Aller au contenu principal

Financial Services Provision and Prevention of Financial Exclusion

Soumis par Anonyme le
Type de support
Type de document
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Introduction What is financial exclusion? Levels of financial exclusion Who is most likely to be financially excluded? The causes and consequences of financial exclusion Extent of the financial exclusion debate in Europe Market policy approaches to financial exclusion Voluntary charters and codes of practice for financial exclusion Government intervention to promote financial inclusion Recommendations and conclusions Bibliography Annexes

Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-POPP2008-1
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2008
Date d'édition
03/2008
Mois d'édition
Mars

Octroi de crédit : la minimisation des risques de défaillance n'a pas le dernier mot

Soumis par Anonyme le

De l'accès au crédit

Il existe en Belgique différents types de professionnels du crédit : banque ou organisme de crédit, ou encore fournisseur de carte de crédit ou compagnie d'assurances.

Chaque acteur développe sa stratégie en matière d'offre de crédit, peut choisir de se spécialiser dans l'offre de certains produits ou cibler certains publics particuliers ; l'accès au crédit n'étant pas, en tant que tel, un droit du citoyen. La politique « risque » qui est décidée au sein d'un établissement déterminera le taux de défaut de paiement acceptable, compte tenu du rendement projeté du type de crédit envisagé. Cette politique commerciale se construit en grande partie sur ce qui est généralement qualifié de « credit scoring » ou « scoring d'octroi », qui établit une probabilité de défaillance pour tout profil de demandeur de crédit.

En fonction de leur positionnement sur le marché, certains prêteurs auront donc plus que d'autres tendance à s'approcher de publics financièrement plus fragiles (organismes proposant des cartes de paiement et des cartes de crédit) alors que d'autres s'en éloigneront (banques s'orientant vers la gestion de fortune).

Et si tous, sans exception, cherchent à minimiser leur risque de perte sur crédit, le pourcentage de risque de défaillance « acceptable » peut différer d'un prêteur à l'autre, puisqu'il dépend, notamment :

  • des politiques poursuivies (s'ouvrir une niche de clientèle particulière, élargir sa part de marché, tester un nouveau produit...) ;
  • de l'image de marque du prêteur et de son positionnement sur le marché ;
  • des particularités des crédits proposés (taux, durée, montant, marketing, process...) qui influencent le niveau de rentabilité du produit.

Autrement dit, si les prêteurs cherchent à minimiser les risques de défaillance, ils le font dans un souci de maximisation du profit. Mais cette recherche du profit maximal peut amener certaines institutions à tolérer une part d'impayé plus ou moins significative, car cela permet de dégager plus de bénéfices.

Maximisation du profit : notion de base

La maximisation du profit se calcule de manière précise en théorie microéconomique, ce qui permet de déterminer avec justesse le niveau de production idéal à mettre en oeuvre pour l'atteindre.

Pour ce faire, cette théorie démontre qu'une entreprise a intérêt à augmenter sa production aussi longtemps que le revenu supplémentaire (appelé le revenu marginal) tiré d'une unité supplémentaire vendue (en l'occurrence, ici, un crédit supplémentaire) est supérieur aux coûts supplémentaires qui ont dû être mis en oeuvre pour produire cette nouvelle unité. Elle atteindra son niveau de profit maximum précisément au moment où les revenus dégagés égalisent les coûts engagés.

Une autre manière d'illustrer schématiquement cette recherche de profit maximum est donc de trouver la meilleure combinaison entre coûts fixes et coûts variables. On sait que les coûts fixes sont d'autant plus faibles à l'unité produite que le volume produit est important (on réalise alors des économies d'échelle). Ceci est vrai à l’intérieur de certaines marges, au-delà desquelles il devient à nouveau nécessaire d’accroître les coûts fixes (ex. : surface de l'entreprise, standard téléphonique, publicité...).

Dans le cas qui nous occupe, la maximisation du profit déterminera le volume idéal de crédits à réaliser, qui correspond lui-même à un niveau de score spécifique, comme nous allons l'illustrer dans le paragraphe suivant.

Illustration

Le graphique ci-dessous représente la répartition des clients selon qu'ils ont ou non remboursé leur crédit ; ces clients sont classés en fonction du niveau de score obtenu (axe des abscisses). On comprend que pour chaque niveau de score, un certain nombre de clients n'ont pas remboursé (ligne pointillée) et qu'un certain nombre d'autres ont remboursé (ligne continue).

On constate aussi que, pour chaque niveau de score, la proportion change. À 400, le nombre de crédits non remboursés est supérieur à celui des crédits remboursés. Autour de 500, on se trouve à environ 50 % remboursés / 50 % non remboursés. Au-delà, la part des crédits remboursés est supérieure à celle des défaillances.

Mais où placer le niveau idéal de production ? À 600 à 700 ? Au-delà ? Comment être sûr de faire le bon choix, de fixer le bon objectif ?

Graphe :

 

 

 

Afin d'établir le volume de production idéal, les informations contenues dans ce graphique ne sont donc pas suffisantes.

On constate, en effet, que si le seul critère de décision était la minimisation des risques de défaillance, on se situerait dans des niveaux d'exigence de score très élevés, qui dans notre graphique dépasseraient les 750 points. À ces niveaux, force est de constater que les volumes de production sont faibles, car rares sont les clients qui obtiennent de tels niveaux de score. Et pour atteindre cette « élite », il est nécessaire de traiter un très gros volume de dossiers, traitement qui implique des coûts importants alors que presque toutes les demandes seront refusées. Il y a fort à parier que ces coûts seront bien plus élevés que les bénéfices réalisés sur le seul volume atteint grâce à « l'élite ».

La minimisation des risques ne maximise-t-elle donc pas le profit ?

Certes, les pertes sur crédits alourdissent les coûts de l'entreprise, raison pour laquelle le prêteur cherchera à les contenir, comme il le fait d'ailleurs pour l'ensemble des autres coûts. Toutefois, en fonction des volumes d'affaires envisagés, d'autres éléments interviennent qui peuvent impacter la rentabilité, et, en particulier, les économies d'échelles susceptibles d'être réalisées grâce à un volume d'affaires plus grand. Ces économies d'échelle permettent notamment de répartir les coûts fixes – personnel de base, administration, équipement, marketing et communication... – sur un plus grand volume et, donc, de réduire le coût unitaire de production. Cette dernière permet à l'entreprise d'envisager d'augmenter son profit en augmentant sa production jusqu'au moment où coûts et revenus supplémentaires s'égalisent.

Conclusions

Ce recadrage nous paraît important à l'heure où la responsabilité du prêteur dans la phase précontractuelle fait l'objet d'une attention particulière, que ce soit de la part des médiateurs de dettes, d'organisations de défense du consommateur, et d'organismes régionaux tels que le Grepa, l’Observatoire du crédit et de l'endettement ou encore le Vlaams Centrum Schuldebemiddeling, acteurs de prévention et de traitement du surendettement.

Alors que de plus en plus souvent, également, les prêteurs ou leurs représentants mettent en avant et insistent sur l'évidence de l'intérêt qu'ils ont à réduire autant que possible le nombre de défaillances1 et en profitent ainsi pour éluder le débat. On l'a vu, le coût des défaillances est un des coûts pris en compte dans le calcul de rentabilité, mais quelles que soient les circonstances, le niveau de score se déduit d'une politique de rentabilité et non l'inverse. Des marges existent donc à ce niveau, et sans doute pour les types de crédits qui connaissent des taux importants de défaillance, à savoir les ouvertures de crédit. D'ailleurs, ce n'est sans doute pas un hasard si ce type de crédit connaît le taux de défaillance le plus élevé : c'est aussi celui dont le volume en nombre est en forte croissance depuis des années. Le seuil de maximisation du profit des producteurs n'est donc sans doute pas encore atteint sur ce produit.

Dans ce cadre plus spécifique, des espaces de progrès sont donc envisageables du côté de la performance générale du credit scoring utilisé. C'est en améliorant ce dernier (l'analyse risque réalisée avant l'octroi) pour réduire les probabilités de défaillances (et donc, « aplatir » la courbe pointillée du graphique) que l'offre de crédit sera plus adéquate.

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Aucun prêteur, c'est entendu, n'octroie de crédit à une personne qu'il ne considérerait pas comme potentiellement solvable. Et pourtant, c'est en tolérant un certain taux de défaillance que les prêteurs peuvent accroître leur rentabilité... Recadrage d'un élément classique du discours des professionnels du crédit.

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-8
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
12/2007
Mois d'édition
Décembre

Credit scoring : une approche objective dans l'octroi de crédit ?

Soumis par Anonyme le

Elements de contexte

Les évolutions de ces dernières années ont profondément réformé le paysage des professionnels du crédit (concentration bancaire, arrivées de nouveaux opérateurs...), de l'offre de crédits (ouvertures de crédit : croissance de 1.500.000 contrats entre 1999 et 20061 !) et les habitudes des consommateurs, de plus en plus nombreux à recourir au crédit en dehors de l'achat d'un immeuble ou d'un véhicule.

Cette forte croissance n'a été rendue possible que grâce à une forte rationnalisation des process2, dans laquelle se trouve en bonne place l'analyse risque réalisée pour l'octroi des crédits. De manière simple et schématique, on peut considérer que l'analyse risque s'articule autour de deux matières principales:

La mesure de la fiabilité

Celle-ci cherche à répondre à la question : « Cette personne est-elle digne de confiance? Respectera-t-elle ses engagements? Est-elle capable de gérer adéquatement son crédit? »

Elle s'intéresse à la nature du client, son comportement général, son attitude face à ses engagements.

La mesure de la solvabilité

S'intéresse aux données budgétaires du/des demandeurs – le niveau de revenu, les dépenses du ménage et les engagements en cours. L'objectif est de déterminer si le demandeur (et son ménage) dispose des moyens nécessaires au remboursement du crédit envisagé.

Principes généraux du « credit scoring » 

Pour élaborer un tel outil statistique, il est nécessaire de disposer :

  • d'un produit de crédit (ex : l'ouverture de crédit de 2.500 €)
    Idéalement, le prêteur mettra au point un credit scoring par type de crédit proposé. En effet, selon les caractéristiques propres à chacun d'eux (montants minima et maxima, taux d'intérêt, durées de remboursement, mode de vente - agences, web, grandes surfaces,...), le credit scoring différera;
  • d'un échantillon de clients ayant eu accès à ce crédit, pour lesquelles les informations personnelles ont été conservées. Ces données sont principalement collectées grâce à un formulaire de demande de crédit, imprimé ou « en ligne ». Dans la phase de construction, les décisions d'octroi sont mises en oeuvre par un Comité de crédit qui travaille sans le support du score, de façon traditionnelle;
  • de l'historique de remboursement de ces clients : pour réaliser un bon credit scoring, il est important de disposer, parmi ceux-ci, d'un nombre suffisant de clients défaillants (n'ayant pas honorés leurs engagements), idéalement de plusieurs centaines d'unités.

Sur base de ces informations, une analyse statistiques des données personnelles des clients sera réalisée. Le travail peut se révéler complexe, puisque cette analyse doit permettre d'identifier les combinaisons de données qui sont les plus fréquentes lors de défaillances, et à partir de là, construire une grille de score qui permettra de prédire la probabilité de défaillance (versus de remboursement) de chacun des clients.

Voici quelques illustrations qui rendront nos propos plus concrets.

Quant à la neutralité des données :3 :

En tant que telle, aucune d'entre elles n'est ni « bonne » ni « mauvaise » : elles seront chacunes plus ou moins fréquentes dans les situations de défaillances, en fonction de certaines combinatoires.

Exemple :

  • une femme sera plus rarement défaillante qu'un homme;
  • une femme célibataire sera plus rarement défaillante qu'un homme célibataire;/li>
  • une femme célibataire sera plus souvent défaillante qu'une femme mariée;
  • une mère célibataire sera plus souvent défaillante qu'un père célibataire

L'exemple ci-dessus ne reprend que les données « sexe – état civil – situation parentale », mais en réalité, il s'agit toujours de combinatoires complexes, puisqu'en permanence c'est au moins 15 données qui sont observées simultanément.

Quant aux types de données utilisées dans le score4 :

Caractéristiques du modèle Sujet X Score
Age de l'emprunteur 52 ans 51
Situation maritale Concubinage ou PACS 19
Statut résidentiel Locatire 24
Lieu de résidence Provence-Alpes-Côtes d'Azur 20
Ancienneté à l'adresse actuelle 9 ans 17
Nature du contrat de travail ET ancienneté à l'emploi actuel de l'emprunteur CDI ET 25 ans 56
Fonction professionnelle de l'emprunteur Agent de service 31
Fonction professionnelle du conjoint Agent de sécurité et de surveillance 11
Nature du contrat de travail ET ancienneté à l'emploi actuel du conjoint CDD ET 5 mois 0
Revenu du ménage ET nombre de personnes du ménage 2.200 € ET 2 personnes 67
Pourcentage actuel des remboursements mensuels du ménage 0% 89
SCORE FINAL   385

Les données reprises dans cet exemple sont particulièrement élémentaires. Parmi d'autres données qui sont recueillies et qui peuvent se révéler statistiquement significatives, on peut trouver aussi : le type d'habitat (certains formulaires proposent même les catégories « chalet », « caravane »,...), le type de magasin où la demande a été faite (Inno ou Carrefour), le type d'intermédiaire utilisé (le cas échéant)...

Dans les faits...on retiendra également...

Que la qualité prédictive des données n'est pas liée à leur « légitimité » dans le cadre d'une demande de crédit.

Si le type d'habitat se révèle très efficace d'un point de vue statistique, on peut s'étonner légitimement d'une telle question dans le cadre d'une demande de crédit : cet élément n'entretient pas de relation causale avec la fiabilité individuelle du client, sa capacité de remboursement ou son honnorabilité. Cet absence de lien causal entre la donnée collectée et l'objet de la demande soulève ce que nous désignons précisément par « légitimité ». Ne devrait-on pas se limiter à la collecte d'informations en lien avec l'objet sollicité : historique du remboursement de crédits, capacité financière, stabilité des revenus, niveau de dépenses incompressible...

Des dérives sont possibles sur ce point, et pour illustration supplémentaire, nous évoquerons celle qui se développe au Royaume-Uni concernant l'usage du domicile comme critère déterminant dans l'évaluation du risque (crédit, assurance,...) : ce dernier peut devenir tellement déterminant dans certaines transactions (il est vrai que cette donnée est par ailleurs très peu coûteuse à collecter et à vérifier) que des personnes sont soit amenées à déménager pour intégrer des quartiers « mieux côtés », soit à faire du lobbying pour que leur rue change de « catégorie de risque ».

Que le credit scoring est un sujet délicat pour l'industrie, car...

La construction d'un credit scoring représente un investissement lourd pour le prêteur. Il se construit sur base d'un traitement « manuel » d'un volume significatif de demandes et il n'atteint sa pleine puissance prédictive que si un volume suffisant de défaillances a pu être observé (ce qui signifie, autrement dit, des pertes significatives).

Un tel investissement requiert donc de l'entreprise qu'elle puisse amortir ce dernier par une rationnalisation de son process et une capacité de traitement futur importante, d'où le marketing agressif mis en oeuvre par certains.

Puisque le credit scoring est particulier à chaque « type de crédit », il permet aux prêteurs de dégager un avantage concurrentiel sur une niche qu'il se sera ainsi construite. Dans cette mesure, tenter de lever le voile sur ce qu'ils considèrent comme des secrets maisons à propos du contenu de « la boîte noire » relève de l'espionage industriel.

Une qualité prédictive et une objectivité limitées

En ce qui concerne la qualité prédictive...

Le credit scoring est donc un outil prédictif d'autant plus efficace que les demandeurs ont des profils proches de ceux qui composent l'échantillon d'origine. Mais ce dernier, bien qu'il soit élaboré sur une base large, n'est pas en soi représentatif de la population belge majeure : n'oublions pas que son but est de permettre un traitement industriel des demandes, pas d'éviter que certaines personnes n'accèdent pas au crédit parce que leur profil est trop éloigné de la norme de l'échantillon.

Il se révéle dès lors peu adéquat pour estimer le risque de défaillance de profils qu'il n'a pas intégrés, qu'il n'a pas « appris à reconnaître » dans sa phase de construction. Des refus peuvent naître d'une « non reconnaissance » plutôt que d'un lien effectif avec une probabilité de défaillance.

Ces refus sont particulièrement dommageables pour les candidats clients (et notamment ceux qui auraient mené à bien le remboursement de leur crédit), puisqu'ils n'y accèdent pas. Mais ils le sont aussi pour les prêteurs, puisqu'ils ratent autant d'occasion de ventes.

En ce qui concerne l'objectivité de la méthode...

Si on comprend assez aisément que la « boîte » que constitue la méthode statistique du credit scoring traite de manière neutre les données qu'on lui fournit, on perçoit moins intuitivement que l'échantillon sur lequel elle a été construite ne l'est pas. Cet échantillon repose sur des décisions prises par les membres du Comité de crédit dans la phase de création, et intégre donc leur subjectivité de manière structurelle !

Les profils refusés, les données considérées comme rédibitoires dans la phase de construction du scoring le seront aussi par la suite... Les données qui ne sont considérées dans l'analyse le seront donc pour longtemps, car la capacité « d'apprentissage » du système est toujours lente, et sur certaines dimensions, tout à fait impossible.

Exemples :

Apprentissage possible :

Si la donnée « type de contrat » associait, dans l'échantillon, le statut « intérim » , mais que très peu de dossier aient été accepté car les membres du Comité étaient en général défavorable, les quelques dossiers comprenant cette information ont été généralement défaillant. Toutefois, cette observation peut progressivement évoluer si dans les faits, les nouveaux clients en itérim remboursent adéquatement leur crédit.

Apprentissage impossible :

Prenons l'hypothèse que les pratiques de crédit social à la consommation mise en oeuvre par des projets « sociaux » confirment que, parmi les nombreuses données collectées dans leur analyse crédit, une des plus pertinente pour distinguer les bons payeurs des mauvais est l'analyse des « dettes hors crédit » et la transparence du client à leur propos.

Si un organisme bancaire souhaite profiter de cet enseignement en intégrant cette information dans son analyse risque, il devra tout bonnement construire un nouveau credit scoring, il ne pourra pas intégrer progressivement cette dernière. Compte tenu des coûts déjà évoqués d'une telle démarche, on comprend dès lors pourquoi l'accès au crédit, quand il repose sur certains a priori, peut générer pour longtemps des refus inadéquats.

Conclusion

Le credit scoring a fortement réformé l'analyse risque crédit des prêteurs. En rendant possible un traitement massif des demandes, il a rendu le crédit accessible à une plus large frange de la population.

Sa nature statistique en fait un outil prédictif fiable, pour autant que les profils des clients ciblés soient similaires à ceux des clients ayant composé l'échantillon d'origine. Mais même établit sur une base large, l'échantillon n'est toutefois pas construit pour garantir la représentativité de la population dans son ensemble.

Cette limite méthodologique impacte donc profondément et pour longtemps l'accessibilité du crédit aux profils « hors normes ». Dans quelle mesure l'industrie prendra-t-elle cette question en main ? Comment envisage-t-elle d'y apporter une solution ?

Il est en effet indispensable que les scores, d'une manière ou d'une autre , apprennent à reconnaître ces publics et à distinguer parmi ceux-ci les différents niveaux de risque... Car sans cela, ils resteront exclus pour de mauvaises raisons, simplement parce qu'ils n'ont pas intégré l'échantillon d'origine. Et cela, n'est-ce pas de la discrimination indirecte?

1Données extraites des rapports annuels de la Centrale des Crédits aus Particuliers, Banque Nationale de Belgique

2Ensembles des modalités liées à la procédure d'octroi d'un crédit par un prêteur.

3Il ne s'agit pas ici de cas réel, même s'ils sont réalistes.

4« Mémo technique Modèles Génériques de score de crédit ou le scoring de crédit « prêt à l'emploi » », www.softcomputing.com

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Le credit scoring, ou encore scoring d'octroi, est un des outils mis en oeuvre lors de l'analyse risque d'une demande de crédit par les prêteurs. Méthode statistique adaptée à une pratique massive du crédit, son impartialité est souvent citée parmi ses vertus par l'industrie. Elle génère toutefois des refus de crédit qui n'auraient pas lieu d'être : mise en lumière d'une limite méthodologique.

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-7
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
09/2007
Mois d'édition
Septembre

Credit scoring : décryptage d'une pratique discriminante... et discriminatoire ?

Soumis par Anonyme le

Éléments de contexte 

Dans toute vente à paiement différé, l'entreprise s'expose à un risque de défaillance du client. Si c'est particulièrement vrai pour le crédit, au coeur de cette ça l'est aussi dans d'autres domaines : énergie (électricité, gaz), téléphonie... Pour cette raison, les entreprises développent des moyens censés réduire ce risque.

La question est de savoir si cette recherche « légitime » de réduction du risque n'aboutit pas, in fine, à des pratiques discriminatoires.

Poser le problème sous cet angle est particulier, car cela va à l'encontre de deux évidences :

  • a) l'outil statistique et l'analyse probabiliste du 'credit scoring' développé par l'industrie du crédit offrent une image de parfaite objectivité1 ;
  • b) la discrimination ne sert pas les intérêts de l'insdustrie : dans une stricte recherche de maximisation du profit, le credit scoring doit chercher à réduire le « risque de défaillance », certes, mais pour le plus grand nombre de personne possible.

Si nous avons battu en brèche la première évidence dans une précédente analyse2, la seconde peut être facilement démontée : le credit scoring est considéré comme « la meilleure méthode connue » pour permettre à l'industrie de maximiser son profit en pratiquant une activité crédit, mais cette méthode n'est tout simplement pas parfaite : sa base méthodologique a des limites et elle génère une discrimination dont les prêteurs pourraient avoir intérêt de se débarrasser.

Cette approche n'est d'ailleurs pas considérée comme la panacée et les professionnels du crédit tentent d'améliorer en permanence leur technique d'analyse risque pour être toujours plus performants, toujours plus compétitifs. La contrainte absolue dans laquelle tout se joue est toutefois claire : la méthode doit rester peu coûteuse, ne doit pas remettre en cause les marges dégagées. Au contraire, elle doit tenter de les améliorer.

Paradoxe de la situation : dans l'absolu (hors logique de profit), la discrimination nuit à toutes les parties prenantes.

Clarification des concepts

Avant de poursuivre, il est nécessaire de clarifier la base sémantique.

Lorsqu'un prêteur cherche à distinguer, parmi les demandeurs de crédit, ceux qui auront le plus de chance de rembourser leur crédit, il discrimine. Cette action n'est en rien condamnable, bien au contraire : en fonction de sa politique prudentielle, de son éthique, de la pertinence des outils mis en oeuvre et des données collectées, il pourra faire plus ou moins preuve de responsabilité en prodiguant informations et conseils adaptés.

Il en va tout autrement quand, volontairement ou involontairement, la sélection opérée comporte une dimension « discriminatoire » : dans ce cas, en effet, la distinction réalisée se fait au détriment du demandeur.

Cadre légal

La question soulève certes une réflexion de nature philosophique, mais également de nature juridique, puisqu'au moins trois textes de loi peuvent venir l'alimenter.

  • La loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination. Cette législation fait une distinction entre le « discriminant » (ici, le prêteur) et le « discriminé » (le client) et interdit toute discrimination directe ou indirecte (c'est-à-dire non intentionnellement discriminatoire).
  • La loi du 12 juin 1991 sur le crédit à la consommation. En son article 12, elle oblige notamment l’établissement de crédit à donner la raison de son refus d’octroi d’un crédit.
  • La loi du 8 décembre 1992, enfin, relative au traitement automatique de données personnelles interdit, quant à elle, l’utilisation de données non mises à jour, erronées… Elle impose, en outre, que l’utilisation qui est faite des données soit loyale, licite et conforme aux objectifs poursuivis. Aucune prescription particulière n’existe quant à la conservation des données utilisées.

Les différentes facettes du problème

La limite « méthodologique »

Par essence, le credit scoring est discriminatoire : en effet, son élaboration repose sur l'étude des données relatives à une population de clients ayant obtenu un certain type de crédit.

Il pourrait en être autrement si le protocole de mise en oeuvre comprenait :

  • de disposer d'une clientèle représentative de la population belge répondant aux critères légaux d'accès au crédit ;
  • d'accorder à cette clientèle le crédit demandé sans analyse de fiabilité.

Dans tous les autres cas, l'échantillon obtenu reflète immanquablement une non-représentativité... CQFD.

Cette démonstration a le mérite de montrer que si l'outil est discriminatoire par essence, c'est parce que, sans cela, son élaboration se ferait en totale contradiction avec les règles les plus élémentaires de prudence. Ainsi donc, si le credit scoring est une méthode performante, elle devra à terme céder la place à une autre méthodologie si l'industrie veut un jour dépasser cette limite.

On comprend également que, sous l'angle légal, cette pratique soulève la question de la « discrimination indirecte ».

En ce qui concerne les données

Les pratiques observées sur le terrain soulèvent un certain nombre de questions : parmi celles-ci, on retiendra celle de la légitimité, celle de la loyauté, et enfin celle de la sensibilité.

Légitimité

Ce que l'on entend par légitimité d'une donnée, d'une information, c'est la relation logique qu'elle entretient avec le but de sa collecte.

Dans le cadre d'une demande de crédit, une donnée légitime aura un lien logique direct avec la fiabilité de l'emprunteur, sa capacité de remboursement, sa capacité de gestion, sa compréhension des termes du contrat...

À l'opposé, les données non légitimes seront celles qui n'entretiennent pas cette relation. L'intérêt qu'elles offrent aux prêteurs n'apparaît qu'au travers du traitement statistique et de la part qu'elle tient dans sa qualité prédictive.

À titre d'exemple, citons dans le champ des données légitimes : le niveau de revenu, sa stabilité passée, les éventuels changements envisagés dans le futur, l'existence passée ou présente de découvert bancaire, de dettes, la structure familiale, les charges incompressibles du ménage, la capacité d'épargne...

Au menu des données « non légitimes », on peut citer, par exemple, le sexe, l'âge, l'état civil, le domicile, le type d'habitat..

Loyauté

La question de la loyauté se situe, en matière de scoring, au niveau de l'usage 'stratégique' de certaines informations. On entend par 'stratégiques' des données / informations que le consommateur n'identifie pas comme pouvant avoir un impact sur sa capacité d'emprunt, puisqu'elles se situent à un niveau différent d'information (méta), hors du champ des questions posées dans le formulaire de demande de crédit.

À titre d'illustration, on peut citer la prise en compte par certains prêteurs : du type d'intermédiaire utilisé (certains sont plus prudents et perfectionnistes que d'autres dans le montage des demandes), du moyen utilisé pour solliciter le crédit (e-mail, agence, téléphone), de l'enseigne du magasin dans lequel l'ouverture de crédit est sollicitée...

Si on ne remet pas en question l'éventuelle efficacité de ces informations dans les qualités prédictives du score, elles n'en sont pas moins recueillies et utilisées à l'insu du client, et ne sont pas non plus légitimes, au sens défini préalablement.

Sensibilité

On évoquera rapidement la question de la collecte directe ou par proxy de données sensibles, formellement interdites par la loi, et notamment celles relatives à la race, l'orientation sexuelle, la religion...

Sans vouloir jeter l'anathème, la situation actuelle ne nous permet pas :

  • d'être certains qu'aucun abus n'existe (pas de contrôle organisé);
  • de confirmer que ces données n'auraient pas de pouvoir prédictif et donc pas de raison d'être.

Conclusions 

Des pistes de solutions existent pour réduire, voire résoudre, les problèmes soulevés dans cette analyse.

Le contrôle relatif à la légalité :

Il serait sans doute utile de confier à une autorité la vérification de la légalité de la collecte des données utilisées dans le credit scoring ;

Le remplacement des données non légitimes et stratégiques par des données légitimes :

Il ne s'agit pas de fournir une solution à l'emporte-pièce, mais force est de constater :

  • que la réduction du risque dans les affaires est une recherche légitime des entreprises ;
  • que les technologies de l'information comportent des marges de progrès importantes dans l'estimation du risque crédit ;
  • que ces opportunités de progrès peuvent tout autant être orientées pour résoudre les questions soulevées que pour les aggraver ;
  • qu'un service dédié à cette problématique ferait fortement avancer la connaissance et la pratique durable et responsable de l'industrie du crédit.

1 Voir analyse intitulée «'' Credit scoring '' : une approche objective dans l'octroi de crédit ? » - Réseau Financement Alternatif asbl, O. Jérusalmy, septembre 2007

2 Op. cit.

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Le credit scoring est au coeur de l'activité de crédit : il joue un rôle déterminant dans l'analyse risque. Sésame de l'accès au crédit, il est essentiel d'en analyser le fonctionnement pour vérifier qu'il n'ouvre la porte à de la discrimination.

Mots-clés liés

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-6
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
10/2007
Mois d'édition
Octobre

Hypothèque inversée : du crédit à la consommation garanti par une hypothèque ?

Soumis par Anonyme le

Contexte politique et social

Peu après une annonce du ministre de l'Économie, dans laquelle ce dernier a présenté l'hypothèque inversée comme pouvant répondre à un besoin réel en raison du vieillissement de la population, des représentants de l'industrie du crédit ont notamment réagi en organisant le 8 mai 2007, via le Forum financier belge, un colloque sur « le crédit logement inversé ». En juin, l'Union professionnelle du crédit éditait un feuillet d'information sur ce thème1, envisageant les adaptations nécessaires du cadre légal pour son introduction en Belgique.

A priori, en effet, compte tenu de certains traits de la société belge, ce type de produit pourrait rencontrer les besoins d'un public précis : les personnes âgées, propriétairesà tout le moins de leur logement, qui souhaitent continuer d'y vivre et dont le pouvoir d'achat est insuffisant pour couvrir leurs besoins courants.

Principales caractéristiques

Sous des vocables variés « crédit-logement inversé », « prêt viager hypothécaire », « hypothèque inversée »2, se cache un produit financier dont les caractéristiques principales procurent au client :

  • la disposition d'une somme d'argent, en un versement ou sous la forme éventuelle d'une rente ;
  • le maintien de son droit de propriété sur l'immeuble, en ce compris le droit de jouissance, pour autant qu'il y ait eu constitution d'une hypothèque ;
  • la possibilité de lier généralement le remboursement du crédit à la survenance d'un événement particulier, le décès ou la vente de l'immeuble.

La mise à disposition d'une somme d'argent pourra prendre des formes variées :

  • montant versé en une fois ;
  • montant versé sous la forme de versements réguliers pendant une période déterminée, dont la fréquence sera le plus souvent mensuelle.

Une variante de cette formule est également possible lorsque la durée n'est pas prédéterminée, mais correspond à la période d'occupation effective de l'immeuble hypothéqué (en anglais « tenure »);

  • montant versé à la demande (à l'instar d'une ouverture de crédit), à concurrence du montant maximum prédéterminé.

En matière de remboursement, ce crédit peut prévoir que le montant emprunté et le coût du crédit deviennent exigibles soit :

  • au moment du décès ou de la vente de l'immeuble hypothéqué (le contrat est alors à durée indéterminée) ;
  • au terme d'un certain délai déterminé contractuellement (20 - 25 ans, contrat à durée déterminée).

Conditions envisagées par l'Union professionnelle du crédit (UPC)3

  • Puisque le remboursement du montant prêté et le paiement du coût du crédit seront a priori couverts par la réalisation de l'immeuble, l'analyse de solvabilité du client n'a pas d'importance (principe de capitalisation des intérêts). Dès lors, plus jeune sera le senior, moins grand sera le capital.
  • Une inscription hypothécaire en premier rang est prise sur le bien immobilier pour la valeur entière du bien immobilier (résidence habituelle / autre habitation).
  • L'emprunteur agit exclusivement/principalement dans un but pouvant être considéré comme étranger à ses activités commerciales, professionnelles ou artisanales.
  • Mentions particulières dans l'offre de crédit – Ajout d'un tableau illustratif de libération des fonds (évolution de l'augmentation de la dette sur une période forfaitaire de 20 ans).
  • L'emprunteur, qui a accepté l'offre de crédit avant la passation de l'acte, a le droit de renoncer au contrat de crédit jusqu'à la passation de l'acte.
  • Un expert indépendant évalue la valeur du bien immobilier.
  • Conseil indépendant par le notaire préalablement à la passation de l'acte (Loi Ventôse). Les héritiers peuvent y être associés.
  • Compensation dans les cas où l'emprunteur reste en défaut de prélever le capital.
  • Indemnité de remploi spécifique dans la mesure où il y a plus d'interventions, de contrôles et d'estimations dont l'emprunteur pourrait déroger.
  • L'emprunteur a l'obligation d'entretenir soigneusement le bien immobilier grevé d'une hypothèque et de le traiter en bon père de famille, afin que la valeur du bien immobilier évolue normalement (contrôle périodique par l'expert). La prime d'assurance d'incendie et l'impôt sur l'immobilier doivent être payés à temps.
  • À la fin du crédit, un choix s'impose. Soit la famille veut garder le bien et elle paye la dette finale du crédit (qui sera toujours plafonnée à la valeur de la maison). Soit la dette finale n'est pas payée et la maison est vendue. Si la vente rapporte plus que la dette finale, le surplus reviendra à la famille.

Les éléments positifs

Par rapport à une vente viagère :

Pour les personnes qui envisagent une vente viagère, la formule présente une série d'avantages non négligeables :

  • maintien du droit de propriété : en cas de décès prématuré, seuls le montant réellement prélevé et les intérêts échus sont redevables. Les héritiers peuvent les prendre en charge sans devoir obligatoirement mettre en vente l'immeuble hypothéqué ;
  • la formule viagère ne prévoit qu'une seule modalité de versement du montant : un montant déterminé versé périodiquement;
  • la rente viagère est généralement moins élevée lorsque le vendeur souhaite continuer à occuper le logement.

C'est très probablement dans ces circonstances particulières (alternative à la vente viagère) que le produit semble le plus pertinent.

En complément du pouvoir d'achat des seniors :

Compte tenu des évolutions démographiques, du prolongement de l'espérance de vie, des coûts croissants de certains soins de santé et d'un système de pension fragile dans ces circonstances, le public potentiel existera réellement. Ce crédit pourrait sensiblement améliorer le quotidien de certains seniors à moins que des solutions politiques soient trouvées pour maintenir un pouvoir d'achat raisonnable et un accès peu coûteux aux soins de santé.

En outre, face à une réduction du niveau général des solidarités intergénérationnelles, qui s'explique à la fois par un changement dans les relations et les mentalités, mais aussi parfois à cause de la réduction du pouvoir d'achat des plus jeunes. Ce type de crédit permet de compenser l'absence de transferts de fonds intrafamiliaux des plus jeunes vers les plus âgés par une réduction du volume du patrimoine transmis des plus âgés vers leurs héritiers.

Une conjoncture économique favorable4

  • Les taux élevés de propriétaires occupants5 : dans un nombre croissant de pays, et, en particulier, dans le nôtre, la part de la population propriétaire de sa résidence dans la population totale est particulièrement élevée.
  • Le marché immobilier en forte croissance6 : la valeur des biens immobiliers s’est accrue de manière importante et cette plus-value tend à se maintenir7.
  • Les taux d’intérêt faibles : la conjoncture est basse depuis de nombreuses années et les taux auxquels sont consentis les prêts destinés à financer le logement sont inférieurs à ceux appliqués aux autres formes de crédit à la consommation.

Les questions pendantes...

Aspects légaux

Si le crédit envisagé prend la forme d'une ouverture de crédit à durée indéterminée, l'hypothèque peut être affectée à la garantie des dettes futures (les montants prélevés) : sur cet aspect, il ne semble pas que la loi belge s'oppose à sa mise en oeuvre.

Mais la question de savoir si ce crédit relèvera de la loi relative au crédit à la consommation ou plutôt à celle du crédit hypothécaire reste ouverte. Comment qualifier un crédit dont la finalité première est la consommation quotidienne ? Les cas où ce type de crédit sera utilisé pour rénover ou transformer l'immeuble hypothéqué soulèvent évidemment moins la question.

Aspects socio-économiques

On peut aussi s'interroger sur les bienfaits d'un crédit consommation qui s'octroie « sur garantie », compte tenu de l'impact que cela peut avoir sur la transmission patrimoniale. Cela peut être source de tensions familiales et il serait utile d'envisager les modalités de publicité à l'attention des héritiers.

Les éléments positifs du contexte économique précédemment cités ne sont pas éternels : l'accès à la propriété (coût / financement / pouvoir d'achat) sera-t-il dans le futur aussi bon qu'il l'a été par le passé ? Si, jusqu'ici, la classe moyenne a pu accéder largement à la propriété, sera-ce encore le cas pour les générations futures ? Il serait nécessaire de vérifier qu'un tel produit ne favorise pas à long terme l'appauvrissement net des familles aux revenus modestes.

Dans certaines circonstances, en effet, il existe également un risque de surendettement de l'emprunteur ou de ses héritiers. On constate en effet dans les pays où ce type de crédit est commercialisé (États-Unis, Royaume-Uni ...) que les emprunteurs sont de plus en plus jeunes. Dès lors, la période sur laquelle le coût du crédit se calcule est plus grande et majore d'autant ce dernier. Si, dans le même temps, la valeur du bien hypothéqué n'a pas évolué aussi favorablement (marché immobilier, niveau d'entretien du bien, performance énergétique), il est possible que la valeur vénale du bien soit inférieure aux remboursements à opérer, et puisse être source de difficultés financières pour les héritiers... Inutile de rappeler que ces circonstances ont présidé à certains des drames sociaux générés par la crise des sub-primes.

La stabilité des taux d'intérêt faibles ou encore la croissance du marché immobilier sont quant à eux beaucoup plus volatiles encore...

Conclusion - recommandations

L'apparition d'un tel produit sur le marché n'est donc pas anodine et mérite à tout le moins un encadrement adapté.

Afin d'éviter les risques de surendettement évoqués, une mesure déjà en vigueur aux États-Unis permet notamment de limiter la créance résultant du crédit, soit à la valeur vénale, soit au produit de la vente du bien hypothéqué. Dans ces cas, les dettes nées du crédit s'éteignent en toute hypothèse à la vente de l'immeuble.

Il est également possible d'aller plus loin en envisageant de limiter le montant emprunté à maximum 50 % de la valeur vénale. Dans cette configuration, on ménage à la fois la possibilité d'améliorer son pouvoir d'achat sans compromettre toute transmission patrimoniale : une voie intermédiaire, donc.

Le plus inquiétant dans la proposition de l'UPC est la volonté manifestée, pour mettre en oeuvre le produit imaginé, de lever l'interdiction de capitalisation des intérêts. Le cadre légal actuel s'y oppose8, et les conditions dans lesquelles elle peut s'opérer sont définies par l'article 1154 du Code civil (elles relèvent de l'ordre public économique). Il est fondamental que les intérêts ne puissent être calculés que sur le capital prélevé, sans souffrir aucune forme d'exception telle que la capitalisation des intérêts débiteurs. Ceci impacterait gravement la protection du consommateur telle qu'elle existe à ce jour et rendrait complexes la compréhension et la comparaison du coût du crédit.

Enfin, nous retiendrons comme bonne pratique le passage prévu des candidats clients9 devant un service-conseil professionnel et indépendant (type ASBL) afin que leur soient présentés les avantages et inconvénients de la formule ainsi que des simulations adaptées à leur situation personnelle.

1 « Le crédit-logement inversé », Union professionnelle du crédit, 2007

http://www.upc-bvk.be/documents/public/Cr%C3%A9ditlogement%20invers%C3%A9%20(feuillet%20d'information)%20v3.pdf

2 Cette dernière dénomination est calquée sur le terme anglais « reverse mortgage »

3 Op. cit.

4 « Le prêt viager hypothécaire:analyses et réflexions », Échos du Crédit et de l'Endettement, nº 14,

5 Taux de ménages propriétaires : 74,4 %; sans prêt à rembourser : 37,5 %; avec prêt à rembourser : 36,9 %. Source : DG Statistique et information économique – Enquête sur le budget des ménages 97/98.

6 Entre 2000 et 2006, le prix de vente moyen des maisons d’habitation ordinaire a augmenté de plus de 86 %, alors que celui des appartements a augmenté de plus de 75 %. Source : DG Statistique et information économique

7 Si elle venait à se résorber, voire si la valeur des biens immobiliers tendait à diminuer, la vente viagère pourrait davantage tenter les consommateurs âgés.

8 Art. 10 de la loi du 4 août 1992 et l'art. 14, §2, 5ème alinéa, de la loi du 12 juin 1991.

9 « Le prêt viager hypothécaire ou hypothèque inversée : une solution au financement des retraites et de la dépendance? » ,mémoire de T. Dubocage – promotion 2005 CHEA, p. 7

lien : http://www.silverlife-institute.com/uploaded_files/docs/rapportreversefr_1137753264.pdf

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Effet d'annonce ou projet réel, depuis quelques mois, l'industrie du crédit réfléchit aux conditions de mise en oeuvre de ce nouveau type de crédit en Belgique. De quoi s'agit-il ? À qui ce type de crédit s'adresse-t-il? Quels dangers recèle-t-il ? Éléments de réponses

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-5
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
09/2007
Mois d'édition
Septembre

Centrale des crédits aux particuliers : premier pas vers un crédit responsable ?

Soumis par Anonyme le

Éléments de contexte

L'analyse de la solvabilité des demandeurs de crédit fait partie intégrante de l'analyse risque mise en place par les prêteurs, dans la phase pré-contractuelle... ou devrait en tout cas toujours en faire partie. Dans les précédentes analyses réalisées par le Réseau Financement Alternatif relatives au Credit scoring, nous avons vu que l'analyse de fiabilité des demandeurs doit somme toute être complétée d'une analyse de solvabilité.

C'est notamment dans cette optique que le législateur a décidé, pour renforcer la qualité de l'information dont dispose les prêteurs, de mettre en place la Centrale des Crédits aux Particuliers.

Quelle place, quelle efficacité peut-on attendre de la tenue de ce fichier dans une pratique responsable du crédit ? Avant d'entrer dans le vif du sujet, présentons brièvement le cadre légal relatif à l'analyse de la solvabilité dont les prêteurs doivent s'acquiter.

Eléments législatifs 1

La loi précise les obligations préalables à la conclusion du contrat et à charge du prêteur, de l'intermédiaire de crédit et de l'emprunteur :

  • le prêteur et l'intermédiaire de crédit doivent, avant de solliciter ou d'octroyer un crédit, vérifier la situation financière et les engagements financiers du candidat emprunteur et s'assurer de sa solvabilité, de ce qu'il aura la possibilité d'assumer les obligations résultant du contrat de crédit envisagé et, en particulier, de ses facultés de remboursement (articles 10, alinéa 1er, et 15 de la loi du 12.06.1991) ;
  • à cet effet, le prêteur doit consulter la Centrale des Crédits aux Particuliers (article 9 de la loi du 10.08.2001) et le prêteur et l'intermédiaire de crédit doivent recueillir tous les renseignements exacts et complets qu'ils jugent nécessaires (article 10, alinéa 1er de la loi du 12.06.1991) ;
  • le candidat emprunteur doit répondre de manière exacte et complète aux demandes de renseignement qui lui sont adressées par le prêteur et l'intermédiaire de crédit ;
  • le prêteur et l'intermédiaire de crédit doivent rechercher, parmi les produits qu'ils offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant de crédit les mieux adaptés compte tenu de la situation du candidat emprunteur au moment de la conclusion du contrat de crédit et du but du crédit (article 11, 2°, de la loi du 12.06.1991) ;
  • le prêteur doit vérifier les données d'identification du candidat emprunteur sur base de sa carte d'identité (article 17 de la loi du 12.06.1991).

Avant de poursuivre, il est utile de souligner que des décisions jurisprudentielles insistent sur le fait que la consultation de la Centrale ne peut représenter l'unique élément d'analyse de la solvabilité du client.

Impacts du fichier de la CCP sur l'analyse risque crédit

Plus de transparence

L'existence du fichier et sa consultation systématique par le prêteur rend inutile toute tentative de fraude de la part du demandeur quand à déclaration des crédits à la consommation en cours, et d'éventuels défauts de paiement y relatifs.

Cela simplifie la relation avec les clients, qui légalement avaient de toute façon l'obligation de répondre complètement et sans erreurs aux questions du prêteurs.

En revanche, des omissions d'informations sur ces matières par le client peuvent susciter de nouvelles questions : raisons de l'omission ? Distraction ? Crédit dormant ou jamais activé? Les réponses peuvent utilement informer le prêteur sur la rigueur de gestion du client, sur sa compréhension des enjeux que représentent la signature d'un contrat de crédit...

Réduction de l'incertitude

L'accès à une information complète et fiable à propos de l'endettement crédit permet aux prêteurs de lever le doute qui subsistait jusqu'ici. Les données étant fiables, le credit scoring a dû intégrer cette nouvelle donne, car avant 2003, si l'information collectée était réputée exacte, elle ne l'était pas avec certitude. En outre, si le demandeur a l'obligation de repondre correctement aux questions du prêteur, encore faut-il que ce dernier pose systématiquement la question. La consultation étant obligatoire avant l'octroi du crédit, on peut dès lors considérer que le niveau global de l'information utilisée pour l'analyse risque des prêteurs a été augmenté.

Indicateur partiel de solvabilité

Connaître le niveau d'endettement en crédit à la consommation n'est pas en soi suffisant pour mesurer la solvabilité du client, mais elle apporte toutefois une des informations indispensables à son évaluation.

Quel usage réserver à cette information?

L'approche mise en oeuvre en Belgique laisse une marge de manoeuvre importante aux prêteurs sur la manière dont ces derniers doivent utiliser cette information. Ils gardent en effet toute liberté d'octroyer ou non le crédit, puisqu'ils en assument la responsabilité finale.

Selon la loi, le prêteur ne peut délivrer d'offre de crédit que si, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, notamment sur base de la consultation organisée par l'article 9 de la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers, et sur base des renseignements visés à l'article 10, il doit raisonnablement estimer que le consommateur sera à même de respecter les obligations découlant du contrat.

Cela signifie concrétement que c'est le prêteur qui garde toute l'attitude pour évaluer la capacité de remboursement du client potentiel. Cela signifie qu'il est en principe autorisé à octroyer du crédit :

  • même en cas de fichage négatif (existence de défaut de paiement);
  • quelque soit le niveau d'endettement observé (nombre de crédit et montant);
    pour autant qu'il considère que les chances de remboursements du client sont suffisantes.

Dans les faits, toutefois, force est de constater que lorsqu'un client est fiché négativement (défaut de paiement), son accès au crédit est quasi nul. Cette lourde conséquence souligne, s'il en est besoin, l'importance d'une tenue très stricte du fichier, afin que les données collectées soient exactes et à jour.

Quelle responsablilité? Quelle sanction ?

Responsabilité : obligation de moyen – obligation de résultat ?

En Belgique, le prêteur ou l'intermédiaire sont considérés comme des professionnels, le législateur ne leur dicte pas leur conduite.

En matière d'analyse de la capacité de remboursement, de la mesure du risque, c'est donc à eux de mettre en oeuvre les moyens adéquats et ce sont également eux qui sont à même de les déterminer. La loi de 1991 est donc source d'une simple obligation de moyen : obligation d'investigation (dans les limites raisonnables) qui doit permettre de repérer et éviter les omissions, les incohérences et être assortie des vérifications jugées nécessaires.

Puisqu'il s'agit d'une obligation de moyen, la question de savoir si le prêteur a mis en oeuvre une investigation adéquate n'est pas automatiquement soulevée par le juge, en cas d'action en justice. En effet, dans ce cas, si le consommateur considère que le prêteur ou l'intermédiaire n'ont pas réalisé l'analyse adéquate, c'est à lui ou à son représentant de soulever la question et d'amener des éléments probants de négligence, d'incohérence ou d'omission dans le montage du dossier de demande de crédit. Dans ce cas seulement, la responsabilité du prêteur pourrait être engagée.

En revanche, il en va différemment pour la consultation de la CCP par le prêteur, dans la phase pré-contractuelle. Cette dernière représente une obligation de résultat, ce qui modifie la manière dont la question sera traitée en cas d'action en justice. Dans ce cas, en effet, la question sera soulevée automatiquement par le juge et c'est au prêteur a qui revient la charge de la preuve que la consultation a bien été réalisée.

Sanction

La sanction la plus souvent appliquée en cas de faute est la levée du coût du crédit. Le client ne sera plus redevable alors que du montant du capital emprunté.

La législation particulière relative aux crédits à la consommation et à la protection du consommateur en la matière apporte un petit plus par rapport au droit commun d'application en matière de contrat : en effet, lorsque la faute a été constatée, il n'est alors plus obligatoire de prouver ni le dommage, ni le lien de causalité entre la faute et le dommage, pour que la sanction soit appliquée. Ceci rend nettement plus efficace toute la procédure au profit du consommateur.

Conclusion

En tant que telle, la consultation obligatoire de la CCP par le prêteur ou l'intermédiaire de crédit dans la phase précontractuelle constitue donc un premier pas vers une objectivation de la responsabilité du prêteur, même si, par ailleurs, des progrès sensibles sont encore envisageables pour améliorer la qualité et la pertinence des données collectées2.

La loi du 10.08.2001 prévoit en son article 10 que la Banque Nationale de Belgique (BNB) pourra interroger pour le compte des prêteurs le fichier des avis de saisie, de délégation, de cession et de règlement collectif de dettes, qui n'est toutefois pas opérationnel à ce jour. Cette même loi prévoit en son article 11 que la BNB pourra consulter pour le compte des prêteurs d'autres fichiers centralisant des dettes impayées à charges du consommateur.

Des marges de progrès sont donc possibles pour améliorer la fiabilité des informations fournies au prêteur dans le cadre de leur analyse risque, et l'approche belge confiant à une institution publique la gestion des fichiers garantit le respect de la législation en matière de protection de la vie privée. Il n'est toutefois pas prévu à ce jour de rendre ces potentielles consultations obligatoires pour les prêteurs.

Les données citées précédement relèvent toute d'une mesure de l'endettement : nombre de crédits en cours, et potentiellement pour l'avenir, nombre de procédure de recouvrement de dette en cours. Ces données (utiles mais toutefois non exhaustives) informent le prêteur sur la qualité de gestion du consommateur, sur sa maîtrise budgétaire et donne des indications sur le poid de ses dettes sur son budget.

Des progrès sont également à envisager au niveau de l'analyse de la solvabilité, telle qu'elle peut s'appréhender sous l'angle budgétaire : quelles sont les ressources régulières, quel est le niveau des dépenses incompressibles du ménage et dès lors qu'elle est la capacité contributive du consommateur pour faire face à ses engagements en matière de crédit.

Le législateur jusqu'ici n'a pas envisagé d'inviter plus précisément les prêteurs à collecter certaines informations minimales : preuves de revenus, preuves des charges de loyer et autres dépenses incompressibles et récurrentes... Peut-être faudra-t-il un jour envisager de construire un socle minimal et fiable d'informations relatives à la solvabilité du consommateur, que ce dernier devra collecter pour compléter sa demande de crédit.

Nous pensons en effet que les responsabilités croisées des parties prenantes:

  • le consommateur, qui devrait apporter des éléments prouvant sa solvabilité;
  • le prêteur, qui s'engage à les vérifier et à ajuster le montant du crédit à la capacité contributive;

sont les meilleures garantes d'un crédit responsable. En outre, par une telle approche, le consommateur est amené à mesurer lui-même sa capacité contributive, ce qui est en soit une source potentielle d'apprentissage en matière de gestion budgétaire...

 

Réflexions à poursuivre...

1 Extrait du « Rapport belge. Les services financiers adéquats », Observatoire du Crédit et de l'Endettement asbl, 2007, p.8

2 Voir analyse intitulée « Défaut de paiement : une obligation incomplète » - Réseau Financement Alternatif asbl, O. Jérusalmy, octobre 2007

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

La Banque nationale de Belgique (BNB) gère la Centrale des crédits aux particuliers (CCP), plus simplement appelée « fichier positif et négatif des crédits ». Alimentées par l'ensemble des professionnels du crédit, les données collectées dans la Centrale servent à augmenter la qualité de l'information à laquelle ils accèdent lors du traitement d'une demande de crédit...

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-4
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
11/2007
Mois d'édition
Novembre

Centrale des crédits aux particuliers (CCP) : identification de données clés toujours manquantes

Soumis par Anonyme le

Un rôle qui doit évoluer...

La CCP n'avait pas pour but, lors de sa création, de devenir une base de données qui pourrait alimenter la recherche relative à la prévention du surendettement. Certes, cette centrale a bien pour finalité de réduire le risque de surendettement, mais son mode opératoire original était la tenue d'un fichier « à jour » de tous les contrats de crédits régis par la loi relative au crédit à la consommation et les crédits hypothécaires destinés aux particuliers.

La Banque nationale de Belgique, dont la mission première est la gestion de ce fichier, s'est toutefois très vite intéressée aux matières contenues dans ce fichier et a également perçu le potentiel préventif de l'analyse de nombre d'entre elles. Les rapports annuels statistiques produits sur la base de certaines de ces données en sont les signes les plus visibles, auxquels s'ajoute un travail plus approfondi réalisé en 20061.

Des marges importantes de progrès sont encore possibles pour améliorer la prévention du surendettement et pousser l'ensemble des parties prenantes à avoir des comportements responsables.

Pour une plus grande prévention du surendettement...

Mesurer l'endettement réel

À l'heure actuelle, les montants enregistrés dans la CCP correspondent aux montants maxima prévus contractuellement. Si, en ce qui concerne les prêts et ventes à tempérament, les prêts hypothécaires et les crédits-bails, cela correspond le plus souvent au montant réellement libéré à la signature, cela n'est pas d'application aux ouvertures de crédit. Cette information, relative aux montants maxima, est, en tant que telle, tout à fait intéressante pour le prêteur, comme pour le chercheur qui s'intéresse à l'activité de crédit ou à la prévention du surendettement, mais, en revanche, elle se révèle insuffisante pour mesurer le niveau réel de l'endettement des personnes. En effet, pour les ouvertures de crédits, le montant maximum (droit de tirage) octroyé par contrat ne correspond pas au montant réellement prélevé.

De ce fait, telle que l'information est stockée à ce jour, elle surévalue le plus souvent le montant réellement dû par l'emprunteur. Ceci est vrai également pour les autres types de crédit, puisqu'il n'est pas tenu compte des remboursements réalisés une fois le crédit octroyé. Ce biais est dommageable à plusieurs égards : 

  • il limite la connaissance des montants réellement dus, de l'endettement crédit effectif ;
  • il biaise l'information collectée par les prêteurs alors que l’un des attraits fondamentaux de la CCP est de fournir une information exact (par rapport à celle qui était jusque-là reçue par les clients, et qui était donc sujette à caution, en matière de crédit en cours;

L’information se révèle également insuffisante pour illustrer l'usage effectif des ouvertures de crédit (dont un grand nombre est contracté à durée indéterminée) : ces dernières représentent, en nombre, plus de 45,7 % des contrats au 31 décembre 2007 (soit 4.433.937 contrats).

Vu le succès de ce type de crédit, il devient totalement déraisonnable de poursuivre une analyse des ouvertures de crédit s'il n'est pas possible :

  • d'identifier celles qui sont dormantes (on pourrait considérer comme dormantes celles qui sont inutilisées depuis leur octroi et celles qui sont à zéro depuis au moins 12 mois) ;
  • d'identifier les encours réels utilisés par les consommateurs.

Pour ce faire, il est indispensable que la Centrale des crédits puisse collecter au moins une fois par an, en plus des informations disponibles à l'heure actuelle, les encours réels des crédits enregistrés, et qu'un suivi longitudinal anonymisé des situations d'endettement puisse être mis en oeuvre.

Tracer les regroupements de crédits et les refinancements

Le regroupement de crédit – et toute offre de crédit qui tend à consolider des dettes (permettre un étalement plus long des remboursements, réduire la mensualité, et parfois aussi, augmenter le montant emprunté) – représente une activité en croissance et mérite une attention particulière, pour les raisons suivantes :

  • il se présente généralement « déjà » comme une réponse à des difficultés budgétaires, et constitue à ce titre un premier signal ;
  • il se présente comme une solution facile, qui amène peu de réflexion sur la gestion budgétaire du ménage, sur ce qui l’a amené à devoir faire ce regroupement. Il n'y a donc aucun effet pédagogique sur la qualité de gestion du ménage ;
  • il est souvent assorti d'une offre d'argent supplémentaire : dès lors, le total du crédit regroupé représente plus que la somme des soldes restant dus des crédits existants ;
  • enfin, malgré l'allégement qu'il procure (ou est censé procurer) au niveau du budget mensuel – puisqu'il permet de réduire le montant des remboursements – il est généralement plus coûteux en termes absolus, ce qui est une source potentielle d'aggravation de la situation financière dans le futur.

Pour toutes ces raisons, une traçabilité des « regroupements de crédits et refinancements » devrait être rendue possible au sein de la CCP. Elle permettrait, par une observation longitudinale adaptée, de vérifier si, dans les faits, les bienfaits immédiats apportés aux consommateurs ne se révèlent pas nocifs à moyen terme. Cette observation particulière pousserait par ailleurs l'ensemble des acteurs (consommateurs et prêteurs) à un usage raisonné de ce type de crédit. Les modalités d'identification de ces situations devront faire l'objet d'un soin particulier.

Pour ce faire, une rubrique «but du crédit » devrait être systématiquement complétée dans le contrat de crédit, avec le « regroupement/refinancement» comme un choix particulier parmi d'autres. Cette information, complétée par le professionnel, sera ensuite transmise à la CCP avec les autres informations déjà collectées.

Tracer les intermédiaires de crédit

Les intermédiaires de crédit jouent un rôle clé dans la commercialisation de certains types de crédit. Or, cette étape intègre notamment l'information et le conseil que les consommateurs doivent recevoir dans la phase précontractuelle. Il devient dès lors tout à fait indispensable de pouvoir identifier, au sein de la CCP, non seulement le prêteur, mais également l'intermédiaire de crédit qui est éventuellement intervenu.

Cette traçabilité des intermédiaires de crédit permettrait de vérifier si oui ou non leur présence réduit ou augmente le risque de défaut de paiement, ou de détecter, parmi ceux-ci, ceux qui l'augmentent.

Cette observation ciblée des pratiques des intermédiaires devrait avoir, une fois de plus, un effet incitatif à une pratique raisonnée de l'offre de crédit, et devrait avoir des retombées positives quant à la professionnalisation du personnel de ce secteur.

La traçabilité des intermédiaires de crédit devrait permettre d'accroître la responsabilité et le professionnalisme d'un secteur professionnel, qui occupe aujourd'hui une place prépondérante dans l'offre de crédit et dans les risques d'endettement qui en découlent.

La participation des intermédiaires de crédit pourra permettre par ailleurs d'élargir la base de financement du Fonds de traitement du surendettement.

Conclusion

L'exploitation des données collectées par la CCP n'en est qu'à ses balbutiements. Comme nous l'avons illustré, les perspectives de développement sont importantes et pourraient contribuer à influencer les pratiques sur le marché de manière positive, en accroissant l'attrait de comportements responsables tant de la part des professionnels que des consommateurs. Ce type d'influence est d'autant plus efficace qu'elle touche l'ensemble des acteurs de la même manière et sans qu'il soit possible de s'y soustraire. Ces deux qualités permettent à ce type de mesure de réduire d'autant les risques de distorsion de concurrence ou d'autres effets indésirables. 

1 2006-01-18, Working Paper 78, Helga De Doncker, Crédits aux particuliers – Analyse des données de la Centrale des Crédits aux Particuliers. 

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Les données diffusées à ce jour par la Centrale des crédits, certes utiles pour une première compréhension du marché du crédit et des défaillances qui y sont inscrites, continuent à n'utiliser qu'une part infime des informations dont cet organisme dispose à des fins de prévention du surendettement...

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-3
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2008
Date d'édition
05/2008
Mois d'édition
Mai

Education financière : principes et priorités

Soumis par Anonyme le

Eléments de définition – étendue de la matière

Sous le vocable d'éducation financière se retrouvent aujourd'hui encore des éléments très disparates et une définition claire, synthétique, largement partagée, n'est pas encore de mise.

Une vision toutefois assez éclairante nous est inspirée d'auteurs finlandais2, dont une publication traite précisément de la compétence financière des consommateurs et d'autres concepts qui lui sont liés.

Leur approche considère la compétence financière des consommateurs comme une matière relative et évolutive par essence. Relative puisqu'elle dépend de la position du consommateur dans son cycle de vie, mais aussi de son niveau d'éducation, de revenu et des circonstances de vie qu'il rencontre. Relative également puisqu'elle dépend du contexte culturel dans lequel le consommateur s'insère.

Au sein des multiples compétences qu'un consommateur acquiert dans sa vie, la compétence financière, lorsqu'elle se traduit par une gestion adaptée, contribue à atteindre l'équilibre budgétaire et, par conséquent, participe à son bien-être général.

L'émancipation des consommateurs sur ces matières nécessite des formations et des informations sur mesure, ciblées, qui puissent atteindre la diversité croissante de leur mode de vie et de consommation et s'adapter à leur propre langage.

Quant aux contenus concernés, nous avons choisi de les classer en trois grandes familles :

  • a) le savoir : apprendre à compter, à gérer un budget, à lire un contrat de crédit,... ;
  • b) le savoir-faire : identifier le crédit ou le placement qui répond à son besoin, mesurer le risque, comparer des propositions d'assurances,... ;
  • c) le savoir-être : différencier désirs, envies et besoins, gérer les frustrations, apprendre à différer, à choisir, poser des choix éthiques et solidaires,...

Cette présentation illustre à quel point la matière est riche, touche une gamme très large de savoirs, dont la transmission nécessite une gamme tout aussi large de méthodes, d'outils et d'intervenants. 

Education financière : principes identifiés et commentaires 3

L'enquête menée dans le cadre du projet européen cité en introduction4 a permis d'identifier et de conforter un corpus commun de principes. Nous les passerons tour à tour en revue en les commentant. Lorsque cela est possible, nous citerons pour chacun d'eux des exemples concrets d'applications : 

Premier principe

Il est nécessaire de mesurer, sur une base régulière, le niveau de connaissance financière du public afin de réaliser un état des lieux préalable, d'évaluer l'efficacité des mesures prises et d'identifier de nouveaux besoins.

Commentaire
La construction d'une structure d'enquête devrait prendre en considération :

Application

  • l'âge du répondant et le niveau des savoirs et compétences qui lui sont nécessaires pour pouvoir agir en citoyen responsable et en consommateur averti;
  • la nécessité d'une mise en oeuvre régulière et, idéalement, sur un échantillon représentatif, afin de mesurer les progrès accomplis et d'adapter les programmes en conséquence.
  • Au Royaume-Uni, c'est la « Financial Services Authority » (FSA) qui mène des enquêtes régulières ayant pour objectif de mesurer le niveau de connaissance financière du public et d'évaluer l'efficacité des mesures prises. Cette institution, mandatée par le gouvernement, organise par ailleurs la coordination des parties prenantes1 (principe décrit au paragraphe suivant).

Deuxième principe

L'éducation financière du public est un objectif de long terme qui doit s'articuler tout au long de la vie des citoyens et s'adapter aux circonstances particulières des étapes traversées : l'enfance et la gestion des envies et des besoins ; l'adolescence et la construction de l'identité, les liens d'appartenance ; la vie de jeune adulte, le premier budget à gérer, la découverte de l'autonomie, le premier salaire ; la vie de couple, le premier enfant, la perte d'emploi,...

Commentaire

Si ce principe renforce le précédent quant à l'articulation des actions des divers acteurs impliqués, il sous-entend également qu'une didactique et une pédagogie particulière doivent être développées afin de rencontrer les besoins et s'adapter au public ciblé: on n'aborde pas la question des pulsions d'achat de la même manière que le choix d'un produit d'épargne pension ou encore la manière de retrouver l'équilibre financier lorsque l'on est surendetté ou précarisé.

Application

Des associations se sont spécialisées dans le développement de supports et d'actions pédagogiques qui ciblent des publics particuliers, soit en les contactant en direct, soit en formant les professionnels avec lesquels ces publics sont en contact (enfants, adolescents, travailleurs, personnes handicapées...)
Deux sites particulièrement bien fournis, néerlandais et suisse, exposent un nombre substantiel d'outils et de campagnes « prêt-à-l'emploi »:

Troisième principe

L'éducation financière doit construire sa propre didactique. L'objectif doit permettre de rencontrer le public et de s'adapter à ses spécificités.

Commentaire

Dans cette dimension, s'ajoute également la nécessité de construire un lexique et un vocabulaire qui permettent de rompre avec la complexité croissante des produits et services financiers.
En effet, cette complexité voue à l'échec une éducation financière qui chercherait à transmettre la totalité des termes techniques utilisés par les professionnels. Non seulement ce vocabulaire est en pleine expansion, mais sa complexité intrinsèque le rend à tout jamais incompréhensible pour une partie de la population. Dès lors, on peut envisager plus pragmatiquement de construire une présentation « simplifiée et standardisée » des produits financiers, qui comporterait une cotation de plusieurs critères, ce qui permettrait d'informer le consommateur sur leurs principales caractéristiques : durée, risque, rémunération/rendement, coût, responsabilités engagées et garanties mobilisées. Le consommateur ainsi informé sur les principaux éléments participant à sa décision verrait cette dernière non seulement facilitée, mais aussi basée sur des éléments objectifs et comparables (par critère, on pourrait utiliser un code couleur pour la cotation, comme ce qui est mis en oeuvre pour les consommations énergétiques des appareils électroménagers).

Une « présentation standardisée» des produits et services financiers aurait pour autres avantages :  

  • de simplifier le contenu des matières relatives à la compréhension et au choix de consommation de produits financiers ;
  • d'accroitre la durée de vie des contenus pédagogiques, car elle ne serait pas limitée à celle, parfois brève, des produits disponibles sur le marché;
  • de faciliter l'évaluation à moyen et long termes des connaissances du public.

Application

En tant que tel, il existe de nombreux projets pédagogiques parfaitement adaptés dans leur didactique et leur pédagogie aux publics ciblés; en revanche, nous n'avons pas identifié d'exemple de « présentation standardisée de produits financiers ».

Parmi les nombreux projets pédagogiques développés, citons notamment : 

En Belgique, pas de portail unique en tant que tel, mais de nombreuses initiatives développées : pour un premier recensement, voir l'Observatoire du Crédit et de l'Endettement qui travaille sur ces matières6.

Quatrième principe

L'éducation financière fait partie d'un tout, qui participe à la recherche de l'épanouissement des citoyens. Si une approche spécialisée et directe peut être appropriée dans certaines circonstances : conseils en placements, produits d'épargne,..., une approche globale est souvent nécessaire dans d'autres cas : surendettement, consommation compulsive,...

Commentaire

L'enquête menée au niveau européen auprès d'experts relève que tous considèrent comme fondamental l'intégration d'éléments d'éducation financière dans le cadre scolaire, dès le plus jeune âge.
Il est également utile d'imaginer la démultiplication de l'information à travers d'autres médias, notamment dans les activités de loisirs : jeux télévisés, débats, témoignages, forums Internet, presse,...
Cette multiplication aura comme autre effet positif de faciliter la prise de parole sur ces questions qui peuvent parfois se révéler particulièrement taboues et sources de souffrance (on pense en particulier aux situations de surendettement).

Application

Un projet d'envergure nationale dans les écoles secondaires est mis en place au Royaume-Uni, qui doit se déployer d'ici 2011. Intitulé « Learning Money Matters », il est mis en oeuvre par l'organisation Personal Finance Education Group (www.pfeg.org).

Cinquième principe

L'éducation financière n'a pas pour objectif de rendre économiquement rationnel le consommateur, dont les comportements répondent le plus souvent à d'autres types de considérations (sentiments, émotions, symboles,...). Face à des produits financiers tels que les crédits ou certains placements spéculatifs, il n'est d'ailleurs pas rare que ces considérations poussent un consommateur à agir dans une logique de très court terme, en sachant que le choix posé a toutes les chances d'aggraver sa situation à plus long terme. Face à cette réalité, force est de constater que seule la protection du consommateur et la consolidation des pratiques commerciales responsables peuvent apporter une réponse adéquate.

Commentaire

Les politiques en matière d'éducation financière ne peuvent avoir pour objectif d’autoriser la dérégulation du marché des produits et services financiers mais doivent, au contraire, viser une plus grande confiance des consommateurs actifs sur le marché, notamment par une plus grande symétrie d'information entre eux et les producteurs.

Application

Le cadre législatif belge en matière de protection du consommateur et de responsabilisation du prêteur dans la phase précontractuelle est relativement poussé au regard de la moyenne européenne (obligation d'information et de conseil des prêteurs, Centrale des Crédits aux Particuliers – fichiers négatif et positif, Fonds de Traitement du Surendettement, loi sur le crédit à la consommation et sur le règlement collectif de dettes, ..., pour n'en citer que quelques exemples).

Et la Belgique ?

Comme nous venons de l'indiquer, la Belgique dispose, d'une part, d'un cadre législatif performant et, d'autre part, de nombreuses structures qui agissent d'ores et déjà en matière d'éducation financière. Elles pourraient à terme agir de manière coordonnée et efficace dans la mise en place d'une stratégie globale d'éducation financière. Des syndicats aux prêteurs, en passant par des organismes d'éducation permanente ou les Centres de références7, les actions se multiplient et la prise de conscience du caractère inéluctable d'un tel développement fait son chemin.

Il est utile de garder à l'esprit que les motivations qui insufflent ces initiatives ne sont pas toutes de même nature. Si certaines ont clairement pour objectif une meilleure protection du consommateur et une plus grande symétrie d'information entre les consommateurs et les producteurs, d'autres visent très clairement la dérégulation progressive du marché des produits et services financiers. Ces derniers considèrent qu'un consommateur « informé » n'a plus à être considéré comme « l'usager faible » dans les relations contractuelles qu'il entretient avec son banquier ou son organisme de prêt. Cette approche pourrait, dans les pays où la protection du consommateur est élevée et efficace, à l'instar de la Belgique, se révéler dommageable pour le consommateur.

Conclusions

S'il fallait indiquer l'une ou l'autre priorité, avec comme prisme l'efficacité à court et moyen termes, nous pensons que l'ensemble des parties prenantes auraient tout à gagner à se rencontrer sur une base régulière dans le cadre d'une coordination. Sur ce point, il sera intéressant de suivre le développement que prendra l'étude mise en oeuvre par la CBFA.

Le second point serait sans doute de construire un outil efficace de mesure des connaissances du public (des publics), qui permettrait de définir les besoins les plus fondamentaux (quelles matières, concepts, savoirs sont les moins maîtrisés?) et d'identifier les publics les plus fragilisés afin de construire de manière coordonnée des stratégies d'action.

Le dernier point pourrait être l'élaboration d'un plan opérationnel d'éducation financière dans l'enseignement obligatoire, qui pourrait, le cas échéant, valoriser et utiliser au mieux les nombreux supports pédagogiques développés, en particulier par les Centres de références (mallette pédagogique, journée pédagogique,...). L'école semble en effet le meilleur moyen de toucher de manière large les enfants dès le plus jeune âge, ce qui, nous le rappelons ici, a été identifié par de nombreux professionnels comme un des principaux gages d'efficacité.

Olivier Jérusalmy, octobre 2007 

Références 

  • http://static.twoday.net/fes/files/FES_FinEd_Finland_lifecycleapproach.pdf
    Consumer Financial Capability – A life cycle approach 04.11.2005
    Johanna Leskinen, Ph.D.; Head of research, National Consumer Research Centre & Anu Raijas, Ph.D.; Senior Lecturer in Consumer Economics, University of Helsinki
  • http://fes.twoday.net
  • « Education Financière » ASB Schuldnerberatungen GmbH, publication issue du projet européen FES « Education financière et meilleur accès à des services financiers adéquats », 2005-2007
  • En cours de rédaction au moment de la réalisation de cette analyse : une fiche thématique réalisée par l'Observatoire du crédit et de l'Endettement : “Education financière : concept under construction”

1 Le projet intitulé « Better Access to Financial Services & Financial Education » a été cofinancé par la Commission européenne, DG Emploi, Affaires sociales et Egalité des chances. Le responsable du projet est ASB Schuldnerberatungen GmbH, acteur principal en Autriche de la médiation de dettes.

2 http://static.twoday.net/fes/files/FES_FinEd_Finland_lifecycleapproach.pdf, Consumer Financial Capability – A life cycle approach 04.11.2005, Johanna Leskinen, Ph.D.; Head of research, National Consumer Research Centre & Anu Raijas, Ph.D.; Senior Lecturer in Consumer Economics, University of Helsinki

4« Education Financière » ASB Schuldnerberatungen GmbH, publication issue du projet européen FES « Education financière et meilleur accès à des services financiers adéquats », 2005-2007, téléchargeable sur le site indiqué en note 2.

7 Les Centres de référence sont en charge, en Wallonie, d'un support en expertise pour les services de médiation de dettes le la province et de la prévention au surendettement. Trois Centres sont opérationnels à ce jour : Province du Luxembourg : Groupe Action Surendettement : gas.prevention@skynet.be, tél: 063.60 20 86 ; Province du Hainaut : Centre de Référence : centreref@hotmail.com, tél:064.84 22 91 ; Province de Liège (germanophone) : Verbraucherschutzzentrale asbl : viviane.leffin@vsz.be, tél: 087.59 18 50.

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Identification de bonnes pratiques européennes en matière d'éducation financière : quels enseignements pour les parties prenantes en Belgique ?

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-2
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
10/2007
Mois d'édition
Octobre

Défaut de paiement : une obligation incomplète

Soumis par Anonyme le

Les crédits et défauts enregistrés à la Centrale des Crédits aux Particuliers1

La Centrale enregistre, conformément aux dispositions légales et réglementaires, les informations concernant tous les crédits à la consommation et les crédits hypothécaires, conclus par des personnes physiques à des fins privées ainsi que les éventuels défauts de paiementrésultant de ces crédits.

En 1993, suite à la loi du 12 juin 1991 sur le crédit à la consommation, le champ d'application de l'enregistrement "négatif" a été élargi à toutes les formes de crédits prévues dans cette loi, c'est-à-dire la vente à tempérament, le prêt à tempérament, le crédit-bail et l'ouverture de crédit. L'enregistrement des défauts de paiement relatifs à des crédits hypothécaires a également débuté cette même année suite à la nouvelle loi sur le crédit hypothécaire.

Ne sont toutefois pas enregistrés, les crédits à la consommation :

  • dont le montant initial est inférieur à 200 euros;
  • constatés par un acte authentique et dont le montant initial est supérieur à 20.000 euros;
  • dont le montant initial doit être remboursé par le débiteur dans un délai ne dépassant pas trois mois, pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une ouverture de crédit;
  • dont le montant octroyé est inférieur à 1.250 euros et est remboursable dans un délai de trois mois, en cas d'ouverture de crédit.

Les critères provoquant l'enregistrement des défauts de paiement découlant des contrats de crédit sont les suivants :

  • a) pour les ventes à tempérament, les prêts à tempérament et les crédits-bails:
    • lorsque trois termes n'ont pas été payés ou l'ont été incomplètement, ou
    • lorsqu'un terme échu n'a pas été payé ou l'a été incomplètement durant trois mois, ou
    • lorsque les montants de termes restant encore à échoir sont devenus immédiatement exigibles;
  • b) pour les ouvertures de crédit :
    • lorsqu'une situation débitrice non autorisée n'est pas apurée dans les trois mois à partir de la date à laquelle le prêteur l'a exigé par écrit;
  • c) pour les crédits hypothécaires :
    • lorsqu'une somme due n'a pas été payée ou l'a été incomplètement trois mois après la date de son échéance, ou
    • lorsqu'une somme due n'a pas été payée ou l'a été incomplètement un mois après une mise en demeure par lettre recommandée.

Les données fournies par les prêteurs relatives au crédit sont les suivantes :

  • a) concernant le débiteur ainsi que le codébiteur éventuel : le numéro d'identification du Registre national des personnes physiques, le nom, le premier prénom, la date de naissance, le sexe et l'adresse;
  • b) concernant le contrat de crédit : le type de crédit, le numéro du contrat, et
    • pour les ventes à tempérament, les prêts à tempérament et les crédits-bails : le montant total à rembourser, le montant du premier terme, le nombre de termes, la périodicité initiale des termes, la date du premier terme et la date du dernier terme ;
    • pour les ouvertures de crédit: le montant du crédit, la date de conclusion du contrat et, le cas échéant, la date de fin du contrat ;
    • pour les crédits hypothécaires : le montant emprunté en capital, le montant de la première échéance, le nombre d'échéances, la périodicité initiale des échéances, la date de la première échéance et la date de la dernière échéance;
  • c) concernant le défaut de paiement : la date et le montant de l'arriéré ou, en cas d'exigibilité, le montant et la date du solde débiteur restant dû.

L'objectif d'un tel enregistrement

L'enregistrement des données en matière de défaut de paiement des crédits à la consommation et des crédits hypothécaires au sein de la Centrale des Crédits aux Particuliers a pour objectif d'accroitre de manière significative la prévention du surendettement des particuliers.

En effet, ce fichier doit être obligatoirement consulté par les prêteurs ou leurs représentants dans la phase précontractuelle. Cela signifie que ces professionnels disposent d'une cartographie des crédits en cours d'un candidat emprunteur, qu'ils soient ou non en défaut de paiement. Chaque consultation génère un code qui doit être mentionné sur le contrat de crédit avec la date de cette dernière. Le contrat doit être émis au plus tard dans les 20 jours qui suivent la consultation, sous peine de devoir réaliser une nouvelle consultation.

Cette information est utile au prêteur dans la mesure où l'octroi d'un crédit repose sur une analyse de risque qui comporte généralement un volet « fiabilité » et un volet « solvabilité ». La place que l'information contenue dans la Centrale prendra in fine dans la décision est quant à elle variable en fonction des politiques commerciales et des politiques risques des prêteurs. A la croisée des chemins, le résultat du fichage permettra une connaissance du nombre d'engagements en cours2 et permettra dans certains cas de vérifier les propos des clients ou d'entamer une discussion.

A un autre niveau, il faut également considérer la consultation obligatoire de la Centrale des Crédits comme le premier pas tangible en direction d'une objectivation des obligations du prêteur dans la phase précontractuelle, en ce qui touche l'évaluation de la solvabilité du client.

Un fichier perfectible

Ce fichier correspond, à n'en pas douter, à une très belle avancée en matière de prévention du surendettement. Toutefois, nous souhaitons souligner dans cette analyse deux éléments particuliers qui nous semblent handicaper cette belle mécanique.

A) Un fichage incomplet qui souligne le paradoxe des crédits non régis

  • Les crédits non régis : il s'agit des crédits à la consommation destinés aux particuliers dont les montants (inférieurs à 200 € ou 1.250 € selon le type) ou les durées (inférieures à 3 mois) les font sortir du cadre légal organisant la protection du consommateur (loi de 1991) et donc de leur fichage corrélatif, qu'il soit positif ou négatif.
  • Ne sont pas non plus régis par cette loi les dépassements non autorisés en compte courant ni les contrats de leasing conclus par des personnes physiques, alors qu'ils représentent également des engagements financiers dont la présence impacte directement la solvabilité des clients. La connaissance de défaut de remboursement pour ces services est tout aussi pertinente dans l'analyse du risque que les défauts soumis à l'enregistrement.

Il est toutefois paradoxal que les défauts relatifs à ces services financiers non régis par la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers soient tout de même centralisés à la Banque Nationale de Belgique, dans un fichier appelé « enregistrement des défauts non régis », pour les mêmes raisons « préventives » que celles qui animent les autres enregistrements. Toutefois, seuls les participants à ce fichier particulier, c'est-à-dire les prêteurs qui ont signé une convention avec la Banque Nationale de Belgique et qui alimentent ce fichier, ont accès aux données.

Nous sommes d'avis que l'ensemble des services financiers (régis et non régis) fassent l'objet d'un même traitement au sein de la CCP : qu'ils fassent tous l'objet d'un enregistrement « positif » et qu'ils soient consultables par les mêmes acteurs (les professionnels ainsi que les particuliers pour leur propre situation) car cette information participe à une meilleure estimation de la fiabilité et de la solvabilité des candidats emprunteurs. En outre, si la collecte de ce type de données est généralisée à l'ensemble des acteurs, il n'y a plus de raison d'en réserver l'accès aux seuls pourvoyeurs.

B) La difficile interprétation des défauts de paiement

Parmi les analyses possibles des données collectées dans la Centrale des Crédits, il est légitime d'identifier, parmi les différents types de crédits, ceux qui provoquent proportionnellement plus de défaut de paiement, et le cas échéant, si des différences s'observent entre les différentes catégories de prêteurs recensées.

Cette analyse est toutefois rendue difficile, voire impossible, pour les raisons suivantes :

a) la règle d'enregistrement des défauts varie en fonction des types de crédits (cf. infra), et elle ne nous paraît pas adaptée aux ouvertures de crédit (OC). D'une part, il y a un effet de stock : puisque les OC sont des crédits à durée indéterminée, même si elles sont remboursées et inutilisées, elles restent enregistrées jusqu'à la résiliation du contrat par le consommateur – cet effet de stock est aggravé par le fait que de nombreuses OC sont accordées sans jamais être utilisées, parfois simplement d'ailleurs car le client n'a pas pris conscience que la carte de paiement qu'il s'est vu proposer est en réalité une OC. D'autre part, les OC sont des crédits dont les modalités sont très variables : d'un contrat à un autre, les règles régissant les droits de tirage comme les modalités de remboursement sont très variables. Ces dernières peuvent prévoir soit un remboursement en capital à terme et le paiement régulier d'intérêts, soit des remboursements échelonnés composés de capital et d'intérêts. Dans ce dernier cas, le montant minimum proposé de remboursement équivaut généralement au montant des intérêts dus augmentés d'une part de capital, qui peut parfois être faible.

Pour ces raisons, les comparaisons des taux de défaut de paiement par type de crédit sont fallacieuses et souvent utilisées, d'ailleurs, par les professionnels du secteur pour minimiser les problèmes générés par les OC, puisqu'ils sont amplement dilués dans ces effets de stock.

Parmi les pistes envisageables, il pourrait s'avérer utile de :

  • mettre fin au caractère « indéterminé » des durées des ouvertures de crédit, cela permettrait de « nettoyer » le fichier régulièrement;
  • prévoir un niveau de remboursement mensuel minimal en deçà duquel le défaut de paiement devrait être enregistré de manière systématique ;
  • prévoir annuellement une mise à jour des encours - et pouvoir ainsi identifier les OC dormantes à ce moment-là des autres. Cette mesure serait également utile pour les autres types de crédit, puisque cela permettrait d'appréhender de manière plus réaliste non seulement « les types de crédits souscrits », mais également l'encours de ces crédits.

A quand un « scoring » des prêteurs ?

A ce jour, les informations collectées par la Centrale des Crédits aux Particuliers servent aux professionnels dans la phase précontractuelle de l'octroi d'un crédit, et plus précisément dans leur analyse risque.

Un autre usage utile des données collectées pourrait être d'identifier les professionnels et les crédits qui provoquent le moins de défaut de paiement. D'un scoring exclusivement orienté « client », on passerait ainsi à une plus grande symétrie d'information en proposant également un scoring des « prêteurs ».

Olivier Jérusalmy, octobre 2007

Références

  • Working paper document n°78 « Crédits aux particuliers - Analyse des données de la Centrale des Crédits aux Particuliers », (janvier 2006), Helga De Doncker, Banque Nationale de Belgique

1 Banque Nationale de Belgique, Statistiques, Centrale des crédits aux particuliers, 2006

2 A noter que les données mises à disposition ne traitent pas des encours des crédits recensés, puisque ce sont les montants octroyés à la signature du contrat qui sont repris dans la Centrale, et qu'il n'y a pas d'actualisation prévue des montants.

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

La loi de 2003 relative à la Centrale des Crédits aux Particuliers (CCP) organise l'enregistrement de tous les crédits à la consommation et crédits hypothécaires ainsi que les arriérés de paiement : les modalités d'enregistrement ne permettent pas une analyse des dangers respectifs des différents types de crédit.

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2007-1
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2007
Date d'édition
10/2007
Mois d'édition
Octobre

Indicateur de pauvreté et budgets minima : une avancée pour une définition absolue du phénomène ?

Soumis par Anonyme le

Introduction

Sous une terminologie non encore définitivement fixée à ce jour – budgets standards, budgets standardisés, références budgétaires ou encore exemples budgétaires – on trouve des descriptions de budgets (revenus et dépenses) de ménages adaptées à leur composition familiale – prise en compte de la composition (nombre d'adultes et d'enfants ou du niveau de bien-être envisagé (minimum, intermédiaire ou élevé). Ces budgets de référence, ainsi que nous les désignerons dans la suite de cette peuvent servir à de nombreuses applications, dont les principales sont brièvement exposées ci-après.

Quand ils sont développés pour établir un standard minimum de vie (seuil de dignité/seuil de pauvreté), ils prennent la forme d’une liste précise de biens et services qui doivent être accessibles au ménage considéré, sous peine d'avoir un niveau de vie inférieur à ce seuil. Cette liste est adaptée au nombre de personnes qui composent le ménage, à leur sexe et à leur âge. À la différence des autres applications possibles, cette référence « minimale » est élaborée sans tenir compte des revenus disponibles. On ne cherche pas à établir un budget équilibré en fonction des revenus disponibles, comme cela se fait pour d'autres applications. Ici, il s'agit bien de définir le panier auquel tout ménage devrait pouvoir accéder sous peine d'être tenu pour « pauvre » dans le pays considéré.

En revanche, quand les budgets de références sont utilisés à des fins éducatives (gestion/guidance budgétaire) ou curatives (médiation de dettes amiable ou judiciaire), les méthodologies d'élaboration pourront être plus variées, pas forcément basées sur la définition précise d'un panier de biens. Des moyennes statistiques pourront être utilisées, par exemple. En revanche, c'est la notion d'équilibre budgétaire qui devient essentielle ici. Nous consacrerons une seconde analyse à cette famille de références budgétaires.

Pour mémoire, citons encore comme applications possibles des budgets de référence : leur usage dans l'estimation des capacités de remboursement dans le cadre de l'octroi responsable de crédit, leur usage par les autorités publiques pour identifier les profils de ménages les plus « déprivés » et prendre des mesures adaptées et ciblées. Ils sont également utiles pour réaliser des simulations et vérifier les impacts budgétaires que des mesures publiques/fiscales auront sur le pouvoir d'achat des différents profils de ménage.

Avant de passer à la présentation concrète de telles références minimales, il est important de signaler qu'en aucun cas cette approche n'est en soi une manière de définir « scientifiquement » ce qu'est la pauvreté. Cette notion contiendra toujours une part de subjectivité qu'il n'est pas question ici de remettre en cause. Cependant, l'approche utilisée et la méthodologie employée permettent une grande transparence et une grande flexibilité (il est aisé d'ajouter ou de retirer des éléments du panier), et, dès lors, elles ouvrent la porte à des débats qui peuvent aboutir à un consensus social. Car c'est bien de cela qu’il est question : la définition d'une norme sociale (ici, un pouvoir d'achat minimum) en deçà de laquelle on considère qu'un citoyen est pauvre.

La transparence et la précision sont donc les principales qualités d'une telle approche, revient ensuite à la qualité et à la maturité des parties prenantes la responsabilité d'atteindre ou pas un consensus quant à un panier minimum. Comme tout instrument, il convient donc de le construire avec art et de le manier avec un peu de dextérité.

Standard minimum, pauvreté, dignité humaine... de quoi parle-t-on ?

Pour construire une référence budgétaire pour un niveau de vie minimum en Belgique, il est donc nécessaire d'élaborer un « panier de biens et services » qui illustre ce qu'il est nécessaire de pouvoir acquérir pour échapper à la pauvreté. Cela se traduit donc in fine par un pouvoir d'achat, une fois que ce panier est estimé aux prix courants. Il est important de se rappeler que ce panier ne correspond toutefois pas à ce que les personnes doivent acheter, mais à ce à quoi, à un moment donné, on considère que toute personne ou tout ménage doit pouvoir accéder pour échapper à la pauvreté.

Ces questions lèvent déjà un premier voile sur l'importance que revêt, dans cette approche, l'élaboration d'une définition commune de la pauvreté ou de la dignité humaine, si l'on souhaite aboutir à un consensus. Vivre dignement, c'est évidemment pouvoir satisfaire ses besoins essentiels, mais n'est-ce pas aussi pouvoir vivre de façon autonome, pouvoir prendre part de façon responsable à la vie en société ?... Une abondante littérature traite toutefois ces questions et ce sont, en général, des chercheurs/experts qui, en lançant les premières bases de telles références minimales, proposent la définition sur laquelle ils vont se reposer1. D'autres approches existent, que l'on trouvera plus souvent mises en oeuvre dans les pays anglo-saxons (Royaume-Uni2, Irlande3), qui partent, au contraire, d'une construction du panier minimum au travers de groupes de personnes qui vivent la pauvreté. Cette approche pragmatique, plutôt que théorique, répond de facto à ce type de questions, mais de manière implicite.

Principes d'élaboration

Pour construire un tel panier, il faut idéalement lister l'ensemble des biens et services qui doivent pouvoir être accessibles à chaque ménage (en fonction de sa composition) afin de pouvoir échapper à la pauvreté.

Pour ce faire, les dépenses sont classées par catégories, dont voici une nomenclature possible, basée sur les modes de paiement. Il existe d'autres catégories possibles, basées sur les données de l'ancienne INS4, sur le rythme des dépenses... Il n'existe pas en tant que telle de solution « idéale ».

Revenu

  • Revenu(s) professionnel(s)
  • Pécule(s) de vacances
  • Prime(s) de fin d’année
  • Allocation compl. RIS
  • Allocation compl. chômage
  • Allocation compl. mutuelle
  • Allocation compl. handicapé
  • Allocations familiales
  • ADEL
  • Indemnités de formation
  • Étudiant
  • Indépendant
  • Chèques repas
  • Pension alimentaire perçue
  • Remboursement contributions
  • Autres ressources secondaires
Dépenses
  • Dépenses fixes
  • Loyer / Crédit hypothécaire
  • Énergies et fluides
  • Taxes locales
  • Téléphonie et Internet
  • Assurances
  • Études et frais scolaires
  • Transport
  • Dépenses « à provisionner »
  • Vêtement et chaussures
  • Équipements ménagers, mobilier
  • Santé – traitements médicaux
  • Loisirs
  • W-E et vacances
  • Dépenses ménagères
  • Alimentation et snack
  • Cigarettes
  • Entretien/nettoyage du logement
  • Soins corporels
  • Animaux domestiques
  • Divers (timbres, fleurs...)
  • Cadeaux (anniversaires, fêtes...)
  • Autres déplacements

Pour chacune des catégories de dépenses citées, il faut ensuite détailler le panier de biens qui les composera... Puisque le format d'une analyse ne nous permet pas de passer l'ensemble des postes budgétaire en revue, nous avons choisi d'en présenter quelques-uns qui nous permettront de souligner la dimension subjective que cette approche maintient, mais aussi, on l'espère, de souligner les bienfaits qu'une transparence complète par rapport à ces éléments peut apporter sur le chemin d'un consensus social.

Quels articles ?

Pour l'alimentation, plusieurs pistes sont possibles : on peut partir de la liste des produits alimentaires utilisée dans l'enquête sur le budget des ménages, où on compte plus de 330 produits différents. Mais, parmi ceux-ci, lesquels doivent se retrouver dans le panier minimum ? Des choix doivent-ils être opérés ? Sur quelle base ? On peut également partir des prescriptions en matière d'alimentation réalisées par des diététiciens/nutritionnistes. On peut encore décider de partir des habitudes alimentaires nationales, pour autant qu'elles soient connues par enquête, ou encore des paniers tels que ceux que des personnes en précarité cherchent à obtenir.

Pour les assurances : prendra-t-on seulement en compte les assurances rendues obligatoires par la loi ? Considérera-t-on aussi celles qui protègent des risques du surendettement (hospitalisation, crédits...) ?

Pour le mobilier, quels seront les éléments minimums d'un aménagement décent ? Se référera-t-on aux dépenses moyennes observées par l'INS ? Ou plutôt à un panier déterminé par des experts ou par des personnes pauvres ?

Pour les (télé)communications : si une ligne fixe ou un GSM pour le ménage ne devrait pas soulever de questions, qu'en est-il de la place de l'Internet ? Cette question est cruciale quand on sait quelles économies cela peut permettre en termes de télécommunications, quand on sait l'utilité d'un tel outil pour l'éducation, les loisirs, la recherche d'emploi...

Pour les soins de santé : ce poste est un des plus délicats à aborder dans une telle approche, puisque l'accès à la santé fait partie des besoins essentiels et que la santé en tant que telle n'est pas un bien de consommation que l'on doit apprendre à consommer adéquatement. En revanche, l'accès aux soins de santé et à la prévention de la santé peut être coûteux pour le particulier – produits et prestations hors prescription et remboursement (aspirine... mais aussi lunettes, dentisterie, le minimum à facturer...). Ce problème n'existe pas dans les pays où l'accès gratuit est garanti à tous.

Quelles quantités ?

Pour l'alimentation, on peut notamment partir d'une grille élaborée par des diététiciens, qui prennent en compte l'âge et le sexe des membres de la famille pour établir des menus, ou encore partir des données collectées sur les habitudes alimentaires. Certains ont choisi une formule hybride (menus constitués sur la base des habitudes nationales, mais adaptés aux quantités recommandées par les diététiciens), après avoir constaté qu'en général les gens mangent de trop grosses portions.

Pour les assurances : ici, la question est directement liée à la structure du ménage et de son patrimoine.

Pour le mobilier : sur ce type de poste (mais aussi pour l'énergie, le loyer...), des économies d'échelle existent. S'il faut un lit pour chaque enfant, une grande table à manger et une TV suffisent pour le ménage.

Pour les (télé)communications : si l'Internet est sans doute devenu indispensable dans les familles où des enfants sont en âge de scolarité, ou quand un adulte est en recherche d'emploi, la question portera aussi sur les GSM et sur leur nombre. Quant au GSM : qui y accède dans la famille ? À partir de quel âge ? Quel budget prévoir par adulte et par enfant ? Ici plus qu'ailleurs, les débats peuvent aller bon train, mais on n'oubliera pas, au final, que c'est le coût total du panier ainsi défini qui a de l'importance, plutôt que le montant spécifique de chaque poste. Chaque poste individuel ne représente en effet qu'une dépense «potentielle ».

Pour les soins de santé : hormis la présence de maladie chronique, il restera toujours très difficile d'anticiper un tel poste de dépenses... et, donc, d'éviter qu'un panier minimum ne sous-estime de nombreuses situations particulières dans lesquelles le coût des soins de santé est plus élevé (ou devrait l'être pour que les membres du ménage soient adéquatement soignés).

Quelle qualité ?

Pour l'alimentation : parmi les nombreuses options possibles, on peut citer : choisir exclusivement les produits les meilleurs marchés, prendre comme référence une qualité moyenne, prendre comme référence les habitudes d'achat moyennes ou celles des populations précaires, si elles sont connues par enquête ou par consultation de « focus groupes », sur la base des prix pratiqués dans les lieux d'achats privilégiés par les personnes précaires...

Pour les assurances : ici, la question pourra se traiter sur la base de la recherche du meilleur rapport qualité-prix, ou du contrat le moins coûteux... ou de l'assurance la plus adaptée à la situation familiale et patrimoniale.

Pour le mobilier : on prendra en considération, soit les données statistiques disponibles, soit les catalogues de magasins spécialisés, en donnant la préférence, soit au meilleur marché, soit à une qualité considérée comme moyenne, soit encore aux choix que posent en général les personnes en état de précarité, pour autant que l'on dispose de l'information (organisation de « focus groupes », partenariat avec des associations représentant des personnes pauvres).

Pour les (télé)communications : comme pour les assurances, la question du meilleur rapport qualité-prix est sans doute la plus pertinente.

Pour les soins de santé : cette question reste encore relativement abstraite en Belgique, même si elle fait sens dans d'autres pays d'Europe. Le problème principal en Belgique reste l'accès aux soins plutôt que la qualité de ceux-ci.

Quelle durée de vie ?

Question souvent liée à celle de la qualité, pour l'ensemble des biens dont la durée de vie dépasse le mois, il est important d'en établir la durée de vie présumée afin de pouvoir transformer le coût d'achat en « provision » mensuelle. Si l’on considère qu'un lave-linge dure six ans dans une famille de quatre personnes, compte tenu de la marque/qualité choisie, on divisera son prix d'achat par 72 pour en connaître la « charge mensuelle ».

Il en ira de même pour les chaussures, les vêtements...

Un bel outil pour un usage responsable

Si nous avons souhaité présenter cette méthode de mesure absolue de la pauvreté, c'est que nous souhaitions tour à tour souligner :

  • sa richesse et sa complexité méthodologique, qui n'éliminent toutefois pas la subjectivité de sa construction et la multitude des approches possibles
  • sa grande transparence indispensable, sous peine de ne jamais permettre d'atteindre un consensus ;
  • la nécessité, compte tenu de son mode d'élaboration, de sa mise à jour régulière (une fois par an, pour la mise à jour des prix, et une fois tous les 5 ans au moins, pour ce qui concerne le contenu du panier) ;
  • son utilité pour vérifier la validité des mesures relatives de la pauvreté, et nous pensons, en particulier, au seuil de 60 % du revenu médian, qui est aujourd'hui l'indicateur de pauvreté le plus utilisé en Europe ;
  • son utilité pour vérifier la pertinence des tables d'équivalence utilisées pour simuler les diverses constellations de ménages (1er adulte = 1 ; 2ème adulte ou enfant de plus de 14 ans = 0,5 ; et enfant de moins de 14 ans = 0,3), quand on travaille sur la base des unités de consommation modifiées.

À ce jour, en Belgique, une recherche sur cette matière est mise en oeuvre par une équipe supervisée par le professeur Karel Van den Bosch (Centrum voor Social Beleid – Université d'Anvers) et financée par la politique scientifique belge, tandis que le Réseau Financement Alternatif participe à un projet européen d'apprentissage mutuel relatif à l'élaboration de budgets standardisés. La comparaison des approches, des méthodes et des contextes nationaux est primordiale à ce stade pour une compréhension complète de cette méthode et des différences marquantes qui peuvent subsister d'un pays à l'autre. Cette présentation et les réflexions qu'elles suscitent sont issues de la confrontation des diverses approches étudiées dans le cadre de ces deux projets.

Repères bibliographiques

  • Budget Handboeck, kerncijfers huishoudfinanciën, NIBUD, 2007-2.
  • Beyond the breadline, a poverty threshold based on a generalised budget approach, The Netherlands Institute for Social research SCP, February 2008.
  • Standard Budgets and Household Economy, report from a seminar on Nordic models for household budgeting in St Petersburg, 14-16 October 2001.
  • Minimum Essential Budgets for six households, The Vincentian Partnership for Social Justice, 2006.
  • A minimum income standard for Britain, What people think, Jonathan Bradshaw, Sue Middleton, Abigail Davis, Nina Oldfield, Noël Smith, Linda Cusworth and Julie Williams, Joseph Rowntree Foundation, Loughborough University, 2008.

Olivier Jérusalmy, octobre 2008.

 

1 Doyal, L., & Gough, I. (1984). A theory of human needs. Critical Social Policy.

4 SPF Économie - Direction générale Statistique et information économique

Type de support
Type de document
Auteur(s)
Editeur
Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
Lieux
Sommaire

Les indicateurs de pauvreté soulèvent toujours de nombreuses questions, qu'ils s'expriment de manière relative ou de manière absolue... Dans ce dédale, l'approche par la définition d'un panier de biens et services minimum, ainsi que l'estimation du coût de son acquisition semble ouvrir des perspectives intéressantes..

Thématiques liées
Numéro de classement dans la bibliothèque ou code de rangement
MO-JERU2008-2
Cocher cette case pour générer un nouveau code lors de l'enregistrement de ce contenu
Désactivé
Année d'édition
2008
Date d'édition
10/2008
Mois d'édition
Octobre