré s'effectuent « à l'amiable » sans passer par une autorité supérieure. Concernant les produits dérivés, le contrat s'établit directement entre deux banques.

4Romain Thomas, Produits dérivés de gré à gré – Les paradoxes de la régulation, Le nouvel économiste, 13 janvier 2011.

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