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Dans quelle mesure l'implication des organisations non gouvernementales (ONG) apporte une valeur ajoutée dans les partenariats publics privés (PPP)?

Soumis par Anonyme le

La notion de PPP est devenue un terme internationalement très usité qui, de fait, varie en fonction des pays ou des secteurs économiques. De façon générale, les analystes s’entendent sur la définition suivante1 : « mode de financement par lequel une autorité publique fait appel à des prestataires privés pour financer et gérer un équipement assurant ou contribuant au service public. Le partenaire privé reçoit en contrepartie un paiement du partenaire public et/ou des usagers du service qu'il gère.»

Les partenariats étudiés lors de la préparation du cycle de formation2 ont mis en valeur un acteur supplémentaire d’importance : les ONG. Certes, les ONG font partie de la sphère du droit privé, mais elles diffèrent radicalement des entreprises classiques du fait qu’elles n’ont pas pour finalité essentielle la recherche de profit. Par nature, les ONG impliquées dans des partenariats peuvent jouer divers rôles : ceux de censeur, de moteur, de médiateur de proximité ou de type organisationnel. La finalité et la nature de l’action des ONG au sein des PPP sont donc très variables, mais elles semblent être généralement jugées comme très positives par les autres partenaires.

En effet, souvent le propre des ONG est de dénoncer une pratique contraire aux droits ; qu’ils soient fondamentaux, sociaux, environnementaux ou économiques. En théorie, autant ce rôle dénonciateur peut sembler néfaste dans la mise en oeuvre des PPP, autant dans les faits, il est nécessaire pour montrer les dysfonctionnements de notre société en servant de catalyseur aux changements. Si dans un premier temps cela permet d’exposer les problèmes, il faut savoir, en un deuxième temps, en tirer profit non pas pour créer un climat délétère mais au contraire pour pousser les entités en tort à réagir.

Dans le meilleur des cas, nous avons pu observer que l’action des ONG peut aboutir à une collaboration entre différents acteurs afin qu’ils trouvent des solutions. Malheureusement, il arrive également que cela ne mène qu'à des hostilités stériles. L’idéal pour les ONG est donc de savoir utiliser ce pouvoir de censure à bon escient afin de s’allier aux autres entités pour trouver des solutions plutôt que de s’en faire des adversaires.

Un autre aspect des ONG dans le montage de partenariats est leur rôle moteur. Comme elles ont tendance à identifier les manquements dans la société, elles sont à même d’initier des actions visant à résoudre ces carences. Comme exemple de ce rôle, il faut mentionner le cas de l’Association au Droit à l’Initiative Economique (ADIE), association française, dont le but premier est de financer et accompagner les créateurs d'entreprise qui n'ont pas accès au crédit bancaire.

Cette association s’est rendue compte du peu de connaissances des micro-entrepreneurs en termes de logiciels de base informatiques, tels que Word, Excel ou cie!l3 (logiciel de devis et factures). Grâce à un partenariat initié par l’ADIE4, il lui a été possible de mettre en place une sorte de cercle vertueux. Du côté des ONG, des formateurs recrutés par l’ADIE et PlaNet Finance5 donnent des leçons à des chômeurs désireux d’acquérir des compétences informatiques les aidant à trouver du travail, pendant que les Restos du Cœur de Valence révisent les ordinateurs et installent les logiciels. Du côté privé, les compagnies Microsoft France et ciel! mettent à leur disposition des logiciels, leur permettant par le même coup de gagner en visibilité. Enfin, sur le plan public, le Fonds Social Européen amène un soutien financier, promouvant de la sorte la cohésion sociale ainsi que la réintégration des sans-emploi au marché du travail.

Le rôle de moteur de l’ADIE permet une situation « gagnant-gagnant » où chaque acteur trouve son avantage. Menée par l’ADIE, la mise en commun des forces de chacun des opérateurs aboutit à un succès prouvé par les chiffres : quinze centres de formation, au lieu des cinq prévus initialement, ont été mis en place dans cinq régions en France.

Un exemple portugais nous montre le rôle réunificateur ou de médiateur qu’une ONG peut jouer. L’Associação Nacional de Direito ao Crédito (ANDC) est une association développant le microcrédit au Portugal. Créée en 1998, pour poursuivre son objectif d’attribution de microcrédit, cette association monte des partenariats entre des banques privées et les autorités publiques.

Plus précisément, l’ANDC entretient des liens étroits avec l’Institut de l’Emploi, organisme public chargé de réduire le taux de chômage, ainsi qu’avec trois banques, dont deux commerciales Millennium et Espírito Santo Bank, et une publique, la Caixa Geral de Depósitos. En effet, la loi portugaise permet seulement aux institutions bancaires d’accorder des prêts. C’est ainsi qu’à travers des partenariats - grâce aux banques - que l’ANDC peut offrir du microcrédit à son public cible. Dans ce cadre, l’ANDC sert donc de médiateur entre les pouvoirs publics ayant un but commun, celui de favoriser la cohésion sociale, tout en permettant aux banques d’y trouver leur avantage, par l’élargissement de leur clientèle.

Bien souvent les ONG jouent un rôle de proximité et de connaissance du terrain. Il arrive effectivement que les autorités publiques se trouvent trop loin des réalités du groupe cible qu’elles aimeraient aider. Prenons le cas suédois de la commune de Bergsjön. Cette partie de la ville de Göteborg est connue pour sa grande communauté immigrante, en particulier en provenance de Somalie.

La commune de Bergsjön veut aider les immigrants somaliens à s’intégrer en leur offrant des cours de langue, des services d’aide à la recherche d’emploi etc. Toutefois, du fait de la situation politique dans leur pays d’origine, les Somaliens sont devenus très méfiants envers tous types de services publics. C’est donc grâce à l’intervention et l’implication d’une ONG qui travaille depuis ses débuts avec les immigrants somaliens, que la commune de Bergsjön a pu mieux comprendre les besoins de la communauté et ainsi mettre en place un programme mieux adapté à leur intégration. Il est à noter que celui-ci a également été en partie financé par des entreprises résidant sur la commune.

On peut dire ici que l’ONG en relation avec la population somalienne a un rôle essentiel de proximité et de connaissance de la population, servant d’intermédiaire pour instaurer la confiance entre les immigrants somaliens et la commune de Bergsjön.

Le dernier rôle que peuvent avoir les ONG est celui d’organisation et de coordination entre les partenaires privés et publics d’un partenariat. Cette vocationde nature organisationnelle est évidemment primordiale pour le bon fonctionnement d’une collaboration entre ces différentes parties prenantes. Dans ce contexte, l’ONG initie des actions mais prend également les devants pour organiser les ressources afin de maximiser l’action défendue.

Nous pouvons citer le cas allemand d’Enigma Gründungszentrum (Enigma) qui a mis en place un partenariat portant sur des couveuses d’entreprises avec l’aide financière du gouvernement et d’entreprises sponsors. Tout est régi de manière fonctionnelle et orienté sur l’action : les participants, en général des chômeurs, ont six mois pour développer leur idée d’entreprise. Enigma organise la formation selon une méthode bien définie et, dans le même temps, les rôles des entreprises et du gouvernement se limitent plutôt à leur participation financière.

En conclusion, l’implication des ONG dans les PPP semble clairement s’affirmer comme une valeur ajoutée. De positions parfois antagonistes à l’origine, les entités publiques, privées et ONG parviennent à se mettre d’accord en coordonnant leurs efforts afin de parvenir à un objectif commun, même si leurs buts sont souvent différents, voire antagonistes. Si, par exemple, tous les opérateurs souhaitent une meilleure cohésion sociale, c’est certainement pour des raisons diverses. Les autorités publiques cherchent à remplir leurs obligations de service public ; les entreprises privées y voient un avantage à moyen terme (sortir les gens du chômage engendre le fait qu’ils peuvent devenir de potentiels clients) et les ONG souhaitent que ces derniers retrouvent leur dignité en décrochant une occupation rémunérée.

Ainsi, si les ONG remplissent parfois un rôle de censeur, elles sont aussi et plus souvent fédératrices des énergies, des financements, des ressources humaines ainsi que des connaissances du terrain des diverses parties. Elles jouent un rôle de catalyseur et permettent ainsi de multiplier les chances de succès.

 

Annika Cayrol, septembre 2007

 

1 Site Wikipédia, Partenariat public-privé, http://fr.wikipedia.org/wiki/Partenariat_public-priv%C3%A9

2 Eufin, projet européen de formations basé sur l'expérience des partenariats publics privés dans différentes villes d'Europe (www.eufin.org).

3 Site Internet des logiciels ciel, http://www.ciel.be/Public/index.php?ID=13

5 Site Internet du PlaNet finance, http://www.planetfinance.org/

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Dans un partenariat, chaque type d'acteur joue un rôle particulier. Alors que les autorités publiques tiennent plus le rôle de facilitateur ou de stabilisateur, les entreprises privées en général s'occupent du soutien financier ou technique. Quelles fonctions ont les ONG? Nous verrons dans cette analyse les différents aspects du rôle des ONG.

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09/2007
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Septembre

Les banques responsables du changement climatique?

Soumis par Anonyme le

Un constat sans appel

En décembre 2005, un rapport sur les impacts environnementaux et sociaux massifs générés par le secteur financier européen, réalisé par Action Aid, Amnesty International, CAFOD, Christian Aid, The Corner House, Friends of the Earth, Global Witness, New Economics Foundation, Tax Justice Network et WWF a démontré, par sept études de cas, que le secteur financier n’assumait pas ses responsabilités en matière de changement climatique, de corruption, d’évasion fiscale, de pauvreté, d’exclusion sociale, de violation des droits humains et de dégradation de l’environnement. Il appelait les États européens et l’Union européenne à prendre des mesures législatives pour garantir que le secteur financier assume ses responsabilités et contribue à la création de sociétés durables.1

Un rapport français publié en 2006 par les Amis de la Terre fournit, quant à lui, une analyse détaillée des performances environnementales des plus grands réseaux bancaires français au regard des meilleures normes et pratiques françaises et internationales. Ses conclusions sont dures : parmi les huit banques françaises étudiées, aucune ne dispose d’une véritable politique environnementale, complète et précise. Les banques n’apportent pas la preuve qu’elles font de l’environnement la priorité qu’elles affichent toutes.2

Si la réputation et le sérieux de ces ONG n'étaient connus et appréciés, on pourrait croire qu'elles ont forcé le trait. Il semble au contraire que le secteur financier éprouve quelques difficultés à appréhender la problématique environnementale et à assumer sa responsabilité en la matière, même si les évolutions récentes sont de bon augure.

Les bonnes pratiques

Est-il si difficile pour les banques d'assumer leur responsabilité environnementale ? Manifestement pas, si l'on en croit de bonnes pratiques, malheureusement trop isolées, qui constituent autant d'exemples intéressants.

Ainsi, en 2005, HSBC – un des premiers groupes de services bancaires et financiers au monde, dont le siège social est à Londres, mais dont le réseau international compte plus de 9 800 implantations réparties dans 77 pays – est devenu la première banque au monde à être parvenue à un bilan carbone neutre pour ses émissions directes, en les réduisant de 10 % et en compensant le reste par l’achat d’électricité verte et de permis d’émissions.

Wells Fargo, une société de services financiers (banque, assurance, prêt, investissement) qui compte plus 23 millions de clients aux États-Unis, a acheté 550 millions de kWh générés par des éoliennes. Il s’agit du plus gros achat de crédits énergies renouvelables aux États-Unis en 2006.3

Toujours aux États-Unis, Bank of America a pris l’engagement de comptabiliser puis réduire de 7 % les émissions indirectes de gaz à effet de serre de son portefeuille d’investissement «énergie», tandis que JPMorgan Chase a adopté en 2005 une politique qui vise à demander à ses clients de mesurer et publier leurs émissions et d’adopter des plans de réduction de ces émissions.

Le développement de fonds d'investissement socialement responsable (ISR), respectueux notamment du respect de critères environnementaux par les entreprises qu'ils financent, est également une réponse appropriée du secteur bancaire. Un exemple frappant : la société de gestion financière britannique Henderson a demandé à la société spécialisée Trucost de mesurer les émissions de CO2 des sociétés détenues par l'un de ses fonds ISR. Verdict ? Ces émissions étaient en 2005 de 43 % inférieures à celles des entreprises qui composent l'indice MSCI World. 4

Dans la même veine, en novembre 2006, Fortis Investments a annoncé son intention d'appliquer une méthode développée par la société Trucost pour quantifier et évaluer les bénéfices environnementaux des technologies durables dans les domaines de l’énergie propre, de l’eau et des déchets pour l'un de ses fonds ISR. Un bénéfice environnemental apparaît lorsqu’une technologie alternative réduisant le recours aux ressources environnementales est utilisée à la place de technologies traditionnelles, créant ainsi un bénéfice équivalent au coût évité.

En 2006, Fortis a par ailleurs été classé meilleur élève pour sa manière d'aborder la question des changements climatiques dans une enquête mondiale menée par le Carbon Disclosure Project5. Cette étude s'est basée sur les rapports relatifs aux émissions de gaz à effet de serre remis par les plus grandes sociétés internationales ainsi que sur un rapport d'évaluation indépendant sur la stratégie en matière de changements climatiques et la gestion des risques.

Développer des stratégies globales

Les exemples de bonnes pratiques montrent que les banques ne sont pas démunies en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Encore faut-il intégrer de bonnes pratiques, parfois éparses, dans des stratégies globales.

Pour les Amis de la Terre, il existe quatre priorités :

  1. La première est que toutes les banques mettent en place une politique de transparence exigeante. L’opacité accroît légitimement les doutes sur la réalité des efforts fournis. Elle nourrit l’argument que les engagements ne dépassent pas le stade de l’affichage et la rhétorique.
  2. La deuxième concerne les composantes environnementales des politiques d’investissement et de financement, qui doivent être renforcées d’urgence dans leurs trois composantes : politiques d’investissement sectoriel, screening des entreprises clientes, épargne et prêts environnementaux.
  3. La troisième priorité est l’établissement d’objectifs, moyens et échéanciers clairs, publics et mesurables, permettant de fixer des orientations lisibles.
  4. Enfin, la dernière priorité consiste à renforcer la formation interne en matière environnementale.6

Dans une communication du 12 décembre 2007, Banktrack7 considère qu'en réponse aux défis du changement climatique, toutes les banques devraient développer, en consultation avec les organisations de la société civile et d'autres parties prenantes, une politique complète et transparente en matière de climat. Cette politique devrait inclure des stratégies qui visent trois objectifs : se retirer de toutes les activités qui contribuent directement et sensiblement au changement climatique, réduire l'impact climatique de tous les prêts et investissements accordés et financer la transition vers une économie fondée sur des émissions de gaz carbonique nulles ou faibles.

D'abord, se retirer de toutes les activités qui contribuent directement et sensiblement au changement climatique. Si les banques veulent jouer un rôle positif en facilitant une transition vers une économie fondée sur des émissions de gaz carbonique plus faibles, elles doivent progressivement, en vertu de calendriers précis, arrêter de soutenir financièrement de nouveaux projets d'extraction de pétrole, de charbon et de gaz et de livraison de ceux-ci. Une stratégie globale sérieuse en matière de réduction d'émission de gaz à effet de serre implique une réduction draconienne de l'usage du charbon, qui doit commencer immédiatement, car toute nouvelle centrale à charbon a une vie utile de l'ordre de 50 ans au moins. Les banques doivent donc immédiatement retirer leur soutien aux centrales à charbon. Enfin, si la combustion des combustibles fossiles produit actuellement la plus grande part des émissions de gaz à effet de serre à travers le monde, plusieurs autres activités et secteurs économiques causent également des dommages significatifs au climat. Les banques devraient tenir compte de ces impacts quand elles sont engagées dans ces activités et secteurs et devraient cesser de soutenir les activités dont l'impact négatif est le plus élevé. Les activités et les secteurs visés sont notamment la gestion des forêts, l'agriculture et les transports.

Outre un retrait de toutes les activités qui contribuent directement et sensiblement au changement climatique, il est demandé aux banques de réduire l'impact climatique de tous les prêts et investissements accordés. D'abord, pour expliquer entièrement leur empreinte climatique, les banques devraient mesurer et faire rapport sur les émissions de gaz à effet de serre liées aux services financiers qu'elles fournissent à leurs clients. Ensuite, elles devraient se fixer des objectifs de réduction de ces émissions. Enfin, les banques devraient développer et mettre en application les outils appropriés pour s'assurer qu'elles atteignent ou excèdent leurs objectifs de réduction d'émission.

Il est enfin demandé aux banques de financer la transition vers une économie fondée sur des émissions de gaz carbonique nulles ou faibles. Elles devraient développer une stratégie proactive pour investir dans des programmes et des projets d'énergie renouvelable et d'efficacité énergétique. Les banques devraient en outre développer pour leurs clients une gamme de produits et services consacrés à l'amélioration du climat, comme des programmes visant à aider les consommateurs à acheter des maisons et des appareils offrant le meilleur rendement énergétique ou à investir leur épargne de manière plus favorable pour le climat. Les banques pourraient enfin exiger de leurs clients actifs dans l'immobilier de respecter des critères rigoureux d'efficacité énergétique et de structurer leurs investissements pour améliorer cette efficacité.8

Et en Belgique ?

Parmi les banques présentes en Belgique, le Crédit agricole, ING et ABN AMRO reçoivent de Bantrack une note de 1 sur 4 ; ce qui signifie que ces institutions financières reconnaissent leur responsabilité dans les émissions de gaz à effet de serre qu'elles financent, mais qu'elles n'y apportent pas de réponse.

Fortis, Dexia et KBC reçoivent, quant à elles, une note de 2 sur 4, ce qui les place dans le lot de tête du secteur. Cette notation signifie que soit elles intègrent dans leur stratégie l'objectif de mesurer et de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les projets qu'elles financent, soit qu'elles prennent des mesures concrètes pour déplacer les financements qu'elles accordent vers les énergies renouvelables et les économies d'énergie.9

Conclusions

Comme on le voit, si le tableau belge n'est pas franchement mauvais, il est loin d'être bon et les banques belges pourraient redoubler d'effort pour intégrer la lutte contre le réchauffement climatique dans leur stratégie d'entreprise. Les exemples et les outils font florès en la matière. Seule la volonté peut, le cas échéant, faire défaut. Aux parties prenantes du monde bancaire – et en premier lieu aux clients – de donner de la voix pour attiser une volonté encore trop incertaine!

 

1 “A Big Deal : Corporate Social Responsability and the Finance Sector in Europe”, décembre 2005, http://www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/a_big_deal_-_uk_ngos_dec_05.pdf

2 « Banques françaises et environnement : presque tout reste à faire », février 2006, http://www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/Rapport_banques_et_envt_fev_06-3.pdf

3 “Top Five Socially Responsible Investing News Stories of 2006”, http://www.socialfunds.com/news/article.cgi/article2197.html

5 Le Carbon Disclosure Project(CDP regroupe investisseurs et assureurs déterminés à faire pression sur les entreprises pour qu’elles maîtrisent leur « risque carbone » au même titre que d’autres risques liés à la pollution.

6 « Banques françaises et environnement : presque tout reste à faire », op.cit.

7 BankTrack est un réseau d’organisations non gouvernementales (ONG) et d’individus qui surveille les opérations du secteur financier privé (banques commerciales, investisseurs, compagnies d’assurance, fonds de pension) ainsi que les impacts de ses opérations sur l’Homme et la planète.

8 A Challenging Climate, What international banks should do to combat climate change, 2007.

9 Banktrack, Mind the gap, Benchmarking credit policies of international banks, décembre 2007.

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Les banques ont été sévèrement critiquées pour leurs pratiques en matière environnementale. Mais elles tentent, par ailleurs, de développer de bonnes pratiques en la matière. Plongée dans une réalité contrastée.

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De la citoyenneté politique à la citoyenneté financière

Soumis par Anonyme le

Ce fondement religieux, qui n'a pas totalement disparu aujourd'hui, s'est arrimé, dans le contexte des Etats-Unis des années 70, à un fondement beaucoup plus large, davantage citoyen et politique, qui trouve son origine dans les bouleversements sociaux et culturels des années 60, en particulier les mouvements de lutte pour les droits civiques, les mouvements féministes, consuméristes, environnementalistes ou encore le mouvement de contestation contre la guerre au Vietnam. Ces préoccupations ont donné naissance à une véritable conscience publique au sujet des problèmes sociaux, environnementaux et économiques ainsi que de la responsabilité des entreprises à leur égard.

Cette évolution est parfaitement illustrée par une anecdote vécue, en 1967, par Luther Tyson et Jack Corbett qui travaillaient, à Washington, pour le Conseil de l'Eglise et la Société de l'Eglise méthodiste unie, sur des questions comme la paix, le logement et l'emploi. Tyson reçut une lettre d'une citoyenne de l'Ohio qui lui posait une question simple : "Existe-t-il un fonds commun de placement qui gère mon épargne-pension sans investir dans l'industrie militaire ?". Au terme d’une recherche bien menée, à sa plus grande surprise, Tyson dut faire l’amer constat qu’il n’existait pas de fonds répondant à cette exigence. Un an plus tard, retour de France où il s’était rendu en tant que membre d'une délégation surveillant les entretiens de paix de Paris qui ont permis de négocier la fin de la guerre du Vietnam, il décida qu'il était temps de créer des fonds qui répondent aux attentes de cette habitante de l'Ohio et de tous les autres investisseurs qui avaient les mêmes préoccupations qu’elle.1

C'est ainsi que Luther Tyson et Jack Corbett ont créé, en 1971, le Pax World Fund. Avec le Dreyfus Third Century Fund, créé l'année suivante, ce fut le premier fonds à proscrire l'énergie nucléaire et les contrats militaires de son portefeuille d’investissements. Ce fut aussi le premier fond à prendre en considération des critères sociaux dans sa gestion. Le Pax World Fund et le Third Century Fund marquent l’émergence de l’ISR au sein de la société civile et la prise en compte de critères extra-financiers, à caractère plus politique, dans la gestion financière. Cette tendance allait se confirmer avec le mouvement de lutte contre le régime de l'apartheid sévissant en Afrique du Sud.

Le boycott de l'Afrique du Sud de l'apartheid.

En 1973, la population noire d’Afrique du Sud a lancé, dans le cadre de sa lutte pour abolir l'apartheid, un appel à la communauté internationale afin qu'elle exerce diverses formes de boycott, de retrait d’investissement et de sanctions à l’égard du régime sud-africain.

Dès 1971, à l’initiative de l’un de ses nouveaux administrateurs — le Révérend Leon Sullivan, qui était le premier Noir américain nommé au conseil d’administration d’une multinationale —, une première résolution de vote, proposant la cessation des activités en Afrique du Sud, avait été soumise à l’assemblée générale de General Motors.

Parmi les nombreuses parties qui ont préparé le terrain pour que cesse l'apartheid en Afrique du Sud figure le mouvement de l'ISR, en particulier aux Etats-Unis. Ce mouvement débuta vers la fin des années 70, prit de l'ampleur tout au long des années 80 et eut pour effet que de nombreuses institutions retirèrent de leur portefeuille d'investissement les actions des sociétés qui ont continué à faire des affaires avec le régime raciste. Ce mouvement de désinvestissement a amplifié l'intérêt pour les fonds communs de placement investis de façon responsable.

La montée en puissance de cette campagne anti-apartheid s’est traduite par le départ de plus des deux tiers des entreprises américaines implantées en Afrique du Sud. Mais il aura fallu attendre 1993 pour que l’Assemblée générale de l’ONU lève finalement les sanctions économiques contre l’Afrique du Sud tout en maintenant l’embargo sur le pétrole et les armes, répondant ainsi à l’appel du président de Nelson Mandela, qui avait demandé la levée de ces sanctions, estimant que « le compte à rebours vers la démocratie » en Afrique du Sud avait commencé.

Cette victoire allait-elle mettre un terme à l'ISR fondé sur la défense des droits humains, voire à l'ISR tout court ? C'était en tout cas une opinion largement répandue à l'époque aux États-Unis. Il n'en a, pourtant, rien été puisque le rapport 1995 du Social Investment Forum (SIF) américain montrait notamment que 78 % environ des gestionnaires de fonds privés qui ont soutenu le démantèlement de la ségrégation en Afrique du Sud continuaient à gérer des portefeuilles ISR pour leurs clients deux ans après la fin de la campagne de désinvestissement.2

Par ailleurs, le mouvement anti-apartheid allait laisser d'autres traces tangibles en matière de responsabilité sociale des entreprises : en 1977, le Révérend Leon Sullivan édictait les « Sullivan Principles », code de conduite pour la promotion des droits de l’homme et de l’égalité des chances à destination des entreprises intervenant en Afrique du Sud. Vingt ans plus tard ils ont été révisés, élargis et rebaptisés Global Sullivan Principles for Corporate Responsibility, puis relancés par les Nations unies et un groupe de multinationales le 2 novembre 1999. Ils exigent des entreprises qu’elles contribuent à « promouvoir la justice économique, sociale et politique » là où elles opèrent.

En Belgique aussi, cette longue lutte de boycott et de désinvestissement des entreprises présentes en Afrique du Sud allait être à l'origine de réflexions et d'initiatives en matière d'éthique et de solidarité financière. C'est ainsi qu'à la fin des années 70 sont nées des initiatives d’épargne et de prêt de proximité, rapidement suivies de la création de structures comme Crédal et le Réseau Financement Alternatif et de leur homologues néerlandophones, Hefboom et Netwerk Vlaanderen.

La Birmanie est l'Afrique du Sud des années 90

On le voit, la préoccupation politique est désormais au coeur de la démarche d'investissement socialement responsable. Comment, en effet, concilier citoyenneté politique, fondée sur le vote démocratique, et citoyenneté financière, sinon en privant de financement les entreprises qui soutiennent directement ou indirectement des régimes non démocratiques?

C'est évidemment le cas de la Birmanie qui vit, depuis 1962, sous le joug d'une dictature militaire. En 1988, l'armée réprima violemment un mouvement de protestation contre la situation économique et politique en ouvrant le feu sur la foule qui protestait. La conséquence indirecte de ce mouvement fut qu'il permit la tenue d'élections en 1990. Elles virent la victoire de la NLD (National League for Democracy) dirigée par Aung San Suu Kyi mais elles furent annulées ensuite par la dictature militaire. Cela provoqua un scandale au niveau international. Suu Kyi reçut cette année-là le prix Sakharov et le prix Rafto puis le prix Nobel de la paix l’année suivante. Elle fut tour à tour emprisonnée, libérée puis assignée à résidence.

En 1993, lorsque l'Archevêque Desmond Tutu, qui avait reçu le Prix Nobel de la paix en 1984 pour son combat pacifiste contre le régime de l'apartheid, eut connaissance des brutalités commises par la junte contrôlant la Birmanie, il décrivit celle-ci comme « l'Afrique du Sud des années 90 ». Et de déclarer : « Il est temps aujourd'hui d'admettre que la politique de l'engagement constructif [avec le gouvernement militaire birman] est un échec (…). La pression internationale peut faire changer les choses. Ce furent des sanctions dures qui amenèrent finalement (…) l'aube d'une ère nouvelle dans mon pays. C'est là le langage qu'il convient de parler avec les tyrans, car c'est là, hélas, le seul qu'ils comprennent. »3

Aung San Suu Kyi elle-même lança divers appels en ce sens : « Je voudrais en appeler à ceux qui sont prêts à utiliser leurs talents pour promouvoir la liberté intellectuelle et les idéaux humanitaires, afin que, sur le principe, ils prennent position contre les entreprises qui font des affaires avec le régime militaire birman. Que votre liberté puisse servir la nôtre. »4

Ces appels ne sont pas restés sans réponse : des entreprises comme Pepsi, Levi's, Interbrew, Carlsberg, Heineken, Reebok, C&A, Hewlett-Packard, Ericsson, Adidas-Salomon, H&M, IKEA, Newmont ou British Petroleum ont choisi de se retirer de Birmanie. Mais il faut bien constater que d'autres multinationales, basées en Europe pour beaucoup, continuent à jouer un rôle clef dans l'appui à l'économie birmane qui finance la junte. Cinq des plus grands groupes bancaires présents en Belgique (Axa, DEXIA, Fortis, ING et KBC) investissent quant à eux massivement dans ces entreprises présentes en Birmanie, apportant ainsi un soutien financier (plus de 2,5 milliards $) à des entreprises qui soutiennent la junte militaire en place.5 Seule KBC a réagi en retirant, en avril 2006, TOTAL de ses fonds d'investissement éthiques.

26 communes belges se sont depuis lors émues de cette situation et ont voté une motion par laquelle elles nomment Aung San Suu Kyi citoyenne d’honneur de leur commune, interdisent tout investissement des finances communales ainsi que tout achat de produits d'entreprises actives en Birmanie et interpellent leurs banques pour qu’elles cessent d’investir dans les sociétés actives en Birmanie. 6

Le monde bancaire belge reste cependant sourd à ces appels et, par conséquent, les économies que chacun peut placer sur un compte d'épargne ou investir dans un fonds de placement continuent, au moins en partie, à soutenir les entreprises qui persistent à faire des affaires avec la junte birmane. A l'instar de la réaction citoyenne qui s'est développée en réaction au régime d'apartheid, la seule réponse possible est, ici aussi, de priver de financement les entreprises qui soutiennent directement ou indirectement la junte birmane en enjoignant aux banques d'arrêter immédiatement de financer ces entreprises avec nos dépôts. On le voit, la prise en compte de critères extra-financiers à caractère plus politique dans la gestion financière, initiée par Luther Tyson et Jack Corbett en 1971, reste plus que jamais d'une brûlante actualité et nécessité.

Bernard Bayot, avril 2007

2 Social Investment Forum, After South Africa, The State of Socially Responsible Investing in the United States, 1995

3 Desmond Tutu, Burma as South Africa, Far Eastern Economic Review, 16 septembre 1993

4 Le Monde, 10 décembre 1998

5 Netwerk Vlaanderen, Votre banque investit-elle en Birmanie?, février 2006, https://www.financite.be/gallery/documents/burma/mini-dossier-birma-fr-.pdf

6 Bruxelles-Ville, Ottignies-Louvain-la-Neuve, Ixelles, Andenne, Remicourt, Rochefort, Mettet, Comblain-au-Pont, Dour, Alost, Schaerbeek, Huy, Gembloux, Zottegem, Nassogne, Gesves, Fléron, Anthisnes, Chaudfontaine, Baelen, Engis, Chastre, Nivelles, Dalhem, Watermael-Boitsfort, Gembloux

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L'histoire de l'investissement socialement responsable (ISR) remonte à plusieurs siècles. Les investisseurs religieux de confession juive, chrétienne et islamique ainsi que de nombreuses cultures indigènes ont longtemps mêlé argent et morale, prenant en considération les conséquences de leurs actions économiques et refusant les investissements qui entraient en contradiction avec leurs conviction profondes.

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07/04/2007
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Le crédit aux plus démunis profite aux mieux nantis !

Soumis par Anonyme le

Banco Compartamos

Banco Compartamos est une institution de microfinance mexicaine créée en 1990 grâce à des subventions variées. Le 20 avril dernier, elle a lancé une offre publique de vente de 30 % de son capital. Cette offre a été souscrite 13 fois, ce qui peut être considéré comme un succès important sur tout marché financier.1 La demande n’ayant pas pu être satisfaite, le prix des actions, a grimpé jusqu’à atteindre 22 % de hausse dès le premier jour d’échange. Les actions ont finalement été achetées par les gestionnaires de fonds internationaux habituels et d’autres investisseurs commerciaux. Le succès de cette offre est lié à divers facteurs : la croissance et la rentabilité exceptionnelles de Compartamos, une pénurie d’investissements mexicains sur les marchés émergeants, une valeur rare, une gestion solide de l’organisation et l’intérêt suscité par la microfinance. En ce qui concerne la rentabilité, Banco Compartamos génère des profits importants (rendement de 56 % sur les fonds propres) grâce aux taux d’intérêt élevés qu'elle pratique, qui dépassent 100 %, c'est-à-dire des taux intérêts qui sont considérablement supérieurs à ce dont la banque a besoin pour couvrir ses coûts.2

Selon Standard & Poor’s, l’une des trois principales société de notation financière, les plus de 15 milliards de dollars de microcrédits actuellement recensés sont dérisoires par rapport au potentiel, qui est, lui, de l’ordre de 150 milliards de dollars3. En septembre, Standard & Poor’s prévoit d'ailleurs de définir de nouvelles normes mondiales et devrait noter environ vingt organismes de microcrédits, mesure demandée par les fonds de pension et autres, pressés de toucher les rendements alléchants que peut offrir ce segment.

Un autre aspect de cet engouement est la titrisation des crédits, c'est-à-dire l'émission de titres représentant une société spécialement créée pour acheter le portefeuille de crédit d'un organisme prêteur. De cette manière, l’investisseur acquiert en quelque sorte une fraction du portefeuille de crédits, avec le rendement mais aussi les risques liés à celui-ci. En mai dernier, la banque d'investissement Morgan Stanley a ainsi titrisé des petits crédits accordés par une douzaine d’organismes à but lucratif – valeur totale : 108 millions de dollars – en un titre négociable rapportant jusqu’à 7,7 %. Et, annonce Standard & Poor’s, deux autres poids lourds de l’industrie devraient eux aussi se jeter à l’eau cette année, en offrant 500 millions de dollars au total en titres.

Les rendements sur fonds propres élevés qu'espèrent les investisseurs suscitent l’intérêt des grands noms du capital risque. En mars, la société Sequoia Capital, qui finance des entreprises comme Google et YouTube, s’est jetée sur une participation de 11,5 millions de dollars dans SKS Microfinance, basée à Hyderabad, en Inde. Depuis sa fondation en 1998, SKS a accordé des prêts à 731 000 Indiens, à des taux allant de 24 à 30 %.4

Crise des subprimes

La « crise des subprimes » que nous avons connue cet été a, quant à elle, été provoquée par un krach des prêts hypothécaires à risque aux Etats-Unis : les subprimes. Aux Etats-Unis, les banques et assurances classent leurs clients en non-primes, primes et subprimes selon les risques estimés de défaillance de l’emprunteur ; les subprimes étant les plus potentiellement défaillants. Les subprime mortgage sont donc des prêts hypothécaires censés permettre à de petits salariés, voire à des chômeurs, de devenir propriétaires. Ces crédits sont accordés par des institutions financières de moins en moins regardantes sur le profil de l’emprunteur. Ils ont un taux d’intérêt très élevé, de 4 à 5 points supérieur au taux normal (prime de risque), et variable en fonction de l’évolution des taux de la Réserve fédérale américaine. Leur remboursement se fait souvent suivant la règle du 2 28 : deux ans de remboursements très faibles, puis 28 ans à pleine charge. Les montages financiers permettent parfois de prêter jusqu’à 110 % de l’acquisition.

Ces prêts ont connu un grand succès lié au fait que le taux directeur de la Réserve fédérale américaine était très faible. Mais ce taux s'est mis à augmenter : il est passé de 1 % en 2004 à plus de 5 % en 2007. Une hausse des taux longs s'en est suivie, qui a entraîné une augmentation des montants de remboursement, et certains ménages ont commencé à ne plus pouvoir faire face à leurs dettes. Près de 1,2 million de prêts immobiliers ont fait défaut en 2006 aux Etats-Unis, soit une augmentation de 42 % par rapport à 2005, avec bien sûr pour conséquence immédiate et dramatique la mise en vente des logements.5

Par ailleurs, à partir de 2006, le marché immobilier américain est entré dans une crise, faisant baisser les prix des logements. Dans ce contexte, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur n'arrive plus à recouvrer la totalité de sa créance en revendant le bien immobilier. A la faillite personnelle des emprunteurs s'est donc ajoutée une série de graves difficultés financières pour les prêteurs et certains de leurs banquiers.

La combinaison des deux facteurs a conduit à une crise financière internationale. En effet, des titres représentatifs de ces subprimes se sont négociés sur le marché des prêts hypothécaires et la crise connue par les prêteurs s'est répercutée sur les marchés financiers dès que les créances douteuses ont été révélées par les organismes prêteurs.

Conclusions

Ces deux exemples, par ailleurs très différents, montrent deux choses : d'une part, l'activité de crédit peut générer des revenus très élevés grâce à des taux d'intérêt d'usuriers car les pauvres n'ont souvent pas d’autre solution et, d'autre part, les marchés de capitaux s’intéressent très sérieusement à ce marché des crédits aux pauvres, au moins pour spéculer sur la période durant laquelle ceux-ci sont encore en capacité de rembourser.

Car c'est là que se situe le problème. Aux Etats-Unis, au Mexique ou partout ailleurs dans le monde, les individus et ménages à revenus modestes n'accèdent pas au crédit classique, soit parce qu'il n'existe pas d'institution financière pour les servir, soit parce qu'ils ont un profil jugé trop risqué ou simplement insuffisamment évaluable. Pour eux, l'alternative se pose souvent en ces termes: ne pas bénéficier d'un crédit, alors qu'il s'avère parfois indispensable pour lancer ou soutenir une activité professionnelle ou tout simplement pour faire face à un aléa de la vie, soit accepter, quand cette faculté existe, des conditions à ce point exorbitantes qu'elles portent bien souvent en elles-mêmes les germes de la défaillance de l'emprunteur.

En d'autres termes, la fragilité – objective – dans laquelle se trouve l'emprunteur est exploitée de manière éhontée par des prêteurs sans scrupules qui, par les marges qu'ils entendent se réserver, renforcent encore cette fragilité, quand ils n'anéantissent tout simplement pas des existences. Selon les études de l'Institut français de Pondichéry, le microcrédit a entraîné en Inde des vagues de suicides chez les paysans.6

Sont ainsi posées à la fois les limites d'une finance fondée sur la maximisation du profit et la nécessité corrélative pour les institutions qui veulent fournir un crédit adapté aux populations précarisées de mobiliser l'épargne solidaire plutôt que de courir vers le marché des capitaux. Cette épargne solidaire, qui place le souci de cohésion sociale avant celui du rendement, est en effet la seule qui permette de répondre à des besoins réels de financement de personnes ou de groupes pour sortir de la précarité, de favoriser l’émergence d’activités nouvelles rencontrant des difficultés de financement auprès des banques classiques (environnement, éducation, action sociale, etc., particulièrement sur le plan local) et de faire la preuve que l’économie peut être utilisée de façon plus humaine et plus au service des hommes. Est enfin posée à l'épargnant la question de ses choix d'investisseur, y compris de ses choix par défaut – ou par cécité serait-il plus exact d'écrire – lorsqu'il se complaît dans l'ignorance dans laquelle le berce sa banque quant à l'utilisation des fonds qui lui sont confiés.

2 Richard Rosenberg, Réflexions de CGAP sur la première offre publique de vente de Compartamos : Une étude de cas sur les taux d’intérêts et les profits de la microfinance, CGAP/The World Bank, Washington, D.C.

3 Standard & Poor’s, Report Of The Microfinance Rating Methodology Working Group, 19 juin 2007.

4 Keith Epstein, avec Geri Smith à Mexico et Nandini Lakshman à Hyderabad, « Les grands de la finance jouent le microcrédit », Business Week, 13 juillet 2007

5 Michel Lasserre, Crise des crédits immobiliers "subprime" et turbulences financières mondialisées, http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=5368

6 Jean-Michel Servet, « Le microcrédit n'est pas un levier fort du développement », Libération, 21 mars 2007; Banquier aux pieds nus, Editions Odile Jacob, 2006.

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Les plus démunis, s'ils veulent accéder à du crédit doivent passer sous les fourches caudines de conditions de prêt - notamment de taux d'intérêt - abusives. Les mieux nantis, qui disposent du capital, en retirent des profits éhontés, quand ils ne spéculent pas froidement sur la probable période durant laquelle l'emprunteur restera en capacité de rembourser, pour revendre le crédit avant qu'il ne fasse dé- faillance. Cette description peut apparaître comme une mauvaise caricature. L'actualité récente, en particulier l'offre publique de vente de Banco Compartamos et la crise des subprime mortgage aux Etats-Unis, semble toutefois lui donner les traits d'une triste et inquiétante réalité.

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2007
Jour d'édition
24
Date d'édition
24/08/2007
Mois d'édition
Août

Comment améliorer les pratiques bancaires en matière environnementale ?

Soumis par Anonyme le

Activisme militant

Prenons deux bonnes pratiques aux États-Unis. Bank of America, tout d'abord, qui a pris l’engagement de comptabiliser puis de réduire de 7 % les émissions indirectes de gaz à effet de serre de son portefeuille d’investissement «énergie ». JP Morgan Chase, ensuite, qui a adopté en 2005 une politique qui demande à ses clients de mesurer et publier leurs émissions de gaz à effet de serre et d’adopter des plans de réduction de ces émissions. Ces attitudes positives ne sont pas le fruit du hasard, mais la conséquence immédiate et tangible de l'activisme particulièrement efficace d'un groupe californien de défense de l’environnement : Rainforest Action Network (RAN).

En 2000, celui-ci a demandé à Citigroup, la plus grande banque du monde, d’adopter une politique de prêt prenant en compte les critères environnementaux. La société a tout d’abord refusé et les activistes ont dénoncé l'attitude de la banque. Ainsi, par exemple, le 13novembre 2002, par le biais d’une annonce occupant une page entière du New York Times, RAN dénonçait le fait que Citigroup octroyait des prêts à des entreprises dont les activités ont d’importants impacts environnementaux comme la destruction de forêts fragiles, le déplacement de communautés locales ou l'accélération du réchauffement climatique. Citigroup était, entre autres, associée au projet péruvien d’exploitation du gisement gazeux de Camisea, à l’oléoduc équatorien Crudos Pesados, à la centrale électrique thaïlandaise Ratchaburi, au gisement pétrolifère Gobe, en Papouasie Nouvelle-Guinée, à la coupe d’anciens séquoias en Californie, au pipeline Tchad-Cameroun, etc.

RAN estimait qu'en sa qualité de plus grande banque du monde, Citigroup avait le pouvoir et la responsabilité de mettre en place de nouvelles normes environnementales pour les institutions financières. L'organisation écologique lui demandait en conséquence de mettre fin aux investissements destructeurs dans les combustibles fossiles et la déforestation et de privilégier le financement des énergies propres, renouvelables. Après plus de trois ans de protestations, Citigroup a finalement reconnu qu’il serait plus coûteux que profitable d’accorder des prêts à des industries polluantes, alors que leur refuser un prêt constituerait une bonne publicité, gratuite.

Une fois que Citigroup eut cédé, sa relation antagoniste avec RAN s’est transformée en une collaboration destinée à assurer le respect de ces nouveaux standards – un partenariat qui a apporté encore davantage de publicité gratuite à cette société. Pendant ce temps, RAN a tranquillement rédigé une lettre aux dirigeants de Bank of America, leur demandant d’adopter une politique similaire. Bank of America, ayant pu constater le désordre que des militants déterminés pouvaient causer en s’attachant aux portes des banques, a vite réalisé qu’il était préférable de rejoindre les rangs des banques écologiquement respectables. Après la capitulation de Bank of America, JP Morgan Chase est devenu la cible suivante et n’a pas tardé à suivre l’exemple de la concurrence.

Comme on le voit, même de grands groupes financiers, parmi les plus importants au monde, peuvent trembler et se soumettre aux exigences de militants écologistes déterminés. C'est en quelque sorte le combat de David contre Goliath au pays du réchauffement climatique – la fronde de David s'apparentant à un usage astucieux des médias. Cette forme d'activisme, classique, n'est pas la seule à laquelle le monde économique soit perméable.

Activisme actionnarial

La protection de l’environnement, traditionnellement perçue par les investisseurs comme un frein à la rentabilité, est désormais envisagée par les plus éclairés d'entre eux comme source de profit et de rentabilité. Et ils le font savoir au travers de l'activisme actionnarial : en exerçant leur droit de vote aux assemblées générales annuelles des entreprises cotées dont ils détiennent des parts, les actionnaires utilisent un levier puissant pour améliorer le comportement éthique, social et/ou environnemental des entreprises, en favorisant le dialogue avec les dirigeants, en exerçant des pressions, en soutenant une gestion responsable, en proposant et en soumettant au vote des assemblées générales annuelles des préoccupations sociétales. Quelques exemples.

Le géant pétrolier Exxon est depuis des années la bête noire d'un nombre grandissant d'actionnaires responsables et d'ONG luttant contre le changement climatique, qui l'accusent de négliger les impacts de ses activités sur le changement climatique, mais aussi de se livrer à un lobbying forcené auprès du gouvernement fédéral afin que les États-Unis n'approuvent pas le protocole de Kyoto. Un rapport publié par un groupe d'experts américains montre ainsi comment Exxon a organisé et financé une campagne de désinformation sur les changements climatiques en distribuant près de 16 millions de dollars entre 1998 et 2005 à un réseau composé d'une quarantaine de think tanks et de lobbyistes.

Face à cette politique de la direction d'Exxon, ses actionnaires, ou au moins certains d'entre eux, ne sont pas restés inactifs. Dès 2004, 8,8 % des votes en assemblée générale, représentant 475 millions d'actions, se sont déterminés en faveur d'un projet de la résolution qui demandait à Exxon :

  • d'expliquer sur quels fondements elle se basait pour proclamer qu'il existe « des zones inconnues dans la science climatique » ;
  • d'effectuer une comparaison entre les coûts prévisionnels d'une politique prenant en compte le changement climatique et ceux probables induits par une non-prise en compte ;
  • d'expliquer les différences marquantes entre la position de l'entreprise et celle du Groupe d'Experts Intergouvernemental sur le changement climatique (GIEC - Intergovernmental Panel on Climate Change/IPCC), le corpsd'experts chargé, à l'échelle internationale, de la recherche sur ce changement, et dont le troisième rapport d'évaluation, en 2001, démontrait clairement que le réchauffement climatique mondial observé au cours des cinquante dernières années était, pour sa majeure partie, dû à l'activité humaine ;
  • de dresser un état des recherches menées par l'entreprise pour justifier son point de vue minoritaire sur le changement climatique.

En 2005, ce projet de la résolution a été déposé à nouveau et a reçu cette fois 10,3 % de soutien, tandis qu'une autre résolution, demandant à la compagnie de présenter des plans sur la manière dont elle pense contribuer à réduire ses gaz à effet de serre dans les pays signataires du Protocole de Kyoto, a reçu 28,3 % de soutien, soit 1,5milliard d’actions d’une valeur sur le marché de 83,3 milliards de dollars. La résolution avait été présentée par le Centre multiconfessionnel pour la responsabilité des entreprises et soutenu par des investisseurs institutionnels des États-Unis et d’Europe, dont CALPERS, le Fonds de pension des employés de l’État de Californie, la Direction du Fonds de pension de la ville de Londres et un groupe-conseil mandataire fondé de pouvoir du nom de Institutional Shareholder Services.

En mai 2006, 17 fonds de pension américains, contrôlant 110 millions d'actions de l'entreprise, ont été reçus par la direction pour évoquer la stratégie du groupe sur ces questions. Par contre, le projet de résolution sur le changement climatique destinée à l'assemblée générale d'Exxon a été, en 2006, écarté par la Securities and Exchange Commission (SEC).

Même si leur action n'a encore produit que des résultats très limités, les actionnaires exercent – on le voit – une pression que la direction d'Exxon aura toujours davantage de difficulté à ignorer.

Ces actionnaires se rassemblent au sein d'organisations comme le Investor Network on Climate Risk (INCR), créé en novembre 2003, pour favoriser une meilleure compréhension auprès des investisseurs institutionnels des risques et des opportunités résultant du changement climatique. Actuellement, l' INCR rassemble plus de 50 membres gérant plus de 3 000 milliards de dollars. Citons également, avec un spectre plus large, le Interfaith Center on Corporate Responsibility (ICCR) composé de 275 investisseurs institutionnels religieux. L'ICCR et ses membres poussent les entreprises à adopter un comportement responsable sur les plans sociaux et environnementaux. Tous les ans, l'ICCR, au travers de ses membres, dépose plus de 200 résolutions d'actionnaires concernant les principales questions sociales et environnementales. On estime la valeur du portefeuille géré par les membres d'ICCR à 110 milliards de dollars. Enfin, le CERES est quant à lui un réseau nord-américain d'investisseurs, d'organismes de protection de l'environnement et autres des groupes d'intérêt public travaillant avec des entreprises et des investisseurs pour relever des défis de développement durable comme le changement climatique.

Autre exemple de l'intérêt croissant porté par les investisseurs à la protection de l’environnement : le « Carbon Disclosure Project » (CDP), qui regroupe investisseurs et assureurs déterminés à faire pression sur les entreprises pour qu’elles maîtrisent leur « risque carbone » au même titre que d’autres risques liés à la pollution. Les 280 investisseurs institutionnels qui participent au CDP – représentant plus de 41 000 milliards de dollars en gestion – demandent chaque année aux 500 plus grosses entreprises mondiales (celles qui composent l'indice FTSE 500) d’expliquer comment elles prennent en compte le réchauffement climatique dans leurs activités, au moyen d’un questionnaire abordant la production, l’innovation, les consommations d’énergie, etc.

Conclusions

Beaucoup de choses séparent sans doute les Robins des Bois de Rainforest Action Network des investisseurs institutionnels à col blanc qui se préoccupent de réchauffement climatique. À commencer par la motivation profonde sans doute : la défense de l’environnement pour les uns et la recherche de profit et de rentabilité pour les autres. Il n'empêche, les uns comme les autres sont alliés objectifs dans la lutte contre le réchauffement climatique. Et les uns comme les autres réussissent à infléchir la politique des plus grands groupes financiers en la matière.

Ils contribuent, avec des méthodes différentes, à remettre la finance au coeur de la vie et des préoccupations humaines. À n'en pas douter, le réchauffement climatique est de celles-ci. Ainsi l'argent et les flux financiers perdent cette posture désincarnée qui les caractérise si souvent, comme s'ils répondaient à quelque fatalité et non, tout simplement, au choix des habitants de cette bonne terre.

Ce constat à lui seul est réjouissant, même s'il faudra sûrement redoubler d'effort pour faire vaincre la lutte contre le réchauffement climatique et contre les investissements nuisibles à l'homme et à l'environnement.

 


Bernard Bayot, Les banques responsables du changement climatique ?, décembre 2007

Erik Assadourian, Le rôle des différentes parties prenantes, Evolution des sociétés de capitaux - 2ème partie, http://www.delaplanete.org/IMG/pdf/role.pdf

Union of Concerned Scientists, Smoke, Mirrors & Hot Air, How ExxonMobil Uses Big Tobacco’s Tactics to Manufacture Uncertainty on Climate Science, january 2007, http://www.ucsusa.org/assets/documents/global_warming/exxon_report.pdf

Nathalie Fessol, Bon résultat d'un projet de résolution d'actionnaires SR sur le changement climatique chez Exxon, 16 juin 2004, http://www.isr-info.com/library/fr/columns/A80Fn75EdT7WBNItzgu3.htm

Lisa Mastny, Les actionnaires d’ExxonMobil apportent un soutien sans précédent à une résolution concernant les changements climatiques, L’état de la planète Magazine, n°23 : septembre/octobre 2005, Renseignements environnementaux, http://www.delaplanete.org/Renseignements-environnementaux,228.html

Concerned That Exxon Mobil's Handling of Climate Change Lags Behind Other Competitors, U.S. Institutional Investors Seek Meeting with Exxon Board, http://www.incr.com/index.php?page=ia&nid=179

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Les pratiques bancaires en matière environnementale sont très variées. Comment expliquer ce tableau contrasté où l'on retrouve les meilleurs comme les pires exemples ? Ou comment et pourquoi le monde financier peut-il se défaire de mauvaises pratiques dans le domaine environnemental ? Deux acteurs qui y contribuent sont sans conteste : les ONG et les investisseurs.

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Année d'édition
2007
Date d'édition
12/2007
Mois d'édition
Décembre

Réduire l'impôt pour favoriser l'épargne solidaire.

Soumis par Anonyme le

Introduction

Le 30 mars 2006, les sénateurs Sabine de BETHUNE, Jan STEVERLYNCK, Étienne SCHOUPPE, Lionel VANDENBERGHE et Christian BROTCORNE ont déposé une proposition de loi instaurant une réduction d'impôt pour les participations sous la forme d'actions dans des fonds de développement du microfinancement dans les pays en développement et fixant les conditions d'agrément en tant que fonds de développement. Une proposition reprenant le même texte a été déposée à nouveau le 1er octobre 2007 par les sénateurs Sabine de BETHUNE, Wouter BEKE, Étienne SCHOUPPE, Els SCHELFHOUT et Elke TINDEMANS.

Cette proposition de loi vise à élargir le financement des fonds de développement qui investissent dans des institutions de microfinancement dans le Sud, par le biais de prêts, de participations en capital ou de garanties. Le but est de développer ce type de financement au moyen d'un incitant à créer, en vue d'encourager les particuliers à investir dans les fonds de développement en question. L'incitant consiste à accorder une réduction d'impôt aux particuliers qui prennent des participations dans ces fonds de développement ou qui leur consentent des prêts.

Les incitants fiscaux existants

Les auteurs de la proposition se réfèrent à juste titre à des incitants similaires qui existent tant en Belgique qu'à l'étranger. Il est sans doute opportun de faire le point à ce propos.

En Belgique

Le Fonds Starters

La société Fonds Starters a pour objet de contribuer au financement des prêts réalisés par le Fonds de Participation en faveur de personnes physiques ou morales – y compris les demandeurs d'emploi inoccupés – désireuses de créer leur propre entreprise ou installées dans leur activité professionnelle depuis quatre ans au maximum.

Le Fonds de Participation a notamment développé à cet effet la Business Line "Microfinance" qui couvre les crédits octroyés aux demandeurs d'emploi et aux personnes n’ayant pas facilement accès au crédit bancaire classique pour le lancement de leur propre activité économique. Les partenaires du Fonds de participation dans cette Business Line sont des structures d'appui, reconnues et agréées par le Fonds, qui assurent un accompagnement professionnel aux bénéficiaires de ces crédits.

Dans ce cadre, trois produits sont développés par le Fonds de Participation :

  • le Prêt Lancement : il fournit aux demandeurs d'emploi inoccupés les moyens financiers afin de lancer leur propre affaire et un accompagnement professionnel est garanti pour la préparation de la demande de crédit, ainsi que pendant les 18 premiers mois de la phase de démarrage des activités;
  • le Plan Jeunes Indépendants pour les moins de 30 ans : les structures d'appui aux starters, financièrement soutenues par le Fonds de participation, offrent un accompagnement gratuit aux bénéficiaires pour une période de 3 à 6 mois, afin de les soutenir dans le lancement du projet;
  • le Prêt solidaire : créé par la Fondation Roi Baudouin, ce microcrédit peut être accordé à une personne qui, vu sa situation financière personnelle, ne peut avoir accès aux crédits bancaires ou d'investissement classiques.

 

Le Fonds de l'économie sociale et durable

Le Fonds de l'économie sociale et durable, constitué par la Société Fédérale d'Investissement conformément à la loi-programme du 8 avril 2003, a pour objet toute forme d’intervention, notamment des prises de participation ou prêts, au bénéfice d’activités relevant de l'économie sociale et durable. Au moins septante pour cent de ses moyens doivent être investis dans celle-ci.

Sont considérées comme relevant de l'économie sociale et durable les activités qui sont développées par une société commerciale ou par une association sans but lucratif et qui appliquent les principes de base suivants :

  • la primauté du travail sur le capital ;
  • une autonomie de gestion ;
  • une finalité de service aux membres et à la collectivité plutôt que le profit ;
  • un processus décisionnel démocratique ;
  • un développement durable respectueux de l'environnement.

 

L'incitant fiscal

Les deux Fonds décrits ci-dessus offrent le même avantage fiscal à l'épargnant.

En cas de souscription d'obligations nominatives à 60 mois, il est accordé aux personnes physiques une réduction d’impôt pour les sommes versées pendant la période imposable pour leur acquisition.

La réduction d'impôt est égale à 5 % des paiements réellement effectués (soit un avantage fiscal à peu près équivalent à 1 % par an) et ne peut excéder 210 euros (actuellement 270 euros avec l'indexation) par période imposable. Chaque conjoint a droit à la réduction si les obligations sont émises à son nom propre.

En France

En France, l'épargne solidaire est favorisée par trois mesures fiscales :

  • Les produits de partage solidaires bénéficient de la loi 2003-709 du 1er août 2003 sur le mécénat. Celle-ci porte la réduction d'impôt pour les particuliers à 60 % du montant des dons, avec effet rétroactif au 1er janvier 2003, dans la limite de 20 % du revenu imposable, et avec possibilité de report sur 5 ans en cas de dépassement du plafond ; pour les entreprises, la réduction d'impôt est de 60 % du montant des dons, dans la limite de 5 pour mille du chiffre d’affaires, avec possibilité de report sur les 5 exercices suivants en cas de dépassement du plafond ou d'exercice déficitaire.
  • L'épargne solidaire investie dans des actions non cotées bénéficie de la loi 2003-721 du 1er août 2003 pour l’initiative économique qui porte la réduction d'impôt à 25 % de l’investissement réalisé, dans la limite annuelle de 20 000 euros pour un célibataire et de 40 000 euros pour un couple, avec effet rétroactif au 1er janvier 2003.
  • L'épargne solidaire investie dans le cadre de l'épargne salariale dans des fonds communs de placement d'entreprise solidaire (FCPES) est exonérée d'impôt sur le revenu. Cette exonération s’applique dans une limite annuelle pouvant atteindre 43 000 euros et calculée selon des modalités qui varient selon l’origine des sommes placées (participation, intéressement ou abondement) et les dispositifs servant de support.

L'épargne solidaire bénéficiaire de ces deux dernières mesures est celle qui est dirigée vers des entreprises solidaires au sens de l’article L.443-3-1 du Code du travail.

Aux Pays-Bas

Les fonds verts d'épargne et d'investissement ainsi que les fonds socio-éthiques d'investissement doivent investir ou prêter au moins 70 % de leur capital dans des projets respectivement verts ou socio-éthiques, agréés par les autorités pour une durée maximale de 10 ans.

Par projets verts, on entend par exemple :

  • projets naturels et paysagers ;
  • projets dans le domaine de l'agriculture biologique ;
  • projets relatifs à l'énergie renouvelable ;

     

  • projets dans le domaine de la construction durable ;

     

  • projets orientés vers la construction de pistes cyclables.

     

Par projets socio-éthiques, on entend des projets dans les pays en voie de développement, qui, d’une manière significative, visent la sécurité et l’amélioration alimentaires, le développement social et culturel, le développement économique, l’emploi et le développement régional. Les projets ne peuvent avoir d’effet négatif sur le cadre social et environnemental et doivent être réalisés avec la participation des populations locales et l’aide des connaissances locales.

Depuis janvier 1995, la réglementation sur les fonds verts contient un incitant fiscal prévu dans la loi relative aux impôts sur les revenus. Depuis janvier 2002, un incitant identique a été créé pour les fonds socio-éthiques. Les épargnants de ces fonds ne doivent pas payer l’impôt sur le revenu mobilier (1,2 %) et leur impôt sur les revenus est réduit de 1,3 % du montant investi dans les fonds verts et socio-éthiques, soit au total un rendement complémentaire de 2,5 % par rapport au rendement habituel.

Au Royaume-Uni

Le Finance Act 2002 a instauré un avantage fiscal, la « Community Investment Tax Relief » (CITR), qui vise à encourager l'investissement communautaire privé.

La CITR est une réduction d'impôt accordée aux citoyens à concurrence de 5 % du montant de leur investissement dans une Community Development Finance Institution (CDFI) agréée, et ce, chaque année pour une période de cinq ans.

Cette mesure, prise en faveur du développement local, vise à encourager les investissements privés dans les organisations, à but lucratif ou non, au sein des communautés défavorisées.

Pour être agréées, les CDFI doivent en effet avoir pour objectif principal de fournir (directement ou indirectement) des financements (prêts ou investissements), accompagnés ou non d’une activité de conseil, aux entreprises engagées dans les communautés défavorisées, c’est-à-dire :

  • les entreprises situées dans des secteurs défavorisés ainsi que ;
  • celles possédées ou dirigées par – ou conçues pour servir – des membres de groupes défavorisés.

La procédure d'agrément vise à garantir que seuls les investissements des particuliers dans des organisations qui travaillent effectivement à la promotion des entreprises au sein des communautés défavorisées donnent droit à cet avantage fiscal. Parmi les programmes que cette mesure vise à soutenir, figurent l’installation de nouveaux équipements, la rénovation de bâtiments, la création de nouveaux services, ou tout autre programme visant à revigorer les secteurs faibles et à créer un capital social et économique.

L'épargne solidaire

On le voit, les incitants fiscaux existants en Belgique et dans les pays voisins visent à favoriser certaines formes d'épargne solidaire, qu'elles soient conçues pour satisfaire les besoins de financement dans le Sud ou dans nos pays.

Ils s'inscrivent dans une démarche de soutien public à cette forme d'épargne qui intéresse des citoyens toujours plus nombreux. C'est dans cet esprit que Finansol (France), le Réseau Financement Alternatif (Belgique) et FEBEA (Fédération Européenne des banques Éthiques et Alternatives) se sont associés, fin 2005, pour mener, avec le soutien de la Commission européenne, un projet visant à favoriser le développement de la finance solidaire à une échelle internationale. D’autres institutions, qui financent l'économie sociale et solidaire, ont collaboré activement au projet et ont apporté leur expertise : Banca Popolare Etica (Italie), Bank für Sozialwirtschaft (Allemagne), Charity Bank (Royaume Uni), Colonya-Caixa Pollença (Espagne), Crédal (Belgique), Crédit Coopératif (France), Merkur Bank (Danemark).

Après une année de travail, ces organisations ont pu établir les bases pour :

  • un label européen des produits d'épargne solidaire qui permette de distinguer les produits d’épargne solidaire des produits d'épargne classique ;
  • des indicateurs européens qui favorisent une meilleure connaissance du secteur de l'épargne solidaire à l’échelle européenne. 

Ce label européen de l'épargne solidaire sera lancé durant le premier semestre 2008. Il consacrera toute forme d'épargne et d'investissement socialement responsable qui vise à favoriser la cohésion sociale par le financement, grâce à un mécanisme de solidarité, d’activités de l'économie sociale et solidaire, et ce, dans une transparence totale à l’égard des souscripteurs.

En ce sens, les produits d'épargne labellisés financent des projets et des entreprises qui présentent une valeur ajoutée pour l'homme, la culture et/ou l'environnement.

Discussion

La question essentielle que pose la proposition de loi est la suivante : pourquoi limiter l'incitant fiscal au financement des fonds de développement qui investissent dans des institutions de microfinancement dans le Sud ?

Le législateur a déjà prévu des incitants similaires pour des fonds publics qui, en Belgique, offrent du microcrédit ou financent l'économie sociale et durable. Des fonds de développement non publics qui, comme Crédal et Hefboom, ont une activité identique ne bénéficient pas, quant à eux, de ce soutien.

Dans leur mémorandum en vue des dernières élections fédérales, Netwerk Vlaanderen et le Réseau Financement Alternatif demandaient un avantage fiscal similaire à celui lié à l’investissement dans le Fonds de l’économie sociale et durable, à savoir une déduction de 5 % du capital souscrit avec un maximum de 250 euros pour :

  • les prises de participation dans les SCRL, sociétés à but social et produits financiers compatibles avec une économie solidaire (y compris les microcrédits) ;
  • les prêts et souscriptions à des obligations d'entreprises compatibles avec une économie solidaire (y compris les microcrédits) pour autant que la rémunération de ces produits (sept jours avant l’émission) ne dépasse pas le taux des obligations d'État sur cinq ans.

Plus récemment, dans leurs propositions pour le gouvernement fédéral communiquées en décembre 2007, l'ensemble des financiers solidaires, qu'ils destinent leurs fonds au Sud ou à l'économie sociale belge – à savoir Alterfin, Crédal, Incofin, Hefboom, Netwerk Rentevrij, Oikocredit-be, Trividend et, au nom du secteur, le Réseau Financement Alternatif, SAW-B et VOSEC (Vlaams Overleg Sociale Economie) – demandaient des conditions concurrentielles égales aux initiatives publiques. En particulier sur le plan fiscal, le stimulant fiscal qui existe pour le Fonds de l'économie sociale et durable devrait être reconnu, selon ces organisations, pour les coopératives qui se chargent du financement solidaire de l'économie sociale ou pour les entreprises à finalité sociale et écologique.

La présente proposition de loi, si on élargissait sa portée, offrirait ainsi une double opportunité :

  • s'appliquer à toute l'épargne solidaire, qu'elle finance des institutions de microfinancement dans le Sud ou le microcrédit et l'économie sociale en Belgique;
  • mettre un terme à cette inégalité de traitement injustifiée entre le Fonds de l’économie sociale et durable ou le Fonds Starter et les fonds de développement non publics actifs en Belgique.

 


3-1649/1

S. 4-221

Art. 2. § 1er de l'arrêté royal du 16 mai 2003 déterminant les modalités de création de la filiale de financement du Fonds de Participation dénommée « Fonds Starters » visée à l'article 74, § 4, de la loi du 28 juillet 1992 portant des dispositions fiscales et financières, MB 12 juin 2003.

Articles 90 et s., M.B. 17 avril 2003, pages 19.436 et s. ; voir aussi l’arrêté royal du 3 mai 2003 portant exécution du chapitre 11 du titre IV de la loi-programme du 8 avril 2003 portant création du " Fonds de l'Économie sociale et durable ", M.B. 9 mai 2003, 2e éd., pages 25.328 et s.

Loi du 26 juin 2001 approuvant l'accord de coopération du 4 juillet 2000 entre l'État fédéral, la Région flamande, la Région wallonne, la Région de Bruxelles-Capitale et la Communauté germanophone relatif à l'économie sociale, M.B., 28 août 2001, 1e éd., p. 28.684.

Netwerk Vlaanderen, Réseau Financement Alternatif, Le rôle des pouvoirs publics en matière d'investissement socialement responsable, mai 2007, http://rfa.be/files/04fr.pdf

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Il est question de créer des incitants pour les investissements en faveur du microcrédit dans le Sud. Et si on élargissait cette mesure à toute l'épargne solidaire ?

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2007
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12/2007
Mois d'édition
Décembre

Épargne-pension éthique

Soumis par Anonyme le

Selon le Conseil des ministres, la responsabilité sociétale des entreprises est un processus d'amélioration dans le cadre duquel les entreprises intègrent de manière volontaire, systématique et cohérente, des considérations d'ordre social, environnemental et économique dans leur gestion, et ce, en concertation avec les parties prenantes ou avec les intéressés. Au travers du plan d'action qu'il vient d'adopter, le Conseil des ministres entend stimuler cette responsabilité sociétale des entreprises.

Un des moyens retenus est de favoriser les placements et investissements éthiques en Belgique, au travers d'une réduction fiscale accrue de l'épargne- pension fiscale. Celle-ci fait partie, avec l'assurance vie individuelle assortie d'un avantage fiscal, du troisième pilier des pensions, qui s'adresse à tous les contribuables quel que soit leur statut social. Les salariés et les indépendants peuvent donc accéder à celui-ci et combiner ces formules avec les autres systèmes du second pilier (entre autres les assurances de groupe). L'épargne- pension fiscale se décline en deux versions : le compte épargne pension souscrit auprès d'une banque ou d'une société de Bourse et l'assurance épargne-pension conclue auprès d'une compagnie d'assurance.

L'article 1458, alinéa 2 du Code des impôts sur les revenus 1992 stipule que le montant pris en considération pour la réduction pour épargne-pension est limité à 500 € par période imposable mais que ce montant peut être porté à un maximum de 1.000 € par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres. Le Conseil des Ministres du 26 octobre 2005 a approuvé un projet d'arrêté royal qui augmente de 25 % le montant maximum de la réduction d'impôt et qui porte donc le montant de 500 € à 625 € (780 € montant indexé) à partir de l'exercice d'imposition 2006. L'avantage fiscal effectif varie entre 30 et 40% des primes payées (majoré de l'impôt communal épargné).

Concrètement, le projet de Madame Els Van Weert signifie que ceux qui choisiront en faveur d'une épargne-pension éthique pourront investir un montant plus important de manière fiscalement avantageuse. Cet avantage vaudra tant pour les comptes d'épargne collectifs et individuels que pour l'assurance épargne. Cette décision sera encore mise en oeuvre sous cette législature, selon Madame Els Van Weert.

Si l'on ne peut que souscrire à l'objectif poursuivi – favoriser la responsabilité sociétale des entreprises – encore faut-il s'interroger à la fois sur le contenu de cette responsabilité et sur les moyens envisagés pour la stimuler.

Avantage fiscal

Le gouvernement n'a pas encore décidé, semble-t-il, si l'avantage fiscal qu'il entend réserver à l'épargne-pension éthique va être accordé en plus du montant de 625 € reconnu à toute forme d'épargne-pension ou si tout ou partie de l'avantage existant va être subordonné à la preuve d'un investissement éthique. En d'autres termes, il reste à préciser si on va augmenter l'avantage fiscal existant ou le maintenir dans l'enveloppe actuelle mais le conditionner à des critères d'investissement socialement responsable (ISR).

Seule cette deuxième formule paraît défendable. Selon la Secrétaire d'Etat Els Van Weert elle-même, « de plus en plus d'études montrent qu'à long terme, les portefeuilles ISR sont aussi rentables que d'autres et qu'ils présentent moins de risques. D'autre part, il ressort de ces études que les placements ISR sont moins volatiles et moins sensibles aux mouvements cycliques ». Pourquoi dès lors offrir un avantage fiscal supplémentaire aux heureux investisseurs qui auront combiné pertinence sociétale et économique?

La vraie question est au contraire de savoir si l'Etat doit favoriser fiscalement l'investissement dans des entreprises qui n'assument pas leur responsabilité sociétale. Poser la question, c'est y répondre !

Faire une différenciation fiscale au sein de l'épargne-pension, selon qu'elle soit éthique ou pas, est certainement justifié au regard du souci du gouvernement de favoriser la responsabilité sociétale des entreprises, mais elle doit se comprendre plutôt en termes de condition mise à l'obtention de l'avantage existant qu'en termes d'avantage supplémentaire.

Épargne-pension éthique ?

Pour qu'un avantage fiscal soit accordé à l'épargne-pension éthique, encore convient-il préalablement de définir ce que l'on entend par là et donc les critères objectifs et transparents permettant de distinguer l'épargne-pension éthique de l'épargne-pension ordinaire. Derrière cet enjeu fiscal se cache donc un enjeu bien plus important : la normalisation publique de l'investissement socialement responsable.

Depuis les années 70, c’était la société civile qui définissait les frontières de l’épargne éthique. Au début des années 2000, les banques ont progressivement pris le relais. Il semble donc que l'on s'engage à présent dans un processus de définition publique. On ne peut que s'en réjouir, vu la difficulté grandissante de s’y retrouver entre des fonds qui se revendiquent de l'ISR mais qui utilisent critères et méthodologies disparates. Il est d'ailleurs permis de s’interroger sur la légitimité des gestionnaires de fonds à choisir seuls de tels critères. Au nom de quoi ceux-ci devraient-ils échapper au débat citoyen ? La responsabilité sociale, s’il s’agit d’un sujet et d’un enjeu fondamental de la gestion entrepreneuriale et de la finance, est aussi un thème qui nous concerne tous et il nous paraît que le milieu financier doit accepter de partager cette compétence.

Si, à ce stade, ni le Réseau Financement Alternatif, ni son homologue flamand Netwerk Vlaanderen, n'ont été consultés sur cette initiative gouvernementale, il paraît assez inconcevable qu'en qualité de porte-paroles de la société civile sur les questions de finance éthique et solidaire, ils ne soient pas étroitement associés aux travaux de définition de l'épargne-pension éthique.

Ils seront en tous cas attentifs à ce que les normes publiques à venir soient de qualité, et non un pis-aller de bonne conscience.

Parmi les produits éthiques à rendre éligibles pour l'épargne-pension éthique figurent en première place ceux de l'épargne solidaire – et ce n'est certainement pas Madame Van Weert, en charge par ailleurs de l'économie sociale qui nous contredira. Ceux-ci visent à favoriser la cohésion sociale par le financement, grâce à la solidarité, d’activités de l’économie sociale et investissent en conséquence dans les entreprises qui font de la responsabilité sociale, non l’appendice d’une activité lucrative, mais l’essence même de leur engagement.

Ces produits financiers, non seulement éthiques mais aussi solidaires, visent soit à répondre à des besoins réels de financement de personnes ou de groupes pour sortir de la précarité, soit à favoriser l’émergence d’activités nouvelles rencontrant des difficultés de financement auprès des banques classiques (l’environnement, l’éducation, l’action sociale, etc., particulièrement sur le plan local), soit à faire la preuve que l’économie peut être utilisée de façon plus humaine et plus au service des hommes.

S'il existe un type de produit éthique pour lequel un avantage fiscal se justifie plus que pour un autre, c'est bien pour l'épargne solidaire. Certes, une réduction d’impôt est accordée en cas de souscription d’obligations émises par le Fonds de l'économie sociale et durable, mais, par contre, les particuliers qui utilisent les outils traditionnels de financement de l'économie sociale et durable, comme la coopérative Crédal par exemple, ne se voient pas accorder un avantage fiscal similaire.

Il serait donc paradoxal qu'un avantage fiscal soit accordé pour des investissements éthiques et pas pour des investissements non seulement éthiques mais aussi solidaires et, à ce titre, offrant souvent une rentabilité moindre. En France, par exemple, un avantage fiscal est reconnu pour ceux qui investissent directement au capital d'entreprises solidaires, dans le capital d'institutions financières solidaires agréées ou encore dans des fonds communs de placements d'entreprises solidaires (FCPES) dont 5 à 10 % sont affectés à des entreprises solidaires, y compris des sociétés de capital risque ou de finance solidaire. Un exemple qui est certainement à méditer, à l'heure où une définition européenne de l'épargne solidaire a pu être dégagée avec l'appui de la Commission européenne.

 


Arrêté royal du 10 novembre 2005 modifiant l'AR/CIR 92 en ce qui concerne l'épargne-pension, M.B. 18 novembre 2005.

Communiqué de presse, L'épargne-pension devient plus avantageuse pour ceux qui choisissent les placements éthiques, 21 décembre 2006, http://www.elsvanweert.be/default.aspx?ref=AAACAU&lang=FR

Bernard Bayot, « L’éthique privatisée ? », in Les placements éthiques et solidaires, édition Belgique, Alternatives Économiques, 2006.

http://www.fineurosol.org

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Le 21 décembre dernier, le Conseil des Ministres a marqué son accord sur un plan d'action qui, dans le cadre des compétences fédérales, a pour objectif de stimuler la responsabilité sociétale des entreprises. Ce plan fait partie du plan fédéral de développement durable 2004-2008 qui vise notamment à favoriser la responsabilité sociétale des entreprises et les placements et investissements éthiques en Belgique. Selon un communiqué de presse de Madame Els Van Weert, Secrétaire d'Etat au développement durable, le Conseil des ministres a notamment approuvé, dans le cadre de ce plan, sa proposition visant à rendre l'épargne-pension plus avantageuse pour les placements éthiques par le biais d'une déduction fiscale différenciée.

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2007
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20
Date d'édition
20/01/2007
Mois d'édition
Janvier

Évolution sémantique de l'ISR

Soumis par Anonyme le

Introduction

Le développement sémantique d’un domaine constitue en général un bon indicateur de l’évolution du domaine en question. Les termes génériques des débuts se déclinent en termes plus spécifiques et nuancés pour migrer ensuite vers le langage commun. Prenons l’exemple du « commerce équitable », chacun comprend aujourd’hui de quoi il s’agit. Il n’en fut pas de même lors du lancement de ce concept. Il a d’abord dû se faire connaître, accepter et mettre en pratique pour, in fine, entrer dans le langage commun.

Qu'en est-il à ce jour du concept de l’investissement socialement responsable ? À la différence du commerce équitable, l’ISR comprend une diversité vaste et plurielle de pratiques financières, et, en l’absence de cadre juridique délimitant le concept, chaque institution financière, association ou fédération est libre d’en établir une définition propre.

D’aucuns parleront d’« investissements éthiques », d’autres d’« investissements durables », « socialement responsables », voire « soutenables ». Derrière ces variations sémantiques, que nous détaillerons par la suite, l’on retrouve toujours le même socle fondateur, généralement en phase avec l’évolution des préoccupations citoyennes : la prise en compte de considérations éthiques et sociales, au-delà des objectifs financiers traditionnels, dans les décisions d’investissement ou de placements1.

La définition de l’ISR reste imprécise par essence, « dans la mesure où elle repose sur l’idée de responsabilité sociale corporative, concept au cœur de débats et de perceptions diverses »2. De plus, l’éthique est loin d’être une notion absolue, celle-ci variant en fonction des cultures, des convictions, des époques et des lieux.

Toutefois si l’ISR est un concept en constante évolution – et ce, tant en Europe que dans les pays anglo-saxons – et si les termes pour le définir sont interchangeables, il nous paraît important de distinguer, quelle que soit la sémantique utilisée, l’investissement « éthique », qui porte un jugement moral ou de valeur, de l’investissement « socialement responsable », qui évoque les impacts sociétaux de tout investissement.

Genèse et évolution

L’intégration de critères autres que financiers dans les décisions d’investissement est apparue pour la première fois aux États-Unis, dans le courant du 19ème siècle, sous l’action des quakers américains qui refusaient d’investir dans les deux marchés les plus rentables de l’époque : l’armement et le commerce d’esclaves. Par la suite, le mouvement s’est perpétué à la suite de la pression exercée par les congrégations religieuses qui refusaient d’investir dans des actions « du péché », (les sin stocks), et qui excluaient d’emblée de leur politique d’investissement les entreprises actives dans l’alcool, le tabac, le jeu, l’armement et la pornographie. D’où l’origine du terme « investissementéthique ».

Progressivement les champs d’exclusion se sont élargis à d’autres secteurs d’activité, à d’autres zones géographiques et à d’autres investisseurs en fonction des nouvelles revendications de groupes de pression d’origines diverses : guerre du Vietnam et refus de financer l’industrie de l’armement ; régime de discrimination raciale en Afrique du Sud et boycott des investissements au nom de l’antiracisme ; catastrophes de Tchernobyl et de l’Exxon Valdez et lutte pour la protection de l’environnement.

Dans les années 1980, et à l'initiative d'un activiste américain, Léon Sullivan, le concept entre dans une nouvelle logique : en lieu et place d’exclure des entreprises en fonction de leurs activités, on s’intéresse davantage à leurs modes de fonctionnement, à leurs engagements vis-à-vis de la société. On les compare entre elles et on sélectionne celles qui affichent une réelle responsabilité sociétale. On parle donc d’« investissement socialement responsable ».

Le rapport Brundtland (1987), qui fait référence en termes de définition du développement durable, et le Sommet de la Terre de Rio (1992) ont largement contribué à renforcer l’évolution du concept qui, d’un instrument de boycott obéissant à une logique d’opposition, est devenu un moyen de tendre, positivement, vers un développement durable de notre société.

Les scandales financiers de ces dernières années – tout le monde a encore en mémoire le scandale d’Enron – n’ont fait que renforcer l’importance de la notion de responsabilité dans les actes financiers ainsi que dans le rôle d’actionnaire, où le concept d’activisme actionnarial, l'un des trois aspects de l’ISR, prend de l’ampleur.

De nos jours l’investissement éthique a donc fait place à l’investissement socialement responsable, voire même, depuis deux ans, à l’« investissement socialement responsable et durable(ISRD) ». L’ajout récent de ce dernier qualificatif traduit l’évolution du concept dans les pays anglo-saxons, où l’on parle de plus en plus de « socially responsible and sustainable investment (SRSI) ».

Au vu de ce qui précède, il est incontestable que le concept d’ISR évolue et évoluera encore. Depuis cette année, les termes « green and ethical investment »3, « green funds » ou « fonds thématiques ISR »4 font leur apparition. Nul doute que la problématique du changement climatique et de la protection de l’environnement influencera largement l’ISR au cours de ces prochaines années.

Ces éléments attestent donc le dynamisme et la richesse du concept de l'ISR. Mais ils montrent aussi que les professionnels de la finance se sentent suffisamment concernés par cette problématique pour vouloir participer à la définition de son cadre sémantique.

Cadre de l'ISR

 

Comme mentionné précédemment, l'investissement socialement responsable se définit au sens large comme toute forme d'investissement qui ne répond pas uniquement à des critères financiers, mais également à des préoccupations sociales, éthiques et environnementales.

En général, et de manière reconnue par la majorité des acteurs du secteur, les investissements responsables peuvent se classer selon trois grandes catégories :

  • Selon une approche active, en fonction de l'engagement ou de l'activisme actionnarial auprès des entreprises du portefeuille de placement. « L'activisme actionnarial consiste à exercer son pouvoir d'actionnaire, par le biais de son droit de vote, aux assemblées générales des entreprises cotées en Bourse afin d'améliorer le comportement éthique, social et/ou écologique de l'entreprise dont on est actionnaire, en favorisant le dialogue avec les dirigeants, en exerçant des pressions, en soutenant une gestion responsable, en proposant et en soumettant au vote des assemblées générales annuelles des préoccupations sociétales »5.
  • Selon une approche passive, en fonction de l'application de filtres positifs ou négatifs sur la base de critères éthiques, sociaux ou environnementaux, au moment du choix de placement. On parle dès lors de « screening » ou « tamisage positif ou négatif de l'univers d'investissement ».

Le « screening négatif » ou « screening d'exclusion » consiste à exclure de son univers d'investissement des entreprises impliquées dans certains secteurs d'activités ou produits et services. De nos jours les secteurs qui sont remis en question sont généralement : l'armement, l'énergie nucléaire, le tabac, l'alcool, le pétrole, etc. Les pays qui posent problème sont les pays non démocratiques, non respectueux des droits de l'Homme, des conventions de l'OIT. Quant aux pratiques réputées sensibles, citons, à titre d’exemples, les manipulations génétiques, les tests sur les animaux, les OGM…

L'exclusion sera soit globale, exclusion de l’ensemble du secteur d'activité ou exclusion géographique, soit nuancée, par exemple, exclusion des entreprises dont plus de 10 % du chiffre d'affaires proviennent de la vente d'armes.

A contrario, le « screening positif » ou « screening d'inclusion » vise à inclure dans l'univers d'investissement les entreprises qui affichent des pratiques exemplaires ou, du moins, qui adoptent les meilleures pratiques de leur catégorie (Best in Class) ou qui apportent une contribution signification au développement durable, par exemple.

  • Selon une approche communautaire (ou solidaire ou de partage) en fonction des investissements communautaires ou des investissements dits « solidaires » ou dits « de partage ». On sélectionne, ici, les produits financiers de différentes formesqui visent à fournir du capital en prêtant à des entreprises locales ou à des particuliers ou en faisant des investissements sous forme de participation dans de telles entreprises en vue de favoriser le développement communautaire ou d’appuyer les groupes défavorisés ou à faibles revenus ou de développer l'économie locale, sociale.

C'est très certainement dans cette dernière catégorie que l'on retrouve le plus d'hétérogénéité entre les pays. La richesse et la multiplicité des outils financiers développés de par le monde en vue de répondre au réel besoin de financement de l'économie sociale fait qu'il est difficile de se limiter à trois catégories pour définir l'ISR. La Belgique et la France ont des spécificités ISR qui se regroupent au sein d'une quatrième catégorie appelée « placement de partage ». Le Canada définit quant à lui l'ISR en six catégories, ajoutant ainsi aux quatre catégories évoquées ci-dessus des prêts responsables et du capital risque soutenant le développement durable6. D'autres préféreront parler de « finance socialement responsable » afin de pouvoir marquer clairement la distinction entre les deux types de pratiques que sont les placements, d’une part, et les investissements, d’autre part7.

Sans parler des nuances de terminologie entre les notions anglo-saxonnes de « charity », « communit »y, « local economy » et celles, francophones, de « partage », « solidaire », « social ».

Pour avoir une vue exhaustive de ces différentes notions, il serait nécessaire de consacrer tout un article la sémantique de la finance solidaire. Ce qui n'est pas l'objet premier de cette analyse.

Néanmoins, notons que l'Europe a songé tout récemment à créer un label qui définit les critères pour les produits financiers solidaires. Outil précieux sans nul doute qui permettra, d'une part, d'éclairer le consommateur, et, d'autre part, de ne pas mettre le solidaire à toutes les sauces.

Conclusion

Indépendamment des questions de sémantique, l'investissement socialement responsable est un concept important : il permet d'agir sur les pratiques des grandes entreprises, de ramener l'économie mondialisée et de plus en plus distante des préoccupations de la société dans un champ plus citoyen, de dégager par le biais de ses investissements communautaires du capital de développement, indispensable pour un développement harmonieux de l'ensemble de notre société. Il permet de reconstruire le lien, oublié dans cette mondialisation financière, entre l'investisseur et le projet de développement.

La mise en place d'un cadre définissant de manière légale l'investissement responsable devient peut-être une réelle nécessité. Les professionnels de la finance ne sont pas prêts à l’admettre, arguant que délimiter l'investissement responsable viendrait à réduire le concept et à empêcher son évolution. Ce n'est pas faux mais, a contrario, étiqueter des produits financiers ISR alors qu'ils n'ont strictement rien d'ISR en dehors de leur nom pose un réel problème, du même ordre que la vague greenwashing8 qui déferle en ce moment sur notre société.

La mise en place d'un cadre légal, aussi large fût-il, permettrait déjà de préserver l'ISR de dérives commerciales et d'ainsi garantir la pérennité du concept.

Alexandra Demoustiez, octobre 2007

Références:

 

  • Bourque, Gendron, « La finance responsable : la nouvelle dynamique d’une finance plurielle ? », in Economie et Solidarités, volume 34, numéro 1, 2003.
  • Association canadienne pour l'Investissement Responsable (AIR), : La revue 2004 de l'Investissement responsable au Canada.
  • Novethic Etudes, Les nouveaux territoires de l'ISR : les investissements verts qui se réclament de l'ISR, octobre 2007
  • Bayot, Demoustiez, L'investissement socialement responsable en Belgique – rapport 2004, Réseau Financement Alternatif, juin 2004.
  • Jean-Jacques Rosé, Responsabilité sociale de l'entreprise, De Boeck Université, 2006

 

1 L’investissement socialement responsable vient, à l’origine, du terme anglo-saxon « SociallyResponsible Investment » dans lequel le terme « investment » désigne tant les activités d’investissement que de placement. Dans le cadre de cette analyse, nous utiliserons également le terme « investissement » pour désigner à la fois l’investissement et le placement.

2 Bourque, Gendron, « La finance responsable : la nouvelle dynamique d’une finance plurielle ? », in Économie et Solidarités, volume 34, numéro 1, 2003 p. 21 à 36.

3 Henderson

4 " Les fonds thématiques ISR se définissent principalement par des choix d'investissement dans des secteurs d'activité proposant des solutions en faveur d'un développement durable.", in Novethic Etudes, Les nouveaux territoires de l'ISR : les investissements verts qui se réclament de l'ISR, octobre 2007.: p. 3.

5 Bayot, Demoustiez, L’investissement socialement responsable en Belgique - rapport 2004, Réseau Financement Alterntif, juin 2004, p. 13.

6 Association canadienne pour l'Investissement Responsable (AIR), La revue 2004 de l'Investissement responsable au Canada..

7 Bourque, Gendron, op.cit., p.25.

8 Terme anglophone pouvant être traduit par « verdissement d'image ». Il est utilisé par les groupes de pression environnementaux pour désigner les efforts de communication des entreprises sur leurs avancées en termes de développement durable – avancées qui ne sont pas accompagnées d'action véritable. Ce terme est également utilisé pour désigner le rapprochement d’une entreprise avec l'ONU dans le cadre du Global Compact.

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L'investissement éthique, l'investissement socialement responsable, durable, soutenable... que de termes pour qualifier un même concept, à savoir, la prise en compte de critères extrafinanciers lors d'un choix de placement ou d'investissement. Mais derrière chacune de ces variantes se profile une nuance. Prenons le temps de les examiner.

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2007
Date d'édition
10/2007
Mois d'édition
Octobre

État des lieux des initiatives socialement responsables des institutions financières

Soumis par Anonyme le

Introduction

Les institutions financières multiplient, depuis quelques années, les initiatives volontaires afin d'améliorer leur responsabilité sociale et environnementale. Aujourd'hui, on peut en dénombrer sept principales, allant de l'élaboration de lignes directrices en termes de lutte contre le blanchiment d'argent, la corruption et le financement du terrorisme – Wolfsberg Principles – à une standardisation des bonnes pratiques en matière de transparence – Global Reporting Initiative – ou à une collecte d'information sur l'empreinte écologique des entreprises détenues en portefeuille – Carbon Disclosure Project. Comme nous le verrons en détail par la suite, les domaines sont donc vastes, variés et complexes. Toutes ces initiatives, louables en soi, nécessitent, pour devenir réellement efficaces et espérer déboucher sur un changement significatif, un réel engagement en interne et la mise en place de sérieuses procédures de suivi de la part de l'institution bancaire. Et c'est malheureusement là que très souvent le bât blesse.

L'objectif de cette analyse est de réaliser un état des lieux des sept principales initiatives bancaires en termes de responsabilité sociétale, de porter un regard critique sur leur efficacité pour amener in fine le débat à la question : initiative volontaire ou réglementation du marché financier ?

État des lieux

Global Reporting Initiative (GRI)

Créé en 1997, le Global Reporting Initiative, comme son nom l’indique, poursuit l’objectif de standardiser les bonnes pratiques en matière de transparence et de reporting. Il s’est donné pour mission de développer, en partenariat avec différents groupes d’acteurs et d’experts, un référentiel en matière de reporting social et environnemental– Sustainability Reporting. Le GRI définit les principes et indicateurs qu’une organisation (entreprise privée ou publique, ONG, association, sprl...) peut utiliser pour mesurer et rendre compte de ses performances économiques, sociales et environnementales. En 2006, le GRI a édité sa troisième version de lignes directrices dénommée G3 Guidelines.

En développant un référentiel en matière de reporting économique, social et environnemental, le GRI permet de stimuler la demande pour de l’information « durable » (sustainable development), d’accroître la qualité de l’information ainsi que de faciliter les comparaisons intersectorielles.

Carbon Disclosure Project (CDP)

Lancé en 2000, le Carbon Disclosure Project (projet de publication volontaire des émissions de dioxine de carbone – CO2) regroupe, aujourd'hui, plus de 300 investisseurs institutionnels qui gèrent, au total, plus de 40 milliards de dollars d'actifs. L'objectif du projet est de fournir à ses membres des informations essentielles et souvent difficiles à obtenir concernant la stratégie en matière de changements climatiques et d'émissions de gaz à effet de serre des entreprises dans lesquelles ils investissent, et ce, afin de leur permettre d'évaluer les risques et opportunités liés aux changements climatiques. Pour récolter ces informations, le CDP, par le biais de ses membres, mène chaque année une enquête sur la base d'un questionnaire en dix points. La première édition, menée en 2000, portait sur les 500 premières entreprises mondiales (FT500). Depuis, le taux de réponse n'a cessé d'augmenter et l'univers de s'élargir pour arriver aujourd'hui à plus de 2000 entreprises interrogées.

L'atout de cette initiative : conscientiser le secteur bancaire et le monde des entreprises aux changements climatiques et encourager les entreprises à calculer et réduire leur empreinte écologique.

Ses limites : plus de 20 % des premières entreprises mondiales par capitalisation boursière (FT500) refusent toujours de publier leurs émissions de gaz à effet de serre. Se pose également une question de crédibilité étant donné qu'aucun organisme indépendant ne valide ni ne certifie les données récoltées.

Les principes de l'Équateur (Equator Principles - EP)

Les principes de l’Équateur sont un ensemble de dix principes calqués sur les standards environnementaux et sociaux de l'International Finance Corporation visant à permettre aux institutions financières une gestion saine des problèmes sociaux et environnementaux liés au financement de projets.

L'objectif des EP, pour les établissements financiers signataires, consiste à s'assurer que les projets qu'ils financent, et particulièrement ceux qu'ils financent dans les pays et marchés émergents, sont réalisés en tenant compte de critères sociaux et environnementaux.

Ils servent de base pour la mise en œuvre, par chaque institution financière signataire, de ses propres politiques, procédures, normes internes. Depuis le lancement en 2003, les EP sont adoptées à ce jour par plus de cinquante institutions financières internationales.

L'atout de cette initiative : rationaliser, de par la création de ce réseau international, la gestion de risque social et environnemental ainsi qu'harmoniser les exigences sociales et environnementales en termes de financement de projets.

Ses principales limites : la question de la gestion et de la bonne gouvernance des « banques d'Équateur ». Une des faiblesses souvent évoquées à l’égard des EP réside dans le fait que  les banques d’Équateur ne disposent pas, d’une part, d’un réel mécanisme de gouvernance et, d’autre part, ne constituent pas un consortium solide. La mise en place d’un mécanisme de gouvernance, via une fonction de coordination appuyée par des politiques et des critères, permettrait à tout le moins de garantir l’intégrité de l’initiative volontaire de chaque banque signataire, de maintenir ainsi un contrôle de qualité minimum et d’assurer le développement des EP à terme.

United Nations Global Compact (ou le Pacte mondial)

Il s’agit d’un ensemble de dix principes qui engagent, sur base volontaire, les entreprises signataires à respecter et promouvoir, dans leurs stratégies et opérations, le respect des droits de l’Homme, les normes du travail, l’environnement et la lutte contre la corruption.

« En termes de droits de l’homme : (1) elles sont invitées à promouvoir et à respecter la protection du droit international relatif aux droits de l’homme dans leur sphère d’influence ; et (2) à veiller à ce que leurs propres compagnies ne se rendent pas complices de violations des droits de l’homme. En termes de droit du travail : elles se doivent de respecter (3) la liberté d’association et le droit de négociation collective, (4) l’élimination de toutes les formes de travail forcé ou obligatoire, (5) l’abolition effective du travail des enfants ; et (6) l’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession. Sur le plan environnemental, elles sont invitées à (7) appliquer l’approche de précaution face aux problèmes touchant l’environnement, (8) à entreprendre des initiatives tendant à promouvoir une plus grande responsabilité en matière d’environnement, ainsi qu’à (9) favoriser la mise au point et la diffusion de technologies respectueuses de l’environnement. En matière de lutte contre la corruption, elles sont invitées (10) à agir contre la corruption sous toutes ses formes, y compris l’extorsion de fonds et les pots de vin. »

Depuis son lancement officiel, le 26 juillet 2000, l’initiative concerne actuellement plus de 5 600 signataires répartis dans 120 pays. Elle s’adresse aux entreprises et organisations les plus diverses, et souhaite favoriser, de par sa structure volontaire et en réseau, la participation au processus de diverses parties prenantes de la société civile et promouvoir ainsi l’interaction et l’échange de bonnes pratiques. Plusieurs mécanismes tels que la concertation, l’apprentissage, la mise en place de réseaux locaux et les partenariats sont proposés en vue de faciliter la mise en pratique du pacte.

Les critiques les plus souvent émises à l’égard de l’initiative proviennent principalement de la faiblesse de son système de reporting ; de sa pénétration limitée sur le marché, essentiellement auprès des grandes compagnies d’Europe de l’Ouest ; et de la nécessité de définir des critères plus précis, moins amples, afin de pouvoir, d’une part, les appliquer concrètement, et, d’autre part, initier un réel changement des comportements entrepreneuriaux.

Les Principes Wolfsberg

Fondé en 2000, le Wolfsberg Groupe est une association de onze établissements financiers d’importance internationale qui se sont accordés sur un ensemble de directives mondiales pour la lutte contre le blanchiment d’argent, la corruption et la répression du financement du terrorisme. Leur volonté est de développer des normes et des références adéquates pour les institutions financières.

La première directive définie concerne les directives mondiales anti-blanchiment pour les services bancaires privés, dont l’objectif est de prévenir l’utilisation de leurs opérations internationales à des fins illicites, via, entre autres, des procédures de vérification internes dans l’acceptation du client. Ces directives ont ensuite été traduites pour les banques correspondantes.

En matière de prévention contre le terrorisme, la Déclaration de Wolfsberg sur la répression du financement du terrorisme de 2002 définit, quant à elle, des lignes de conduite aux institutions financières qui, par le biais de la prévention, de la détection et du partage des informations, peuvent aider les gouvernements et organismes publics à lutter contre le terrorisme.

Tous ces textes reconnaissent la nécessité d’un contrôle approprié des transactions et des clients mais ne traitent nullement des questions relatives à l’élaboration et à la mise en place de telles procédures. C’est chose faite, via la Déclaration sur la surveillance, le filtrage et la recherche qui aborde ce point en déterminant les questions à aborder afin d’être en mesure de développer de telles procédures.

Ces mesures volontaires sont certainement utiles pour pallier des déficiences dans des domaines régis par des législateurs ou régulateurs. Néanmoins, en Europe, la directive du 4 décembre 2001 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux assure une réglementation stricte en la matière.

Initiative de transparence des industries extractives - Extractive Industries Transparency Initiative (EITI)

Initiative lancée en 2002 au sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg par le premier Ministre britannique Tony Blair et largement soutenue par le G8, elle vise à accroître la transparence des paiements des industries extractives (Pétrole, Gaz, industries minières) effectués auprès des gouvernements des pays riches en ressources naturelles. L’exploitation de ces ressources minières par les compagnies génère des revenus sous formes de royalties, taxes, primes à la signature des contrats d’exploitation et d’autres formes de paiements auprès des gouvernements locaux. Ces revenus devraient contribuer à la croissance économique et au développement social de ces pays. Malheureusement, le manque de transparence lors des transactions financières peut exacerber des pratiques de mauvaise gouvernance et aboutir à des cas de corruption, de conflit ainsi que de pauvreté.

Le mécanisme est simple : encourager la publication, par les Etats, des recettes perçues au titre de l’exploitation de ces ressources naturelles et, par les entreprises, des paiements effectués aux Etats. Parallèlement, la mise en place d’un mécanisme de réconciliation de ces données permet de s’assurer de la concordance entre les recettes perçues par les Etats et les paiements effectués par les entreprises.

Les institutions financières et investisseurs institutionnels peuvent encourager cette initiative en adhérant à la Déclaration des investisseurs sur la transparence dans le secteur de l’extraction. Par cette adhésion, les institutions financières s’engagent à soutenir les principes de transparence de l’EITI en demandant aux entreprises dans lesquelles elles investissent de soutenir et de promouvoir activement les principes de l’EITI.

La coalition internationale « Publiez ce que vous payez » souligne l’importance de cette initiative et les développements encourageants qu’elle entraine auprès d’institutions financières internationales telles que le FMI, la Banque Mondiale et la BERD. Néanmoins, elle relève deux points critiques d’importance : D’une part, la question de l’approche tripartite de l’EITI entre le gouvernement, l’industrie et la société civile et qu’il serait plus judicieux que l’entreprise divulgue individuellement l’information concernant leurs paiements afin de permettre un contrôle efficace de la publication des données et éviter ainsi les pressions exercées par le gouvernement. D’autre part, la question de l’approche volontaire, pays par pays, car l’initiative risque de ne pas s’appliquer aux pays qui ont le plus besoin de transparence en la matière. Les élites au pouvoir profitant de la gestion secrète des revenus provenant des ressources naturelles sont peu susceptibles de s’engager sur base volontaire.

Principes pour l’Investissement Responsable - United Nations Principles for Responsible Investment (PRI)

Lancé en 2006 sous l’égide de l’UNEP-FI et du Global Compact, les Principes pour l’Investissement Responsable visent à intégrer les problématiques environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) dans la gestion des portefeuilles d’investissement.

Le PRI est composé de 6 principes, déclinés en une série de 35 actions concrètes possibles pour guider les investisseurs à mettre les principes en place. Ils consistent à (1) intégrer les problématiques ESG dans l’analyse et les décisions d’investissement ; (2) devenir investisseur actif et prendre en compte les questions ESG dans les politiques et pratiques actionnariales – via la politique des droits de vote par exemple ; (3) demander aux entités dans lesquelles elles investissent de publier des informations appropriées sur les questions ESG ; (4) favoriser l’acceptation et l’application des principes dans le secteur de l’investissement ; (5) travailler ensemble afin d’accroître l’efficacité dans la mise en application de ces principes ; (6) rendre compte à titre individuel des activités et des progrès réalisés dans l’application de ces principes.

Les PRI, comme toutes les initiatives mentionnées ci-dessus, relèvent d’un engagement volontaire, non obligatoire de la part des institutions financières et certes la question de l’efficacité, du suivi, du contrôle et de l’impact réel se pose à nouveau. Néanmoins, l’atout de ces principes réside essentiellement dans le fait qu’ils fournissent une reconnaissance officielle aux questions ESG dans le secteur financier et qu’ils concernent la totalité des actifs financiers au-delà du champ de l’Investissement Socialement Responsable.

Social Investment Organisation (SIO), un organisation qui promeut l’Investissement Socialement Responsable au Canada souligne que « sans la pression des actionnaires les principes n’aboutiront pas in fine à de grands changements. Le PRI étant basé sur les procédures plutôt que sur les revenus proprement dits, il laisse la porte ouverte aux investisseurs de les signer sans devoir changer d’un dollar leurs portefeuilles d’investissement, donnant ainsi l’impression de changement, plutôt qu’un réel changement ».

Conclusion

Au regard de l’ensemble de ces initiatives volontaires, il est incontestable que la question de la responsabilité sociale et environnementale ne peut plus être et n’est plus ignorée par le monde financier. Elles démontrent la prise de conscience du rôle des institutions financières vis-à-vis de la société actuelle et future et apporte une reconnaissance officielle aux questions environnementales, sociales et de gouvernance. Cet élément justifie à lui seul pleinement leur existence.

Le mouvement est donc initié. Néanmoins après le lancement de la première initiative il y a 11 ans, n’est-il pas temps de se poser la question de leur efficacité ? Et d’ouvrir à nouveau le débat sur la question : initiative volontaire ou réglementation du marché financier ? Les associations et organisations non gouvernementales actives en la matière portent un regard de plus en plus sceptique quant à l’efficacité des démarches volontaires. Celles-ci se multiplient mais les résultats sont faibles et les changements peu perceptibles. Souvent instrumentalisées à des fins de communication, peu contraignantes, elles passent fréquemment à la trappe face aux obligations de rendement et autres obligations financières. L’adage n’est-il pas : Chassez le naturel, il revient au galop. Pour qu’une démarche volontaire mène à un réel changement, l’initiative nécessite un engagement, et ce à tous les niveaux en interne. Elle doit s’intégrer dans le core business de l’institution, être acceptée, assimilée, acquise par tous et non circonscrite à un département extra-financier qui s’occupe des questions de responsabilité sociale et environnementale. De sérieuses procédures de contrôle et de suivi se doivent d’être mises en place. Or très souvent elles sont absentes. Un rapport de l’OCDE sur la question des approches volontaires pour les politiques environnementales concluait que l’efficacité environnementale des approches volontaires est bien souvent questionnable et leur efficacité économique généralement faible.

 


Carbon Disclosure project 2006, Enquête menée auprès des entreprises du SBF120, p.17.

Pour plus d'information sur les principes de l'Équateur, se reporter à l'analyse " Les principes de l'Équateur", Alexandra DEMOUSTIEZ, Réseau Financement Alternatif, septembre 2007.

Par financement de projet, on entend un « mode de financement dans lequel le prêteur considère avant tout les revenus générés par un projet à la fois comme source de remboursement de son prêt et comme sûreté attachée à son exposition. Ce type de financement concerne donc généralement de vastes projets complexes et onéreux tels que centrales électriques, usines chimiques, mines, infrastructures de transport, environnement et télécommunications. » (Source : Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, Convergence internationale de la mesure et des normes de fonds propres – Dispositif révisé(« Bâle II »), novembre 2005, http://www.bis.org/publ/bcbs107fre.pdf).

Les dix principes sont issus des conventions internationales suivantes : Déclaration universelle des droits de l’homme, Déclaration de l’Organisation internationale du travail relative aux principes et droits fondamentaux au travail, Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, conventions des Nations unies contre la corruption.

Nom de la localité suisse où s’est tenue la séance de travail visant à définir ces directives.

Banco Santander, Bank of Tokyo-Mitsubishi, Barclays, Citigroup, Crédit Suisse, Deutsche Bank, Goldman Sachs, HSBC, J.P. Morgan Chase, Société Générale, UBS.

Par « banques correspondantes », on entend : les banques, maisons de courtage, fonds mutuels, sociétés d’investissement à capital variable, fonds de pension, sociétés de financement des ventes à tempérament, etc.

France Diplomatie – l’initiative pour la transparence dans les industries extractives – juin 2007

Publish what you pay – est une coalition internationale regroupant plus de 200 ONG et qui appel à l’entière transparence des paiements des compagnies minières, pétrolières et gazières de tous les gouvernements nationaux. www.publishwhatyoupay.org

UNEP-FI : unité du PNUE visant à encourager l’adoption de meilleures pratiques environnementales par les professionnels de la finance. www.unepfi.org

Ethical Corporation – North America: The Principles of Responsible Investment: Time to step up to the mark. http://www.ethicalcorp.com/content.asp?ContentID=4354

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Les institutions financières de par le monde adoptent, sur base volontaire, une série d'initiatives en vue d'améliorer leur responsabilité sociale et environnementale.

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Année d'édition
2007
Date d'édition
12/2007
Mois d'édition
Décembre

Les principes de l'Équateur

Soumis par Anonyme le

Introduction

Les principes de l'Équateur (Equator Principles – EP) ont vu le jour en juin 2003 à l'initiative d'un groupe de banques internationales. Il s'agit d'un ensemble de dispositions en vue d'une gestion saine des problèmes sociaux et environnementaux liés au financement de projets. Cet ensemble de principes, qui vient de connaître une évolution en passant dans sa version II en juillet 2006 (EPII), permet a priori l'identification, l'évaluation et la gestion du risque social et environnemental en matière de financement de projets.

Par financement de projet, on entend un "mode de financement dans lequel le prêteur considère avant tout les revenus générés par un projet à la fois comme source de remboursement de son prêt et comme sûreté attachée à son exposition. Ce type de financement concerne donc généralement de vastes projets complexes et onéreux tels que centrales électriques, usines chimiques, mines, infrastructures de transport, environnement et télécommunications (…). Les EPII s'appliquent donc à des projets d'envergure dont le seuil d'investissement s'élève au minimum à 10 millions de dollars.

L'objectif des EP, pour les établissements financiers signataires, est de s'assurer que les projets qu'ils financent, et particulièrement ceux qu'ils financent dans les pays et marchés émergents, sont réalisés en tenant compte de critères sociaux et environnementaux.

Il y a donc, au travers de l'élaboration de ces principes, la reconnaissance de la responsabilité sociale du milieu bancaire, la reconnaissance du rôle que peuvent jouer les financiers dans la promotion d’une gestion responsable de l'environnement ainsi que d’un développement social responsable.

Les principes de l'Équateur ont pour vocation de servir de base et de référence communes pour la mise en œuvre, par chaque institution financière signataire, de ses propres politiques, procédures, normes internes en matière sociale et environnementale de financement de projets.

Pour ce faire, les EP se calquent sur les standards environnementaux et sociaux de l'IFC – International Financial Corporation – institution appartenant au groupe de la Banque Mondiale et chargée des opérations avec le secteur privé. L'IFC a été créée en 1956 dans le but de promouvoir les investissements privés dans les pays en développement.

Notons toutefois que l'adhésion aux Principes de l'Équateur par une institution financière n’entraîne, en aucun cas, des droits ou des obligations dans le chef de cette institution envers quelque personne que ce soit. Ces principes servent de référentiel et sont adoptés sur base volontaire uniquement.

Les Principes de l'Équateur - EPII

Les EP dans leur version II sont de l'ordre de 10.

Principe 1: examen et catégorisation

L'institution financière signataire des EP (EPFI) se doit de catégoriser les projets pour lesquels un financement est sollicité en fonction de l'importance de ses impacts et risques potentiels en matière sociale et environnementale. Il existe trois catégories allant des impacts sociaux et environnementaux potentiels significatifs, hétérogènes et irréversibles (catégorie A) à minimes ou nuls (catégorie C).

Principe 2: Évaluation sociale et environnementale

Pour chaque projet de catégorie A ou B, l'emprunteur doit fournir une évaluation des conséquences sociales et environnementales liées au projet et également proposer des mesures d'atténuation et de gestion pertinentes, adaptées à la nature et à l'échelle du projet envisagé.

Principe 3 : Critères sociaux et environnementaux applicables

Pour les projets localisés dans les pays de l'OCDE qui ne sont pas considérés à haut revenu ou dans les pays hors OCDE, sont d'application les critères de performance de l'IFC ainsi que les directives spécifiques du secteur d'activité en matière d'environnement, de santé et de sécurité (directives EHS).

Pour les projets localisés dans les pays de l'OCDE à haut revenu, le processus d'évaluation se fera conformément à la législation locale ou nationale. Et ce, afin de rationaliser et d'éviter tout doublon, car les exigences réglementaires d'autorisation et d'enquête publique sont en général équivalentes ou supérieures aux critères de performance de l'IFC et aux directives EHS.

Notons que les principes suivants (le 4, le 5 et le 6) s'appliquent aux projets de catégorie A ou B et localisés hors pays OCDE ou pays OCDE non considérés à haut revenu.

Principe 4 : Plan d'action et système de gestion

Obligation de la part de l'emprunteur de rédiger un plan d'action sur la base des conclusions de l'évaluation. Ce document décrit et hiérarchise les actions nécessaires pour mettre en œuvre les mesures d'atténuation, les actions correctrices et le suivi nécessaire pour gérer les impacts et les risques identifiés dans l'évaluation. L'emprunteur doit également établir un système de gestion sociale et environnementale.

Principe 5 : Consultation et communication

Consultation par le gouvernement, l'emprunteur ou l'expert indépendant des communautés affectées, et ce, d'une manière coordonnée et adaptée. On entend par « communautés affectées » les communautés locales établies dans la zone d'influence du projet. L'objectif étant d'assurer au minimum la consultation préalable de ces communautés et de faciliter leur participation sur l'ensemble du processus du projet (et non uniquement lors des premières phases).

Principe 6 : Mécanisme de règlement des griefs

Mise en place d'un mécanisme de règlement des griefs par l'emprunteur afin de recevoir les plaintes et de faciliter la résolution des conflits avec des individus ou des groupes affectés par le projet.

Principe 7 : Expertise externe

Nomination d'un expert externe indépendant en matière sociale et environnementale sans lien direct avec l'emprunteur afin d'examiner l'évaluation, le plan d'action et la documentation relative au processus de consultation.

Principe 8 : Obligations de faire ou de ne pas faire

L'incorporation d'obligations de conformité est l'un des piliers des Principes de l'Équateur ; pour les projets de catégorie A ou B, l'emprunteur s'engage, dans la documentation financière, à respecter toutes les lois et réglementations sociales et environnementales du pays d'accueil ; à respecter le plan d'action, à informer périodiquement sur ses obligations de conformité, à mettre hors service ses installations, là où il convient, selon un plan de démantèlement convenu.

Principe 9 : Indépendance du suivi et du reporting

Nomination d'un expert indépendant pour vérifier les conclusions.

Principe 10 : Présentation des rapports par les EPFI

Chaque institution financière signataire s'engage à publier, au minimum sur une base annuelle, un rapport sur ses procédures et ses résultats de mise en œuvre des EP. Ces rapports devraient au minimum comprendre le nombre d'opérations passées en revue par chaque EPFI, leur répartition par catégorie ainsi que des informations relatives à la mise en œuvre.

Avantages et limites des EPII

À ce jour, les Principes de l'Équateur version II sont adoptés par plus de cinquante institutions financières internationales, devenant ainsi les standards mondiaux pour évaluer et gérer les risques sociaux et environnementaux pour le financement de projets.

Les EP permettent, d'une part, au sein des institutions financières, de rationaliser tant que faire se peut la gestion de risque social et environnemental et, de par la création de ce réseau international, d'aider au transfert de connaissances, à l’apprentissage et au développement de meilleures pratiques. D'autre part, et ce, du point de vue du secteur industriel, cette fois, ils permettent de structurer et d'harmoniser les exigences sociales et environnementales en termes de financement de projets.

De plus, le processus révisionnel des EP, qui a abouti au lancement, en juillet 2006, d'un nouveau set de critères environnementaux et sociaux plus exigeants (par exemple, dans le domaine des conditions de travail ainsi qu'au niveau du respect des conventions sociales et environnementales des pays hôtes), s'est fait en incluant la participation de stakeholders et d'ONG externes. Ce qui, indéniablement, constitue un plus dans la qualité du processus de révision des critères.

Néanmoins, malgré la mise en place de critères plus poussés, d'une procédure de révision régulière de ces critères, les Principes de l'Équateur pèchent par certaines faiblesses majeures et par des problèmes fondamentaux de bonne gouvernance.

Champ d'activité

Le champ d'activité des EP ne concerne que le financement de projets et non l'ensemble des activités des institutions financières. En outre, même si le seuil d'investissement est passé de 50 millions USD à 10 millions USD, il limite encore le nombre de projets susceptibles d’être soumis aux EP.

Critères sociaux et environnementaux

Les critères sociaux et environnementaux des EP se calquent en majorité sur ceux de l'IFC, heureusement revus à la hausse, mais qui restent néanmoins en deçà de normes internationales, standards et bonnes pratiques en la matière et qui inquiètent par leur faiblesse dans certains domaines, notamment le changement climatique.

De plus, dans certains domaines, les EP n'ont pas suivi les révisions à la hausse des IFC et en sont restés à des principes moins forts notamment dans le domaine des nouvelles réglementations en matière de transparence des revenus et contrats, dans le secteur des industries extractives, ainsi que dans le domaine de la reconnaissance de communautés ne possédant pas un titre de territoire "reconnaissable".

En outre, les banques ont, en général et à titre individuel, adopté des politiques sociales et environnementales en termes de financement de projets qui vont plus loin que les EP.

Gestion et bonne gouvernance

Une des faiblesses souvent évoquées par Friends of the Earth, toutes deux membres du réseau d’ONG BankTrack, à l’égard des EP réside dans le fait que « les banques d’Équateur » ne disposent pas, d’une part, d’un réel mécanisme de gouvernance et, d’autre part, ne constituent pas un consortium solide. La mise en place d’un mécanisme de gouvernance, via une fonction de coordination appuyée par des politiques et des critères, permettrait à tout le moins de garantir l’intégrité de l’initiative volontaire de chaque banque signataire, de maintenir ainsi un contrôle de qualité minimum et d’assurer le développement des EP à terme.

Conclusion

Comme on le voit, l’objectif des principes de l’Équateur reste sans nul doute un objectif louable et positif. Néanmoins les banques signataires n’ont-elles pas laissé passer, lors du récent processus de révision des EP, une réelle opportunité de tendre vers une autorégulation efficace ? Vers une réelle prise en compte de leur responsabilité sociale et environnementale en tant que financeurs de projets aussi vastes et complexes que les centrales électriques et autres projets énergétiques ?

Lorsque l’on sait qu’une partie des financeurs du très controversé projet pétrolier gazier Sakhalin II, en Russie, – qui pourrait, entre autres, être responsable de l’extermination des dernières baleines grises de nos océans – sont des signataires des Principes de l’Équateur, il est légitime de se demander si les EP sont un nouvel outil marketing ou le signe d’une réelle prise de conscience du monde bancaire. De telles inconsistances ne peuvent malheureusement que remettre en cause le système des Principes de l’Équateur dans son intégralité et intégrité. Seule la mise en place de mécanismes de bonne gouvernance, de cohérence politique et de transparence au niveau de l’information pourra garantir la fiabilité des EP à long terme. Néanmoins comme le souligne BankTrack : « les Principes d’Équateur sont des lignes directrices (baseline) et nullement des bonnes pratiques en matière de gestion sociale et environnementale ».

 


(…) Il peut également servir à financer la construction d’une installation exigeant de nouveaux capitaux ou à refinancer une installation déjà existante, en y apportant ou non des améliorations. Dans ce type de transaction, le prêteur est habituellement payé uniquement ou presque sur les flux de trésorerie générés par les contrats relatifs à la production de l’installation, par exemple l’électricité vendue par une centrale. L’emprunteur est généralement une structure ad hoc (Special Purpose Entity– SPE) qui n’est pas autorisée à servir d’autres fins que le développement, le contrôle et le fonctionnement de l’installation. Il en résulte que le remboursement repose essentiellement sur les flux de trésorerie provenant du projet et sur la valeur de la sûreté attachée aux actifs. » Source : Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, Convergence internationale de la mesure et des normes de fonds propres – Dispositif révisé(« Bâle II »), novembre 2005. http://www.bis.org/publ/bcbs107fre.pdf

Dans la première version des EP, le seuil d'investissement s'élevait à 50 millions USD.

Les principes de l'Equateur – Juillet 2006, www.equator-principles.com

"(…) le plan d'action peut aller d'une description succincte des mesures d'atténuation à un ensemble de documents (...) par exemple : plan de déplacement des populations, plan relatif aux populations autochtones, plan d'urgence et d'intervention, plan de démantèlement, etc.).", Les principes de l'Equateur, juillet 2006, p. 3.

"Le système de gestion sociale et environnementale recouvre les éléments suivants : (i) évaluation sociale et environnementale, (ii) programme de gestion, (iii) capacité organisationnelle, (iv) formation, (v) engagement auprès des communautés, (vi) suivi et (vii) présentation de rapports. Les principes de l'Equateur, juillet 2006, p. 3.

Friends of the Earth (FoE) est une organisation gouvernementale qui se consacre à la sauvegarde de la planète pour les générations à venir. Elle représente le plus vaste réseau écologique international. www.foei.org. Michelle Chan-Fishel, Friends of the Earth, Revised Equator Principles fall short of international best practice for Project Finance, by Bill Baue, social funds.com, July 2006.

Rainforest Action Network. www.ran.org

BankTrack est un réseau d’organisations non gouvernementales (ONG) et d’individus qui surveille les opérations du secteur financier privé (banques commerciales, investisseurs, compagnies d’assurance, fonds de pension) ainsi que les impacts de ses opérations sur l’Homme et la planète.

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Lancé en juin 2003, révisé en juillet 2006, cet ensemble de principes en vue d'une gestion saine des problèmes sociaux et environnementaux liés au financement de projets correspond-il à un nouvel outil marketing ou à une autorégulation efficace du marché financier ?

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