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Education financière : principes et priorités

Soumis par Anonyme le

Eléments de définition – étendue de la matière

Sous le vocable d'éducation financière se retrouvent aujourd'hui encore des éléments très disparates et une définition claire, synthétique, largement partagée, n'est pas encore de mise.

Une vision toutefois assez éclairante nous est inspirée d'auteurs finlandais2, dont une publication traite précisément de la compétence financière des consommateurs et d'autres concepts qui lui sont liés.

Leur approche considère la compétence financière des consommateurs comme une matière relative et évolutive par essence. Relative puisqu'elle dépend de la position du consommateur dans son cycle de vie, mais aussi de son niveau d'éducation, de revenu et des circonstances de vie qu'il rencontre. Relative également puisqu'elle dépend du contexte culturel dans lequel le consommateur s'insère.

Au sein des multiples compétences qu'un consommateur acquiert dans sa vie, la compétence financière, lorsqu'elle se traduit par une gestion adaptée, contribue à atteindre l'équilibre budgétaire et, par conséquent, participe à son bien-être général.

L'émancipation des consommateurs sur ces matières nécessite des formations et des informations sur mesure, ciblées, qui puissent atteindre la diversité croissante de leur mode de vie et de consommation et s'adapter à leur propre langage.

Quant aux contenus concernés, nous avons choisi de les classer en trois grandes familles :

  • a) le savoir : apprendre à compter, à gérer un budget, à lire un contrat de crédit,... ;
  • b) le savoir-faire : identifier le crédit ou le placement qui répond à son besoin, mesurer le risque, comparer des propositions d'assurances,... ;
  • c) le savoir-être : différencier désirs, envies et besoins, gérer les frustrations, apprendre à différer, à choisir, poser des choix éthiques et solidaires,...

Cette présentation illustre à quel point la matière est riche, touche une gamme très large de savoirs, dont la transmission nécessite une gamme tout aussi large de méthodes, d'outils et d'intervenants. 

Education financière : principes identifiés et commentaires 3

L'enquête menée dans le cadre du projet européen cité en introduction4 a permis d'identifier et de conforter un corpus commun de principes. Nous les passerons tour à tour en revue en les commentant. Lorsque cela est possible, nous citerons pour chacun d'eux des exemples concrets d'applications : 

Premier principe

Il est nécessaire de mesurer, sur une base régulière, le niveau de connaissance financière du public afin de réaliser un état des lieux préalable, d'évaluer l'efficacité des mesures prises et d'identifier de nouveaux besoins.

Commentaire
La construction d'une structure d'enquête devrait prendre en considération :

Application

  • l'âge du répondant et le niveau des savoirs et compétences qui lui sont nécessaires pour pouvoir agir en citoyen responsable et en consommateur averti;
  • la nécessité d'une mise en oeuvre régulière et, idéalement, sur un échantillon représentatif, afin de mesurer les progrès accomplis et d'adapter les programmes en conséquence.
  • Au Royaume-Uni, c'est la « Financial Services Authority » (FSA) qui mène des enquêtes régulières ayant pour objectif de mesurer le niveau de connaissance financière du public et d'évaluer l'efficacité des mesures prises. Cette institution, mandatée par le gouvernement, organise par ailleurs la coordination des parties prenantes1 (principe décrit au paragraphe suivant).

Deuxième principe

L'éducation financière du public est un objectif de long terme qui doit s'articuler tout au long de la vie des citoyens et s'adapter aux circonstances particulières des étapes traversées : l'enfance et la gestion des envies et des besoins ; l'adolescence et la construction de l'identité, les liens d'appartenance ; la vie de jeune adulte, le premier budget à gérer, la découverte de l'autonomie, le premier salaire ; la vie de couple, le premier enfant, la perte d'emploi,...

Commentaire

Si ce principe renforce le précédent quant à l'articulation des actions des divers acteurs impliqués, il sous-entend également qu'une didactique et une pédagogie particulière doivent être développées afin de rencontrer les besoins et s'adapter au public ciblé: on n'aborde pas la question des pulsions d'achat de la même manière que le choix d'un produit d'épargne pension ou encore la manière de retrouver l'équilibre financier lorsque l'on est surendetté ou précarisé.

Application

Des associations se sont spécialisées dans le développement de supports et d'actions pédagogiques qui ciblent des publics particuliers, soit en les contactant en direct, soit en formant les professionnels avec lesquels ces publics sont en contact (enfants, adolescents, travailleurs, personnes handicapées...)
Deux sites particulièrement bien fournis, néerlandais et suisse, exposent un nombre substantiel d'outils et de campagnes « prêt-à-l'emploi »:

Troisième principe

L'éducation financière doit construire sa propre didactique. L'objectif doit permettre de rencontrer le public et de s'adapter à ses spécificités.

Commentaire

Dans cette dimension, s'ajoute également la nécessité de construire un lexique et un vocabulaire qui permettent de rompre avec la complexité croissante des produits et services financiers.
En effet, cette complexité voue à l'échec une éducation financière qui chercherait à transmettre la totalité des termes techniques utilisés par les professionnels. Non seulement ce vocabulaire est en pleine expansion, mais sa complexité intrinsèque le rend à tout jamais incompréhensible pour une partie de la population. Dès lors, on peut envisager plus pragmatiquement de construire une présentation « simplifiée et standardisée » des produits financiers, qui comporterait une cotation de plusieurs critères, ce qui permettrait d'informer le consommateur sur leurs principales caractéristiques : durée, risque, rémunération/rendement, coût, responsabilités engagées et garanties mobilisées. Le consommateur ainsi informé sur les principaux éléments participant à sa décision verrait cette dernière non seulement facilitée, mais aussi basée sur des éléments objectifs et comparables (par critère, on pourrait utiliser un code couleur pour la cotation, comme ce qui est mis en oeuvre pour les consommations énergétiques des appareils électroménagers).

Une « présentation standardisée» des produits et services financiers aurait pour autres avantages :  

  • de simplifier le contenu des matières relatives à la compréhension et au choix de consommation de produits financiers ;
  • d'accroitre la durée de vie des contenus pédagogiques, car elle ne serait pas limitée à celle, parfois brève, des produits disponibles sur le marché;
  • de faciliter l'évaluation à moyen et long termes des connaissances du public.

Application

En tant que tel, il existe de nombreux projets pédagogiques parfaitement adaptés dans leur didactique et leur pédagogie aux publics ciblés; en revanche, nous n'avons pas identifié d'exemple de « présentation standardisée de produits financiers ».

Parmi les nombreux projets pédagogiques développés, citons notamment : 

En Belgique, pas de portail unique en tant que tel, mais de nombreuses initiatives développées : pour un premier recensement, voir l'Observatoire du Crédit et de l'Endettement qui travaille sur ces matières6.

Quatrième principe

L'éducation financière fait partie d'un tout, qui participe à la recherche de l'épanouissement des citoyens. Si une approche spécialisée et directe peut être appropriée dans certaines circonstances : conseils en placements, produits d'épargne,..., une approche globale est souvent nécessaire dans d'autres cas : surendettement, consommation compulsive,...

Commentaire

L'enquête menée au niveau européen auprès d'experts relève que tous considèrent comme fondamental l'intégration d'éléments d'éducation financière dans le cadre scolaire, dès le plus jeune âge.
Il est également utile d'imaginer la démultiplication de l'information à travers d'autres médias, notamment dans les activités de loisirs : jeux télévisés, débats, témoignages, forums Internet, presse,...
Cette multiplication aura comme autre effet positif de faciliter la prise de parole sur ces questions qui peuvent parfois se révéler particulièrement taboues et sources de souffrance (on pense en particulier aux situations de surendettement).

Application

Un projet d'envergure nationale dans les écoles secondaires est mis en place au Royaume-Uni, qui doit se déployer d'ici 2011. Intitulé « Learning Money Matters », il est mis en oeuvre par l'organisation Personal Finance Education Group (www.pfeg.org).

Cinquième principe

L'éducation financière n'a pas pour objectif de rendre économiquement rationnel le consommateur, dont les comportements répondent le plus souvent à d'autres types de considérations (sentiments, émotions, symboles,...). Face à des produits financiers tels que les crédits ou certains placements spéculatifs, il n'est d'ailleurs pas rare que ces considérations poussent un consommateur à agir dans une logique de très court terme, en sachant que le choix posé a toutes les chances d'aggraver sa situation à plus long terme. Face à cette réalité, force est de constater que seule la protection du consommateur et la consolidation des pratiques commerciales responsables peuvent apporter une réponse adéquate.

Commentaire

Les politiques en matière d'éducation financière ne peuvent avoir pour objectif d’autoriser la dérégulation du marché des produits et services financiers mais doivent, au contraire, viser une plus grande confiance des consommateurs actifs sur le marché, notamment par une plus grande symétrie d'information entre eux et les producteurs.

Application

Le cadre législatif belge en matière de protection du consommateur et de responsabilisation du prêteur dans la phase précontractuelle est relativement poussé au regard de la moyenne européenne (obligation d'information et de conseil des prêteurs, Centrale des Crédits aux Particuliers – fichiers négatif et positif, Fonds de Traitement du Surendettement, loi sur le crédit à la consommation et sur le règlement collectif de dettes, ..., pour n'en citer que quelques exemples).

Et la Belgique ?

Comme nous venons de l'indiquer, la Belgique dispose, d'une part, d'un cadre législatif performant et, d'autre part, de nombreuses structures qui agissent d'ores et déjà en matière d'éducation financière. Elles pourraient à terme agir de manière coordonnée et efficace dans la mise en place d'une stratégie globale d'éducation financière. Des syndicats aux prêteurs, en passant par des organismes d'éducation permanente ou les Centres de références7, les actions se multiplient et la prise de conscience du caractère inéluctable d'un tel développement fait son chemin.

Il est utile de garder à l'esprit que les motivations qui insufflent ces initiatives ne sont pas toutes de même nature. Si certaines ont clairement pour objectif une meilleure protection du consommateur et une plus grande symétrie d'information entre les consommateurs et les producteurs, d'autres visent très clairement la dérégulation progressive du marché des produits et services financiers. Ces derniers considèrent qu'un consommateur « informé » n'a plus à être considéré comme « l'usager faible » dans les relations contractuelles qu'il entretient avec son banquier ou son organisme de prêt. Cette approche pourrait, dans les pays où la protection du consommateur est élevée et efficace, à l'instar de la Belgique, se révéler dommageable pour le consommateur.

Conclusions

S'il fallait indiquer l'une ou l'autre priorité, avec comme prisme l'efficacité à court et moyen termes, nous pensons que l'ensemble des parties prenantes auraient tout à gagner à se rencontrer sur une base régulière dans le cadre d'une coordination. Sur ce point, il sera intéressant de suivre le développement que prendra l'étude mise en oeuvre par la CBFA.

Le second point serait sans doute de construire un outil efficace de mesure des connaissances du public (des publics), qui permettrait de définir les besoins les plus fondamentaux (quelles matières, concepts, savoirs sont les moins maîtrisés?) et d'identifier les publics les plus fragilisés afin de construire de manière coordonnée des stratégies d'action.

Le dernier point pourrait être l'élaboration d'un plan opérationnel d'éducation financière dans l'enseignement obligatoire, qui pourrait, le cas échéant, valoriser et utiliser au mieux les nombreux supports pédagogiques développés, en particulier par les Centres de références (mallette pédagogique, journée pédagogique,...). L'école semble en effet le meilleur moyen de toucher de manière large les enfants dès le plus jeune âge, ce qui, nous le rappelons ici, a été identifié par de nombreux professionnels comme un des principaux gages d'efficacité.

Olivier Jérusalmy, octobre 2007 

Références 

  • http://static.twoday.net/fes/files/FES_FinEd_Finland_lifecycleapproach.pdf
    Consumer Financial Capability – A life cycle approach 04.11.2005
    Johanna Leskinen, Ph.D.; Head of research, National Consumer Research Centre & Anu Raijas, Ph.D.; Senior Lecturer in Consumer Economics, University of Helsinki
  • http://fes.twoday.net
  • « Education Financière » ASB Schuldnerberatungen GmbH, publication issue du projet européen FES « Education financière et meilleur accès à des services financiers adéquats », 2005-2007
  • En cours de rédaction au moment de la réalisation de cette analyse : une fiche thématique réalisée par l'Observatoire du crédit et de l'Endettement : “Education financière : concept under construction”

1 Le projet intitulé « Better Access to Financial Services & Financial Education » a été cofinancé par la Commission européenne, DG Emploi, Affaires sociales et Egalité des chances. Le responsable du projet est ASB Schuldnerberatungen GmbH, acteur principal en Autriche de la médiation de dettes.

2 http://static.twoday.net/fes/files/FES_FinEd_Finland_lifecycleapproach.pdf, Consumer Financial Capability – A life cycle approach 04.11.2005, Johanna Leskinen, Ph.D.; Head of research, National Consumer Research Centre & Anu Raijas, Ph.D.; Senior Lecturer in Consumer Economics, University of Helsinki

4« Education Financière » ASB Schuldnerberatungen GmbH, publication issue du projet européen FES « Education financière et meilleur accès à des services financiers adéquats », 2005-2007, téléchargeable sur le site indiqué en note 2.

7 Les Centres de référence sont en charge, en Wallonie, d'un support en expertise pour les services de médiation de dettes le la province et de la prévention au surendettement. Trois Centres sont opérationnels à ce jour : Province du Luxembourg : Groupe Action Surendettement : gas.prevention@skynet.be, tél: 063.60 20 86 ; Province du Hainaut : Centre de Référence : centreref@hotmail.com, tél:064.84 22 91 ; Province de Liège (germanophone) : Verbraucherschutzzentrale asbl : viviane.leffin@vsz.be, tél: 087.59 18 50.

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Identification de bonnes pratiques européennes en matière d'éducation financière : quels enseignements pour les parties prenantes en Belgique ?

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2007
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10/2007
Mois d'édition
Octobre

Défaut de paiement : une obligation incomplète

Soumis par Anonyme le

Les crédits et défauts enregistrés à la Centrale des Crédits aux Particuliers1

La Centrale enregistre, conformément aux dispositions légales et réglementaires, les informations concernant tous les crédits à la consommation et les crédits hypothécaires, conclus par des personnes physiques à des fins privées ainsi que les éventuels défauts de paiementrésultant de ces crédits.

En 1993, suite à la loi du 12 juin 1991 sur le crédit à la consommation, le champ d'application de l'enregistrement "négatif" a été élargi à toutes les formes de crédits prévues dans cette loi, c'est-à-dire la vente à tempérament, le prêt à tempérament, le crédit-bail et l'ouverture de crédit. L'enregistrement des défauts de paiement relatifs à des crédits hypothécaires a également débuté cette même année suite à la nouvelle loi sur le crédit hypothécaire.

Ne sont toutefois pas enregistrés, les crédits à la consommation :

  • dont le montant initial est inférieur à 200 euros;
  • constatés par un acte authentique et dont le montant initial est supérieur à 20.000 euros;
  • dont le montant initial doit être remboursé par le débiteur dans un délai ne dépassant pas trois mois, pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une ouverture de crédit;
  • dont le montant octroyé est inférieur à 1.250 euros et est remboursable dans un délai de trois mois, en cas d'ouverture de crédit.

Les critères provoquant l'enregistrement des défauts de paiement découlant des contrats de crédit sont les suivants :

  • a) pour les ventes à tempérament, les prêts à tempérament et les crédits-bails:
    • lorsque trois termes n'ont pas été payés ou l'ont été incomplètement, ou
    • lorsqu'un terme échu n'a pas été payé ou l'a été incomplètement durant trois mois, ou
    • lorsque les montants de termes restant encore à échoir sont devenus immédiatement exigibles;
  • b) pour les ouvertures de crédit :
    • lorsqu'une situation débitrice non autorisée n'est pas apurée dans les trois mois à partir de la date à laquelle le prêteur l'a exigé par écrit;
  • c) pour les crédits hypothécaires :
    • lorsqu'une somme due n'a pas été payée ou l'a été incomplètement trois mois après la date de son échéance, ou
    • lorsqu'une somme due n'a pas été payée ou l'a été incomplètement un mois après une mise en demeure par lettre recommandée.

Les données fournies par les prêteurs relatives au crédit sont les suivantes :

  • a) concernant le débiteur ainsi que le codébiteur éventuel : le numéro d'identification du Registre national des personnes physiques, le nom, le premier prénom, la date de naissance, le sexe et l'adresse;
  • b) concernant le contrat de crédit : le type de crédit, le numéro du contrat, et
    • pour les ventes à tempérament, les prêts à tempérament et les crédits-bails : le montant total à rembourser, le montant du premier terme, le nombre de termes, la périodicité initiale des termes, la date du premier terme et la date du dernier terme ;
    • pour les ouvertures de crédit: le montant du crédit, la date de conclusion du contrat et, le cas échéant, la date de fin du contrat ;
    • pour les crédits hypothécaires : le montant emprunté en capital, le montant de la première échéance, le nombre d'échéances, la périodicité initiale des échéances, la date de la première échéance et la date de la dernière échéance;
  • c) concernant le défaut de paiement : la date et le montant de l'arriéré ou, en cas d'exigibilité, le montant et la date du solde débiteur restant dû.

L'objectif d'un tel enregistrement

L'enregistrement des données en matière de défaut de paiement des crédits à la consommation et des crédits hypothécaires au sein de la Centrale des Crédits aux Particuliers a pour objectif d'accroitre de manière significative la prévention du surendettement des particuliers.

En effet, ce fichier doit être obligatoirement consulté par les prêteurs ou leurs représentants dans la phase précontractuelle. Cela signifie que ces professionnels disposent d'une cartographie des crédits en cours d'un candidat emprunteur, qu'ils soient ou non en défaut de paiement. Chaque consultation génère un code qui doit être mentionné sur le contrat de crédit avec la date de cette dernière. Le contrat doit être émis au plus tard dans les 20 jours qui suivent la consultation, sous peine de devoir réaliser une nouvelle consultation.

Cette information est utile au prêteur dans la mesure où l'octroi d'un crédit repose sur une analyse de risque qui comporte généralement un volet « fiabilité » et un volet « solvabilité ». La place que l'information contenue dans la Centrale prendra in fine dans la décision est quant à elle variable en fonction des politiques commerciales et des politiques risques des prêteurs. A la croisée des chemins, le résultat du fichage permettra une connaissance du nombre d'engagements en cours2 et permettra dans certains cas de vérifier les propos des clients ou d'entamer une discussion.

A un autre niveau, il faut également considérer la consultation obligatoire de la Centrale des Crédits comme le premier pas tangible en direction d'une objectivation des obligations du prêteur dans la phase précontractuelle, en ce qui touche l'évaluation de la solvabilité du client.

Un fichier perfectible

Ce fichier correspond, à n'en pas douter, à une très belle avancée en matière de prévention du surendettement. Toutefois, nous souhaitons souligner dans cette analyse deux éléments particuliers qui nous semblent handicaper cette belle mécanique.

A) Un fichage incomplet qui souligne le paradoxe des crédits non régis

  • Les crédits non régis : il s'agit des crédits à la consommation destinés aux particuliers dont les montants (inférieurs à 200 € ou 1.250 € selon le type) ou les durées (inférieures à 3 mois) les font sortir du cadre légal organisant la protection du consommateur (loi de 1991) et donc de leur fichage corrélatif, qu'il soit positif ou négatif.
  • Ne sont pas non plus régis par cette loi les dépassements non autorisés en compte courant ni les contrats de leasing conclus par des personnes physiques, alors qu'ils représentent également des engagements financiers dont la présence impacte directement la solvabilité des clients. La connaissance de défaut de remboursement pour ces services est tout aussi pertinente dans l'analyse du risque que les défauts soumis à l'enregistrement.

Il est toutefois paradoxal que les défauts relatifs à ces services financiers non régis par la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers soient tout de même centralisés à la Banque Nationale de Belgique, dans un fichier appelé « enregistrement des défauts non régis », pour les mêmes raisons « préventives » que celles qui animent les autres enregistrements. Toutefois, seuls les participants à ce fichier particulier, c'est-à-dire les prêteurs qui ont signé une convention avec la Banque Nationale de Belgique et qui alimentent ce fichier, ont accès aux données.

Nous sommes d'avis que l'ensemble des services financiers (régis et non régis) fassent l'objet d'un même traitement au sein de la CCP : qu'ils fassent tous l'objet d'un enregistrement « positif » et qu'ils soient consultables par les mêmes acteurs (les professionnels ainsi que les particuliers pour leur propre situation) car cette information participe à une meilleure estimation de la fiabilité et de la solvabilité des candidats emprunteurs. En outre, si la collecte de ce type de données est généralisée à l'ensemble des acteurs, il n'y a plus de raison d'en réserver l'accès aux seuls pourvoyeurs.

B) La difficile interprétation des défauts de paiement

Parmi les analyses possibles des données collectées dans la Centrale des Crédits, il est légitime d'identifier, parmi les différents types de crédits, ceux qui provoquent proportionnellement plus de défaut de paiement, et le cas échéant, si des différences s'observent entre les différentes catégories de prêteurs recensées.

Cette analyse est toutefois rendue difficile, voire impossible, pour les raisons suivantes :

a) la règle d'enregistrement des défauts varie en fonction des types de crédits (cf. infra), et elle ne nous paraît pas adaptée aux ouvertures de crédit (OC). D'une part, il y a un effet de stock : puisque les OC sont des crédits à durée indéterminée, même si elles sont remboursées et inutilisées, elles restent enregistrées jusqu'à la résiliation du contrat par le consommateur – cet effet de stock est aggravé par le fait que de nombreuses OC sont accordées sans jamais être utilisées, parfois simplement d'ailleurs car le client n'a pas pris conscience que la carte de paiement qu'il s'est vu proposer est en réalité une OC. D'autre part, les OC sont des crédits dont les modalités sont très variables : d'un contrat à un autre, les règles régissant les droits de tirage comme les modalités de remboursement sont très variables. Ces dernières peuvent prévoir soit un remboursement en capital à terme et le paiement régulier d'intérêts, soit des remboursements échelonnés composés de capital et d'intérêts. Dans ce dernier cas, le montant minimum proposé de remboursement équivaut généralement au montant des intérêts dus augmentés d'une part de capital, qui peut parfois être faible.

Pour ces raisons, les comparaisons des taux de défaut de paiement par type de crédit sont fallacieuses et souvent utilisées, d'ailleurs, par les professionnels du secteur pour minimiser les problèmes générés par les OC, puisqu'ils sont amplement dilués dans ces effets de stock.

Parmi les pistes envisageables, il pourrait s'avérer utile de :

  • mettre fin au caractère « indéterminé » des durées des ouvertures de crédit, cela permettrait de « nettoyer » le fichier régulièrement;
  • prévoir un niveau de remboursement mensuel minimal en deçà duquel le défaut de paiement devrait être enregistré de manière systématique ;
  • prévoir annuellement une mise à jour des encours - et pouvoir ainsi identifier les OC dormantes à ce moment-là des autres. Cette mesure serait également utile pour les autres types de crédit, puisque cela permettrait d'appréhender de manière plus réaliste non seulement « les types de crédits souscrits », mais également l'encours de ces crédits.

A quand un « scoring » des prêteurs ?

A ce jour, les informations collectées par la Centrale des Crédits aux Particuliers servent aux professionnels dans la phase précontractuelle de l'octroi d'un crédit, et plus précisément dans leur analyse risque.

Un autre usage utile des données collectées pourrait être d'identifier les professionnels et les crédits qui provoquent le moins de défaut de paiement. D'un scoring exclusivement orienté « client », on passerait ainsi à une plus grande symétrie d'information en proposant également un scoring des « prêteurs ».

Olivier Jérusalmy, octobre 2007

Références

  • Working paper document n°78 « Crédits aux particuliers - Analyse des données de la Centrale des Crédits aux Particuliers », (janvier 2006), Helga De Doncker, Banque Nationale de Belgique

1 Banque Nationale de Belgique, Statistiques, Centrale des crédits aux particuliers, 2006

2 A noter que les données mises à disposition ne traitent pas des encours des crédits recensés, puisque ce sont les montants octroyés à la signature du contrat qui sont repris dans la Centrale, et qu'il n'y a pas d'actualisation prévue des montants.

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La loi de 2003 relative à la Centrale des Crédits aux Particuliers (CCP) organise l'enregistrement de tous les crédits à la consommation et crédits hypothécaires ainsi que les arriérés de paiement : les modalités d'enregistrement ne permettent pas une analyse des dangers respectifs des différents types de crédit.

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L'économie alternative, la tête hors de la crise

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revue n°265

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Baromètre de la pauvreté : entre grandes pluies et tempête

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Revue n°266

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Janvier

Le développement durable appliqué au secteur bancaire.

Soumis par Anonyme le

Notion de responsabilité sociétale des entreprises 

Avec l’évolution des mentalités sur la croissance économique mondiale, un acteur clef commence à se rendre compte de son rôle à jouer. L’entreprise, moteur de l’économie, influence par son comportement toute possibilité de démarche intégrée de développement durable.

Telle que définie par le Livre vert « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises » de la Commission européenne, la RSE est : « l'intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes » [2]. Autrement dit, au-delà de sa raison d’être — faire des bénéfices — l’entreprise génère des impacts sur l’environnement comme sur la société qui l’entoure et doit donc en assumer la responsabilité. En termes économiques, on peut le comprendre comme des externalités, négatives ou positives, d’une entreprise sur son entourage humain et naturel.

Archie Carroll — chercheur spécialiste de la RSE à l’Université de Géorgie — attribue à l’économiste américain Howard Bowen la paternité du concept « moderne » de RSE en management en faisant référence à son ouvrage de 1953 intitulé Social Responsibilities of the Businessman[3]. On estime que c’est avec la conscientisation des opérateurs économiques dans le courant des années 1980 sous l’effet de la mondialisation et de l’accroissement des échanges, mais aussi et surtout sous l’effet de la pression des militants et de l’opinion publique, que les firmes ont commencé à reconnaître l’importance de cette notion. La démarche est motivée, selon les entreprises, par une réelle volonté d’engagement ou par le simple souci d’améliorer l’image de marque. Éric Persais — chercheur à l’Université de Poitiers —, auteur sur le sujet, le résume ainsi : « On peut aujourd’hui admettre que la plupart des firmes inscrivent (à des degrés divers) leur action dans le cadre du développement durable défini dans le Rapport Brundtland ». Il invite à la réflexion sur les deux principes de la responsabilité sociétale selon lui : « En tant qu’institution, l’entreprise reconnaît sa capacité à agir et admet que les conséquences de ses actes dépassent largement la sphère de l’économique. Elle se reconnaît donc des obligations vis-à-vis d’un ensemble de parties prenantes – ces obligations, dépassant le stade des obligations légales ou fiduciaires, concernent les domaines de l’éthique et de la citoyenneté »[4].

Si éthique et citoyenneté sont éloignées de la sémantique entrepreneuriale, la mise à l’agenda des enjeux de raréfaction des ressources et du changement climatique semble engendrer un changement de mentalité. Changement qui facilite la mise en place et le respect de nouveaux mécanismes juridiques, tels que le principe de pollueur-payeur, le principe de prévention ou même le principe de précaution. D’autant que certaines entreprises adoptent une démarche proactive, en faisant évoluer leur manière de travailler, autrement dit leur « gouvernance ». Elles rendent des comptes dans divers domaines, tout en reconnaissant et en impliquant leurs parties prenantes.

Comme d’autres opérateurs économiques, les institutions bancaires sont sujettes à ce processus. Elles peuvent rationaliser leur consommation énergétique, réduire leur production de déchets et intensifier leur recyclage de manière à réduire leurs impacts environnementaux. Tout comme il est important qu’elles veillent aux conditions sociales de leurs salariés, sur le plan, notamment, de l’égalité homme-femme, du dialogue social ou de la formation[5].

Toutefois, les banques se singularisent, dans le monde de l’entreprise, du fait qu’elles sont le centre nerveux des flux financiers. Cette position centrale leur confère une puissance d’influence sans pareil. En effet, l’institution bancaire, en tant que bailleur de fonds sur de multiples projets, peut engendrer des effets indirects importants. Sa politique RSE sur les aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance devient alors décisive pour mesurer l’ampleur de son impact sur son entourage. Voyons brièvement le cheminement éthique du secteur bancaire.

Bref historique de l’éthique bancaire

L’éthique bancaire ou l’éthique de l’argent est une idée plutôt ancienne et qui paraît être d’origine religieuse. Elle proviendrait de l’époque où les règles sociales étaient principalement dictées par les dieux[6]. En réalité, les trois grandes religions monothéistes prônent toutes une certaine éthique dans le rapport à l’argent. Par exemple, comme le précise le journaliste économique au quotidien Le Soir, Bernard Demonty[7], dès 640, la morale islamique ne permettait d’investir que dans les activités respectant la « Charî’a ». Ces investissements doivent permettre des activités de long terme en faveur du bien-être commun, avec pour objectif de lutter contre la pauvreté, la faim et l’analphabétisme.

Aux États-Unis, on retrouve ces principes dans la pensée capitaliste, après le krach boursier de 1929 et la crise de confiance qui secoue le monde de la finance. Le président Roosevelt déclare à l’époque : « On savait déjà que la poursuite aveugle du profit donnait mauvaise morale. Nous savons maintenant que cela donne aussi une mauvaise économie »[8]. De ces années folles naît un mouvement, soucieux de créer un système bancaire avec des valeurs plus éthiques. Ce sont en particulier les congrégations religieuses protestantes qui se joignent à cette impulsion et créent des fonds qui évitent les actions de firmes touchant aux domaines de l’alcool, du jeu de hasard, du tabac et de l’armement. Ces actions sont déclarées comme des « actions du péché ».

Dans la deuxième moitié du XXe siècle, période de la mondialisation des échanges par excellence, deux autres évènements favorisent l’apparition de nouveaux épargnants éthiques, tendant à renforcer l’implication, dans le secteur, d’acteurs non exclusivement religieux. Tout d’abord, dans les années 1960, des étudiants liés au mouvement pacifiste se sensibilisent à la question du devenir de leurs économies pendant la guerre au Vietnam. Puis, dans le courant de la décennie suivante, la réaction populaire contre le régime d’apartheid en Afrique du Sud sensibilise l’opinion publique sur un refus d’investir dans les fonds soutenant ce régime. Les fonds éthiques nés aux États-Unis traversent l’Atlantique et s’installent au Royaume-Uni.

En Belgique, le mouvement se déploie dans les années 1980, sous le coup du mouvement d’opinion contre l’apartheid. Naît alors la coopérative Crédal[9]. Initiative parmi d’autres, elle regroupe des « coopérateurs » qui, par leur épargne, financent des projets à vocation sociale[10]. Lentement, les consciences s’éveillent et les clients des institutions bancaires réalisent que placer de l’argent n’est pas un geste neutre. Cette dynamique ne va cesser de se renforcer dans le courant des années 1990, et une autre dimension est apportée à l’investissement éthique. Il ne s’agit plus simplement d’exclure des entreprises en fonction de leurs activités, mais bien de mieux décortiquer leurs modes de fonctionnement afin d’encourager les meilleures de chacun des secteurs. Les firmes sont comparées entre elles sur différents indicateurs – système de « best-in-class[11] » —, puis sélectionnées en vertu de leur engagement envers la société.

On constate donc que, si à l’origine l’investissement éthique était une manière de boycotter certaines activités, actuellement il s’agit plus d’un instrument pour tendre vers un développement durable de la société dans son ensemble. Cependant, parallèlement aux efforts des institutions bancaires, la financiarisation de l’économie a des effets structurels puissants. Privilégiant la valeur du capital plutôt que la valeur du travail, elle sape l’économie réelle ; à l’image de la crise financière de l’automne 2008 qui a fait entrer l’économie mondiale dans une des crises les plus importantes de son histoire, obligeant les gouvernements des pays capitalistes les plus avancés et les institutions internationales à repenser la structure du système financier mondial.

« Un mal pour un bien ? » : la crise comme opportunité de changement vers un développement économique plus durable ?

Depuis le début de la crise des « subprimes »[12] un échec de la supervision, un échec de la régulation, un échec de la croyance que le marché peut se régler tout seul »[13]. L’univers bancaire est mis en accusation. Le libre marché n’a pas su s’autoréguler, et les autorités publiques sont contraintes de garantir les actifs, voire même de recapitaliser des pans entiers du secteur bancaire traditionnel. Comme l’explique sans détour Dominique Strauss-Kahn, président du Fonds monétaire international, la crise montre : «

Avoir recours à l’argent du contribuable pour renflouer un secteur entier de l’économie, qui plus est, supposément dédié au financement de l’ensemble du système, faisant de lui le centre de la logique capitalistique, pose des questions de justice sociale. Des questionnements légitimes apparaissent autour de la répartition et de l’utilisation des richesses et, plus fondamentalement peut-être, autour de la viabilité du système dans son ensemble. Ainsi, un meilleur contrôle des entités bancaires pour assurer une plus grande responsabilité de ce secteur semble d’une urgente nécessité.

 

Effectivement, si, comme on l’a vu, la RSE est apparue dans le monde académique voici une cinquantaine d’années, et si elle semble avoir été revendiquée et appliquée par les grandes institutions bancaires depuis environ une décennie, alors comment comprendre qu’aujourd’hui le système dans son ensemble faillisse? Au risque d’être simpliste, on pourrait répondre que le développement durable prôné par la RSE des institutions bancaires n’a été, en grande partie, que verdurisation de leurs comportements — green washing —. La « main invisible » du marché n’ayant pas rempli son devoir, se pose donc avec acuité la question de la régulation publique.

En attendant, la tempête financière est en train de s’abattre sur l’économie classique. Le problème est que, même si les entreprises — cotées en Bourse et se retrouvant donc dans des portefeuilles d’actions – souhaitent agir en respectant l’environnemental et le social, elles risquent de se retrouver bloquées par les exigences de rentabilité à court terme des actionnaires. Ces dernières années ont vu des retours sur investissements (ROI) mirobolants, frôlant les 20-30 %, basés sur des spéculations dépendant des humeurs de la Bourse. Ceci a eu le double effet de faire croire que de tels rendements sont possibles sans effets de boomerang et de discréditer les investissements à long terme ancrés dans l’économie réelle, mais aux rendements « réels » et plus durables.

Il est clair que pour obtenir des ROI si élevés certaines externalités négatives doivent être imputées à d’autres acteurs que l’entreprise en question. Par exemple, l’enjeu de la responsabilité sociétale menace d’être rapidement « oublié ». On en revient à dire à nouveau que le régulateur devrait intervenir afin de mieux valoriser les efforts d’amélioration des entreprises en termes de gestion sociale et environnementale.

Dans ces conditions, on peut conclure que cette crise, dont l’ampleur ne cesse de grandir, aura peut-être des aspects positifs tels que la relégitimation de la régulation publique. Reste que cette régulation à venir devra être suffisamment empreinte des préceptes du développement durable. Dès à présent, a minima, elle permet d’ouvrir le débat quant à la transparence et à la politique d’investissement des banques. Une démarche qui pourrait certainement être facilitée par une consultation des associations : Netwerk Vlaanderen, le Réseau Financement Alternatif, ainsi que les agences de rating extra-financier, comme Vigéo ou EIRIS – acteurs qui prônent une conciliation de l’éthique et de la finance, et l’importance de la solidarité et de l’éthique dans le monde financier.

 

Annika Cayrol, novembre 2008

 


 


 

[1] Pour plus d’informations, lire l’analyse de RADERMACHER, Françoise, « Éthique et solidarité : jusqu’où les institutions financières sont-elles prêtes à s’engager ? », disponible sur Internet : https://www.financite.be/publications/mes-articles/ethique-et-solidarite-jusqu-ou-les-institutions-financieres-sont-elles-pretes-a-s-engager,fr,209.html, novembre 2005

[2] Livre vert publié par la Commission en 2001 : « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises », COM(2001)366 Final. Disponible sur Internet : http://ec.europa.eu/enterprise/csr/index_fr.htm

[3] Cité par GOND Jean-Pascal,Université Nottingham,dans « Les fondements théoriques de la Responsabilité Sociale des Entreprises », disponible sur Internet : www.seminar.hec.ulg.ac.be/docs/Sem06.03.10_jpgond-presentation.ppt

[4] PERSAIS Éric, « Entreprise et développement durable : vers une relation symbiotique ? » sous la direction de MATAGNE Patrick, Les enjeux du développement durable, Paris, éd. L’Harmattan, 2005 (p.97).

[5] Par ailleurs, pour mesurer et comparer ces actions, il existe des indicateurs mis en avant par l’organisme des Global Reporting Initiatives (entité qui a pour mission de développer des directives applicables globalement pour rendre compte des performances économiques, environnementales, et sociales). Ces indicateurs sont exposés en général dans les rapports annuels et montrent, entre autres, les efforts internes consacrés au développement durable par l’entreprise. Voir site http://www.globalreporting.org/Home

[6] Lire à ce sujet, BAYOT Bernard, « L’investissement socialement responsable et la religion », janvier 2005, disponible sur Internet : https://www.financite.be/publications/mes-articles/l-investissement-socialement-responsable-et-la-religion,fr,188.html

[7] DEMONTY Bernard, Banquier, où places-tu mes valeurs?, Bruxelles, éd. Luc Pire, 1999

[8] Ibidem.

[9] Pour plus d’informations, voir le site Internet de CREDAL : http://www.credal.be/credal/p11_credit_alternatif.html

[10] Historique basé en partie sur « Ethisch beleggen, naar een doorbraak? », Tim BENIJTS, Gerrit DE VYLDER et Wim LAGAE, éd. Garant, 1998 traduit et résumé dans « Banquier, où places-tu mes valeurs ? ».

[11] « Méthode de sélection qui consiste à ne retenir, dans le portefeuille d'investissement d'un produit financier éthique et solidaire et pour un secteur donné, que les entreprises les plus avancées sur le plan de la responsabilité sociale. », disponible sur Internet : https://www.financite.be/publications/lexique,fr,218.html

[12] Les « surprimes » sont des crédits hypothécaires à taux variables accordés à une clientèle peu solvable (aux États-Unis). Traduction française du terme « surprime » : prêt à haut risque. Pour plus d’information, lire BAYOT, Bernard, « Le profit peut nuire gravement à votre économie ! », octobre 2008, disponible sur Internet : https://www.financite.be/publications/mes-articles/le-profit-peut-nuire-gravement-a-votre-economie,fr,402.html

[13] Le Point.fr, Crise financière : pour Strauss-Kahn, « il faut changer les règles du jeu », 10/10/2008, http://www.lepoint.fr/actualites-economie/crise-financiere-pour-strauss-kahn-il-faut-changer-les-regles-du/916/0/281034

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Le développement durable adapté aux entreprises peut se comprendre comme la responsabilité sociétale des entreprises[1](RSE). Les banques s'y intéressent d'autant plus que le contexte les y incite. Cet article revient sur la notion de RSE et propose un bref historique de l'éthique bancaire afin de mettre en perspective les transformations tant attendues d'un secteur au centre de tous les questionnements...

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Novembre

Les produits d'épargne solidaires auront bientôt leur label international

Soumis par Anonyme le

Etre épargnant solidaire, c’est quoi ?

Qu’il dispose de quelques euros en fin de mois ou qu’il hérite d’une somme importante à investir, l’épargnant se trouve face à une kyrielle de possibilités. Mais toutes ne se valent pas. D’un point de vue financier, les rendements sont, certes, variables. Mais surtout, les produits financiers diffèrent en termes de finalité de l’argent placé.

En effet, l’épargnant n’en est pas toujours conscient mais chaque euro placé permet à la banque de financer une entreprise ou un projet. Entre l’octroi d’un crédit pour la production d’armes ou pour le développement d’une ferme biologique, il y a un monde de différence.

C’est ici qu’intervient la notion de solidarité, laquelle se définit selon les six principes suivants1 :

  1. Egalité : satisfaire de manière équilibrée les intérêts respectifs de toutes les parties prenantes intéressées par les activités de l’entreprise ou de l’organisation ;
  2. Emploi : créer des emplois stables et favoriser l’accès à l’emploi des personnes défavorisées ou peu qualifiées ;
  3. Environnement : favoriser les actions, produits et méthodes de production qui ne nuisent pas à l’environnement à court et à long termes ;
  4. Coopération : favoriser la coopération et éviter la compétition au sein et à l’extérieur de l’organisation ;
  5. Non-profit : les initiatives solidaires n’ont pas pour finalité l’obtention d’un bénéfice, mais la promotion de l’individu et de la société ; ce qui n’exclut pas, lorsque c’est possible, de générer un profit. Les bénéfices éventuels ne se répartissent pas au profit d’un individu mais sont retournés à des projets solidaires ;
  6. Concertation : les initiatives solidaires s’intègrent pleinement dans le contexte social dans lequel elles se développent, ce qui exige la coopération avec d’autres organisations et l’implication dans des réseaux, afin de générer un modèle socio-économique alternatif.

L’individu qui se lance dans l’épargne solidaire pose, dès lors, un acte engagé au même titre que le consommateur qui achète des produits du commerce équitable, par exemple.

Un produit d’épargne solidaire, c’est quoi ?

Les produits d’épargne solidaires se déclinent sous les mêmes formes que les produits d’épargne traditionnels. Selon ses critères de risque, de liquidité et de rendement, l’épargnant peut choisir de placer son argent dans des comptes d’épargne, comptes à terme, SICAV et fonds communs de placement, assurances vie ou encore actions et parts sociales d’organisations solidaires.

Mais, la finalité des produits d’épargne solidaires est différente : ils favorisent la cohésion sociale par le financement de projets et d’entreprises qui présentent une valeur ajoutée pour l’homme, la culture et/ou l’environnement.

Pour ce faire, ils intègrent en leur sein un mécanisme de solidarité sur le capital de l’épargne et/ou sur les revenus de l’épargne :

  1. L’investissement solidaire (solidarité sur le capital de l’épargne) : il consiste à investir l’épargne dans des associations ou des projets à plus-values sociale, culturelle ou environnementale.
  2. Le placement avec partage solidaire (solidarité sur les revenus de l’épargne) : il consiste à partager tout ou partie des bénéfices dégagés par le placement de l’épargne au profit d’associations ou de projets à plus-values sociale, culturelle ou environnementale.

L’épargnant s’adressera donc aux institutions financières engagées dans une démarche solidaire, qu’il s’agisse de financiers alternatifs (coopératives telles que Crédal et Hefboom en Belgique), de banques éthiques ou de banques traditionnelles.

Un label international : pourquoi ?

Le marché de l’épargne solidaire se développe : l’encours croît chaque année et le nombre de produits solidaires augmente constamment. Par ailleurs, la France, la Belgique, l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas, l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Danemark, la Suède et la Norvège proposent ce type de produits.

Certains promoteurs peuvent être tentés de pratiquer une « solidarité de façade » en vue de redorer leur image de marque. Dans ce cas, ils proposent à leurs clients des produits dont les critères de solidarité sont réduits à leur plus simple expression.

Il importe donc de distinguer les produits d’épargne solidaires des produits d’épargne classiques et des produits qui n’ont de solidaire que le nom.

C’est pourquoi, trois organisations de promotion de la finance éthique et solidaire se sont regroupées pour élaborer un label international des produits d’épargne solidaires : Finansol en France, le Réseau Financement Alternatif en Belgique ainsi que la Febea (Fédération européenne des banques éthiques et alternatives).

Le nouveau label consacre toute forme d’épargne et d’investissement socialement responsables qui vise à favoriser la cohésion sociale par le financement, grâce à un mécanisme de solidarité, d’activités de l’économie sociale et ce, dans une transparence totale à l’égard des souscripteurs.

Ce nouveau label ambitionne de renforcer la lisibilité et la visibilité des produits d’épargne solidaire : les critères de distinction des produits d'épargne solidaire permettent à l’épargnant d’identifier rapidement les produits solidaires parmi l’ensemble des produits financiers existants et donc de choisir en connaissance de cause.

Il vise également à accroître la crédibilité du secteur : le développement de la commercialisation de produits labellisés par des grands réseaux bancaires institutionnels ajoute au sérieux du secteur.

Un label : comment ?

Un label des produits d’épargne solidaires existe déjà en France depuis une dizaine d’années. Fortes de cette expérience, les trois organisations instigatrices du label international ont voulu tenir compte de la réalité européenne et des marchés de plus en plus ouverts. Elles ont donc élaboré des critères suffisamment communs pour réunir les produits d’épargne solidaire, quel que soit leur pays d’origine, d’une part, et suffisamment sévères pour distinguer les produits d’épargne réellement solidaires, d’autre part.

Ainsi, pour obtenir le label, un produit financier doit impérativement respecter les conditions suivantes :

  1. Le produit financier doit être un produit d’épargne, d’investissement ou de dépôt : il doit donc s’agir d’un compte courant, d’un compte d’épargne, d’un compte à terme, d’un fonds d’investissement, d’un produit d’assurance, de participations dans du capital et obligations. Les cartes de crédit sont exclues du champ de labellisation. En effet, bien qu’elles permettent le plus souvent une position créditrice de la part du client et malgré que certaines proposent un mécanisme de solidarité en faveur d’associations de protection de l’environnement ou des droits de l’homme, notamment, ces produits financiers ne constituent pas un produit d’épargne à proprement parler. Si elles offrent une facilité de paiement à leur détenteur, elles sont aussi un outil d’endettement, voire de surendettement pour les individus.
  2. Le produit d’épargne, d’investissement ou de dépôt doit viser à favoriser la cohésion sociale par le financement d’activités de l’économie sociale (action sociale, développement local de territoires marginalisés, défense des droits de l’homme, culture, éducation, environnement, coopération Nord-Sud).
  3. Le produit d’épargne, d’investissement ou de dépôt doit prévoir des mécanismes de solidarité, sur le capital et/ou sur les revenus : comme mentionné plus haut, soit l’épargne est investie dans des associations ou des projets à plus-value sociale, culturelle ou environnementale (solidarité sur le capital), soit les bénéfices dégagés par le placement de l’épargne sont donnés, en tout ou en partie, à une association ou à un projet à plus-value sociale, culturelle ou environnementale (solidarité sur le capital).
  4. Le produit d’épargne, d’investissement ou de dépôt doit s’inscrire dans une démarche socialement responsable : l’épargne qui n’est pas directement utilisée pour le financement des activités de l’économie sociale doit être placée, particulièrement pour les produits qui font de l’investissement, en prenant en considération des préoccupations sociales, éthiques et environnementales, en plus des critères financiers.
  5. La gestion du produit d’épargne, d’investissement ou de dépôt doit être totalement transparente à l’égard des souscripteurs : l’information transmise à l’épargnant doit, notamment, être simple, claire, exhaustive, disponible à partir d’une source écrite et favoriser la traçabilité de l’emploi de l’épargne.
  6. Le produit d’épargne, d’investissement ou du dépôt doit proposer des conditions financières en phase avec les pratiques du marché : les conditions financières, notamment, doivent être équitables entre les différentes parties prenantes (épargnant, promoteur, bénéficiaires du financement).

Le label international des produits d’épargne solidaires distingue les produits qui répondent à tous ces critères. Il garantit donc le sérieux des produits labellisés.

Pratiquement…

Les comptes d’épargne, Sicav et autres assurances vie solidaires qui auront obtenu le label afficheront ce dernier sur tous les documents mentionnant le produit. L’épargnant pourra donc aisément s’informer sur l’éventail de produits d’épargne solidaires proposés par les différents acteurs financiers.

En outre, il pourra comparer tous les produits existants sur le site Internet www.fineurosol.org. Ce site, dédié à la finance solidaire, explique de manière détaillée les critères et la procédure de labellisation et dispose, surtout, d’un tableau reprenant tous les produits d’épargne labellisés. L’épargnant pourra y sélectionner les produits selon leur pays d’origine, le type de produit (compte à terme, parts sociales, etc.), le mécanisme de solidarité (sur le capital ou sur le revenu de l’épargne), le gestionnaire de produit, etc.

Pour cela, il faudra patienter quelques mois encore, le temps que les premières demandes de labellisation soient introduites, analysées et, le cas échéant, acceptées.

En pratique, l’épargnant pourra s’appuyer sur ce nouvel outil dans la seconde moitié de 2007.

Françoise Radermacher - Novembre 2006

1 Principes de la Charte pour un monde solidaire, établie par des réseaux de l’économie solidaire au sein de l’Union européenne

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Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)
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Comme le consommateur se fie au label bio ou au label du commerce équitable, l'épargnant pourra s'appuyer sur le label international des produits d'épargne solidaires pour placer son argent en toute connaissance de cause.

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2006
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Pour apporter une réponse au surendettement, l'Europe peut-elle importer le modèle américain du Community Reinvestment Act?

Soumis par Anonyme le

Les exclus du système socio-économique sont nombreux au sein de l’Union européenne : chômeurs, femmes, immigrés, gens du voyage, jeunes universitaires sans emploi, etc. Pour répondre à des besoins de première nécessité tels que l’achat de mobilier, les réparations des installations sanitaires, des soins dentaires, l’achat de lunettes, ou encore l’obtention du permis de conduire, ces personnes doivent faire appel au crédit.

Or, pour octroyer ou non des crédits, les banques se basent sur un credit scoring, tenant compte de la situation financière du demandeur. Les personnes les plus démunies se voient, dès lors, le plus souvent refuser l’accès au crédit dans les banques traditionnelles. Lesquelles prétendent, ce faisant, agir de façon responsable en évitant à leurs clients la spirale du surendettement. Voire. Elles agissent plus certainement dans l’intérêt de leurs résultats, en se concentrant sur les produits les plus rentables. Quant aux emprunteurs potentiels, ils sont généralement contraints de frapper à la porte des prêteurs sur gage, augmentant alors, de facto, le risque de surendettement.

Pour lutter contre ce problème, à l’instar de ce qui se fait aux Etats-Unis depuis près de 30 ans, les banques européennes pourraient être appelées à s’engager dans un marché qu’elles ne connaissent pas encore : celui des personnes à revenu faible ou modéré.

Community Reinvestment Act : de quoi s’agit-il ?

Aux Etats-Unis, les communautés noires ou latino-américaines, souvent économiquement défavorisées, se trouvaient généralement exclues du marché des crédits. Pour mettre fin à cette discrimination, ou à tout le moins pour la diminuer, fut adopté le Community Reinvestment Act (CRA), en 1977, sous la présidence de Carter. Ce premier dispositif allait se voir renforcé en 1994-1995 par l’administration Clinton.

Le CRA mentionne que ‘les institutions financières ont une obligation continue et non discriminatoire d’aider à répondre aux besoins de crédit des communautés, y compris dans les régions à revenu faible ou modéré, et ce, sans que cela soit incompatible avec des pratiques de prêt saines’.

Par conséquent, les banques et autres institutions financières de prêt doivent octroyer des crédits et services financiers aux individus à revenu faible ou modéré ainsi qu’aux organisations et associations s’occupant de ces personnes et ce, dans toutes les zones géographiques où les banques proposent des comptes bancaires. Par ailleurs, elles ont l’obligation de justifier les rejets de prêts, pour lesquels seuls les critères économiques peuvent entrer en ligne de compte.1

Le respect du Community Reinvestment Act par les banques est contrôlé par l’administration fédérale. En effet, en cas de non respect du CRA, les banques s’exposent à des sanctions telles qu’une amende, la perte de l’accès au refinancement à court terme de la FED2 ou à l’arrêt temporaire des opérations du fusion ou d’acquisition.

Un mécanisme de type ‘CRA’ est-il envisageable en Europe ?

A ce jour, l’Union européenne ne dispose pas encore de contrainte légale comparable à l’égard des banques.

Cela s’explique sans doute par des traditions différentes en Europe et aux Etats-Unis. D’abord, les « communautés » en tant que telles sont, la plupart du temps, davantage fondues dans la population. Ensuite, le vieux continent a développé une tradition de banques mutuelles et coopératives lesquelles, historiquement, s’adressent à une clientèle précarisée. Enfin, l’intervention réglementaire des pouvoirs publics sur le secteur financier est généralement plus importante en Europe qu’aux États-Unis. Sous quelles conditions un CRA pourrait-il, dès lors, se développer au sein de l’Union européenne ?

Engagement envers les « communautés » ou principe de solidarité

En visant à réduire les actions discriminatoires envers certains groupes de la population (noirs, latino-américains, …), le CRA américain renvoie à la notion de communautarisme. L’analyse en termes de « communautés » n’est sans doute pas aussi pertinente en Europe. Si ce n’est au Royaume-Uni, voire un peu au Danemark, la notion même de ‘développement communautaire’ est très peu répandue en Europe. Cela ne signifie pas pour autant, loin s’en faut, que l’Europe ne compte pas son lot de personnes marginalisées d’un point de vue socio-économique. Mais on y parlera de populations exclues des services bancaires et financiers.

Aux Etats-Unis, les banques sont contraintes de consacrer une partie de leurs engagements aux « communautés », correspondant à une part de l’épargne qu’elles ont collectée auprès de ces communautés. Les banques sont examinées sur la base des résultats, et non des déclarations d’intention, en matière de lutte contre la discrimination. Ainsi, « si dans des zones d’évaluation du CRA, l’analyse statistique du portefeuille de crédits identifie des exemples de discrimination, y compris par l’absence de prêts, les banques sont appelées à se justifier. Elles doivent fournir une justification économique à leur décision de ne pas prêter. Comme ceci peut s’avérer aussi onéreux que difficile, les banques préfèrent faire de sérieux efforts pour ne pas voir leurs politiques remises en question. »3

Toutefois, dans leur souci de maximisation de la rentabilité, elles créent des Fondations qui font du ‘social banking’, de sorte que le coût du ‘social banking’ est externalisé. Le CRA crée donc, de facto, une dualisation de la société. Or, l’objectif poursuivi consiste en une mutualisation et non en une dualisation de la société et des risques bancaires.

Le Community Reinvesment Act américain pourrait, dès lors, se voir adapté au modèle socio-économique européen par l’instauration d’un principe de solidarité dans les banques et entre les banques. En effet, les produits les plus rentables doivent permettre de couvrir les coûts des produits moins rentables afin de répondre aux besoins de l’ensemble de la population.

Un système d’évaluation pourrait être mis sur pied de sorte que les instances publiques accordent un niveau de rating aux institutions financières, sur la base d’indicateurs pertinents, relatifs principalement à l’accès au crédit mais aussi aux investissements et aux services bancaires (crédit à la consommation, crédit aux indépendants, artisans et PME, crédit à l’économie sociale et solidaire). L’évaluation se ferait tant au niveau de l’action du secteur dans sa globalité que de celle de chaque opérateur en particulier.

Par ailleurs, la création d’un « fonds de compensation des banques permettrait de répartir la charge économique excédentaire que représente l’offre de crédit approprié, sur l’ensemble des opérations de crédit. Ce mécanisme de compensation rendrait neutre, sur le plan économique, la prise en charge de ce service économique d’intérêt général par certains opérateurs et éviterait ainsi une distorsion de concurrence »4.

Obligation de transparence en matière de crédit 

Aux Etats-Unis, « l’intuition première du législateur était que la menace de publicité négative à laquelle serait exposée une banque mal notée par le CRA serait suffisante pour réduire les pratiques discriminatoires de crédit. Elle s’est avérée fondée dans la mesure où peu de banques américaines ont été soumises à une amende.»5

L’expérience américaine a ainsi démontré l’importance de la transparence : tant qu’un mauvais résultat en termes de CRA entraînait une sanction sans publicité, les banques ne s’en inquiétaient pas. Dès lors que les résultats sont devenus publics, c’est-à-dire qu’ils ont touché l’image de la banque, ils sont en même temps devenus dignes d’intérêt…

Par ailleurs, le succès du CRA est dû, en partie au moins, à l’obligation de transparence de la part des institutions financières. On ne peut pas s’attendre à des avancées spectaculaires en Europe si on travaille uniquement sur une base volontaire de la part des banques.

Or, en Belgique, il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’obligation de rendre publique l’information sur les clients. Il existe une centrale positive des crédits à laquelle les prêteurs ont accès mais qui n’est pas publique : tous les crédits y sont enregistrés ; le dispensateur de crédit doit la consulter avant d’accorder un crédit. Il engage ici sa responsabilité.

Il nous semble, dès lors, essentiel de promouvoir la transparence dans les institutions financières en les obligeant à fournir périodiquement les informations sur la manière dont elles ont répondu ou non aux besoins de crédit de la population. Ces informations seraient contrôlées par un organisme indépendant et selon des procédures bien établies.

’Social banking’, banking rentable ?

Il importe de prouver aux banques qu’elles peuvent faire de la ‘finance sociale’ sans enregistrer de perte.

Aux Etats-Unis, plusieurs études ont démontré que le risque de crédit supporté par les banques n’a pas augmenté du fait de l’instauration du Community Reinvestment Act. En effet, les institutions financières ont appris à connaître un marché somme toute nouveau pour elles et la concurrence a joué son rôle dans l’économie libérale de Etats-Unis. Par conséquent, l’évaluation des risques clients s’est affinée de telle façon que le taux de créances non remboursées n’est pas plus élevé auprès des clients CRA qu’auprès des autres clients. Et les prêts hypothécaires aux personnes à revenu faible ou modéré ont augmenté de 39 % entre 1993 et 1998, selon le département du Trésor américain.

Or, chez nous, les banques ont mis au point une méthode d’évaluation des consommateurs, sur la base de leurs dépenses. Ce scoring est de plus en plus précis. Les banques disposent donc déjà d’un premier outil important pour faire crédit aussi aux groupes défavorisés.

Par ailleurs, les banques coopératives s’avèrent aussi rentables que les banques traditionnelles. Pour preuve, quelques acquisitions retentissantes des secondes par les premières, en France et en Italie notamment.

Dans son rapport « Développer des outils communs aux pouvoirs publics et aux institutions financières en vue de favoriser les droits fondamentaux dans l’Union européenne », le Réseau Financement Alternatif insistait déjà, en décembre 2005, sur la nécessité de « favoriser l’implication des institutions financières dans la promotion des droits fondamentaux »6. Ainsi, nous notions alors qu’il importe de sensibiliser les institutions financières à un secteur et à un public qu’elles ne connaissent pas encore. Parallèlement, il convient de leur expliquer l’intérêt qu’elles ont à y prendre part : amélioration de leur image, valorisation du crédit en tant que facteur économique intéressant, nouveaux clients potentiels, etc.

Allier solidarité, lutte contre le surendettement et rentabilité

In fine, l’instauration d’une évaluation sur la base, notamment, de l’accès au crédit, l’obligation de transparence ainsi que la création d’un fonds de compensation pourraient insuffler un vent de solidarité, si léger soit-il, au sein du secteur bancaire sans pour autant en gêner la rentabilité.

Par ailleurs, le CRA européen pourrait devenir un outil puissant de lutte contre le surendettement en permettant aux personnes à revenu faible ou modéré d’emprunter auprès de banques et non plus auprès de financiers aux taux usuriers.

Car, le but ultime d’un Community Reinvestment Act à l’européenne est bien de sortir les personnes précarisées de leur situation d’exclusion pour les intégrer dans l’économie de marché. Lorsque cet objectif est atteint, toutes les parties prenantes en sortent gagnantes : en priorité les personnes anciennement précarisées; mais aussi le secteur bancaire qui ‘récupère’ de nouveaux clients et les pouvoirs publics, enfin, qui évitent d’engager des coûts sociaux.

Françoise Radermacher - Juin 2006

1 Pour davantage d’informations sur le sujet, le lecteur se référera à un article précédent ‘Pour lutter contre la discrimination économique des personnes à revenu faible, l’exemple viendrait-il des Etats-Unis ?, juin 2006, www.financite.be

2 Banque Fédérale américaine

3 Pour davantage d’informations sur le sujet, le lecteur se référera à un article précédent ‘Pour lutter contre la discrimination économique des personnes à revenu faible, l’exemple viendrait-il des Etats-Unis ?, juin 2006, www.financite.be

4 BAYOT Bernard, directeur du Réseau Financement Alternatif.

5 HUDSON Kent, Le Community Reinvestment Act (CRA), 2004, page 4

6 RADERMACHER Françoise,  Développer des outils communs aux pouvoirs publics et aux institutions financières en vue de favoriser les droits fondamentaux dans l’Union européenne , rapport final d’un projet européen, page 51, décembre 2005.

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A l'instar de ce qui ce fait outre-Atlantique, l'Europe doit-elle imposer une obligation de performance sociale au secteur bancaire ? Eléments de réponse.

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Bruxelles (s') investit dans le socialement responsable

Soumis par Anonyme le

Quel contenu pour l’ordonnance Gosuin ?

Ce vendredi 12 mai était votée, au Parlement de Bruxelles-Capitale, une ordonnance déposée par le député MR Didier Gosuin et co-signée par tous les partis bruxellois, représentés par madame Véronique Jamoulle (PS) et messieurs Yaron Pesztat (Ecolo), Hervé Doyen (cdH) et Fouad Ahidar (SPA-Spirit).

Cette nouvelle ordonnance contraint les pouvoirs publics régionaux et communaux à, d’une part, mener une politique financière socialement responsable et à, d’autre part, instaurer une transparence quant à leur politique financière.

Elle s’adresse donc à la Région de Bruxelles-Capitale, aux pouvoirs publics qui dépendent d’elles ou sont soumis à son contrôle de tutelle ainsi qu’aux communes bruxelloises. En d’autres termes, sont concernés : la Région, les communes, les CPAS, la SDRB, les organismes pararégionaux (IBGE, SLRB, STIB, Orbem, Bruxelles-Propreté, etc.) et les intercommunales.

Concrètement, 10 % au moins des sommes placées par les pouvoirs publics régionaux et communaux doivent l’être soit dans des fonds de placements, mandats de gestion ou produits financiers socialement responsables, soit dans des entreprises de l’économie sociale. Cette nouvelle règle s’applique donc, notamment, aux fonds de pension des institutions publiques bruxelloises.

En outre, l’ordonnance requiert des pouvoirs publics qu’ils exposent la manière dont ils appréhendent ou non l’investissement socialement responsable dans leur politique financière. Ainsi, l’ordonnance prévoit que les rapports financiers des institutions visées devront désormais contenir « des informations sur la mesure dans laquelle sont pris en compte les aspects sociaux, éthiques et environnementaux dans la politique financière (…). »1

Quelle éthique ?

Si l’ordonnance Gosuin prévoit que 10 % au moins des sommes placées par les pouvoirs publics régionaux et communaux le seront désormais dans des fonds de placements socialement responsables, encore faut-il savoir selon quel processus les critères sociaux, éthiques ou environnementaux seront pris en compte dans la gestion.

En effet, en l’absence de cadre juridique délimitant le concept d’investissement socialement responsable, chaque institution financière, association ou fédération est libre d’en établir une définition propre.

Les initiateurs de l’ordonnance ont donc décidé de faire confiance aux organismes bancaires et d’investir (je cite) dans les fonds déclarés éthiques ou socialement responsables par les banques (fin de citation). Toutefois, ils précisent qu’en dehors de critères précis, l’Ethibel Sustainability Index (ESI) du groupe Vigeo, leader européen en matière de notation éthique, servira de référence.  

Rappelons que le caractère éthique ou socialement responsable d’un placement se traduit par la sélection d’entreprises ou d’Etats sur la base de critères d’exclusion ou de critères positifs :

  • Critères d’exclusion : les gestionnaires de fonds excluent de leur univers d’investissement des entreprises impliquées dans certains secteurs d’activités ou produits et services, tels que le travail des enfants, la production de pesticides, la production et le commerce d’armes, l’expérimentation animale, le tabac, l’alcool, etc.
  • Critères positifs : les gestionnaires de fonds incluent dans leur univers d’investissement des entreprises et des Etats performants en matière de politique environnementale, sociale et de gouvernance.
    • la politique environnementale (par exemple : le respect des normes légales, la réduction de l’impact environnemental lors du processus de production, la certification environnementale, etc.);
    • la politique sociale interne (par exemple : la formation des salariés, la politique salariale, les conditions de travail, la concertation sociale, etc.) ;
    • la politique sociale externe (par exemple : le respect des conventions de base de l'OIT, le refus du travail forcé, la non-discrimination, la liberté d'association) ;
    • la gouvernance d’entreprise (par exemple : la mise en place de procédures de contrôle interne, le respect du cadre juridique en matière de concurrence ou de fraude, etc.).

En outre, les 10 % requis par l’ordonnance ne doivent pas nécessairement être placés dans des fonds ISR, donc dans des sociétés cotées en bourse. L’ordonnance prévoit, en effet, qu’ils puissent également être investis en économie sociale, c’est-à-dire dans des entreprises respectant les cinq principes suivants :

  • primauté du travail sur le capital ;
  • autonomie de gestion ;
  • finalité de service aux membres et à la collectivité ;
  • processus de décision démocratique ;
  • développement durable dans le respect de l’environnement.

Quelle portée pour l’ordonnance ?

A eux seuls, les fonds de pension des communes bruxelloises représentent environ 135 millions d’euros. Plus globalement, le montant des fonds concernés par la nouvelle ordonnance oscille, selon Jean-François Leconte, collaborateur de Didier Gosuin, autour de 250 millions d’euros. Ainsi, si 10 % (minimum) sont investis en ISR, cela représente plus de 25 millions d’euros.  

Confiants, les initiateurs de l’ordonnance espèrent que le seuil minimum de 10 % actuellement imposé aux pouvoirs publics augmentera rapidement pour, à terme, prévoir des fonds intégralement investis en ISR.

Par ailleurs, «les critères qui entrent en ligne de compte pour donner le statut d’investissement socialement responsable à un placement relèvent de l’intérêt général au sens large mais aussi des compétences attribuées aux Régions. »2  

On conçoit, dès lors, la portée de l’ordonnance. Car, en remplissant sa fonction de représentant et de protecteur de l’intérêt général au travers de ses investissements en produits socialement responsables, la Région de Bruxelles-Capitale stimule doublement l’ISR : d’une part en en augmentant l’encours et, d’autre part, en représentant un exemple à suivre pour les autres investisseurs privés et publics.

Les instances publiques montrent, d’ailleurs, depuis quelques années, une volonté croissante de s’inscrire dans une démarche socialement responsable et jouent, ce faisant, un rôle de moteur pour l’ISR.

Pour preuve, mentionnons d’abord le Fonds flamand d’Assurance Soins (Vlaams Zorgfonds), créé en 1999 en vue de faire face à la croissance des dépenses non médicales suite au vieillissement de la population. Ce fonds place ses capitaux suivant des critères de développement durable, en respectant exclusivement le registre d’investissement d’Ethibel.

Par ailleurs, le fonds de pension du Sénat souscrit 30 % de son capital dans des OPC éthiques, selon des critères de filtrage positif et 35 % en actions d’entreprises portant le label Ethibel, au travers de lignes individuelles.

Ensuite, soulignons l’existence du Fonds de l'Economie sociale et durable. Ce Fonds a pour objet toute forme d’interventions, notamment prises de participation ou prêts, au bénéfice d’activités relevant de l’économie sociale et durable. Au moins 70 % de ses moyens doivent être investis dans celle-ci. La part de 30 % non investie dans l’économie sociale et durable est investie dans des obligations conformes au label Ethibel.

Au niveau communal, notons que quelques villes et communes belges investissent une partie de leurs surplus de trésorerie en comptes d’épargne éthiques.

Cependant, si ces initiatives sont bienvenues, elles demeurent isolées, faute d’une politique générale d’investissements éthiques. Or, l’ordonnance Gosuin jette les bases d’une telle politique. C’est donc aussi à ce titre qu’elle doit être saluée.

Les députés de la Région de Bruxelles-Capitale seront-ils bientôt suivis par leurs confrères wallon et flamands ? Rien n’est moins sûr.

Car, pour faire écho à l’ordonnance bruxelloise, les députés MR Richard Miller, Pierre-Yves Jeholet et Willy Borsus, ont déposé, fin janvier, au Parlement wallon une proposition de décret similaire. Celle-ci y a fait l’objet de discussions, le 8 février et le 23 mai dernier. Mais depuis, plus rien : au moment où nous rédigeons ces lignes, le vote n’a toujours pas eu lieu.

Quant à la Communauté Flamande et au niveau fédéral, rien n’indique, à ce jour, qu’un texte similaire fasse l’objet de la moindre discussion.

Qu’il est long le chemin de l’investissement socialement responsable…

Françoise Radermacher - Mai 2006

(1) Articles 4 et 5 - Proposition d’ordonnance visant à imposer des critères d’investissements socialement responsables aux marchés financiers de pouvoirs publics, Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, session ordinaire du 19 janvier 2006.
(2) Exposé des motifs - Proposition d’ordonnance visant à imposer des critères d’investissements socialement responsables aux marchés financiers de pouvoirs publics, Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, session ordinaire du 19 janvier 2006.

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Le Parlement bruxellois vient de voter une ordonnance visant à obliger les pouvoirs publics de la capitale à investir 10 % minimum de leurs fonds dans des produits éthiques ou dans l'économie sociale.

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2006
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05/2006
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Mai

La finance solidaire, un modèle anti-crise

Soumis par Anonyme le

Exiger des retours sur investissement de 15, 20 voire 30 % par an est incompatible avec l’économie réelle, qui n’offre pas une croissance aussi forte.

De tels rendements ne peuvent par conséquent être obtenus qu’au détriment de la rémunération des autres facteurs de production, du travail en particulier – ainsi, la part de la rémunération des salariés dans le PIB
belge a fortement chuté depuis 1981, passant de 57 % à 51 % (1) – mais aussi, par exemple, des réserves que l’entreprise ne peut plus investir en recherche et développement. Exiger que ces rendements soient obtenus à court terme est par ailleurs en contradiction avec la logique d’entreprise la plus élémentaire qui demande du temps pour que les investissements puissent sortir leurs effets. Enfin, fermer les yeux sur l’impact social et environnemental des activités financées ne fait qu’accentuer ce phénomène de rupture entre finance et réalité.

Une rupture qui a emporté le vieux modèle de la finance, mais qui est aussi porteur de graves conséquences sur le plan économique et social.

Patience et modération

La finance solidaire, fondée sur la responsabilité, la patience et la modération, a toujours pris le contre-pied de cette logique mortifère. Elle consiste à placer le souci de cohésion sociale avant celui du rendement financier immédiat. Ce faisant, elle permet de répondre à des besoins réels de financement de personnes ou de groupes pour sortir de la précarité, de favoriser l’émergence d’activités nouvelles rencontrant des difficultés de financement auprès des banques classiques (environnement, éducation, action sociale, particulièrement sur le plan local) ou encore de faire la preuve que l’économie peut être utilisée de façon plus humaine au service des hommes.

C’est une finance responsable car elle s’inquiète des impacts sociaux et environnementaux de l’activité économique. Elle intègre dès lors, aux côtés de l’analyse financière, l’évaluation que l’on peut porter sur ces impacts dans ses choix d’épargne ou d’investissement, d’une part, de financement, d’autre part. Cette approche, qui favorise une économie bénéfique pour l’homme et l’environnement, permet, mieux que d’autres, de construire des portefeuilles solides, sur des thématiques d’avenir qui conservent leur validité à long terme.

La patience est d’ailleurs la deuxième vertu de la finance solidaire, qui ne se comprend que comme un outil au service de l’économie. S’il est évident que des mouvements financiers à court terme sont nécessaires pour répondre notamment aux nécessités de trésorerie, ils ne peuvent se justifier pour des investissements qui demandent du temps pour sortir leurs effets. Il faut donc remettre à l’honneur ce que les Anglo-saxons appellent le capital patient, c’est-à-dire un capital qui reste dans l’entreprise pour soutenir ses opérations et appuyer ses investissements pour le développement de nouvelles activités.

Enfin, la finance solidaire inverse la logique de la ponction démesurée du profit par l’actionnaire au détriment de l’activité économique et privilégie des modèles économiques qui imposent des limites à la course au profit. Il faut que la plus-value réalisée grâce à l’activité économique d’une entreprise soit modérément distribuée pour rémunérer le capital, et davantage réinvestie dans l’entreprise elle-même. C’est ce que nous pourrions appeler la modération actionnariale qui est d’application dans les sociétés à finalité sociale et les coopératives agréées par le Conseil national de la coopération (CNC). Les conditions de cet agrément reprennent en effet les cinq grands principes de la coopération que sont l’adhésion volontaire, le principe d’égalité ou la limitation du droit de vote aux assemblées générales, la désignation des administrateurs par l’assemblée générale, un dividende modéré servi aux parts sociales (actuellement 6 % net) et une ristourne aux associés.

On le voit, des modèles financiers responsables et solidaires existent, qui soutiennent l’économie réelle et l’intérêt général, au lieu de les détruire. Les favoriser passe par une action publique déterminée qui incite les détenteurs de capitaux à les utiliser davantage qu’ils ne le font aujourd’hui.

Bernard Bayot

(1) Robert Plasman, Michael Rusinek, François Rycx et, Ilan Tojerow, La structure des salaires en Belgique, document de travail, N°08-01.RR , Dulbea, février 2008.

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La finance doit changer ! L'ancienne, nourrie de la seule logique du profit le plus élevé, souvent à (très) court terme et sans égard aux conséquences sociales et environnementales de l'investissement, est allée droit dans le mur.

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12/2008
Mois d'édition
Décembre

Proposition de loi-cadre relative à la création de l'Agence de protection des consommateurs de produits financiers communs

Soumis par Anonyme le
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