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Retraités de l'éthique

Soumis par Anonyme le

En bref :

  • Le plus grand fonds de pension des États-Unis est socialement responsable.
  • En France, le système des retraites est guidé par une politique respectueuse de l'homme et de son environnement.

Chaque pays a ses propres dispositifs déterminant les sommes auxquelles on peut prétendre lorsqu'on arrive à l'âge de la retraite. Il s'agit, selon les cas, de systèmes de financement fondés sur l'aide sociale, sur la solidarité inter-gouvernementale ou encore sur l'épargne (1). Ces mécanismes publics, par leur capacité à mouvoir des mannes financières colossales, sont devenus des acteurs incontournables de la responsabilité sociale des entreprises et du développement durable. En effet, leur poids financier leur permet d'exiger des entreprises ou des pays dans lesquels elles investissent de respecter un certain nombre de critères sociaux, éthiques et de bonne gouvernance. Une façon de les contraindre à une gestion plus responsable de l'argent.

Le précurseur californien

CalPER S, pour California Public Retirement System, est le premier fonds de pension public au monde à s'être impliqué dans l'investissement socialement responsable. Gérant la retraite des employés de l'État de Californie pour un montant estimé à 231 milliards de dollards (2), il est également le plus grand fonds de pension public américain. Dès 1987, CalPERS a décidé de réviser son portefeuille d'actions étasuniennes selon des critères de performance financière et de gouvernance. En 2002,CalPER S a resserré l'étau en définissant des critères économiques et sociaux concernant sa politique d'investissement hors des États- Unis. Pour la première fois, des placements financiers devaient respecter des critères d'appréciation humanitaire : respect des droits de l'homme, transparence, libertés publiques... (3) Certains pays se sont ainsi vu exclus de l'univers d'investissement de CalPER S, dont la Chine, les Philippines ou Russie. Conscient de la nécessité d'agir au niveau des entreprises pour impulser du changement, CalPER S a commencé à exclure à partir de 2007 les entreprises qui manquaient notamment de transparence financière, qui ne respectaient pas les libertés civiles et les droits dans les lois nationales. En parallèle, le fonds de pension californien a consacré une partie de son budget pour permettre à ses actionnaires de mener des recherches en matière de responsabilité sociale des entreprises. Une récente étude réalisée par le fonds CalPER S lui-même a démontré qu'en cinq ans, la performance des entreprises auprès desquelles CalPER S s'était engagé avait augmenté sensiblement. De quoi tordre le cou aux théories prétendant que bonne gouvernance et valeur boursière sont incompatibles. Cerise sur le gâteau, le PDG de CalPER S vient d'annoncer en mai dernier que le fonds étendrait ses critères de gestion sociale et environnementale à toutes ses classes d'actifs.

L'hexagone se réserve pour l'ISR

Afin de contribuer au financement de l'importante réforme des retraites entreprise en 2003, le gouvernement français a mis en place le Fonds de réserve pour les retraites (FRR ). À côté du double relèvement prévu dans la nouvelle loi de novembre 2010 (celui de l’âge légal de départ de 60 à 62 ans pour tous les régimesà compter du 1er juillet 2011 et celui de l’âge de la retraite à taux plein de 65 à 67 ans entre 2016 et 2023), le FRR doit permettre la viabilité sur le long terme du système des retraites pour les Français. Une défi que le Fonds entend inscrire dans une politique d'investissement respectueuse de l'homme et de son environnement. Pour ce faire, le FRR a d'abord prévu une politique active en matière de droits de vote dansles entreprises dont il est actionnaire. Dans ce cadre, le FRR veillera à ce que toutes les résolutions de nature sociale, éthique ou environnementale s'appliquent notamment dans le respect des droits de l'homme, des consommateurs, de l'environnement, ou encore dans le respect des Principes du Pacte mondial (4). Le Fonds de réserve pour les retraites demande également depuis 2003 à ses gestionnaires d'actions européennes de tenir compte de critères sociaux, éthiques et de gouvernance. Fin 2010, 100% des mandats de gestion d'actions du FRR intégraient de telles dispositions. Depuis sa création, le FRR déjà exclu 8 entreprises de son univers d'investissement (l'essentiel étant des entreprises impliquées dans la fabrication d'armes à sous-munitions), il vote dans 90 % des entreprises dont il est actionnaire et 85% de sa capitalisation boursière est couverte par une analyse extra-financière.

En en Belgique ?

Les Belges vivent de plus en plus longtemps et cette évolution a notamment comme conséquence que les pensionnés doivent être payés plus longtemps. Pour faire face à ces dépenses supplémentaires, un Fonds de vieillissement (ZilverFonds) a donc été créé en 2001. Il puise ses revenus dans les surplus budgétaires, dans
les excédents de la sécurité sociale et des recettes non fiscales ainsi que dans les revenus de ses placements. Pour des raisons de sécurité, d'efficacité et de rendement, la loi prévoit que le Fonds de vieillissement place ses réserves en titres de l'État belge (titres des régions, communautés et communes). L'objectif est à la fois d'assurer des placements sûrs et de réduire la dette de l'État (le Fonds de vieillissement faisant partie du secteur public, ses réserves sont portées en diminution de la dette globale du secteur public). La question de la qualité éthique des investissements du Fonds de vieillissement ne se pose pas dès lors que celui-ci investit dans la dette de l'État. Laquestion de la gestion responsable des titres des régions, communautés et communes reste, quant à elle, bel et bien ouverte.

                                                                                                                                       Bernard Bayot,
                                                                                                                                       Thibaut Monnier,
                                                                                                                                       juin2011

1. BAYOT, B., Les pensions et l'éthique, mai 2011.
2. Ces chiffres sont ceux publiés par CalPERS au 28 février 2011. Ils sont disponible sur http://www.calpers.ca.gov/index. jsp?bc=/investments/home.xml.
3. Ibid.
4. Il s’agit d’un ensemble de dix principes qui engagent, sur base volontaire, les entreprises signataires à respecter et promouvoir, dans leurs stratégies et opérations, le respect des droits de l’Homme, les normes du travail, l’environnement et la lutte contre la corruption (www.unglobalcompact.org).

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Certains systèmes de financement des pensions complètent leurs objectifs de rentabilité économique par des objectifs de performance sociale et environnementale. Zoom sur deux exemples en la matière.

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Juin

La Communauté française montre l'exemple

Soumis par Anonyme le

En bref :

  • Les résultats de l'analyse extrafinancière de la Communauté française sont flatteurs.
  • Cette évaluation doit permettre aux investisseurs d'apprécier ;sa performance en matière de développement durable.

Compétente en matière d'enseignement, de culture, de sport, de jeunesse, de santé..., la Communauté française emploie des milliers de personnes et est responsable de centaines de projets de société en Belgique francophone. Son budget annuel se chiffre en milliards d'euros. La Communauté française a demandé à l'agence extrafinancière Vigéo (1) d'analyser sa responsabilité sociale. Par là, elle s'engage indéniablement sur la voie du développement durable à grande échelle. Mais pas seulement...

Un accès à de nouveaux marchés ?

Pour augmenter ses moyens financiers, la Communauté française émet des obligations. Une obligation est une part d’emprunt contractée par les entreprises, par les États, par les collectivités locales ou par les gouvernements auprès d'investisseurs publics ou privés. Cette formule permet d'emprunter à un taux inférieur à celui proposé habituellement par les banques. Grâce aux bons résultats de l'analyse de Vigeo, les emprunts réalisés par la
C ommunauté française devraient pouvoir être considérés par les investisseurs qui y souscrivent comme des ISR, ce qui lui donnera accès à de nouveaux marchés, comme celui des fonds de placements éthiques. En étant présente dans de tels fonds, l'institution espère attirer de nouveaux créanciers. Une manière responsable d'accéder à de nouvelles opportunités d'emprunts, de diversifier sa base d'investisseurs, mais également un acte politique
fort au regard du (encore) faible intérêt que représente aujourd'hui l'ISR auprès des investisseurs (voir article p. 5). Une telle analyse devrait enfin permettre à la Communauté française ;de mettre le doigt sur ses forces et ses faiblesses en matière de responsabilité sociale et de s'améliorer en conséquence.

Sous toutes les coutures ?

L'agence européenne Vigeo a basé son analyse sur la façon dont sont pris en compte, au quotidien, tous les éléments qui impactent le développement durable de l'institution. Il s'agit des ressources humaines, des droits humains, de la commande publique, du développement des solidarités, de la bonne gouvernance et de l’environnement. Chacun de ces six domaines a été étudié en fonction de sous-critères. Ainsi, l'analyse environnementale de Vigeo a tenu compte de la gestion des émissions de gaz à effet de serre de la Communauté française, mais aussi de la gestion de ses ressources en eau... Les ressources humaines ont été étudiées suivant la qualitédes systèmes de rémunération, l'amélioration des conditions de sécurité et de santé... Le résultat obtenu par la Communauté française est jugé flatteur par Vigeo, qui classe l'institution en deuxième position sur un panel de 26 collectivités publiques qu’elle a eu l’occasion d’analyser, collectivités originaires ;d’Allemagne, de France, d’Espagne, d’Italie et – désormais – de Belgique.
1. Vigeo évalue l’engagement des organisations (entreprises, administrations, collectivités…) sur les objectifde responsabilité sociale, c’est-à-dire en matière environnementale, sociale/sociétale et de gouvernance. L'agence identifie les risques extrafinanciers auxquels les entreprises et autres organisations sont exposées, et leur niveau de maîtrise par le système managérial.

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La Communauté française est la première institution publique belge francophone à faire évaluer sa responsabilité sociale. Une belle manière de se remettre en question, de s'engager sur la voie du développement durable et d'attirer de nouveaux investisseurs.

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Juin

Communes en action !

Soumis par Anonyme le

Philippe Lauwers, échevin des Finances de Rixensart

Depuis avril 2011, Rixensart innove en faisant du placement à court terme chez Triodos.

FINANcité : Pourquoi avoir choisi de placer une partie de la trésorerie à court terme de la commune de Rixensart chez Triodos ?
Il s'agit là d'un signal de diversification de nos placements lancé à Dexia (qui gère déjà les fonds de pension de nos mandataires pour un montant de 600 000 euros dans un fonds éthique). De plus, la plupart des communes, lorsqu'elles investissent en ISR, le font via des placements à long terme. Il est important pour nous de s'inscrire dans cette démarche responsable sur le court terme aussi.
Comment s'assurer du caractère éthique de vos placements ?
En ce qui concerne Dexia, je dois bien reconnaître que nous n'avons pas vraiment d'instrument de contrôle. Nous devons lui faire confiance. Sur le plan éthique, les choses sont beaucoup plus claires chez Triodos, qui nous a fourni une liste détaillée de la façon dont est géré notre argent sur le plan social et environnemental. Cette transparence nous permet de vérifier très facilement si les critères éthiques sont respectés.
Pourquoi ne pas faire plus ?
Les banques traditionnelles offrent des aides à la gestion. Elles sont présentes dans toutes les communes et connaissent bien les spécificités des investissements de chacune d'entre elles. Forcément, avec toutes ces facilités mises à disposition, changer d'opérateur est peu motivant. Les banques éthiques n'offrent pas de tels services à l'heure actuelle. Du reste, je pense que des initiatives comme « Ça passe par ma commune » (voir p.7) peuvent jouer un rôle important dans l'évolution de l'ISR en interpellant leurs élus communaux.

Aurélie Naud, échevine des Finances de Braine-l'Alleud

Les fonds de pension de la commune de Braine-l'Alleud sont investis en placements éthiques à hauteur de 140 000 euros par an via Dexia.

FINANcité : Quels types de banques répondent à vos marchés publics ?
Dès qu'il y a des opportunités de marché, les banques traditionnelles sont là pour nous expliquer leurs produits. Dans le cas de la gestion des fonds de pension de nos mandataires, c'est la banque Dexia qui est venue à nous. Et elle s'est présentée avec une offre sur mesure. On est par contre très peu approchés par des institutions dont le corebusiness est d'investir dans l'éthique. On se rabat donc sur ce qu'on connaît et sur les produits avec lesquels on a l'habitude de travailler.

Quelle importance représente votre fonds de pension éthique aujourd'hui ?
Il représente le paiement d'une prime unique d'environ 125 000 euros par an ainsi que l'alimentation annuelle du fonds à concurrence de 37,77 % de la masse salariale de nos mandataires, soit actuellement près de 140 000 euros par an. Ce n'est pas énorme, mais ce montant augmente d'année en année. En 2035, le montant total investi devrait avoisiner les quatre millions d'euros par an.

Cela a-t-il été difficile de convaincre le Collège communal ?
Oui et non. « O ui » car il faut composer avec les aspirations des différents partis autour de la table et car il y a moins d'avantages financiers à placer ses billes dans des produits éthiques (NDLR : en réalité, ce ne sont pas les investissements qui sont moins rentables, mais les produits proposés qui sont moins variés) . Et « non » car nous étions tous d'accord sur le fait qu'il faut encourager ce type de démarche. C'est une question de volonté politique.

David dâ Camara Gomes, échevin des Finances d'Ottignies- Louvain-la-Neuve

La commune d'Ottignies-Louvain-la-Neuve participe à un système de production d'énergie 100% verte depuis 2007.

FINANcité : Comment un tel système de distribution d'énergie verte s'est-il mis en place ?
Les communes du Brabant wallon se sont entendues pour créer une centrale d'achat d'énergie verte, via l'intercommunale d'Ottignies- Louvain-la-Neuve. Grâce à l'achat groupé, nous avons ainsi pu accéder à des prix intéressants auprès du fournisseur et nous avons équipé tous les toits bien orientés des communes en panneaux solaires. L'intercommunale, qui fonctionne comme tiers investisseur, préfinance l'achat sur huit ans, période
après laquelle la commune devient propriétaire.
Y a-t-il d'autres initiatives prises par votre commune en matière d'ISR ?
Environ 200 000 euros transitent chaque année sur un compte courant et un compte de placement à la banque Triodos. C'est peu par rapport à une trésorerie de 12 millions, mais c'est pour l'instant le mieux qu'on puisse faire.
Nous avons également pensé à entrer dans le financement de Crédal, mais nous ne sommes pas tombés d'accord avec le receveur.
Le receveur est-il un frein aux placements en ISR ?
Le receveur cherche une facilité de placement. Son rôle est de placer la trésorerie de la commune de manière à assurer un rendement suffisant. Nous ne pouvons pas interférer dans ses choix, mais nous pouvons les juger. En même temps, le receveur reste attentif à ce que ses placements conviennent à la majorité politique du moment, voire à la majorité politique suivante. Il s'agit donc d'une question de bonnes relations entre le receveur et le Collège. Tant qu'il n'y aura pas de loi qui permette au Collège communal d'orienter les choix du receveur, les choses ne changeront pas.

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FINANcité à interviewé trois échevin(e)s de communes qui sont passées à l'action en matière d'ISR.

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22/06/2011
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Juin

Argent public, argent durable ? État des lieux

Soumis par Anonyme le

En bref :

  • Les deniers publics sont rarement placés de manière socialement responsable.
  • Il existe quelques initiatives.
  • Les réglementations sont peu appliquées.

Fin 2010, le patrimoine financier des administrations publiques belges (État fédéral, régions, communes et
organisations parastatales) avoisinait les 120 milliards d'euros (1). Autant d'argent à dépenser, mais aussi à investir et à épargner dans l'intérêt général des citoyens.
C'est que derrière les comptes de dépôt, les fonds de placement et les prises de participation diverses des pouvoirs publics, il y a des entreprises qui se financent (2).

Du rêve...

En 2006, une ordonnance en faveur de l'investissement socialement responsable (ISR, voir encadré p.5) était votée à la Région de Bruxelles-Capitale. Elle impose à la Région, aux institutions qui en dépendent et aux communes bruxelloises qu'au moins 10 % des sommes investies dans les nouveaux marchés financiers le soient selon un processus d'investissement qui intègre des critères sociaux,éthiques ou environnementaux.
La même année, une proposition de décret demandait à la Région wallonne qu'elle respecte des normes ISR dans ses nouvelles politiques d'investissement. De plus, la Déclaration de politique régionale wallonne pour la législature 2009-2014 prévoit le renforcement de l'investissement selon des critères sociaux, éthiques et environnementaux dans les marchés financiers que la Région wallonne organise, ainsi qu'une promotion active de l'ISR auprès des communes, provinces et pouvoirs adjudicateurs. Un des objectifs est de conduire les communes et les provinces à investir progressivement une part croissante de leurs fonds de pension et de placement (20 % en 2012, 30 % en 2014, etc.) selon des critères de durabilité.

...à la réalité ...

L'ordonnance de 2006 n'a, jusqu'à ce jour, toujours pas été appliquée en Région de Bruxelles-Capitale. La perte de ventes immobilières à la suite de la crise de 2008, conjuguée à l'indexation annuelle du personnel administratif et aux dotations aux communes suffisent à plomber notre budget. Nous ne disposons pas non plus de ressources provenant de la TVA comme la Région flamande ou la Région wallonne. Nous voudrions bien appliquer cette ordonnance, mais nous n'en avons pas les moyens, explique-t-on au cabinet des Finances de la Région de Bruxelles-Capitale. Quand bien même Bruxelles en aurait les moyens, il n'existe toujours pas dans la capitale d'instrument légal pour contrôler le respect des articles de l'ordonnance, et donc de son application. En Région wallonne, la proposition de décret de 2006 n'a pas été votée après que le Conseil d'Etat a jugé que c'est au pouvoir fédéral de fixer les règles en matière de marchés publics et non aux régions. Le député MR Richard Miller a déposé à nouveau en mai 2010 la même proposition de décret.

...il n'y a qu'un pas !

Au niveau fédéral, le Sénat a créé un fonds de pension pour les sénateurs dont 30 % du portefeuille est placé en ISR. La Loterie nationale n'investit pas dans des entreprises impliquées dans la production d'armes, le travail des enfants et les tests non obligatoires sur les animaux. Le Fonds de réduction du coût global de l'énergie se réfère à des critères éthiques pour une partie de ses réserves placées sur un compte à terme. Enfin, l'initiative BIO, dont les ressources financières sont annuellement alimentées par le gouvernement, finance les micro-, petites et moyennes entreprises dans les pays en développement. BIO ne décrit par contre pas de manière précise les critères éthiques, sociaux ou environnementaux (SEE) qu'elle utilise et ses avoirs sont investis dans des comptes d'épargne et/ou à terme pour une gestion sans risques mais également sans critères SEE. Sur le plan régional, le Fonds flamand d'assurance soins (Vlaams Zorgfonds), créé en 1999 en vue de faire face à la croissance des dépenses non médicales liées au vieillissement de la population, place ses capitaux suivant des critères de développement durable, en respectant exclusivement le registre d’investissement d’Ethibel (3). Toujours en Région flamande, le Fonds d'épargne flamand du secteur non marchand/social à but lucratif placeses réserves à la Banque Triodos. Enfin, le Fonds pour l'avenir (Vlaams Toekomstfonds) est une sorte de cagnotte pour les périodes économiquement difficiles. Il doit, selon ses moyens, maintenir une stratégie durable d’investissement, et, plus particulièrement, fixer des « critères spécifiques portant sur la durabilité des activités et l'engagement social des entreprises ». Entretemps, le fait est que les ressources du fonds ont presque entièrement été investies dans des actions de Dexia (4). Quant aux communes belges, seules 8 % d'entre elles déclarent placer de l’argent public dans des produits d’épargne ou de placement socialement responsables. Si nos élus sont pleins de bonnes intentions, force est de constater que les réalisations concrètes sont rares. Des mécanismes existent et fonctionnent pourtant. Ils prouvent combien la volonté politique est déterminante dans la prise en compte de l'ISR dans la gestion des deniers publics.

                                                                                                                                           Thibaut Monnier,
                                                                                                                                            juin 2011

1. www.nbb.be
2. Marcelo, C., Analyse sur la demande en ISR des institutions publiques, Réseau Financement Alternatif, mai 2011.
3. www.ethibel.org
4. Bayot B., Cayrol A., Demoustiez A., Le gouvernement et l'investissement socialement responsable : un état des lieux, octobre 2009.

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Les pouvoirs publics prennent-ils en considération des critères sociaux, éthiques ou environnementaux lorsqu'ils épargnent ou investissent notre bel argent ?

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2011
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22/06/2011
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Juin

FINANcité Magazine n° 21 : Crise financière : stop ou encore ?

Soumis par Anonyme le
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Mars

Quid de la Belgique ?

Soumis par Anonyme le

« Si les institutions n'agissent pas, les marchés financiers le feront pour elles ».

Herman Van Rompuy, lors d'une conférence organisée par l'ONG Friends of Europe, 14 octobre 2010

En bref :

  • Une nouvelle architecture de contrôle du système financier a été dessinée en Belgique.
  • Mais la protection des consommateurs contre les produits financiers doit encore être améliorée.

En décembre 2008, quatre députés PS déposent une proposition de loi relative à la création d'une agence de protection des consommateurs de produits financiers communs. L'objectif est d'éviter qu'à l'avenir le commun des mortels soit plongé dans une nouvelle crise en souscrivant des produits financiers dont il ne connaît pas les risques. De son côté, le gouvernement charge le Baron Lamfalussy de développer un projet pour un nouveau contrôle
financier en Belgique. Près de trois ans plus tard, l'Agence de protection des consommateurs de produits financiers n'a toujours pas vu le jour. Quant à la réforme du contrôle du secteur financier, elle s'est concrétisée dans la Loi du 2 juillet 2010, instituant notamment un nouveau superviseur, provisoire, dans le monde de la finance belgo-belge : le Comité des risques et établissements financiers systémiques.

Protection financière

Vouloir se prémunir des dangers d'un produit financier sans en connaître les risques revient à vouloir conduire une voiture les yeux bandés, c'est le crash assuré ! À l'heure actuelle, la protection des consommateurs de produits financiers est entre les mains de la Commission bancaire, financière et des assurances (CBFA). Une responsabilité qui constitue un conflit d'intérêts aux yeux des auteurs de la proposition de loi de 2008 qui voient mal comment une institution aussi proche du secteur bancaire pourrait assurer une protection objective des consommateurs.
Quant aux représentants des organisations de consommateurs, leur message est clair : renforcer l'information sur les produits financiers, responsabiliser les banques et proscrire du marché belge les produits opaques sont les
étapes clés pour assurer une bonne protection du public.

Protection extra-financière

À ce stade, le conducteur a un oeil libéré, l'autre reste voilé. Le consommateur doit aussi avoir accès à la finance éthique et solidaire et comprendre la finalité de cette appellation. La proposition de loi de 2008 comprend la mise en oeuvre d'un système de compensations financières pour veiller à ce que les entreprises qui pratiquent la responsabilité sociale ne soient pas désavantagées par rapport à celles qui s'en moquent. Elle prévoit aussi la mise en oeuvre d'une norme minimale à respecter pour qu'un produit puisse être qualifié d'« éthique ». En outre serait interdit tout financement, depuis la Belgique, d’entreprises et d’États qui se rendent coupables de violations des droits reconnus dans les conventions internationales ratifiées par la Belgique en matière notamment de droit humanitaire, de droits de l'homme, de droits sociaux et de dégradation intolérable de l'environnement.

La finance belge sous contrôle ?

Le rapport du Baron Lamfalussy publié en juin 2009 propose de renforcer la coopération entre la Banque Nationale de Belgique et la CBFA. Cette volonté sera traduite dans la Loi du 2 juillet 2010, organisée en deux phases. Dans un premier temps, le Comité des risques et établissements financiers systémiques (CREFS), opérationnel depuis octobre 2010 (il remplace ainsi le Comité de stabilité financière mis en place en 2002), est à même de sanctionner un organisme financier quand il estime que celui-ci est susceptible d'avoir un impact négatif sur la stabilité du système financier. Il s'agit des banques, assureurs, groupes financiers et holdings d'assurance susceptibles d'entraîner d'autres établissements dans leur chute en cas de difficultés. Le CREFS se voit également confier une nouvelle compétence, consistant à approuver les décisions stratégiques de ces établissements. Le CREFS doit donc veiller à la stabilité du système financier dans son ensemble pour éviter de nouvelles crises financières massives. Organe transitoire, le CRE FS devrait disparaître à partir du 1er avril 2011. Dans un deuxième temps donc, le contrôle prudentiel sera entièrement confié à la Banque nationale de Belgique tandis que la CBFA assurera la surveillance des marchés, le contrôle des intermédiaires et des produits, ainsi que le contrôle du respect des règles de conduite dans le chef des établissements de crédit, des entreprises d'investissement, des entreprises d'assurance, des fonds de pension. L'architecture du contrôle prudentiel évolue donc en Belgique. Dommage que la protection des consommateurs n'ait, à ce jour, pas suscité autant d'intérêt.

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Si la Belgique a connu de belles avancées sur le plan prudentiel, elle en est toujours au point mort en ce qui concerne la protection des consommateurs.

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2011
Jour d'édition
16
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16/03/2011
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Mars

Bâle III : coup dur pour les banques ?

Soumis par Anonyme le

« Une réforme du système monétaire international pourrait à la fois stimuler la reprise et rendre le système mieux à même d’empêcher de nouvelles crises ».

Dominique Strauss-Kahn, lors d’une table ronde sur le système monétaire international au FMI à Washington, 10 février 2011

En bref :

  • Les banques devront être plus solvables à l'avenir.
  • Cette nouvelle réglementation risque de handicaper les banques de détail.

Instauré en 1974, le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire est un forum où se réunissent quatre fois par an les
banques centrales de cinquante pays pour définir les règles prudentielles qui régiront l'ensemble des banques de la planète.

Plus de fonds propres

En cas de graves difficultés financières, les chances de survie d'une banque sont proportionnelles à l'importance de ses fonds propres, beaucoup plus qu'à sa taille. Les fonds propres représentent en effet ce que la banque possède (bâtiments, terrains, machines, trésorerie) moins ce qu'elle doit (ses dettes) (1). Conduire les banques à être plus solvables afin qu'elles puissent absorber les pertes en cas de crise est donc l'idée maîtresse de Bâle III. La nouveauté majeure est qu'elles devront l'être beaucoup plus et qu'elles devront y arriver via leurs fonds propres durs, c'est-à-dire composés uniquement d'actions et de bénéfices mis en réserve. Ceuxci devront représenter 7 % de leur activité de marché ou de crédit (contre 4 % dans les accords de Bâle II).

La fin des petites banques ?

« C'est trop ! » s'exclament les banques. Si elles doivent « geler » plus de fonds propres, ellesauront moins de ressources pour le crédit, préviennent-elles. Une conséquence d'autant plus dommageable pour l'économie européenne que 80 % de son financement est assuré par les banques (2). Du côté des banques de détail, on estime que la réforme désavantage les petits par rapport aux grands groupes. Les banques d'affaires et d'investissement – cotées en Bourse – y perdront quelques billes, mais n'auront pas de mal à trouver de nouveaux actionnaires pour lever de nouveaux fonds. C'est beaucoup plus compliqué pour les banques de détail qui travaillent main dans la main avec les entrepreneurs. Nous n'avons ni le même carnet d'adresses ni les mêmes clients, déclare Chris De Noose, directeur du Groupe européen des banques d'épargne. Et d’ajouter : La nouvelle réglementation concerne les activités reprises au bilan des banques. Mais une part substantielle des activités des banques d'affaires est réalisée hors bilan (shadow banking system). Les engagements hors bilan concernent notamment l’émission de titres adossés à des prêts hypothécaires, les garanties données sur des prêts, des opérations de marché du type swaps ou opérations à terme... soit les activités favorites des fonds spéculatifs ! Si le Groupe européen des banques d'épargne considère que les nouvelles exigences en capitaux arrivent à point nommé, il n'en estime pas moins qu'il est urgent de réguler le shadow banking system et d'adapter les accords de Bâle aux banques de détail sans quoi ceux-ci risquent de porter atteinte à la diversité des acteurs bancaires en Europe.

Consultez tous les documents officiels du Comité de Bâle sur www.bis.org/list/basel3/ index.htm

1. Bernard Bayot, Bâle troisième, www.financite.be, rubrique bibliothèque, février 2011.
2. Laura Raim, La réforme bancaire de Bâle 3 pour les nuls, L'Expansion, 13 septembre 2010.

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Les dirigeants des grandes banques centrales, réunis à Bâle en septembre dernier, sont tombés d'accord sur un vaste plan de réforme du secteur financier. Ces accords, s'ils vont dans le bon sens, ne font pas que des heureux. À juste titre ?

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2011
Jour d'édition
16
Date d'édition
16/03/2011
Mois d'édition
Mars

Noter en toute indépendance ?

Soumis par Anonyme le

« Les défauts dans leurs méthodes de travail ont conduit à des notations trop liées au climat général du marché sans se préoccuper de savoir si le marché est trop optimiste ou trop pessimiste ».

J. M . B arroso devant le Parlement européen, 5 mai 2010

En bref :

  • D'abord payées par les investisseurs, elles le sont maintenant par les émetteurs.
  • Leurs erreurs ont démontré l'urgence d’une régulation.

Lorsqu'elles font leur apparition aux États-Unis au début du XXe siècle, les agences de notation sont payées par les investisseurs qui souhaitent savoir s'il est risqué ou pas d'investir dans tel État ou telle entreprise. Selon que la note est bonne ou mauvaise, l'investisseur décide d'investir ou non. Le système change à partir des années 1970 : ce sont désormais les émetteurs, soit les entreprises et les États, qui paient les agences pour être cotés sur leur stabilité financière.

Juge ou partie ?

En évaluant la solvabilité de l'émetteur et en informant les investisseurs, les agences de notation sont censées renforcer l'homogénéité de l'information et assurer la transparence du système financier. Mais, qu'elles exercent à titre de conseillères lors du montage financier des produits ou à titre d'expertes pour la notation, ces agences sont des organismes privés payés, dans un cas comme dans l’autre, par les banques émettrices. Une position qui met fortement en doute leur indépendance d'esprit. Une révision à la baisse de leur notation peut ainsi avoir des conséquences désastreuses sur l'économie. C'est exactement ce qui s'est passé avec la crise des subprimes. En 2007, les agences de notation affirmaient aux investisseurs que les titres adossés aux crédits subprime étaient sans risques. Constatant que les défauts se multipliaient, elles ont alors revu à la baisse leur estimation, entrainant la chute libre de la valeur de ces produits. Plus grave, elles auraient conçu les produits toxiques avec les banques, avant de les évaluer et de leur accorder un AAA... la meilleure note ! Dans le cas d’Enron, dont Arthur Andersen, avait maquillé les comptes, l’agence de notation Moody’s avait attendu six mois avant de dégrader la note de la société, alors qu’Enron était de fait en faillite. La Grèce a quant à elle été lourdement handicapée dans ses efforts de redressement économique à la suite de la mauvaise note accordée par Standard & Poor's (1).

Quelle régulation ?

Le code de bonne conduite sur base volontaire rédigé en 2003 par l'Organisation internationale des autorités de régulation des marchés financiers s'est révélé insuffisant. Depuis 2009, l'activité des agences de notation est encadrée en Europe par un règlement du Parlement européen et du Conseil sur les agences de notation de crédit. Il fixe les conditions d'émission des notations de crédit ainsi que des règles relatives à l'enregistrement et à la surveillance des agences de notation de crédit. Mais cette réglementation doit être couplée à d'autres actions. Parmi les pistes envisagées, la Banque centrale européenne ou les banques nationales pourraient être autorisées à émettre des notes. Certains proposent d'en revenir au système « investisseur-payeur » d'avant les années 1970. Mais une chose est sûre : la seule régulation des agences de notation ne suffira pas à sauver les marchés financiers des mouvements spéculatifs hasardeux qui les plongent dans l'instabilité. Tenir l'épargne hors de portée des spéculateurs et encourager les pouvoirs publics à se financer davantage auprès de leur population, plutôt
qu'auprès d'investisseurs privés, est la première voie à emprunter.

1. Les trois agences de notation américaines Standard & Poor's, Moody's et Ficth Ratings se partagent à elles seules 85 à 90 % du marché. 70 autres agences se partagent les 10 à 15 % restants.

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Elles donnent un avis sur la solidité d'entreprises ou d'États. Mais qu'elles conseillent ou qu'elles notent, les agences de notation sont, dans les deux cas, payées par l'émetteur. Une situation qui ne favorise pas l'indépendance d'esprit...

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16/03/2011
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Mars

Bâle III : les banques de détail sont - elles désavantagées ?

Soumis par Anonyme le

Pourquoi pensez-vous que Bâle III entraînera une distorsion de concurrence entre banques d'affaires et banques de détail ?

Lever des fonds coûte cher à une banque, qu'elle que soit sa taille. Cependant les banques d'affaires et d'investissement - cotées en Bourse -, perdront quelques billes mais n'auront pas de mal à trouver de nouveaux actionnaires pour lever de nouveaux fonds. C'est beaucoup plus compliqué pour les banques de détail qui travaillent main dans la main avec les entrepreneurs. Nous n'avons ni le même carnet d'adresses ni les mêmes clients. Aussi, les nouvelles exigences en capitaux sont une très bonne chose, mais elles devraient être adaptées pour les banques de détail sans quoi Bâle III risque de porter atteinte à la diversité des acteurs bancaires en Europe.

Ces accords constituent-ils un frein à l'innovation ?

Nous devrons probablement limiter notre offre de crédit pour atteindre les nouveaux quotas. Ce qui signifie que nous allons devoir prendre moins de risques. Or, les entrepreneurs innovants sont ceux là-mêmes qui prennent le plus de risques. Une société sans innovation est une société qui se meurt.

Vous considérez que Bâle III oublie tout un pan de l'économie. Pourquoi ?

La nouvelle réglementation concerne les activités reprises au bilan des banques. Mais une part substancielle des activités de banques d'affaires est réalisée hors bilan (shadow banking system). Il s'agit d'émmissions de titres adossés à des prêts hypothécaires, de cession de prêts, ... Ces activités, pourtant dangereuses, échapperont aux nouvelles exigences. Il est donc essentiel que le shadow banking system fasse également l'objet de régulation.

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Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
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Pour répondre à cette question, FINANcité a interrogé Chris De Nooze, directeur du Groupe européen des banques d'épargne.

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Pourquoi les paradis fiscaux tuent-ils le développement des pays du Sud ?

Soumis par Anonyme le

Pourquoi une ONG de développement s'intéresse-t-elle à la question des paradis fiscaux ?

Parce-que les paradis fiscaux participent largement au pillage des richesses dans les pays du sud. Chaque année, environ 800 milliards d'euros1 s'échappent des pays du Sud et sont détournés vers les paradis fiscaux, ce qui représente un manque à gagner de 125 milliards d'euros de recettes fiscales qui pourraient être investis dans la santé ou l'éducation. À titre de comparaison, ces 800 milliards d'euros représentent 10 fois le budget alloué pour l'aide au développement des pays riches aux pays pauvres, soit pour un euro qui entre dans les pays du Sud, il y en a 10 qui partent dans les paradis fiscaux.

La lutte contre les paradis fiscaux est donc essentielle pour avancer dans le financement du développement. 125 milliards d'euros, c'est aussi 4 fois le budget estimé par la FAO (l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture ) pour lutter efficacement contre la faim dans le monde.

Concrètement, comment cet argent part-il ?

Entre 3 et 5% partent via la corruption, entre 30 et 35 % relèvent du blanchiment d'argent (armement, prostitution, traite des êtres humains, ...), et la partie la plus importante, 60-65 %, provient de l'évasion fiscale pratiquée par les multinationales ( il s'agit d'entreprises qui produisent ou exploitent des ressources dans des pays du Sud mais qui n'y déclarent qu'une partie de leurs activités afin d'éviter l'impôt).

L'évasion n'est pas que fiscale, elle est aussi judiciaire ?

Le terme "paradis fiscaux" fait référence au problème de l'évasion fiscale mais ne permet pas de décrire l’ensemble du problème. Pour être complet, on devrait parler de paradis fiscaux, judiciaires et prudentiels. Au-delà de la faiblesse de la fiscalité et de l'opacité des comptes, il y également un manque de coopération manifeste avec les instances juridiques et les instances de régulation internationales.

Qu'est-ce qui a été promis ? Quelle est la situation actuelle ?

Il existait déjà des initiatives de coopération internationale en matière de lutte contre les paradis fiscaux avant la crise, mais de façon très fragmentée. L'OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) s'occupe de la coopération fiscale, le GAFI (Groupe d'Action Financière Internationale) lutte contre le blanchiment d'argent, et enfin le Forum de stabilité financière s'occupe de l'approche prudentielle. La crise à révélé l'urgence d’articuler le travail de ces trois organisations. Nicolas Sarkozy s'est réjoui un peu trop vite de la fin des paradis fiscaux. L'approche adoptée par le G20 a été de cibler les territoires non coopératifs à partir d'un système de liste. Sur la liste noire les pays qui refusent de coopérer avec les administrations fiscales, sur la liste grise ceux qui s'y sont engagés oralement, et sur la liste blanche ceux qui ont signés des traités avec au moins 12 pays à qui ils promettent de communiquer les renseignements qu'on leur demande en matière fiscale. Le critère pour être blanchi est donc facile à atteindre: il suffit de signer 12 accords bilatéraux de coopération fiscale, ce que la plupart des pays stigmatisés se sont empressés de faire, et parfois les paradis fiscaux ont signé entre eux. Du coup, de nombreux territoires de la liste noire se sont rapidement trouvés sur la liste blanche. Mais concrètement, la situation n’a pas changé pour les pays du Sud et les outils mis en place ne permettront pas de lutter efficacement contre l’évasion fiscale.

Que reste-t-il à faire ?

Il est urgent de mettre fin à l’opacité financière dans les paradis fiscaux en changeant de stratégie et en ciblant maintenant leurs utilisateurs. Nos trois priorités sont de renforcer les exigences de transparence en demandant aux entreprises multinationales de publier les informations sur leur activités pays par pays (liste des filiales, résultats, nombre d'employés, transactions intra-groupes), de créer un registre des structures juridiques opaques dans lequel sera inscrit le nom de leur bénéficiaire effectif, et enfin de renforcer la coopération fiscale et judiciaire au niveau internationale avec des instruments multilatéraux et automatiques pour que les pays du Sud puissent en bénéficier. La directive épargne impose par exemple aux pays de l'union européenne de mettre à disposition des autres pays les informations bancaires sur les clients non résidents (un Français qui a un compte bancaire en Allemagne, la banque Allemagne doit fournir l'information sur ce compte au fisc français). Cette directive pourrait aujourd’hui être étendue à d’autres pays et notamment des pays émergents ou des pays du Sud.

Entretien réalisé par Thibaut Monnier

1 Selon une étude de l'ONG américaine Global Financial Integrity.

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Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
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Pour répondre à cette question, FINANcité a interrogé Mathilde Dupré, chargée de plaidoyer pour le CCFD - Terre solidaire, ONG française de développement spécialisée dans la lutte contre les paradis fiscaux.

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